Géographie de l'Afrique du nord
Le Titteri des Français
1830-1962
DEUXIEME PARTIE : LES LOCALITES
C / LES VILLAGES DE COLONISATION
3 / Sous la troisième république avant 1914
Les quatre villages de colonisation de la commune mixte de Berrouaghia ( Ben Chicao, Loverdo, Nelsonbourg, Champlain)
Documents et textes : Georges Bouchet

mise sur site le 11-4-2009

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C / LES VILLAGES DE COLONISATION

On sait que parmi les 7 sous-préfectures de 1959, Djelfa et Tablat avaient été d'abord de simples villages de colonisation. Sans compter ces deux cas particuliers sur lesquels je ne reviendrai pas, et sans compter non plus les hameaux jamais promus communes, il a été créé dans tout le Titteri, sauf erreur de ma part, 24 villages européens entre 1848 et 1924.

Leur répartition régionale est éloquente : aucun dans l'Atlas saharien des monts Ouled-Naïl
                                                            3 sur les hautes plaines
                                                            21 dans l'Atlas tellien, plutôt au nord qu'au sud

Sur ces 21 villages telliens, 7 sont proches de Médéa
                                         5 sont dans la plaine des Aribs
                                         3 sont alignés sur la RN 1 dans la vallée de l'oued Akoum
                                         6 sont plus isolés, à l'écart des axes majeurs des RN 1 et RN 8

 Ces localisations seront rappelées aussi souvent que nécessaire mais ne seront pas utilisées pour structurer mon étude. Pour mon exposé je préfère choisir un plan chronologique appuyé sur les 4 périodes que voici :
       IIè République Lodi (ou Draa Esmar) et  Damiette (ou Aïn Dhab)
        Second Empire
Bir-Rabalou (ou Bir-Ghabalou) et Sidi-Aïssa
  Berrouaghia
        IIIè République avant 1914 Les quatre villages de colonisation de la commune mixte de Berrouaghia ( Ben Chicao, Loverdo,  Nelsonbourg, Champlain)
  La commune mixte d'Aïn-Bessem et ses trois villages annexes.
  villages dispersés
       IIIè République après 1918 Maginot, De Foucauld, Aïn-Boucif,
       Trois cas particuliers Taguine, El-Hamel, Tadmit


3 / Sous la troisième république avant 1914

Ce fut la période la plus favorable à la création de villages de colonisation : une quinzaine pour le seul Titteri et plus de 300 pour toute l'Algérie. Cette brutale accélération succéda au net ralentissement impérial de 1851 à 1864 ; puis à un arrêt volontaire à partir de 1864.

Qu'est-ce qui a donc changé, de ce point de vue, avec l'installation de la République ?
D'abord la mise à l'écart progressive des officiers des bureaux arabes qui avaient eu le souci de protéger les indigènes contre d'éventuels abus et spoliations. Ils sont vite remplacés par des administrateurs civils de commune mixte dans toutes les régions telliennes, les seules vraiment propices à l'installation d'agriculteurs européens. La formule des communes mixtes avait été imaginée en 1868, mais réservée aux territoires sous administration militaire. C'est l'arrêté du 24 novembre 1871 qui rendit son extension possible aux territoires civils, avec pour chef-lieu, toujours, un village européen : Berrouaghia, Aumale, Aïn-Bessem ou Reibell par exemple dans le Titteri.

Ensuite la nomination de gouverneurs généraux désireux d'implanter des colons français sur l'ensemble du territoire. Trois gouverneurs généraux ont mis la colonisation rurale au premier rang de leurs préoccupations :
               le vice-amiral comte Louis de Gueydon 1871-1873
               le général de division Antoine Chanzy 1873-1879
               le conseiller d'Etat Louis Tirman 1881-1891

Pour trouver les terres indispensables à la création de villages trois méthodes furent utilisées, le séquestre de terres prises aux tribus insurgées en 1871 (le Titteri fut très peu ou pas du tout concerné par ces séquestres), l'achat de gré à gré (la meilleure ; mais pas facile de trouver des vendeurs) et l'expropriation pour cause d'utilité publique.

Et enfin pour la colonisation privée, c'est-à-dire pour les achats de terre par des particuliers, la nouvelle loi Warnier du 26 mars 1873 institua une nouvelle législation sur les licitations (ventes aux enchères d'un bien indivis comme celui de la plupart des tribus) très favorable aux acheteurs et aux spéculateurs, européens ou pas, cultivateurs ou pas. Cette loi entraîna de tels abus que son emploi fut freiné dès 1887 et qu'elle fut volontairement oubliée en 1891. Et en février 1897 une nouvelle loi empêcha qu'un seul copropriétaire puisse obtenir une licitation.

     NB

Le lecteur désireux d'en savoir plus doit s'intéresser à la loi Warnier, au droit de chefâa et à sa réforme par la loi du 16 février 1897, ainsi qu'aux articles 815 et 827 du code civil français. Entre 1873 et 1897 il suffisait de soudoyer un fellah copropriétaire pour qu'il demande à un juge complaisant d'autoriser ou d'ordonner une vente par licitation. Ces ventes par licitation se firent au profit d'acheteurs européens et musulmans. Un site Internet algérien précisait en 2006 : 55% aux colons et 45% à de riches familles musulmanes.

Les conditions d'attribution des concessions ont fait l'objet de trois décrets entre 1871 et 1904 ; les modifications allant dans le sens du durcissement.

   ·      

Décret du 10 octobre sous le G.G. Gueydon
- Il faut être français, mais pas forcément " immigrant ", c'est-à-dire métropolitain. Les colons et les fils de colons peuvent solliciter une concession. Gueydon pensait que la présence de colons ou de fils de colon était souhaitable car " cultivateurs laborieux et entendus, ils sont un excellent exemple pour les nouveaux venus ".
- la concession est gratuite comme avant 1864
- l'obligation de résidence est de 5 ans pour recevoir le titre de propriété

   ·     Décret du 30 septembre 1878 sous le G.G Chanzy.
C'est le principal car il fut appliqué durant 25 ans. La concession reste gratuite , mais l'obligation de résidence est ramenée à 3 ans sous condition d'avoir investi au moins 100 francs par hectare. Les concessions seront agrandies : 40 ha au maximum. En 1892, le G.G Cambon garda la gratuité de la concession, mais exigea que le demandeur possède un capital de 5 000 Francs. On ne voulait pas attirer de pauvres gens, mais des cultivateurs capables d'investir.
   ·       
Décret du 13 septembre 1904 sous le G.G Célestin Jonnart.
Il prévoit quatre modes d'attribution.
Un " normal " : vente à prix fixe à bureau ouvert (à Alger pour le Titteri).
Un " secondaire " pour les fermes isolées : vente aux enchères par adjudication publique.
Et deux exceptionnels : vente de gré à gré ou concession gratuite. La gratuité n'est donc pas abandonnée, mais elle coûte trop cher et on souhaite s'en passer. Par ailleurs l'obligation de résidence est allongée à 10 ans et il est interdit de vendre, avant 20 ans, à un indigène ou à un non-cultivateur. Il y avait eu trop d'exemples de colons qui revendaient leurs terres et quittaient le village aussitôt que possible.

Comme on commence à aborder les hautes plaines steppiques la concession peut atteindre 200 ha. Les 2/3 des lots sont réservés à des immigrants, car le but n'est pas de déplacer des colons, mais d'en attirer de nouveaux.

Le problème du coût avait d'ailleurs fait échouer en 1882 le projet du G.G. Tirman dit des 50 millions. Ce projet prévoyait de créer avec ces 50 millions, 300 villages de 50 feux sur 600 000 ha. Mais à Paris les députés l'ont rejeté par 249 voix contre 211 au motif qu'il coûtait trop cher et qu'il entraînerait trop d'expropriations et de mécontentements dans les tribus concernées.

Les quatre villages de colonisation de la commune mixte de Berrouaghia

Ce sont à 13 km Ben Chicao ; à 15 km Loverdo ; à 18 km Nelsonbourg ; à 29 km Champlain.

Ces 4 villages ont quelques points communs. Ce sont des villages de moyenne montagne bénéficiant d'un climat à hivers froids et de terroirs propices à une viticulture de qualité. Malgré leur taille modeste ces villages ont connu une prospérité relative grâce à leurs vins VDQS qui préservaient leurs colons des crises récurrentes de surproduction et de mévente des vins de table. Je dis relative car tous les colons n'ont pas réussi pareillement et en 1954 il y vivait moins d'européens qu'au début. Mais il en restait tout de même pas mal :
                                             77 à Nelsonbourg sur 3125 hab
                                             101 à Champlain sur 2570 hab
                                             136 à Ben-Chicao sur 2057 hab
                                             170 à Loverdo sur 7126 hab
Ii y avait une cave coopérative dans chacun de ces quatre villages.

Leur terroir a été presque entièrement défriché. Des forêts ou des broussailles originelles il n'existait plus après 1945 que des lambeaux sur des sommets ; et encore pas sur tous.

Ils ont aussi en commun un village centre pas vraiment conforme au plan en damier carré habituel avec place centrale. Ce sont quasiment des villages rues allongés le long ou en bordure de la route départementale ou nationale qui les traverse.

Ces villages sont devenus chefs-lieux de CPE en 1947 et de SAS en 1956.

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les quatre villages

Particularités de la commune de Ben-Chicao

L'origine du toponyme est le nom d'un minuscule oued qui prend naissance près du village actuel. Ce nom a fini par désigner beaucoup de choses, outre l'oued :
                                                     le col le plus haut de la RN 1 à 1230 m
                                                     un caravansérail près du col
                                                     une ferme école
                                                     une gare
                                                     et le village de colonisation
Sur le col il n'y a rien de neuf à signaler ; seulement à rappeler qu'il peut être obstrué par la neige en hiver et que la descente sur Berrouaghia est plus rapide que la montée depuis Médéa. Il y a en effet un escarpement (de faille ?) qui traverse la région du sud-ouest au nord-est et qui crée un forte dissymétrie des versants qui se voit bien sur la carte au 1/50 000.

Sur le caravansérail il est permis d'imaginer qu'il a été établi assez tôt et qu'il a été utilisé jusqu'à l'apparition de l'automobile. En 1858 son emprise couvrait 5 000 m² avec une grande cour et de nombreux bâtiments pour les gens et les attelages. Sur les cartes des années 1930 il est mentionné ancien caravansérail. Il était très près du col

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ben chicao

Sur la ferme école Roudil il y a quelques passages obscurs, mais l'essentiel est disponible.

  1887

Ouverture, pour 6 élèves, de cette école située en bordure de la RN 1 au carrefour du premier chemin conduisant au village de Ben-Chicao. Cette inauguration est l'aboutissement d'un étrange projet initié en 1882 par le Conseil Général du département de la Seine qui désire ouvrir en Algérie " une école professionnelle d'agriculture réservée aux garçons assistés et moralement abandonnés du département de la Seine ". Le but avoué était de fournir des colons à la mise en valeur de l'Algérie. Un but inavoué pourrait avoir été d'éloigner de l'Ile de France de grands adolescents à problèmes.

Encore fallait-il trouver un terrain assez vaste pour une exploitation agricole. Dieu le trouva en soufflant à l'abbé Roudil l'idée de léguer au département de la Seine une ferme assez grande (160ha peut-être) située près de Ben-Chicao. D'où l'abbé tenait-il ces terres ? Mystère. L'école accueillit donc ses 6 premiers pupilles fin décembre 1887 et les 12 suivants un an plus tard. Le démarrage fut lent car il fallut 6 ans pour que tous les bâtiments soient construits ou aménagés et que les vignes soient plantées ou replantées.

  1893
L'école accueille des élèves ayant 18 ans, les garde trois ans et s'en sépare quand ils partent faire leur service militaire. Durant ces trois années ils suivent des cours théoriques, des cours de viticulture et une formation en menuiserie, maréchalerie et vannerie. Les travaux pratiques sont faits sur l'exploitation agricole annexée. Les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances des fondateurs car il y eut jusqu'à 25% de fugueurs parmi les élèves peu motivés et qui devaient s'ennuyer si loin de Paris.
  1900       Fermeture de l'école pour 10 ans. J'ignore à quoi ont bien pu servir ces bâtiments entre 1900 et 1910, si toutefois ils ont servi à quelque chose.
  1910 Elle est rouverte, mais pour un tout autre public, encore parisien, mais beaucoup plus jeune. Les pupilles qui sont accueillis à la ferme ont 12 ans. De 12 à 15 ans ils suivent une scolarité normale jusqu'au certificat d'études si possible, puis bénéficient d'un enseignement professionnel théorique et pratique destiné à fournir des colons, des chefs de culture et des chefs de chantier. Je ne sais pas jusqu'à quelle date elle a ainsi fonctionné car plus tard elle semble avoir aussi recueilli des orphelins nés en Algérie.

Notule sur l'abbé Roudil

Cet ecclésiastique parisien tenait beaucoup à exercer son ministère en Algérie. Il finit par obtenir l'autorisation d'accompagner Monseigneur Dupuch, premier évêque, d'Alger, lorsque celui-ci regagna Alger en 1838 après un séjour en France. Le voyage de retour parti de Toulon, fit un détour par Rome où Monseigneur avait été mandé.
En 1839 l'abbé est à Boufarik en pleine période d'insécurité due aux Hadjoutes.
En 1841 il devient aumônier et suit pendant plusieurs mois les troupes en campagne en Oranie, autour d'Oran, Mascara et Tlemcen. Il confesse les mourants et ensevelit les morts.
En 1842 il est le curé de Médéah avec mission d'y installer l'église et le presbytère. C'est lui qui obtient les moyens qui permirent de transformer en église Saint Henri (prénom du prince duc d'Aumale commandant en chef du Titteri) la mosquée Ahmar. Il accompagne le duc en campagne et est présent à Taguine le jour de la prise de la smala. Il reste en poste à Médéa avec Marey-Monge successeur du duc d'Aumale. Puis il exerce de plus hautes fonctions à Alger. Sans doute avait-il gardé de son séjour à Médéa de l'intérêt et des amitiés dans le Titteri ; mais cela ne nous dit pas comment il a pu disposer des terres de l'école qui porte son nom.


l'école Roudil vue de l'ouest
l'école Roudil vue de l'est avec, à l'arrière, un sommet à 1121m.
Deux photos de l'école Roudil vue de l'ouest et de l'est avec, à l'arrière, un sommet à 1121m.

Sur les moines cisterciens de la stricte observance qui arrivent à Ben-Chicao en 1934 il est difficile de faire le point sans remonter jusqu'à 1904. Leur présence dans la commune est un contre coup de la vente par les trappistes de Staouëli de leur domaine aux frères Borgeaud, précisément en 1904. Ces moines dépendaient de l'abbaye d'Aiguebelle, mais c'est en Italie, sur le lac de Garde, qu'ils s'étaient réfugiés, par crainte d'être spoliés par la législation anticléricale de l'époque. Il se trouve que d'autres moines cisterciens établis en Slovénie s'inquiètent de la même façon de l'attitude du gouvernement yougoslave orthodoxe de Belgrade qu'ils jugent hostile au catholicisme au début des années 1930. Ils décident de quitter la Yougoslavie et de tenter de recréer en Algérie un monastère qui reprendrait le flambeau abandonné en 1904. Mais le retour à Staouëli est impossible. Avec le soutien d'Aiguebelle ils trouvent un havre à Ben-Chicao.

En 1934 ils quittent leur monastère slovène dit de " Notre-Dame de la délivrance ", passent saluer leurs collègues du lac de Garde, puis ceux d'Aiguebelle. Ils débarquent à Alger le 20 mars et montent aussitôt à Ben-Chicao. On les installe très provisoirement dans une maison située à 8km du village sur la route d'Ouled-Brahim un peu au nord du djebel Djemaa Ressoul en un lieu appelé Ouled Triff. La maison, une ferme de la Société d'Arboriculture du Titteri est isolée (c'est excellent) mais fut jugée trop petite. Ils n'étaient pourtant pas nombreux : deux moines et trois frères convers, pour procéder à cette sorte de résurrection, au changement de nom près, car le nouveau monastère s'appellera Notre-Dame de l'Atlas.

En 1935 l'Assistance publique trouve pour Notre-Dame de l'Atlas un bâtiment en plein village. Comme ce bâtiment est inaliénable, la solution est provisoire. Elle dura 3 ans.

En 1938 enfin les moines, avec l'aide d'Aiguebelle, acquièrent la grande ferme de Tibharine dont il a été déjà question dans le paragraphe consacré au village de Lodi près de Médéa.

Sur l'aérium il faut signaler sa naissance tardive car, si l'on en croit le supplément du dictionnaire Robert, le mot n'est apparu qu'en 1948. Avant on disait préventorium ou centre aéré. C'est un " établissement de repos, de vie au bon air, pour les convalescents et les enfants menacés de tuberculose ". Ce centre placé sur les hauteurs de Ben-Chicao constitue un bel hommage rendu à la salubrité du climat de montagne de l'Atlas tellien.

Sur le village il n'y a rien de nouveau à dire, sinon que la gare dite de Ben-Chicao ouverte en 1892 est la plus haute de la ligne de Blida à Djelfa et qu'elle est un peu loin, à deux kilomètres au moins.

Vue prise en 1953. Le village est tout en longueur. La vigne est sur les pentes les mieux exposées
Vue prise en 1953. Le village est tout en longueur. La vigne est sur les pentes les mieux exposées

Particularités de la commune de Loverdo (ou Hassen ben-Ali) ou (Ouzera)

Ce village a trois noms

En 1874 lorsqu'il fut créé on l'appela Hassen ben-Ali, nom de la tribu locale à laquelle on avait acheté les terrains nécessaires à l'implantation des colons ; pour 42 000 francs et quelques compensations. Il se serait agi d'une transaction de gré à gré passée avec deux des douars de la tribu ; ceux situés près de la route de Médéa à Djelfa. C'est tout à fait possible, même s'il est difficile de se persuader qu'aucune pression des autorités n'ait facilité la vente. Il peut se faire aussi que le prix ait été supérieur à celui du marché, et donc bien tentant.

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dzamiette, loverdo

En 1877 le village est rebaptisé Loverdo pour rendre hommage à un général de division. Comme il y eut dans l'armée française en Algérie deux officiers supérieurs portant ce nom, Nicolas et son fils Alexandre, il faut préciser que c'est Nicolas qui est concerné car c'est lui qui a participé au débarquement de Sidi-Ferruch le 14 juin 1830 et à la conquête d'Alger à la tête de la 2è des 3 divisions de l'expédition. La 1ère était commandée par Berthezène et la 3è par le duc d'Escars plus tard appelé duc des Cars (mais pas des autobus).

Nicolas est né en 1773 à Kephattinia (Céphalonie) la plus grande des îles Ioniennes qui est alors vénitienne. Il porte un nom et des prénoms grecs francisés en Nicolas Michel. Mais en 1797 l'archipel est conquis par les armées du Directoire et devient français pour peu de temps. Nicolas qui a 24 ans peut s'engager dans l'armée française. Il devint l'un des innombrables soldats d'origine étrangère de la Grande Armée de Napoléon. Comme durant les Cent-Jours il eut le bon réflexe de rester fidèle à Louis XVIII, sa carrière se poursuivit jusqu'au grade de général de division. C'est avec ce grade qu'il fut responsable de la protection du camp de Sidi-Ferruch du 14 au 28 juin 1830 ; et qu'il participa à la marche sur Alger à partir du 29 juin. Avec deux de ses trois brigades il constitua l'aile droite de l'armée de de Bourmont qui s'en allait assiéger Alger.

Loverdo est donc l'un des généraux de la conquête. Je ne sais pas s'il a eu des liens particuliers avec le Titteri. A priori non puisqu'il est mort avant la prise de Médéa.

En 1962 Loverdo devient Ouzera toponyme dont j'ignore l'origine.

Le terroir de Loverdo touchant celui de Damiette (1848) qui touche celui de Médéa qui touche celui de Lodi (1848), c'est une zone de terres colonisées et viticoles continue qui s'étend sur plus de 12km, de Lodi à Loverdo. Loverdo n'est pas un village isolé comme souvent dans le bled.
D'abord rattaché à la commune de Médéa, il est en 1877 intégré à la commune mixte de Berrouaghia.
Comme leurs voisins, les colons de Loverdo sont devenus des viticulteurs dans les années 1880, produisant, dit le guide bleu, d'excellents vins rouges.

L'aspect du village n'est pas du tout conforme au schéma classique du plan carré en damier. C'est un village rue traversé par la RN 1 et longée par la voie ferrée. Il est bâti à flanc de coteau.
Il était, depuis 1892 desservi par la voie ferrée de Blida à Djelfa. Et il fut toujours desservi par des transports routiers, diligences, puis autobus. Tous les autocars blidéens allant vers le sud y faisaient un arrêt au passage.

loverdo, la grande rue

Particularités de la commune de Champlain (ou El Omaria)

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champlain

L'origine du nom de ce village est des plus claires : il célèbre un colonisateur d'un autre temps et sur un autre continent. Ce fut sans doute l'argument décisif bien que Samuel Champlain, mort en 1635 à Québec, n'ait jamais posé ses pieds sur le sol du Titteri.

  1567    

Naissance à Brouage. Il aurait reçu une formation de cartographe qui a dû lui être bien utile dans ses nombreux voyages d'exploration du Canada entre le Saint-Laurent et les grands lacs.

1603 Il entre dans l'histoire le 15 mars lorsqu'il quitte Honfleur pour le Saint-Laurent avec mission donnée par Henri IV de remonter jusqu'aux lacs.
1608 Il fonde un modeste établissement, fortin et magasin, sur un plateau rocheux dominant le fleuve là où il se rétrécit sur la rive nord. C'était à l'endroit où Jacques Cartier avait, en 1535, fondé un poste qui fut abandonné dès 1544.
1619 Il est nommé lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-France avec résidence à Québec, nom donné à son établissement de 1608.

Quel rapport Champlain eut-il avec l'Algérie en général et avec le Titteri en particulier ? Aucun bien sûr. Ceux qui ont choisi ce nom pour un nouveau village ont pensé au fondateur de la " Nouvelle-France " (pour l'Algérie on disait plutôt " l'Autre France "). Ils ont oublié le triste destin des 15 000 Acadiens (Français de l'est du Canada) déportés par le " Grand dérangement " de 1755-1760 au cours des guerres franco-anglaises, et l'abandon définitif de tout le Canada français le 10 février 1763 au premier traité de Paris. Fâcheux précédent quand on connaît l'issue.

La date de sa création, par contre, n'est pas claire du tout. La date de 1921 parfois avancée avec force détails est une erreur manifeste. Le village apparaît dans le dictionnaire Joanne de 1908 avec la mention " village de la commune mixte de Berrouaghia ". Il apparaît aussi dans une liste de quatre villages publiée en 1904 et consultable sur le site des archives de Rennes ; il s'y trouve non seulement le nom, mais aussi la distance à Médéa, l'altitude, le nombre (30) et la taille des concessions (35ha)ainsi que les cultures et les élevages pratiqués.
Créé avant 1904 il a bénéficié du décret de 1878 qui avait maintenu le système des concessions gratuites (mais sous condition d'un apport en capital après 1892) avec un maximum de 40ha : avec 35ha, on n'en était pas loin. Ce village a donc été créé entre 1878 et 1904 : je ne puis préciser davantage ; mais j'imagine plus près de 1904 que de 1878. Alors 1921 ? Peut-être la date d'un agrandissement comme il est arrivé assez souvent.

Le cadre naturel est un peu différent de celui des trois autres villages de la commune mixte. Le terroir se trouve, pour l'essentiel, ainsi que le village, dans une petite plaine de montagne, et non sur une crête. Cette cuvette est à 800 m d'altitude à peine, et est dominée au nord, par des massifs de l'Atlas tellien où la France n'a installé ni villages, ni routes, ni pistes carrossables. Il n'y avait en 1935, vers le nord, que l'amorce de la piste tracée, après l'indépendance, jusqu'au col des deux-bassins au-dessus de Tablat. Cette cuvette à fond plat appartient au bassin de l'oued Isser.

Les cultures principales étaient céréalières, mais avec un vignoble d'appoint pour des vins de qualité VDQS, même si le nom de Champlain évoque spontanément les arpents de neige du Canada plutôt qu'un cru de Médéa. L'élevage bovin était possible.

Champlain se trouve sur une route secondaire qui double la RN 18. Pour y aller, il fallait le faire exprès. C'est peut-être pour cette raison que je n'ai trouvé aucune photo, ni dans les livres d'images, ni sur Internet, ni dans mes albums de famille. Je n'y suis jamais allé. Dommage.

Le village n'est pas traversé par la départementale 23, il est longé par elle. Le rectangle allongé des lots à bâtir est au sud. Les autobus ne traversaient pas davantage le village : ils y avaient leur terminus. Ils venaient de Berrouaghia : en 1948 il y avait un aller-retour quotidien. La route de Berrouaghia passait tout près du camp militaire Paulinier, antérieur à la fondation du village et au sud duquel fut trouvé en 1906 un gisement préhistorique mésolithique tardenoisien. Elle passait ensuite à Ouled-Brahim. Berrouaghia est à 29km de Champlain.

Le 4 avril 1948 il se produisit à Champlain un événement plus que fâcheux, mais qui ne prit toute sa signification qu'avec le recul du temps. C'était jour d'élections : celle du premier tour pour la désignation des députés à l'assemblée algérienne. Il y eut une émeute avec attaque d'un poste de contrôle qui fit trois morts.

Particularités du village de Nelsonbourg (ou Aïn-Tsarès) (ou Si-Mahdjoub)

C'est le dernier village de la bande des quatre de la commune mixte de Berrouaghia.
Aïn-Tsarès est le nom du lieu-dit où Nelsonbourg fut implanté.

Nelsonbourg est le nom donné par la France au bout de deux ou trois ans.

Si-Mahdjoub est son nom actuel.

Je ne puis commenter que le toponyme Nelsonbourg dont la terminaison en bourg est inhabituelle pour un village d'agriculteurs. Evidemment Nelsonbourg ne doit pas son nom à un amiral anglais. C'est la première partie du nom d'un algérois, né en 1847 et qui fit une belle carrière dans l'administration et dans la banque. En 1907 il avait 60 ans : il était préfet honoraire (il avait été préfet du département d'Alger) et ancien directeur général de la banque d'Algérie. Il était à la retraite, mais avait conservé le goût d'entreprendre.

Son nom complet est Félix Nelson-Chierico (voir square Nelson à Alger). Il n'est pas impossible qu'il ait participé au projet de création du village, ne serait-ce qu'en y achetant une concession. Auquel cas il ne s'y serait pas intéressé longtemps car en 1915 (on l'a déjà vu avec Sidi-Aïssa) il entreprend la mise en exploitation du gisement de pétrole de l'oued Guétérini.

Toujours est-il, que pour nommer le nouveau village, Nelsonbourg sonnait mieux aux oreilles française de l'époque que Nelson-Chierico. Mais pourquoi tenait-on tant à associer ce nom au village ? Je l'ignore.

En 1907 commencent des travaux de voirie vers la colline d'Aïn-Tsarès.

En 1910 est signé le décret de création du nouveau centre de colonisation.

En 1911 arrivent les colons :15 familles dont 13 d' " immigrants ". Ce village étant apparu postérieurement au décret 13 septembre 1904, ces colons ont dû acheter leur concession. Les lots étaient vastes : 70 ha. Ils avaient donc les moyens de mettre en valeur leurs terres, c'est-à-dire à cette date de planter des vignes.

En 1922 le village, qui dépendait de Médéa, est rattaché à la commune mixte de Berrouaghia.

En 1947 il est promu chef-lieu de CPE

En 1952 une nouvelle mairie est inaugurée le même jour que celle de Loverdo, le 4 novembre, par une pléiade de personnalités politiques et religieuses. Les politiques sont notamment le Président de l'Assemblée (Laquière), le Président du Conseil général (Farès) déjà rencontré à Berrouaghia, le Préfet d'Alger (Trémaud) et les maires de treize communes du Titteri ; le maire venu de plus loin étant celui de Letourneux.

Les trois religions monothéistes étaient également représentées.

A peu près 80 européens devaient, à cette date, vivre dans la commune : une douzaine de familles de colons propriétaires, trois gérants, un hôtelier-cafetier et des fonctionnaires.

Le cadre naturel est franchement montagneux, entre 800 et 1000 m d'altitude. Le climat y est très favorable à la vigne. Les vins y étaient de qualité supérieure.

Le relief, ainsi qu'on le voit sur le petit extrait de la carte au 1/50 000, est marqué par l'encaissement profond de 300 m de l'oued qui se jette au sud dans la vallée de l'oued Sahari, tributaire du Chélif.

Le village a été construit sur un dos de terrain dominant cette vallée. Il a l'aspect d'un village-rue, tout en longueur comme son voisin Ben-Chicao situé à 18 km plus à l'est. Soyons sincère, le village avait deux rues parallèles à la route, avec de belles maisons à étage qui s'expliquent, et par la date tardive de la fondation du centre, et par le mode d'attribution des lots qui avait sélectionné des familles aisées, et par la taille des lots. Cette image est celle d'un village qui paraît prospère. Les arbres y sont nombreux derrière les maisons. La végétation naturelle était forestière.

Un seul service d'autocar reliait une fois par jour, dans chaque sens, le village à la gare dite de Ben-Chicao, mais qui est assez loin du village du même nom. Il n'y avait aucun service direct vers Médéa à 28 km ou vers Berrouaghia à 18 km.