Introduction
LA côte algérienne s'étend
sur une longueur de 1.000 km. environ suivant un arc de cercle très
tendu dont la corde a sensiblement la direction Ouest 10 degrés
Sud-est 10 degrés Nord. Elle est battue par des vents dominants
venant d'Ouest-Nord-Ouest, tournant parfois au Nord ou au Nord-est et
amenant alors les tempêtes les plus violentes et les plus dangereuses
pour la navigation.
Elle offre très peu de rades sûres ; on n'en compte en effet
que trois qui méritent vraiment ce nom, ce sont celles de Mers-el-Kébir,
d'Arzew et de Bougie. Des rades foraines situées dans la partie
occidentale des golfes algériens, à l'abri des caps ou promontoires
Ouest de ces golfes étaient utilisées par la navigation
à voiles ; les navires y trouvaient une sécurité
plus ou moins grande suivant leur degré de fermeture vers l'Est
et le Nord-est : ce sont celles d'Alger, de Djidjelli, de Colle, de Stora,
petit port voisin de Philippeville, et du Fort-Génois au Nord de
Bône.
Cette côte, autrefois inhospitalière, a été
fréquentée tout d'abord par les Phéniciens, ces granits
navigateurs d'il y a 3.000 ans, qui y avaient fondé des établissement
et qui utilisaient ses abris naturels comme Wales au cours de leurs audacieux
voyages vers l'Atlantique.
Puis les Romains s'y sont établis et ont construit quelques ouvrages
portuaires pour mien abriter leurs galères ; on en trouve trace
à Arzew, à. Cherchell, l'antique Césarée,
capitale de la Maurétanie Romaine, à Tipasa. Ils s'étaient
aussi installés à Dellys, à Bougie (Saldae), à
Djidjelli, à Collo célèbre clans l'antiquité
par ses teintureries de pourpre, à Philippeville (Rusicada), près
du refuge de Stora, à Hippone, à l'embouchure de la Seybouse,
et à proximité du mouillage du Fort-Gênois et à
La Calle.
Après eux, les Byzantins au VIe siècle, puis à partir
du VIIè siècle les Arabes, les rois berbères et les
Espagnols contrôlèrent la côte algérienne. Les
frères Barberousse au XVIè siècle firent passer ses
refuges sous la domination turque pendant laquelle ils devinrent les repaires
des flottes des corsaires qui exerçaient le brigandage maritime,
principale industrie des états barbaresques; seul Oran résista
et ne tomba aux mains des Turcs qu'en 1792.
Carte des ports algériens
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A la conquête de l'Algérie par
les Français rien ne subsistait du peu d'ouvrages maritimes construits
par les Romains ; la mer et les tremblements de terre avaient fait leur
uvre.
A Oran, une grotte dans la falaise servait d'abri aux barques transportant
les marchandises en provenance ou à destination des navires réfugiés
à Mers-el-Kébir.
Alger, le seul petit port turc alors aménagé entre le Maroc
et Tunisie, possédait une darse de 4 ha. entre l'îlot de
l'Amirautéet la côte dans la partie Nord du Vieux Port actuel.
Dès l'occupation des différents points de la côte
algérienne, les Français y construisirent des débarcadères
pour le ravitaillement par mer des colonnes expéditionnaires ;
c'est ainsi que des établissements portuaires prirent naissance
à Nemours, à Arzew, à Mostaganem, à Ténès,
à Dellys , à Bougie, à Philippeville et à
Bône.
Jusqu'en 1851, époque où les barrières douanières
, entre la,France et l'Algérie furent supprimées, le trafic
maritime fut constitué principalement par des importations pour
l'armée. A partir de ce moment, l'extension du réseau de
voies de communication, le développement de la colonisation, la
mise en valeur progressive du territoire algérien entraînèrent
un accroissement continu du commerce entre l'Algérie et les pays
d'outre-mer. Les ports par où se fait la majeure partie de ce trafic
commercial durent par suite, pour répondre à ces besoins
sans cesse grandissants, être construits, aménagés,
outillés et être l'objet .d'extensions renouvelées.
Des trois rades naturelles, seule celle de Mers-el-Kébir est utilisée
pleinement puisqu'une base militaire y a été créée.
Le port d'Arzew, par manque d'aiguade suffisante et de voie ferrée
de desserte à largeur normale, ne s'est pas développé
malgré sa situation géographique favorable. Bougie est resté
un port à trafic moyen en raison du peu de ressources de son arrière-pays
à superficie limitée par les courants commerciaux des hauts
plateaux sétifiens allant vers les ports mieux outillés
d'Alger et de Philippeville.
Le génie français a par contre, à force d'ingéniosité,
de volonté et de ténacité, créé de
toutes pièces des ports à des emplacements de la côte
algérienne déshérités du point de vue nautique.
Il a dû pour celales conquérir entièrement sur la
mer, souvent en des endroits où le relief sous-marin plonge brusquement
et les protéger des tempêtes par des digues établies
par des fonds atteignant près de 40 mètres comme à
Alger.
L'aménagement des bassins et l'outillage des môles et des
quais ont suivi ta réalisation des ouvrages de protection.
Tous ces efforts ont abouti au splendide chapelet d'établissements
maritimes actuels du littoral algérien.
Ces ports, placés sous l'autorité du Gouverneur Général
de l'Algérie, sont tous des ports non autonomes. Leur classification
est encore celle arrêtée par le décret du 12 juin
1931.
Trois d'entre eux sont des ports principaux : Alger, Oran et Bône.
Tous les autres sont des ports secondaires dont les plus importants sont
dans l'ordre : Mostaganem, Philippeville et Bougie. En les citant suivant
leur position géographique, en allant de l'Ouest vers l'Est, les
autres ports secondaires sont :
dans le département d'Oran : Nemours, Béni-Saf et Arzew
; dans celui d'Alger : Ténès, Cherchell,
Tipasa, Dellys,
Tigzirt
et Port-Gueydon, et
dans le département de Constantine : Djidjelli,
Collo, Herbillon et La Calle.
Il existe encore de petits refuges pour barques de pêche : Gouraya
entre Ténès et Cherchell, Bérard,
Bou- Haroun, Chiffalo, Castiglione,
La Pérouse
et
Jean-Bart dans le voisinage immédiat d'Alger ; Mansouriah
et Cavallo entre Bougie et Djidjelli ; enfin Stora près de Philippeville.
Alger, juillet-Octobre 1942. P. LAURENT,
Ingénieur ,des Ponts et Chaussées.
La pénurie actuelle de toutes choses
empêche la reproduction de l'ensemble des cartes, plans, graphiques
et photographies que nous aurions aimé insérer dans la présente
étude.
Nous nous en excusons auprès de nos lecteurs.
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