Mes bien chers
frères,
« Tout homme instruit
du royaume de Dieu, a dit le Christ, est semblable à un maître de
maison qui tire de son trésor des choses anciennes et des choses
nouvelles »; la cérémonie qui va se dérouler est à la fois ancienne
et nouvelle ; ancienne, dès la plus haute antiquité, la piété a
fait usage d'images et de statues ; nouvelle, on n'avait pas eu
la pensée, de nos jours, de placer une statue dans une chapelle
sous-marine. C'est à la spontanéité de la piété populaire qu'on
doit cette initiative.
Au cours de cette
année mariale, la paroisse de Chiffalo a voulu se distinguer par
un hommage d'un caractère exceptionnel à la Vierge Marie que vénèrent
et affectionnent d'une manière touchante les pécheurs et tous les
gens de mer.
Il s'est trouvé,
pour aider à la réalisation de cet audacieux projet, un curé animé
d'une foi et d'un zèle admirables de généreux donateurs, des hommes
à la piété ardente qui n'ont pas épargné leurs peines et ont réussi
à provoquer et grouper de multiples dévouements ; une artiste enfin
qui a su animer un matériau ultra-moderne de lignes sobres et évoquer
à nos yeux la majesté du visage maternel de la Vierge Marie. A tous,
j'exprime ma bien vive gratitude en mon nom personnel et ou nom
de tous ceux pour qui cette cérémonie est une invitation à une foi
plus vive et à une confiance sans limite entre les mains de Dieu.
Marie, mère de Jésus, notre mère est reine : elle est reine de l'univers,
c'est ce que m'ont dit les organisateurs de cette fête ; c'est bien
ce que nous enseignent les prières de l'Eglise. Ici, ou pays de
Saint Augustin, on n'a pas oublié que les prières de l'Eglise sont
l'expression infaillible de la foi : Marie est reine parce qu'elle
a été choisie pour être la mère du Christ-Roi ; Elle a été associée
étroitement à son fils par le sang virginal qu'elle lui a donné,
par le glaive de douleur qui a transpercé son coeur maternel au
moment de la Passion rédemptrice.
N'était-il pas
convenable que son fils ait pour Elle les égards que les princes
de la terre ont pour leur mère ? « Marie, écrivait déjà au VI' siècle
Saint Jean de Damas, a été établie reine de toutes les créatures
puis-qu'elle a été la mère du Créateur. »
Qu'on ne dise pas
que la royauté de Marie porte ombrage à celle de son fils ; Jésus
est roi du monde par droit d'héritage puisqu'il est le fils de Dieu,
par droit de conquête puisqu'il a racheté tous les hommes par son
sang rédempteur ; Marie est reine du monde par grâce ; sa royauté
est un pur don de Dieu. Marie reste l'humble servante du Seigneur.
II n'y a là aucune contradiction car servir Dieu, c'est régner.
Ces paroles sont de Saint Léon le Grand, Pape au Vè siècle.
Dieu qui exalte
les humbles a fait en Marie de grandes choses ; Dieu qui est tout
amour a voulu que Marie, mère de Jésus et notre mère, soit devant
nous, pauvres pécheurs, le témoignage vivant de sa bonté, de sa
miséricorde
.II nous est réconfortant, dans les heures difficiles, dons les
épreuves, dans les tentations de pouvoir crier vers la Vierge Marie
« Salve Regina », Salut, reine, mère de miséricorde, vous qui nous
donnez la vie, la douceur, l'espérance... Salut !
Si Marie est reine
du monde entier, nous ne nous étonnons pas de constater que la piété
populaire la vénère sous des noms si touchants, si variés, si beaux,
qu'ils n'exprimeront jamais assez les richesses de son amour pour
nous.
En 1927, de hardis
alpinistes, accompagnés de guides expérimentés, voulurent aller
placer une statue de la Vierge au sommet d'une aiguille qui représente
l'une des plus difficiles escalades de la chaîne du Mont Blanc,
l'aiguille du Grépon, à 3.482 mètres d'altitude. Elle est toujours
là-haut, blanche comme les neiges éternelles qui l'environnent,
étendant sa protection maternelle sur ceux qui occupent leurs loisirs
d'audacieuses ascensions.
Dons quelques instants,
Marie prendra symboliquement possession de la mer dont elle est
reine. « Je suis sortie, semble-t-elle nous dire, dans le beau langage
de la liturgie, je suis sortie de la bouche du Très-Haut; j'ai habité
dans les hauteurs ; mon trône est comme une colonne de nuées ; j'ai
parcouru l'immensité du ciel ; je me suis promenée dans les profondeurs
de l'abîme, dons les flots de la mer et sur toute la terre, dans
tous pays et toutes nations j'exerce mon empire. »
La royauté maternelle
de Marie est pour nous tous une protection. Marie, reine de la mer,
étend ses bras maternels d'une manière spéciale sur les marins,
les voyageurs, les explorateurs, les chasseurs sous-marins. Nous
lui demandons tout particulièrement de bénir les familles des pêcheurs
; leur vie rude lui rappelle la vie rude des premiers apôtres de
son fils Jésus ; qu'elle les aide à sortir victorieusement des
difficultés que leur crée l'évolution rapide du monde moderne, qu'elle
soit leur Providence et les garde dans la foi.
Si Marie est notre
reine, mes bien chers frères, nous devons reconnaître ses droits
sur nous, nous devons nous soumettre à son empire. Elle a daigné
elle-même nous faire connaître ses intentions à ce sujet.
Aux petits-enfants
de Fatima, en 1917, elle a demandé la consécration du genre humain
à son Coeur Immaculé. Le 31 octobre 1942, ou milieu de la plus horrible
des guerres, le Souverain Pontife Pie XII a prononcé solennellement
ces paroles :
« Reine du Très
Saint Rosaire, secours des chrétiens, refuge du genre humain, c'est
à vous, à votre Coeur Immaculé, qu'en cette heure si tragique nous
confions, donnons et consacrons, non seulement la Sainte Eglise,
mois aussi le monde entier, déchiré par de funeste discordes, embrasé
d'incendies de haine, victime de ses propres inquités. »
Cet acte memorable
du vicaire du Christ n'obtiendra tous ses effets que si chacun de
nous, chacune de nos familles accepte de se consacrer au Coeur Immaculé
de Marie et de son fils. Et cette consécration n'est pas une formule
vide de sens, dépourvue d'influence dans la vie, elle doit être,
au contraire, le point de départ d'un retour à une vie chrétienne
sincère. Le Souverain Pontife le disait avec force, le 8 septembre
1953, dons l'Encyclique promulguant l'année mariale : « ...que chacun,
avec le secours de la grâce divine, conforme chaque jour davantage
sa propre conduite aux préceptes du christianisme. »
J'éprouve le besoin
de répéter, mes bien chers frères, ce que je disais, mercredi soir,
à le radio, à l'occasion du retour des pèlerins de Lourdes : qu'on
se décide à revenir à Dieu, car en Dieu seul se trouve la vie, le
bonheur et la paix.
On ne peut pas
être chrétien et païen à la fois; quand on croit en Dieu, quand
on prétend honorer sa mère, on doit pratiquer la justice à l'égard
du prochain et la foi nous enseigne que nous devons voir en tout
homme, sans aucune distinction, notre prochain.
Mieux que cela,
nous devons voir en tout homme notre frère et, à ce titre, lui donner
le respect, l'amour dont le Christ lui-même nous a donné l'exemple.
Quand on croit
en Dieu, on doit faire honneur à Dieu dons toute la vie ; dans
la vie de famille, tout foyer doit être respecté comme un sanctuaire.
Dans la vie de
travail : patrons et ouvriers doivent construire de véritables communautés
de travail. Les droits de tous doivent être respectés. La recherche
effrénée de l'intérêt et du profit doit être tempérée par la concorde
et l'amitié.
Dans la vie de
loisir : il est des tenues indécentes, des amusements dangereux
qui sont des offenses à Dieu, des provocations au péché ; elles
sont des insultes à toutes les consciences, aux consciences musulmanes
comme aux consciences chrétiennes.
Quand on croit
en Dieu, on se respecte soi-même, on respecte les autres. Quand
on croit en Dieu, on ne se moque pas de Dieu.
La consécration
ou Coeur Immaculé de Marie, la consécration effective, suivie d'un
effort pour une vie plus chrétienne, est la condition posée par
Marie pour le retour de la paix sur terre.
Ecoutez, mes frères,
ces paroles de Marie aux petits-enfants de Fatima, en 1917 : « Hélas
! les hommes ne se lassent pas d'offenser Dieu et, si le coeur s'obstine
dans le péché, à la fin du prochain pontificat un conflit plus terrible
encore se déchaînera. Dieu punira le monde ou moyen de la guerre,
de le famine, de la persécution. Mais c'est pour abréger ces maux
que je viendrai demander la consécration du genre humain à mon Coeur
Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis du mois.
Si l'on m'écoute, la paix vous sera rendue, la Russie se convertira.
Si l'on m'écoute,
quand la paix du monde est menacée, ce serait porter de terribles
responsabilités que de ne pas écouter la voix de Marie, la voix
de son fils. De quoi s'agit-il ? Dc sauver notre âme sans doute
; il s'agit encore, nous dit la Vierge Marie, de sauver le monde
l Ecoutons la voix de Marie ; faisons honneur à Dieu dans toute
notre vie, nous ferons reculer la guerre ; nous préparerons des
temps meilleurs, nous serons les bons ouvriers de la paix.
(Transcrit d'après
enregistrement effectué sur bonde magnétique par Robert COLIN)
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