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une page de tickets
divers
juin 2019
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LES TA
-------La
création du réseau des "Tramways
algériens" procéda d'une démarche
très différente des CFRA ou des TMS. Il ne s'agissait pas
là de relier à Alger différentes communes de banlieue,
mais bien de constituer un réseau intérieur à la
ville, touchant en particulier les nouveaux quartiers situés à
mi-pente et permettant de bien irriguer les zones résidentielles.
La concession en fut donc donnée par la ville d'Alger et les TA
constituèrent toujours un réseau à la fois très
urbain et très "européen", souvent même
largement copié sur les transports parisiens.
-------La
société concessionnaire fut fondée en 1898. Elle
était alors une filiale de la Société Thomson-Houston
qui, après ses succès dans la construction électrique,
souhaitait se diversifier dans l'exploitation, avec l'arrière-pensée
de fournir du matériel aux réseaux dont elle détiendrait
des parts. Le régime administratif prévoyait une régie
intéressée, dont les grandes décisions seraient prises
par la ville mais ceci souffrit plusieurs exceptions.
-------Le
principe du réseau de base était une très longue
ligne parcourant Alger à quelques hectomètres en deçà
du Front de mer (lequel était du "domaine" CFRA) pour
grimper sur les collines de Mustapha supérieur puis se diviser
en deux branches, vers la Colonne Voirol et vers le boulevard Bru.
-------Rapidement,
cette ligne fut scindée comme suit
-Hôpital du Dey-Plateau Saulière.
-Opéra-Colonne Voirol.
- Opéra-Boulevard Bru.
-------Malgré
le profil sévère atteignant 5,2 %, les petites motrices
Thomson de couleur verte tiraient souvent
une et même parfois deux remorques "jardinières",
avec des fréquences qui atteignaient 4 minutes en heures de pointe.
En 1935, le parc de matériel était de 40 motrices et 60
remorques, toutes à deux essieux et plates-formes ouvertes. Mais
l'urbanisation des collines se développant, ces trois lignes apparurent
insuffisantes en débit et trop limitées géographiquement.
De plus, Alger n'a,sauf en Front de mer, que des rues de faible largeur
de sorte que les artères construites vers 1890 étaient déjà
saturées en 1914.
-------En
1925, une convention nouvelle avec la ville prévoyait le financement
d'extensions éventuelles. Puis, en 1928 cette dernière,
en liaison avec le Conseil Général, préconisa la
mise en souterrain d'un grand axe parallèle à la mer, avec
des ramifications d'une part vers le domaine TA (Colonne Voirol), d'autre
part vers le domaine CFRA (Le Ruisseau et Maison Carrée). Chiffré
à 600 millions de francs, ce projet dépassait largement
la puissance financière des autorités de tutelle. Cependant,
à cette époque, la Sté des TA fit, sur ses deniers
propres, l'acquisition d'un vaste domaine qui avait appartenu au célèbre
général YUSUF afin d'y édifier un grand dépôt
moderne pouvant remplacer les modestes remises antérieures de Mustapha
supérieur (Rue Ampère et Boulevard Beauprêtre). Le
dépôt de YUSUF fut l'un des rares au monde à s'étendre
sur deux niveaux : tramways en bas et bus en haut.
-------La
circulation ne faisant qu'empirer, en 1933, un nouveau projet de métro
fut élaboré, ne dépassant pas 220 millions grâce
à de nombreux tronçons à l'air libre. Mais la crise
étant passée par là, ce modeste programme ne put
pas mieux être financé que le précédent. Déçue,
la ville d'Alger, sur les conseils de la Société des TA,
admit que l'on pourrait se contenter d'enterrer à faible profondeur
la ligne TA entre l'Opéra et Yusuf, ce qui limiterait le devis
à 75 millions. Mais il faudrait auparavant remplacer les tramways
d'origine, dont la puissance, la vitesse et le confort étaient
insuffisants.
-------Immédiatement,
en décembre 1934, un prototype de motrice moderne fut essayé
entre l'Hôpital du Dey et Yusuf. Il s'agissait d'un engin révolutionnaire
composé en fait de deux motrices extrêmes, à deux
essieux chacune, reliées par une partie centrale suspendue par
pivots aux précédentes. De la sorte on obtenait un véhicule
de près de 20 m pouvant admettre jusqu'à 150 personnes avec
un poids de 21,5 t seulement. Pour réduire le gabarit du futur
tunnel, la largeur du nouveau matériel était limitée
à 2 m, mais la vitesse normale était prévue à
40 km/h, grâce à une puissance de 180 ch sur quatre moteurs.
Les portes étaient automatiques avec marchepieds relevables. Le
plafond était isolé thermiquement, avec aérateurs
de toitures. Le frein était électrique, avec achèvement
du freinage par air comprimé. Le roulement se faisait par boîtes
Isothermos et l'attelage était simplement à barres et manchon,
attendu qu'on ne pensait pas avoir besoin d'accoupler ces véhicules
de très grande capacité. Enfin, la perche était utilisée
pour la prise de courant, avec frotteurs analogues à ceux des trolleybus
envisagés en correspondance des tramways. La possibilité
d'alimenter le véhicule par frotteur latéral en souterrain
restait réservée.
-------Les
premiers essais démontrèrent l'excellence du prototype,
de sorte que 25 autres véhicules furent commandés très
rapidement et livrés au cours de l'année 1937. Ils différaient
du prototype par l'isolation du wattman dans une cabine vitrée,
par des sièges simples et réversibles, et par l'emploi de
double-portes à toutes les ouvertures. C'est la Société
SATRAMO qui avait fait l'étude
de ce matériel et en avait sous-traité la construction avec
la Société Franco-Belge, de Raismes (Nord). Bien entendu,
l'équipement électrique était fourni par Alsthom,
émanation de l'ancienne Thomson-Houston, actionnaire du réseau.
Ces voitures, de couleur crème et vert,
étaient servies par 3 agents : un wattman
et deux receveurs s'en partageant la longueur. Il est à
noter d'ailleurs, qu'aux TA comme dans certains autres réseaux
africains, la casquette et le fez distinguaient les employés chrétiens
des employés musulmans.
-------Dès
1938, l'ancien matériel fut démoli, sauf une motrice gardée
pour le service de la voie.
-------Or,
dans le même temps, M. GALLOIS, administrateur délégué
des TA, très convaincu de la supériorité de la traction
électrique, avait décidé d'expérimenter des
trolleybus dont le renouveau s'amorçait déjà à
Rouen. Il choisit pour cela le site de la basilique Notre-Dame d'Afrique.
Ce lieu de pèlerinage se situait au nord de la ville, sur un piton
rocheux difficilement accessible, à plus de 2 km du terminus des
tramways de l'Hôpital du Dey. Dans le courant de l'été
1934, un trolleybus fut essayé sur une simple ligne bifilaire installée
le long du chemin abrupt de la basilique. Là aussi les résultats
furent excellents ; 4 autres trolleybus furent mis en service avant la
fin de 1934 et assurèrent un service parfait malgré des
rampes de 11,2 % et des courbes de 8 m de
rayon.Mais la ligne de Notre-Dame d'Afrique étant très éloignée
du dépôt unique des TA à Yusuf, il fallait matin et
soir acheminer les trolleybus par les lignes de tramways, avec une perche
levée et le retour du courant électrique assuré par
une "souris" glissant sur l'un des rails.
-------Les
trolleybus
CS 35 étaient des véhicules
courts (7,25 m), étroits (2,20 m) et légers (6,6T);avec
une carrosserie-poutre sans châssis et un moteur de 72 ch. Ils donnèrent
entièrement satisfaction pendant 27 ans de service très
dur.
-------Or,
dés 1925, un autobus Berliet de 25 places avait été
lancé par les TA à l'assaut des pentes du quartier escarpé
du Telemly. Très lent et asthmatique, il avait été
surnommé "le Cafard".
Il n'est pas étonnant que le succès des trolleybus de Notre-Dame
d'Afrique ait encouragé à remplacer "le Cafard"
par des trolleybus. Ce fut l'apparition des
Vetra CS 60, plus longs (8,78 m),
plus larges (2,35 m) et plus lourds (7,5 t) que les précédents
; ils furent mis en service en 1935, sous une ligne aérienne construite
par les Ets. BOMPARD d'Alger. Devant ces brillants résultats, l'électrification
maximale du réseau fut vite décidée. Certes des autobus
avaient bien été achetés : Somua 35 places puis 40
places en 1929, Panhard 50 places un peu plus tard pour créer des
relations Grande Poste/ El Biar ou La Redoute, et Bab El Oued/Beau Fraisier.
Mais il était évident que les trolleybus seraient autrement
efficaces sur de telles lignes en rampes. Or, en 1935/36 Vetra n'avait
encore qu'une capacité productive assez réduite et se trouvait
accaparé par les commandes de Rouen, Lyon, Casablanca et Strasbourg.
Sans hésiter, les TA se lancèrent alors dans la fabrication
intégrale de trolleybus, à partir de châssis d'autobus
Somua et de moteurs de tramways récupérés à
Rouen et qui n'étaient autres que ceux des motrices L de Paris.
-------La
plupart de ces trolleybus "maison" avaient, contrairement aux
Vetra, une plateforme arrière ouverte "à la Parisienne".
32 d'entre eux furent construits, ce qui portait le parc à 41,
permettant la conversion des lignes de La Redoute, Clos Salembier, puis
El Biar.
-------Le
bilan de la société s'améliora nettement avec l'arrivée
des trolleybus ; aussi 10 trolleybus CS 60 furent-ils encore commandés
à Vetra, et livrés en 1937. Cela permit de parachever l'évolution
du réseau en convertissant aussi les lignes d'Hydra et du Boulevard
Bru. La première fut un rare exemple français où
les transports en commun précédèrent l'urbanisation
puisque le trolleybus y arriva avant même que le lotissement fut
habité, ce qui d'ailleurs permit de vendre les terrains beaucoup
plus cher.
-------Parallèlement,
la perception fut améliorée par l'introduction des "moulinettes"
à la Parisienne, oblitérant des tickets en carnets. Les
rares autobus restant au parc des TA furent limités à la
desserte de Beau Fraisier et Rampe Vallée. Un essai d'intrusion
des autobus dans le domaine CFRA du Front de mer se solda par un échec
sans lendemain et une recrudescence de la lutte entre les réseaux.
-------A la
déclaration de guerre, le 2 Septembre 1939, il n'est pas exagéré
de dire que le réseau TA était le
plus moderne du monde. L'âge moyen de ses 80 véhicules
s'établissait à moins de 3 ans, alors, par exemple, que
le réseau de Lyon accusait une moyenne de 32 et d'autres (Toulon,
Douai, Laon, Cherbourg, Bourges etc...) frisait les 40.
-------Il
convient d'ajouter que les TA entreprirent aussi en 1936 la construction
d'un ascenseur reliant la rue d'Isly au quartier
Berthezéne (Bureaux du Gouvernement Général).
Il comportait une cabine de 30 personnes et une de 12 et fonctionnait
sur le courant des tramways.
-------Un autre
ascenseur public existait aussi entre le Boulevard de la
République et le Port, et un 3e entre
le square Bresson et le Port, mais ils appartenaient à la Chambre
de Commerce dont les entrepôts étaient situés en-dessous.
Le dernier garda même longtemps un caractère privé.
-------Parmi
les particularités des TA, notons aussi que ce réseau ne
comportait aucune sous-station électrique, le courant lui étant
fourni directement en 620 volts continu par l'Electricité et Gaz
d'Algérie.
-------En
1941, on se trouvait avec un réseau TA ainsi constitué
TRAMWAYS
Ligne 1 : Yusuf-Hôpital du Dey (avec beaucoup de services partiels)
Parc de Galland-Hôpital du Dey).
TROLLEYBUS:
A : Grande Poste-Hydra
B : Grande Poste-Bd Bru
E : Grande Poste-El Biar
G : Grande Poste-Telemly (ligne circulaire)
H : Hôpital du Dey-N.D.d'Afrique
J . Grande Poste-La Redoute
K : Grande Poste-Clos Salembier
J barré : Champ de Manoeuvre-La Redoute
K barré : Champ de Manoeuvre-Clos Salembier
AUTOBUS:
C : Place du Gouvernement-Rampe Vallée
F : Place du Gouvernement-Beau Fraisier
(Ces deux lignes étaient depuis 1940 réduites à une
simple navette commune)
-------Le
trafic ne cessait de croître, alimenté par la foule des réfugiés
de toutes sortes déferlant sur l'Afrique du Nord, pour peu de temps
oasis de paix dans un monde en feu. D'ailleurs, l'essence rationnée
obligeait bien à recourir aux transports en commun. Une épidémie
de peste (Camus n'a rien inventé) suivie d'une épidémie
de typhus obligèrent à désinfecter les véhicules
chaque nuit, tandis qu'à la descente des tramways les mères
attentives cherchaient sur le crâne de leurs rejetons les angoissants
"poux rouges" porteurs de maladie.
-------Le
8 Novembre 1942, le débarquement allié ne fit guère
de dégâts mais les bombardements allemands causeront en 1943
de terribles carnages en ville et sur le port. Le ravitaillement ne s'améliorait
guère et, pour acheminer sur les marchés quelques légumes
des banlieues, les TA transformèrent deux autobus Somua en trolleybus
à marchandises équipés de ridelles. Ils déversaient
chaque matin leurs précieux chargements de carottes, courgettes
et patates douces et ont ainsi sauvé bien des familles de la famine.
-------Il
faut noter, pour l'anecdote, un accident apparemment unique au monde un
conducteur dépressif lança son trolleybus du haut du petit
viaduc entre Hydra et la Colonne Voirol et réussit ainsi le premier
suicide par trolleybus. Heureusement, il choisit un moment
où il n'y avait pas de voyageurs, mais son receveur fut grièvement
blessé.
-------La
fin de la guerre permit de créer dès 1947 une nouvelle ligne
de trolleybus intitulée
I : Grande Poste-Birmandreis, grâce à 5 nouveaux véhicules
de type Vetra-Berliet VDB. Ils furent suivis en 1949 de 10 Vetra-Renault
VCR.
-------Dans
le même temps, les encombrements urbains reprirent de plus belle.
De 1946 à 1950, une réorganisation des services fut essayée,
en vue de réduire le nombre de trolleybus atteignant la Grande
Poste. La ligne de tramways fut scindée en deux
Ligne 1 : pour les services partiels Parc
de Galland-Bd de Provence (Bab-el-Oued).
Ligne 3 : pour les services complets Yusuf-Hôpital
du Dey.
-------De
plus, les voies non déposées au dessus du Parc de Galland
furent remises en service sur plusieurs centaines de mètres pour
atteindre le Bd Galliéni, permettant de créer une ligne
2 : Grande Poste-Bd Galliéni, qui devait donner correspondance
en ce point avec les lignes de trolleybus A, B,.E,.vers la banlieue.
-------Mais
ce système qui obligeait à des correspondances moins commodes
qu'avant, fut mal accueilli et la Ligne 2 disparut.
-------On
reparla un peu, sans plus de succès, d'une mise en souterrain des
tramways (voir
:" 30 ans de grands projets") , mais déjà
certains préconisaient leur suppression pour résoudre par
enchantement les problèmes de circulation. Pour faire un essai,
9 trolleybus VA 3 de 12 m furent acquis en 1950 et mis en service sur
la ligne de tramway, intercalés entre les rames articulées.
Puis, en 1951, un trolleybus articulé de 18,60 m fut acheté,
sans qu'on comprenne bien en quoi il encombrait moins qu'un tramway réversible
de 19,80 m. Mais ce trolleybus joua vite de malchance car son arrière-train
mal coordonné avec les roues avant montait sur les trottoirs.
-------Le
bouquet fut atteint lorsque, en 1956, il faucha
une partie du précieux mobilier du général SALAN,
en cours de déménagement pour cause de nomination au commandement
en chef. Cela valut à ce prototype d'être envoyé aussitôt
à la ferraille.(Voir
dans l'encadré la mise au point par Christian Ripoll qui corrige
cette allégation )
Le trolleybus articulé VETRA VA4, n°101 par Christian
Ripoll
En 1950, VETRA, qui construisait une série de trolleybus
du type VA3 (12 m de long, 3 essieux) pour les TA, proposa un VA4,
véhicule articulé à 4 essieux, 18 m de long,
d'une capacité de 180 places. La partie articulée
était une semi remorque sur un essieu équipé
d'un système directeur (un brevet italien) destiné
en principe à faciliter sa conduite. Le véhicule a
été essayé sur une ligne parisienne (à
l'époque, il y avait des trolley à Paris), et sur
une ligne lyonnaise. Puis il a été mis en service
avec le numéro 101 sur la ligne de tram entre le Bd de Provence
et le dépôt Yusuf, avec le projet de remplacer les
trams avec ce type de véhicule.
Mais ce gros trolleybus présentait des défauts graves
: une conduite délicate en raison d'un comportement difficilement
maîtrisable du 4 éme essieu directeur ; son gabarit
qui rendait périlleux les croisements dans les rue étroites
de Bab Azoun et Bab el Oued ; l'instabilité de la semi remorque
en route ; les installations de maintenance inadaptées à
sa longueur.
Devant ce constat d'échec, les TA décident en 1953
de l'amputer de la semi remorque et d'en faire un VA3 similaire
aux autres. Il est remis en service en 1954 sous le numéro
90.
Cette transformation a été
décidée par les responsables des TA pour des raisons
d'exploitation. Elle a été réalisée
en 1953/54. Elle n'a rien à voir avec le mobilier du général
Salan qui prend son poste à Alger en 1956 !!
voir aussi Les
derniers trams d'Alger
Texte et
documents : Christian Ripoll
|
------Une
liaison entre les plateaux de Mustapha supérieur et Belcourt (en
plein domaine CFRA) se révélait de plus en plus indispensable
pour éviter aux usagers d'aller encombrer inutilement le centre
de la ville. Mais le profil d'une telle relation est très sévère.
Un funiculaire avait été envisagé, mais en
1956, les TA construisirent un
téléférique Belcourt-Clos Salambier, dont
l'équipement fut confié à la Sté Applevage.
Un téléférique aussi purement urbain était
une première mondiale.
-------A l'horizon
des Aurès, les nuages tragiques s'amoncelaient. L'insécurité
devenait omniprésente en Algérie, surtout à partir
de 1956. Des grenades ayant été
lancées dans des tramways au passage des rues étroites de
Bab El Oued, il fut décidé de munir tramways et trolleybus
de grillages protégeant les fenêtres. Ces superbes véhicules
prirent des airs de fourgons cellulaires ! Nuit et jour
il fallut garder les dépôts pour prévenir des attentats
sur le matériel. L'officier préposé au dépôt
de Yusuf n'était autre que le lieutenant
LE PEN qui s'illustrera plus tard en politique.
-------En
1958, le Général de GAULLE décréta que le
"Plan de Constantine" devrait permettre - avec bien du retard
- d'industrialiser l'Algérie et d'en assainir l'économie.
Entre autres, une usine Berliet fut construite à Rouiba pour produire
des camions et des autobus, que le nouveau pétrole saharien devait
approvisionner. Hélas, le tohu-bohu politico-militaire de cette
époque était peu propice à l'économie et à
l'industrie ; à part les besoins militaires, l'usine de Rouiba
avait peu de commandes en carnet. Alors que flottait déjà
dans l'air la suppression des tramways, il était tentant de la
rendre effective pour trouver un débouché à l'usine
Berliet et au pétrole saharien.
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de page
LA
RSTA
-------Le
1er Janvier 1959, les réseaux TA et CFRA furent enfin réunis
au sein d'une régie syndicale des transports
algérois (RSTA), dont les mandants étaient
à la fois le département et les communes concernées.
Cette régie adopta pour son matériel les couleurs crème
et bleu clair déjà expérimentées sur
les CFRA. Cette fusion, qui aurait été très bénéfique
si elle avait été opérée 20 ans plus tôt,
n'eut guère de conséquence en cette époque où
plus personne ne se préoccupait du sort des transports en commun.
-------A la
tête de la RSTA fut nommé M. CARON, dont la doctrine était
de liquider au plus vite le réseau de tramways et de trolleybus.
L'occasion lui en fut donnée les 24 et 25 Janvier 1960. Ces jours,
connus sous le nom de "Journées
des Barricades", virent Alger s'embraser en une guerre
civile sans merci. Des barricades de pavés avaient été
dressées en travers des principales rues de la ville. A l'issue
de ces graves échauffourées, les dégâts aux
voies et aux lignes aériennes se révélèrent
importants. Plus jamais les tramways ne ressortirent du dépôt
de Yusuf
Christian Ripoll : « En réalité,
les lignes électriques n'ont jamais subi de dégâts
si graves qu'un trafic de tramways ou de trolleybus puisse être
définitivement interrompu !!
Le vrai motif de la suppression des tramways est tout autre :
Avec la mise en oeuvre le 19 mars 1959 d'un plan de circulation mettant
les artères principales de la ville en sens uniques, rue Michelet
en sens descendant, Bd Saint Saens en sens montant, les trams, dont
on ne pouvait raisonnablement pas déplacer les voies, ont circulé
une fois sur deux en sens interdit, dégradant encore un peu
plus la circulation automobile. Certains n'hésitaient pas à
accuser la RSTA de sabotage du plan de circulation. Les trams étaient
condamnés. Ils ont été retirés du service
en 3 temps :
---------1) Création le 14 août
1959 de la ligne d'autobus " T ", à titre expérimental,
suivant un itinéraire respectant les sens uniques tracé
au plus prés de l'itinéraire des trams. Cette ligne
remplaçait les trams les week end et jours fériés.
---------2) Suppression, à compter
du 3 septembre 1959, de la ligne de tram n°1, Parc de Galland
- Bd de Provence, remplacée par la ligne autobus T. La ligne
3 est maintenue en service.
---------3) Suppression, à compter
du 12 septembre 1959, de la ligne de tram n°3, remplacée
par la ligne T. Avec cette suppression, la dernière ligne de
tram de la ville disparaissait.
Cette suppression, décidée par la direction de la RSTA,
n'a rien à voir avec les évènements de janvier
1960.
Donc, depuis le 12 septembre 1959, plus aucun tramway n'a circulé
dans Alger.
Il faut souligner qu'à cette époque, le tramway était
l'ennemi de l'automobile. C'était partout la course à
la destruction des réseaux. Aujourd'hui, c'est le contraire,
c'est la course à la construction de réseaux ! Nous
attendons maintenant la résurrection du tram d'Alger dans un
avenir tout proche. Peut être même est ce déjà
une réalité.
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et, peu après, des autobus Berliet
de types PCR, PBR, puis PLR et PH prirent la relève du réseau
ferré. Cela n'était certes pas une économie, puisque
pour remplacer les 26 motrices articulées, il ne fallut pas moins
de 60 autobus.
-------En
outre le pétrole saharien, sur lequel on avait fondé tant
d'espoirs, s'avérait beaucoup trop riche en paraffine et nécessitait
des installations de raffinage complexes, à cette époque
inexistantes en Algérie. De dérisoires appareils à
filtrer le pétrole tentèrent sans succès de poursuivre
l'expérience, mais très vite on préféra faire
venir le pétrole d'Arabie- ce qui était tout de même
le comble - !
De
1962 à ...
-------Les
trolleybus disparurent dans la foulée, au cours des années
1962 à 1964 sauf la ligne de N-D. d'Afrique dont les autobus ne
pouvaient pas monter les rudes déclivités (elle
a été fermée en 1975, remplacée par un téléphérique
de St Eugène à ND d'Afrique). Les véhicules
de 1934 qui y roulaient toujours furent, en 1961, remplacés par
5 trolleybus Berliet VBH.
-------Le
3 Juillet 1962, l'indépendance de l'Algérie fut reconnue
par le Général de GAULLE devenu Président de la République
depuis 1959.
-------Le
réseau de transports en commun, si beau quelques années
auparavant, était dans un état lamentable. Tout le personnel
européen avait fui précipitamment, en sorte que la RSTA
n'était plus dirigée que par un agent de maîtrise.
Un service réduit fut néanmoins rapidement élaboré.
On envisagea un instant de remettre les tramways en service, mais les
lignes aériennes en cuivre étaient introuvables(
la vraie raison est que les voies avaient été enlevées
par endroits) . La revente des motrices s'avéra aussi
impossible en raison de leur bizarre écartement de 1,055 m, et
il fallut se résoudre à les démolir pour faire de
la place.
-------Petit
à petit, la RSTA se réorganisa, embaucha de nouveaux cadres
et la vie put reprendre dans l'agglomération. Les autobus, déjà
bien insuffisants à l'époque antérieure, devenaient
de plus en plus surchargés avec l'afflux à Alger de nombreuses
populations rurales appauvries par la guerre et séduites par le
mirage urbain.
-------Le
gouvernement algérien détermina rapidement les priorités
qu'il entendait respecter d'abord l'Education Nationale pour former les
cadres manquants, ensuite la Santé, qui laissait beaucoup à
désirer, et enfin l'Agriculture pour assurer la subsistance de
la population sans recourir à de coûteuses importations.
-------Les
Transports furent placés tout à fait en queue de liste priorités.
Avec un matériel inadapté et insuffisant, la RSTA devait
faire face à un afflux de nouveaux Algérois qui atteignit
jusqu'à 50 000 par an. Nul doute que le coefficient de surcharge
ait, dans les années 70, atteint des valeurs stupéfiantes.
-------Pourtant,
la situation s'est améliorée progressivement. Des autobus
ont été achetés un peu partout : Deutz, Van Hool,
Renault, etc... De nouvelles lignes ont été créées
surtout dans la banlieue proche de El Harrach (Maison Carrée)et
autour de Birkadhem, Baraki et Dely Ibrahim. La longueur du réseau
a atteint 950 km, avec 113 lignes d'autobus (mais les services partiels
utilisent généralement un numéro différent
des services de bout en bout). Le téléférique de
Belcourt-Clos Salambier (devenu Sidi M'Hamed-Diar E1 Mahçoul),
qui avait beaucoup souffert de la guerre, a été entièrement
rénové en 1983 par la société française
Poma et son trafic atteint le chiffre énorme de 2 400 000 voyageurs
par an.Un autre téléférique a été construit
pour remplacer les trolleybus de N-D. d'Afrique, qui avaient expiré
définitivement en 1975, il joint Bologhine à N-D. d'Afrique,
en correspondance avec les autobus de Raïs Hamidou qui passent près
de la gare basse.
-------Deux
ascenseurs fonctionnent encore : celui de l'ancien Gouvernement Général,
dit "Tancrède", et un autre sur le port dit "Port-Saïd".
Un escalier mécanique permet aussi d'accéder au Boulevard
Mohamed V.
-------Enfin,
vers 1984, commençant à émerger des préoccupations
les plus immédiates, les Algériens ont pu penser à
l'avenir, même si l'Etat se désengage largement des transports
urbains. Et le fameux projet de métro revint à l'esprit,
d'autant plus que le trafic avait triplé sur certains axes.
------La Sofretu,
appelée en consultation, procéda à des forages et
mit au point un projet de métro extrêmement complet et performant,
mais tout de même un peu cher pour ce pays encore convalescent.
Une "Entreprise du Métro d'Alger" (EMA) fut constituée,
qui aménagea ce projet pour en faire une ligne d'Oued Koriche (près
de l'ancien Beau Fraisier) à Dar El Beida, et au Gué de
Constantine, donc par rapport à Alger : Ouest-Centre-Sud-Est. C'est
à Dar El Beïda, déjà lieu de l'aéroport
international d'Alger que sera construite la nouvelle gare ferroviaire
évitant aux trains de voyageurs de pénétrer en ville.
Le métro utilisera donc largement l'ancienne ligne de chemin de
fer entre Alger et El Harrach, qui d'ailleurs restera ouverte aux convois
de frêt atteignant le port. On prévoit 21 stations dont 10
souterraines, des rames de 6 voitures à la fréquence de
5 minutes, pour un trafic annuel de 322 millions de voyageurs. Bien entendu,
une refonte du réseau de bus s'en suivra. Il semble cependant qu'une
certaine discorde règne entre l'EMA - conceptrice du métro
et la RSTA - exploitante du réseau, ceci bien dans la tradition
de toutes les villes où ces deux tâches sont dissociées.
La RSTA affecte de largement ignorer le métro et l'EMA méprise
un peu les autobus. Pour ne pas être en reste de projet, la RSTA
vient de lancer à son tour "son" projet d'avenir avec
reconstruction de lignes de trolleybus sur les hauteurs, création
de 5 nouveaux téléphériques et surtout construction
d'une longue ligne de tramways suburbains d'Alger à Zeralda (29
km). Celle-ci reconstituerait, après 60 ans d'interruption, la
magnifique ligne CFRA de Castiglione. Une telle émulation entre
EMA et RSTA entre métro et trolleybus/tramways, n'est sans doute
pas négative. Alger pourrait peut-être bien retrouver un
jour le titre de réseau le plus moderne du monde.
Jean ARRIVETZ
avec l'aimable autorisation de "Chemin de fer régionaux et
urbains".
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