ALGER,
STATION CLIMATIQUE
Le tourisme se présente
sous deux aspects, le premier à l'usage des gens bien portants,
actifs et avides de sensations, qui veulent s'instruire, voir, parcourir
d'immenses étendues, le second s'adressant à des gens
pour une cause ou pour l'autre, fatigue, mauvaise santé, venus
chercher dans certains endroits privilégiés du monde le
repos, le calme en la douceur du climat.
Pour l'une et l'autre de ces formes du tourisme l'Algérie est
magnifiquement équipée. Nous avons dernièrement
montré comment, de par ses beautés naturelles d'abord,
de par les ingénieuses facilités de grands voyages et
de grandes excursions mises au point et organisées par les Compagnies
de navigation et de chemins de fer ensuite, on avait toutes facilités
aujourd'hui pour parcourir de bout en bout, de l'Atlantique au golfe
des Syrtes et de la Méditerranée aux plus lointaines oasis
de l'Extrême-Sud, la terre africaine, patrie d'élection
du grand tourisme.
Il apparaît inutile d'insister là-dessus, qui commence
à être une vérité générale,
de même qu'il est parfaitement superflu de faire ressortir une
fois de plus la valeur touristique de tout premier plan et si bien établie
de nos grands circuits. Ce serait une redite, et qui n'apprendrait rien,
tout le monde sachant aujourd'hui que le circuit Alger-Bougie-Sétif-Batna-Biskra,
par les gorges du Chabet et le défilé d'El-Kantara, est
le plus beau et le plus varié des voyages qu'on puisse faire
au monde, de même que le circuit du M'Zab, présentant le
même intérêt de grand spectacle, se parachève
par de puissantes raisons d'histoire et d'ethnographie.
Aussi nous en tiendrons-nous plus particulièrement à cette
seconde pratique du tourisme signalée plus haut : le tourisme
climatique, le tourisme pour personnes fatiguées ou malades venues
chercher, dans la beauté d'un cadre enchanteur et la clémence
d'un merveilleux climat, le repos, le calme, la quiétude qui
refait les nerfs surmenés par l'intense agitation de la vie moderne
et la température idéale, régulière et sans
écarts, qui permettra la réfection des santés chancelantes.
II faut affirmer sans plus d'ambages ni crainte qu'on contredise ni
scrupule aucun d'exagérer, que l'Algérie tout entière
et Alger plus expressément sont de ce point de vue là
plus favorisés et plus propices que n'importe quel autre pays
du monde.
On connaît le charme de notre ville, les séductions innombrables
dont elle se pare, son caractère architectural si curieux, l'amoncellement
de sa Casbah, la beauté des parcs de sombre verdure dont elle
s'entoure, ses bois de pins et de cyprès si décoratifs,
ses coteaux fleuris de villas, ses jardins éclairés de
blanches maisons mauresques et la splendeur panoramique immense de sa
baie à juste titre donnée par le peintre et le poète
pour un des plus fastueux décors qui soient.
Tout cela, vulgarisé de mille manières, ne faisait de
doute pour personne. Mais ce que l'on sait moins, ce que l'on ne sait
pas assez, la valeur du cadre ainsi résolue et mise à
part, c'est l'excellence du climat algérois et la valeur climatique
d'Alger comme station de repos. Bien des idées furent énoncées
là-dessus, diverses, la plupart fausses et dont beaucoup étaient
surtout tendancieuses. On reproche à notre ville et à
la magnifique campagne qui la drape, aussi belle que la Riviera, aussi
évocatrice, somptueuse et clémente que n'importe quels
jardins des plus fameuses stations d'Italie, de s'ouvrir au plein Nord
et de ne point présenter, dans l'ensemble, cette régularité
de température moyenne qu'exigent, pour leur restauration, les
organismes affaiblis.
Il est beaucoup plus simple de citer des chiffres : ils ont plus d'éloquence,
dans leur brièveté, que les discours les mieux nourris
et les mieux animés de l'intention de prouver.
Alger jouit, hormis les trois mois du plein été qui vont
de juillet à septembre, d'un éternel printemps. L'automne
y est délicieux et sans les pénibles impressions de tristesse
et de mélancolie dont il s'accompagne ailleurs et qui peuvent
retentir si fâcheusement sur le moral des malades puisque nos
arbres restent parés de leur verdure éternelle et que,
rien, nulle part, n'y vient évoquer l'idée de la mort;
le printemps s'y embaume de fleurs et de soleil et c'est l'hiver surtout,
alors que partout ailleurs la nature est au moins rabougrie, attristée,
en sommeil sinon tout à fait morte et lugubre, que s'y affirme
une fête enchanteresse.
A Alger enfin, si l'aménagement des conditions climatiques d'ensemble
peut constituer ailleurs un triomphe de l'industrie, il est ici un triomphe
de la nature.
On n'en peut pas douter. Voici relevés sur les chiffres officiels
du service météorologique les températures maxima
et minima enregistrées à Alger du 20 janvier au 10 février,
c'est-à-dire dans la période du plus gros hiver :
20 Janvier |
16,3 |
12,2 |
21 |
16,5 |
11,6 |
22
|
15,7 |
12,3 |
23 |
16,2 |
11 |
24 |
15,5 |
9 |
25 |
13,8 |
9,6 |
26 |
14,5 |
10,2 |
27 |
16 |
8,5 |
28 |
16,2 |
10 |
29 |
20,5 |
10,4 |
30 |
21,1 |
12,6 |
31 |
21,1 |
12,8 |
1er Février |
24,5 |
14,8 |
2 |
25,4 |
16,5 |
3 |
19,3 |
14,9 |
4 |
22 |
12,7 |
5 |
23,6 |
13,1 |
6 |
20 |
14,5 |
7 |
21 |
16 |
8 |
17,8 |
12,5 |
9 |
16,4 |
11.5 |
10 |
20,4 |
12.4 |
Toutes autres constatations
apparaissent inutiles et après ces preuves ce serait surenchérir
en vain que d'ajouter le moindre mot. La cause est entendue et les gens
que la question peut intéresser, que certaines affirmations induisirent
en erreur ou nantirent de quelque méfiance pourront conclure
en toute impartialité. Un jugement définitif ne peut être
que celui-ci : qu'Alger est une station d'hivernage de premier ordre,
la station la meilleure, la station idéale.
Quelques renseignements complémentaires viendront les confirmer
dans leur idée nouvelle. A son mérite essentiel, il est
bon de savoir qu'Alger en ajoute d'autres : le principal c'est la modicité
des prix qu'on réclame à l'biverneur. Filiale de la France,
l'Algérie est hélas aussi un pays au change déprécié.
A meilleur compte que partout ailleurs, la supériorité
de la livre et du dollar y faisant loi, on trouvera ici, par exemple
dans l'alimentation, à cause des fruits, légumes, poissons
dont nous sommes fournisseurs et dont nous pourvoyons la France qui,
à cette heure, en est à peu près privée,
des conditions de vie aussi exceptionnelles par le nombre, l'abondance,
la diversité que par le bas prix, le bon marché... Produits
et main-d'uvre autorisent en notre faveur une très sensible
différence de prix que tout le monde appréciera, gens
riches comme gens de fortune moyenne.
Au surplus, quand nous avons dit que la supériorité d'Alger
s'affirme en triomphe de la nature, on a bien compris que l'effort humain
ne s'est pas fait faute d'y ajouter et que les mêmes trésors
d'intelligence, d'activité et d'ingéniosité sont
dépensés par nos propriétaires d'hôtels,
nos logeurs, nos valets et nos cordons biens de la bonne cuisine pour
que tout soit à l'unisson de l'admirable fête que nous
offre la nature et donner toute satisfaction à la clientèle
qui nous honore de sa confiance.
En un mot on trouve ici le même confort qu'on peut trouver dans
les pays les mieux organisés du monde et les mieux outillés
pour la pratique de l'industrie hôtelière. Propreté,
célérité, la table, le confort, le luxe, l'agencement
agréable, l'harmonie générale, l'ameublement, la
ligne, la couleur tout s'y trouve réuni, y compris les derniers
perfectionnements imposés par l'hygiène ou la thérapeutique,
hydrothérapie, héliothérapie, qui doit plaire,
séduire et retenir.
C'est de toute évidence. Et de même que nous axons recouru
aux chiffres pour établir sans conteste la véracité
de nos affirmations louchant la valeur d'Alger station climatique, de
même nous recourons aux documents photographiques pour faire la
preuve, même aux yeux des plus sceptiques que ne nous n'avons
rien exagéré quant au confort, au luxe cl à la
beauté de nos établissements hôteliers. Les diverses
vues qui montrent ici le
Saint-George, le
Continental, l'Oriental,
le Transatlantique, à
Laghouat, et le
Palace Hôtel, à Biskra, rendent superflu le
commentaire et inutile l'emploi des mois. Ce pourquoi, vous conviant
à la vision directe, il ne nous reste qu'à nous taire.
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