« FRÈRES IL FAUT MOURIR...
"
la phrase fameuse de CHATEAUBRIAND nest quun mythe du poète...
Les trappistes sont heureux
de vivre... et sils bêchent la terre cest pour subsister
!
Ils connaissent le vrai sens de la vie
Deux heures du matin... une sonnerie électrique retentit dans
le vaste dortoir du couvent montagnard de Tibharine. La journée
du trappiste commence. Aussitôt, les moines qui reposaient tout
habillés sur leur paillasse, soldats du Christ « en garde
», s emploient à mettre en ordre leur austère cellule.
Linstant daprès les trouvera à la chapelle
pour le premier office, qui est consacré à la Vierge.
Ce nest pas par hasard que la journée commence par un «
Ave Maria » : lordre cistercien est placé sous la
protection de la mère du Christ.
Aussi les quatre-vingt-dix-huit monastères trappistes du monde,
dont trente et un en territoire français (dix-huit dhommes
et treize de femmes, trappistines ou moniales cisterciennes) portent-ils
le nom de « Notre-Dame » ou de « Sainte-Marie ».
Les six maisons-filles de N.-D. dAiguebelle, par exemple, dont
N.-D. de lAtlas, ont pour noms : N.-D. des Neiges (diocèse
de Viviers), où le père de Foucauld fut formé à
la vie religieuse ; Ste-Marie du Désert (diocèse de Toulouse);
N.-D. des Dombes (diocèse de Belley): N.-D. dAcey (diocèse
de Saint-Claude) et N.-D. de Bonnecombe (diocèse de Rodez).
Ce qui frappe dabord en pénétrant dans la chapelle
de labbaye de Tibharine, cest sa simplicité, son
dépouillement.
Ici, pas dogives impressionnantes, pas de chapiteaux ouvragés,
pas de vitraux hauts en couleurs, pas de grandes toiles de maître
sur la Passion ou la Résurrection, tout est net,
nu, austère.
Rien ne distrait le regard de lautel, grande table de pierre,
de forme rectangulaire, sur lequel, pour tout ornement, plane lombre,
brisée par le tabernacle, dun très beau Christ en
ivoire, cloué à une croix d'ébène.
Dans le chur, le trône épiscopal fait face à
la stalle abbatiale, reconnaissable à la crosse du même
nom, en bois sculpté, qui est fixée à la paroi
du pupitre la plus proche de lautel.
Dans le prolongement de ces deux sièges, débordant largement
dans la nef, les stalles des Pères choristes.
Devant chacune delles, est posé un livre de chur
à grand in-folio et à la couverture ouvragée avec
des motifs de cuivre.
Cest là, pratiquement, le seul ornement de ce lieu saint.
Et encore ces livres sont-ils luvre d'un monastère
cistercien de Belgique !
Terminant cet austère alignement de« chaises de prière
», posées contre elles de part et dautre de lallée
centrale, tout près du tambour d'entrée, deux autels en
bois attendent les officiants.
Les moines qui sont prêtres sy relaieront au cours de la
matinée pour y dire leur messe.
Lorsque nous avons visité la chapelle, les trappistes étaient
au chapitre, les stalles étaient donc vides.
Mais nous ne pûmes nous empêcher de les imaginer priant
en pleine nuit pour le monde insouciant.