-l'homme qui va vers l'ouest
...ou Margueritte, mon village
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-------Je m'attardais tout près de là, certains jours, à regarder tuer les moutons destinés à la consommation des indigènes. Les moutons étaient égorgés selon le rite de la religion musulmane, en présence d'un marabout et dans la direction de la Mecque. Je vais tâcher de vous expliquer rapidement et d'après ma mémoire comment cela se pratiquait. Une fois la bête tuée, on la suspend à. un pieu par une patte. A l'autre patte on fait une petite incision dans la peau, par cette incision on souffle. Cet air insufflé passe entre la peau et la chair et gonfle le mouton. C'est surprenant de voir cette bête doubler de volume, il ressemble à un gros ballon. Après, avec un outil tranchant comme un rasoir -c'était peut-être un rasoir- on sépare la peau de la chair par des petits coups de rasoir, en allant des pattes vers la tête. Cette peau, entièrement détachée intacte, servira après préparation : je crois qu'on sale l'intérieur de la peau avec du gros sel, on l'étale au soleil. Cette peau sera utilisée de diverses façons : veste, chaussures ou tapis, puis le mouton sera découpé.

-------Un peu plus loin, il y avait le café maure, fréquenté par les Arabes qui venaient boire le thé à la menthe assis par terre sur des coussins, d'autres à table jouaient aux dominos, c'est le jeu le plus courant chez les arabes.

-------Dans une autre rue plus bas, il y avait un maréchal ferrant, et quand je le pouvais j'allais le voir travailler. Ah, il ne chômait pas ! les chevaux attendaient leur tour pour se faire ferrer, dedans ou dehors, comme les automobiles actuellement devant les garages. Les voitures automobiles étaient très rares alors que les chevaux étaient indispensables. On ne pouvait transporter les différentes choses sans une voiture et des chevaux.

-------Dans cet atelier, une forge, un énorme soufflet suspendu au plafond, une enclume posée sur un billot de bois, au mur quelques anneaux scellés pour attacher les chevaux pendant le ferrage ou attendant leur tour.Le forgeron d'une bonne stature, un long tablier de cuir allant du cou aux jambes, la figure et les mains noircies par le charbon et la fumée, me faisait impression, un ouvrier pour l'aider dans les préparatifs. Cet aide alimentait le feu et actionnait ce gros soufflet en tirant sur une chaîne. Le corps du soufflet était de cuir, chaque fois que le soufflet de refermait un j et d'air était projeté sur la braise et activait le feu. Le forgeron posait des petites barres de métal dans cette braise. Quand elles étaient bien rouges, il les travaillait pour façonner les fers qu'il plaçait sous les sabots des chevaux, après avoir enlevé l'ancien fer et égalisé la corne du sabot qui allait recevoir ce fer. Tout cela dans les bruits des marteaux frappant le fer et l'enclume, le bruit du soufflet qui se remplissait et se vidait alternativement, des hennissements des chevaux sans oublier l'odeur de corne brûlée lorsque le forgeron posait le fer encore rouge : ne soyez pas effaré le cheval ne ressentait rien.

-------J'allais aussi parfois chercher le lait chez la fermière, madame Germain, du lait encore tiède venant d'une traite récente.

-------Rosine chaque matin enlevait la pellicule de crème couvrant la surface du lait, et quand il y en avait suffisamment, battait cette crème et faisait un beurre excellent. Je buvais le petit lait qui restait après la formation du beurre.
Parlons de l'école, j'y suis allé une année je crois. Il y avait une seule grande salle et une maîtresse, Madame Gudicelli; Dans cette salle, d'un coté les "grands", de l'autre les "petits" dont je faisais bien sûr partie. Pendant que la maîtresse faisait la leçon aux grands, les petits faisaient des devoirs et réciproquement. Il y avait une grande cour pour les récréations et à l'intérieur le fameux appareil indispensable, dont on parle toujours dans les histoires : le poêle, bien utile en hiver.

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