Placé sous le seul signe de la vérité
scientifique
LE XIX° CONGRÉS GÉOLOGIQUE EST SOLENNELLEMENT OUVERT
M. le gouverneur général R LEONARD a souhaité la
bienvenue aux congressistes
L'avant-première du XIX° Congrès
de géologie a revêtu hier matin un caractère solennel.
En effet. les spahis de l'escorte gubernatoriale formaient, à l'entrée
de la salle Pierre-Bordes, une importante haie d' honneur, tandis qu'à
l'intérieur les murs étaient tapissés d'oriflammes
aux couleurs des nations représentées.
Soixante-dix-huit délégués gouvernementaux - un par
pays - prirent place sur l'estrade, à gauche de laquelle s'étalait
une carte géologique de 1'Afrique.
La musique de garnison, à demi-masquée par un écran
de verdure, salue d'une vibrante " Marseillaise " l'arrivée
de M. Roger Léonard, gouverneur général de l'Algérie,
qui descendit de voiture à 10 h. 30, chaleureusement. acclamé
par l'assistance.
Parmi les nombreuses personnalités, on remarquait : MM. Georges
Blachette, Jacques Chevallier, Paternot, Bentounés, députés
; Lehuraux, délégué à l'Assemblée algérienne,
représentant M. le président Laquière ; Gazagne,
délégué à l'Assemblée algérienne
et maire d'Alger, Gau, recteur de l'Académie, et les représentants
du corps consulaire à Alger, M. le professeur Jacob prend la présidence
du congrès.
C'est M. 1e professeur Read, de l'Université de Londres, président
de la XVIII° session, qui prit le premier la parole pour préciser
le sens de ce congrès et à établir le rapport, avec
1e précédent qui se déroula à Londres, il
y a quatre années, et dont il rappela quelques souvenirs,. M. le
professeur Read remercia le gouverneur général de l'Algérie
pour son bienveillant patronage et, complimenta MM. les professeurs Dalloni
et Laffitte à qui revient le mérite d'avoir mis sur pied
ces gigantesques travaux.
M. Read délégua ensuite ses pouvoirs à M. Jacob,
professeur en Sorbonne, et déclara ouverte la XIX° session
du Congrès de géologie.
Après le " Good save The Queen ", écouté
religieusement par l'assistance, M. Laffitte donna lecture de la composition
du bureau : président, M. le professeur Charles Jacob ; secrétaires
généraux : MM. Laffitte et Lucas.
M. le professeur Jacob, ovationné, prononça une courte allocution
au cours de laquelle il remercia ses collègues de lui avoir confié
la présidence des travaux. Il se félicita de l'esprit de
bonne camaraderie qui anime le monde de la géologie.
Après avoir rendu hommage à M. Dalloni, il souligna l'importance
de la présente session qui se propose d'étudier la nature
du sol nord-africain. M. Jacob exprima à M. Roger Léonard
toute la gratitude des congressistes pour sa haute présidence et
son hospitalité. Il précisa, en terminant que les travaux
étaient places sous le seul signe de la vérité scientifique.
Hommage aux pionniers de la géologie
Le professeur Dalloni, président du comité d'Alger, remercia
le professeur Jacob de l'appui précieux qu'il a bien voulu donner
à ce congrès, en voulant bien en assurer la présidence.
A son tour, ii dit sa gratitude à M. Roger Léonard, qui
a bien vouiu accorder son haut patronage. M. Dalloni retraça l'histoire
des géologues français en Algérie et évoqua
leurs réalisations qui furent à la base de l'essor économique
du pays.
S'adressant à l'assistance, il termina en ces termes : " Aujourd'hui,
nous sommes tous réunis et nous comparons. Je salue particulièrement
les excellents collaborateurs qui ont dressé cette magistrale carte
géologique de l'Afrique. "
Géologie et démographie
M, le député Ben Tounès établit, dans son
allocution, le rapport entre les deux disciplines : " Oui, dit-il,
le vieil ennemi était bien l'anarchie. Aujourd'hui c'est la surpopulation.
Dressée en zones sur vos cartes,cette donnée importante
est dans le problème, Je suis persuade que nous les résoudrons
".
M. Roger LEONARD : " L'Algérie
n'est pas indigne de votre choix "
Le gouverneur général se
fait alors l'interprète des populations algériennes dont
il exprima la fierté d'accueillir sur leur sol d'aussi éminentes
personnalités.
M. Leonard poursuivit en excusant M. Jean-Marie Louvel, ministre du Commerce
et de l'Industrie, dont la venue à Alger a été empêchée
par la mise en place des organismes du pool charbon-acier.
" 'il n'est aucune région, dit-il, où la science des
sols ne soit un préalable à l'évolution des arts
et des techniques de la production, ceci est particulièrement vrai
en un pays tel que l'Algérie, qui n'est ouvert, aux prospections
systématiques que depuis quelques décades et qui attend
d'elle la solution d'impérieux problèmes humains. A la vérité,
c'est dès le lendemain de sa venue sur ces rives africaines que
la France a pris conscience de l'intérêt que, pour le développement
de ce pays,
représentaient des études géologiques activement
poussées. Le professeur Dalloni vous a dit brièvement ce
que depuis un siècle furent ces recherches : il a rendu un juste
hommage à ceux qui en ont été les pionniers, oubliant
toutefois de se citer lui-même alors que le haut-enseignement qu'il
a dispense et les travaux personnels remarquables qui ont été
et sont encore les siens ont si heureusement contribué à
la progression de notre connaissance du sol et du sous-sol algérien.
A l'effort qui se poursuit ici, sont étroitement et cordialement
associés des hommes formés aux disciplines les plus diverses.
Universitaires, ingénieurs de tous services, hommes de science
et hommes de pratique et d'action, tous savent que seule leur collaboration
fraternelle en ce pays difficile et si vaste permettra les progressions
nécessaires.
Effort considérable, à la vérité, et qui est
bien loin d'avoir apporté tous ses fruits, mais effort que l'Algérie
suit avec passion et entend pousser jusqu'à la limite extrême
de ses possibilités financières, car elle n'ignore pas que
seule une transformation de son économie par la mise en uvre
de richesses nouvelles en eaux, en matières minérales et
en combustibles lui permettra de faire face aux besoins d'une population
dont le nombre s'accroît suivant un rythme accéléré
et que la France entend, néanmoins, élever progressivement
jusqu'au niveau général de vie des populations métropolitaines.
C'est dire que l'Algérie n'était sans doute pas indigne
du choix que vous avez fait d'elle pour y tenir votre Congrès ;
c'est dire avec quel intérêt elle suivra vos travaux, assurée
qu'elle est que vos études, vos visites et la confrontation de
vos vues lui permettront d'accéder mieux encore à cette
connaissance de soi-même qui, pour les pays comme pour les individus,
est une loi non seulement; de sagesse mais aussi d'efficacité.:
Sous la présidence éminente du Professeur Jacob, à
qui le professeur Read vient de passer le flambeau avec le concours de
tant de personnalités brillantes, je suis assuré que le
19° Congrès géologique international atteindra et, dépassera
même le succès des congrès précédents.
C'est le vu que je forme à l'orée de vos travaux ".
Les travaux ont débuté dès hier après-midi
Les géologues ont abordés les différents sujets inscrits
à l'ordre du programme.
Les travaux scientifiques
C'est ainsi que la mission Routhier, qui prospecta de 1946 à 1949,
en Nouvelle-Calédonie présenta les conclusions de ses recherches.
Les exposés furent faits par MM. Routhier et Avias, professeurs
à l'Institut de géologie.
En matière de cartographie. d'importants travaux furent présentés
par M. Castello Branco, d'une part, sur la nouvelle carte du Portugal,
par M. Dubertrer. d'autre part, sur les travaux cartographiques du Liban.
On note encore plusieurs communications sur la tectonique divers pays.
A la sous-section qui traite de stratigraphie et de sédimentation,
le professeur Dalloni. de la Faculté de sciences d'Alger, fit un
exposé sur la classification du néogène méditerranéen.
Cette question donna lieu a une longue discussion parfois assez passionnée.
Dans cet ordre d'idée. M. Choubert (Guyane française) fit
un remarquable exposé sur la carte géologique des trois
Guyanes. Le président de cette sous-section insista sur la coopération
qui règne au sein de la Société géologique
des trois Guyanes où sont réunis des chercheurs français,
anglais et hollandais.
Devant la section de géologie appliquée, le professeur Frederickson
(U.S.A.) fit une communication sur une nouvelle technique de reconnaissance
des minéraux en plaques minces. Au cours de cette même séance
M. de Beauregard. Directeur du bureau de recherches minières Algérie.
a exposé des généralités sur les sites minéraux.
tandis que le professeur Liégeois, professeur à l'Univeristé
de Charleroi. abordait le problème de l'action de l'homme en géologie.
Cette importante question reviendra au cours des travaux du présent
congrès.
En outre, on note, dans les travaux des autres sections, un exposé
de M. Lagrula (Algérie) sur carte géophysique du Sahara.
Ce travail aura sans aucun doute d'heureuses répercussions sur
la recherche minière en Algérie, dont les territoires désertiques
sont à l'heure actueile le domaine de recherche tant pétrolifères
que minéralogiques.
Enfin, tandis que l'Association des services géologiques africains,
l'Union paléontologique internationale et le Comité international
pour l'étude des argiles tenaient leur première séance,
le conseil s'est réuni de son cote. Son activité s'est bornée
aujourd'hui à établir l'ordre du jour
de ses séances.
|