LES
MINES ET PORT BREIRA
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Avec l'autorisation de l'I.G.N. Carte
des mines de l'ouest algérois | Dès
le début de la présence française, des recherches minières
étaient entreprises dans toute l'Algérie. C'est ainsi que notamment,
les gisements miniers de Béni Akil et de Breïra avaient été
découverts dans les montagnes au dessus de la baie de Beni Haoua. Cette
dernière vit donc naître, le port d'embarquement minier de Port Breira,
terminal d'un téléphérique qui acheminait le minerai de fer
depuis la montagne jusqu'à l'installation de chargement construite sur
l'ilot Sidi Djilani, et le village qui prit le nom de Francis Garnier.
Pour les anciens, Francis Garnier c'était à la fois " le village
" et " la mine ", dont les vies furent harmonieusement liées.
Au travers de quelques archives trop rares, sans continuité dans le
temps et particulièrement techniques pour une novice, nous allons donc
tenter d'ajouter à l'histoire de Francis Garnier quelques éléments
de l'histoire de ces mines qui faisaient partie, comme celles de Rouina, Miliana
et Philippeville-El Halia, de la Société des Mines de fer de Miliana. Les
premières mines exploitées en Algérie Gaston
Bétier, chef du Service des Mines en Algérie décrit ainsi
les débuts de l'industrie minière en Algérie : "L'absence,
en Afrique du Nord de gisements houillers importants et le fait que les importateurs
de charbon trouvent dans le minerai de fer un fret de retour intéressant,
ont orienté immédiatement les exploitants vers l'exportation ;
Les gîtes situés au voisinage de la côte furent les premiers
mis en valeur ; puis, au fur et à mesure de l'extension et de l'amélioration
du réseau ferré, le pays fut mieux étudié et l'équipement
des gîtes de l'intérieur put être envisagé et réalisé.
On doit observer, d'ailleurs, que la reconnaissance des masses minérales
de quelque importance a partiellement déterminé les directives d'une
politique ferroviaire qui parfois fit abstraction des réalités géographiques./.../
Un grand nombre de petites exploitations, bien que situées à proximité
de la côte, ne se sont développées qu'à partir de 1909,
grâce à l'emploi du chargeur à ruban, qui rend facile et rapide
la mise à bord des produits sur rade foraine. Parallèlement, l'amélioration
de la technique des transporteurs aériens et des appareils sur le carreau
et dans les ports, entrainant la diminution du coût des manipulations diverses,
a permis utilisation progressive de quelques gisements difficilement accessibles."
La situation géographique des premières mines en Algérie
est particulièrement bien illustrée par la carte schématique
des mines de l'ouest algérois .
Carte des mines de l'ouest algérois | Essai
d'historique des mines de Béni Haoua Il
a été impossible de trouver le nom des découvreurs de ces
mines, ni de ses propriétaires. Les débuts furent assez
chaotiques. Le décret de concession des mines de Béni-A kil, suite
à la demande adressée le 6 novembre1858, date du 11 mai 1861. Il
porte sur des mines de "cuivre, plomb, argent et autres métaux associés
dans les mêmes gîtes " conformément à la demande
de concession. " Au moment où sortait le décret de concession,
une usine de calcination (usine à mattes) venait d'être achevée
et avait absorbé les derniers fonds disponibles, mais son insuccès
fut complet ; elle ne servit qu'à créer, par sa haute cheminée,
un jalon pour les explorateurs-de Beni-Aquil. Lors donc que tout semblait annoncer que l'exploitation
des mines des Beni-Aquil allait prendre un essor considérable, elle s'arrêta
tout à coup : la valeur et la puissance du minerai avaient été
nettement mises en évidence, mais les moyens sur lesquels on comptait pour
le traitement à lui faire subir sur place faisaient subitement défaut,
les concessionnaires ( ? ) étaient dans l'impossibilité d'en créer
d'autres et il était impossible, avec les moyens de transport dont on disposait
alors, de songer à une exportation pure et simple du minerai. "
Extrait de : Notes sur les mines de béni-Aquil par Henri FRONTAULT 1882.
Gallica C'est seulement en 1872 que les gisements ferrugineux sont recherchés,
en souterrain et non plus à ciel ouvert, mais les cours du fer baissant,
ces recherches sont abandonnées pour n'être reprises qu'en 1882.
N'ayant trouvé aucun document entre 1882 et 1910, nous en sommes réduits
aux hypothèses. Seule la biographie de François BARONI (
voir sur ce site : François
Baroni, un scaphandrier en Algérie de 1890 à 1949
par Roger Baroni) nous donne un indice
: "
en août 1900, le scaphandrier François BARONI,
alors âgé de 18 ans, a obtenu son premier "certificat de satisfaction"
de la Société Anonyme des Mines de Fer de Rouïna (mines de
Breïra) pour avoir effectué des travaux de repêchage et de mouillage
de corps-mort en rade foraine." (2) Pure hypothèse donc : il semblerait
qu'avant 1900, une partie du minerai extrait soit restée sur le carreau
de la mine et qu'une autre partie ait été transportée jusqu'à
Port Breira (à dos de mulets ?) et chargée sur des minéraliers,
en "rade foraine". Les navires amarrés à la côte
et à des bouées (corps-morts) n'étaient à l'abri ni
du vent, ni des lames.
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Notice
des mines de fer de Rouïna, Breïra et de Béni Akil |
Sur la notice des mines de fer de Rouïna,
Breïra et de Béni Akil, notice qui semble avoir été
éditée fin 1910 ou 1911, on trouve un peu plus de renseignements
: "
/ en août 1910, la société de Rouïna
(Siège social à Bruxelles) acquiert un nouveau domaine minier très
important à Béni- Haoua, commune de Ténès. (voir
sur la BNF Le progrès d'Orléansville du 4 Août 1910) Ce
domaine nouveau comprend la minière de Breira, de 43 hectares, en propriété,
et la concession de Beni-Akil pour les minerais de cuivre, plomb, argent
et autres: métaux associés sur 4.477 hectares./
/ Les travaux
d'installation sont poussés, ces mines sont déjà reliées
à la mer par un cable aérien, et le minerai peut être directement
chargé sur bateau à l'aide d'appareils d'embarquements spéciaux."
( 3.Notice sur les mines de fer de Rouïna,
Breïra et de Béni Akil (vers 1911))
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Profil du chemin de fer aérien
depuis la mine jusqu'au débarcadère |
Leur exploitation
durera jusqu'en 1962, avec un simple ralentissement pendant la guerre de 1939
- 1945.
Quelques directeurs
de ces mines - Mr DUCOLLET en fut le directeur
jusqu'en 1929, année où il prit la direction de la mine de Rouïna.
Selon Mme Solange PERRE, " Son beau père, M.DANIEL était
médecin et soignait avec compétence toute la population "
- Puis ce fut Mr André SALZE, Ingénieur des Mines, qui
après une carrière déjà assez longue dans différentes
mines d'Algérie prit possession de son poste à Breira dans le courant
du premier trimestre de 1930. - Ensuite Mr OLANIER fut directeur des
mines de Breïra (Précision apportée par Mr Bachir MOKRANE,
fils de Mr MOKRANE, comptable des mines jusqu'à son décès
en janvier 1961) En 1923, la société
des Mines de Rouïna avait pris le contrôle des Mines de Fer de Miliana
.(voir sur ce site : Miliana)
Cette nouvelle société s'appella désormais Société
des Mines de fer de Miliana avec 5 mines en exploitation. Son siège était
à Paris, siège social et direction générale à
Francis Garnier. Mr André SALZE en fut le directeur général
jusqu'en 1953.
Le personnel de la mine vers 1930. (photo A.Salze)
|
- Enfin, c'est Mr
Pierre ROUMESTAN, venant des mines d'El Halia, qui en fut le dernier directeur
à partir de 1954 et jusqu'à la fermeture des mines. - 30.11.1961
- Fermeture définitive des mines. - (Date précise donnée
par Mr Bachir MOKRANE) Document
historique : l'ultime chargement (3000 tonnes) de minerai extrait des Mines
de Breïra sur le "François Le Brise". Dernier minéralier
ayant chargé à Port Breïra le 6 octobre 1961 (Photo
de Mr Bachir MOKRANE) François le Brise 2, Vraquier minéralier
- propr. : SNC et Cie Le Brise. |
Anecdotes
-
En mars 1930, Le XIVème
Congrès de la Société de L'industrie Minérale a eu
lieu en Afrique du Nord. Le
15 mars les congressistes vinrent étudier la station d'embarquement de
Port Breïra. Ils furent très intéressés par le cable
aérien (35 tonnes/heure), la trémie de stockage de 10.000 tonnes,
et la toile transporteuse montée sur un bras avancant au-dessus de la mer,
permettant de charger un bateau à raison de 650 tonnes/heure. ( Il fallait
profiter des accalmies de la mer.) Un vin d'honneur leur a été
offert par le directeur de la station de Breîra. Les mines de Rouïna
ont fait l'objet d'une visite spéciale, le lundi 17 mars. (4.Gallica.bnf.fr
Revue de l'Industrie Minérale du 15.08.1930. ) -
En mars 1955 Record du monde
de vitesse sur rails. Les 28 et 29 mars
1955 sont deux dates qui resteront célèbres dans les Annales de
l'Histoire des Chemins de Fer, jours de ce record du monde : 331 km/h, sur une
ligne droite des Landes entre Lamothe et Morcenx. Mme Denise ROUMESTAN,
épouse du dernier directeur de Breïra, a confirmé que son époux
disait avec fierté que les roues de la locomotive électrique française
détentrice du record de vitesse sur rails, la BB 9004, et aussi la CC 7107,
avaient été coulées avec de l'acier provenant du minerai
extrait à Breïra, minerai sélectionné pour sa richesse
en fer et sa pureté remarquable.
Roues de la mythique BB 9004 fabriquée
au Creusot Les bogies des machines et des 3
voitures avaient été équipées de roues monobloc "
de 1,25 m de diamètre - sans bandage - et parfaitement
équilibrées dynamiquement | En
1981, soit 26 ans plus tard, ce record fut battu de seulement 50 km/h par le TGV. -
Et aussi 1887 - 1889. Construction de La Tour
EIFFEL. A sa construction, elle culminait
à 309,63 m.. - 2010 :" On célèbre, cette année
, les 121 années de la Tour Eiffel. Le fer, utilisé pour sa principale
ossature, a été fabriqué en Lorraine, à partir de
minerai venant d'Algérie, des mines du Zaccar (Miliana) et de Rouina.
Gustave EIFFEL a remercié les mineurs en offrant une horloge à l'école
du village de Carnot./... .../ Rouina était l'une des premières
mines découvertes en Algérie par les Français. Ses habitants
racontent avec fierté que Gustave EIFFEL fût ébloui par la
pureté de son fer, et la grande teneur de son acier.." Mme Nicole
MARQUET (5.-Texte écrit par Mme Nicole
MARQUET ) et
L'Horloge de Carnot. Le village de Carnot (voir
ce village, sur ce site.)a connu, de tous temps et régulièrement,
des tremblements de terre plus ou moins dévastateurs, mais " La
tour de l'horloge, située dans l'enceinte de l'école résista
malgré sa hauteur, à toutes les secousses. Cela grâce à
son ossature métallique. En 1962, elle était encore là, témoin
de l'histoire du village." (6 Edgar
SCOTTI dans l'Algérianiste n°125 de mars 2009)
Le nouveau groupe scolaire et l'horloge de
Carnot | Remarque
Cette courte étude est une occasion
de rappeler que le sous-sol de la région de Béni-Haoua ne recelait
pas que des minerais, mais également des vestiges d'antiquités romaines
sur lesquels il serait intéressant d'avoir de plus amples renseignements
que les rares indices suivants : -
En juillet 1910, la Société
Anonyme des Mines de Fer de Rouïna a acheté une propriété
d'environ 43 hectares appelée " La Caverne du Gîte des Romains
", propriété d'un seul tenant située douar Béni-Haoua.
( Le progrès d'Orléansville du 4.08.1910 ) -
Il a aussi été trouvé une colonne, des quantités
de tuiles, une belle mosaïque et aussi une monnaie, romaines, dans le village
et aux alentours. Conclusion
Ces mines ont employé une main d'uvre importante, européenne
et indigène, et fait vivre un grand nombre d'habitants de la région.
Leur production était appréciée et exportée vers l'Angleterre,
les Pays-Bas, l'Allemagne, la France et d'autres pays. Cette esquisse
d'historique, peut-être un peu aride, voudrait être un hommage aux
pionniers. Car combien d'entre nous, habitués à voir circuler ces
wagonnets et à voir périodiquement cet énorme bras sortir
du rocher pour déverser à grand fracas le minerai dans les cales
d'un navire, étaient conscients de tout ce que cela impliquait de la part
de ceux qui avaient construit et qui exploitaient et entretenaient ces installations.
Comment oublier les hommes auxquels nous devons tout cela ? __________________ Sources
: (1) Gaston BETIER dans " Les MINES et les CARRIERES " (Extrait
du volume Algérie et Sahara) Encyclopédie Coloniale et Maritime
(vers 1945). G. BETIER était Inspecteur général des Mines,
Chef du service des Mines et de la Carte géologique de l'Algérie.
(2) Roger BARONI dans L'algérianiste n°114 de Juin 2006.
(3) Notice sur les mines de fer de Rouïna, Breïra et de Béni
Akil (vers 1911) (4) Gallica.bnf.fr Revue de l'Industrie Minérale du
15.08.1930. (5) Texte écrit par Mme Nicole MARQUET (6) + Edgar
SCOTTI dans l'Algérianiste n°125 de mars 2009 (7) http://www.profburp.com/bfk/gal/?img=4025&search=Mines
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