Ben-Aknoun
I/ Esquisse du plan du lycée de Ben-Aknoun valable pour les années 1945 à 1951
Rez-de-chaussée
Georges Bouchet est l'auteur des textes.
Les illustrations
sont issues de sa collection personnelle.
Il a suggéré la présentation.
B.Venis, le webmaster a tenté des'en approcher au mieux.

 

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Plan du lycée Ben-Aknoun
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Plan du lycée Ben-Aknoun
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Plan du lycée Ben-Aknoun
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COMPLEMENTS AU PLAN DU LYCEE DE BEN-AKNOUN

I° COMMENT CE PLAN A ETE REALISE
          A/ Ce plan a été dessiné en s'appuyant, pour les contours, sur une image zénithale trouvée sur Google Earth. Cette image " verticale " ne déformant pas les proportions, elle m'a permis de respecter les dimensions relatives des bâtiments et des cours. Elle m'a également fourni l'orientation. Malheureusement elle n'a pas pu me donner une échelle. Grâce à l'inégale largeur des ombres portées, j'ai pu confirmer ou compléter mes souvenirs concernant la hauteur des bâtiments à un, deux ou trois niveaux. Je n'ai pas jugé utile de choisir une couleur spéciale pour la tour carrée qui domine le hall d'entrée, bien que celle-ci ait 5 niveaux. Au dernier étage, chaque côté possède deux fenêtres ; au-dessous, en façade il y a une grosse horloge ronde et une date : 1885. Le plan dessiné ne concerne évidemment que le rez-de-chaussée des bâtiments, quelle que soit leur hauteur, ainsi que l'emplacement des murs de clôture des cours 3 et 4 et l'espace poubelle derrière la cuisine. Les murs fermant les cours 3 et 4 étaient assez hauts pour dissuader toute tentative de franchissement.

Ces contours extérieurs sont à priori fiables. Il n'en va pas de même de l'aménagement intérieur ; surtout pour le bâtiment d'entrée dont nous traversions le hall au plus court.

          B/ Pour situer l'emplacement des cloisons, j'ai dû me fier à ma mémoire d'abord.
Et aussi à celle d'un autre élève de Ben-Aknoun durant la même période, à un ou deux ans près. Inutile de préciser qu' avec Daniel Gassier nous avons parfois hésité et qu'il est aussi arrivé que nous ignorions la destination de telle ou telle salle. Nous avions beaucoup de certitudes, mais pas pour tout ; certains choix ont été hypothétiques.

A vous de corriger d'éventuelles grosses erreurs. Pour le dessin de quelques détails, surtout pour les passages entre les cours, j'ai délibérément sacrifié le respect des dimensions et privilégié la clarté.

Je n'ai pas pu non plus respecter rigoureusement la taille des salles, me contentant de distinguer les plus grandes et les autres.

Les façades sans ouverture indiquée n'ont que des fenêtres ; trois dans les salles de classe les plus grandes qui pouvaient recevoir au moins 18 tables et les casiers de rangement correspondants ; soit 36 élèves.

De toute façon, malgré 6 ans de présence en tant que pensionnaire, je crois n'avoir fréquenté assidûment au rez-de-chaussée, que 6 classes de niveau, trois classes de langue, la classe de dessin, le gymnase, deux salles annexes et, bien sûr, les deux réfectoires d'élèves.

          C/ L'affectation des salles, lorsqu'elle est précisée, est sûre. Il m'est resté cependant trois
salles dont la destination m'est inconnue : les S 4, 5 et 6. Il n'est pas même pas certain que la SC 4 ait vraiment existé.
Bien sûr pour certaines affectations permanentes il fut facile d'être précis (cuisine ou gymnase par ex.). Mais pour les salles de classe de niveau la répartition a pu changer d'une année à l'autre. C'est pourquoi je n'ai rien indiqué. Je ne puis que donner en exemples les classes qui furent les miennes :

En 6° A3
la SC 3
32 élèves dont 0 fille
En 5° A3
la SC 5
34 élèves dont 0 fille
En 4° B3
la SC 7
34 élèves dont 1 fille
En 3° B3
la SC 13
35 élèves dont 6 filles
En 2° B
la SC 8
31 élèves dont 6 filles
En 1° B
la SC 11
32 élèves dont 8 filles.

La salle d'allemand a d'abord été placée près du gymnase ; puis à la rentrée 1948 ce fut la petite salle SC 10 qui fut affectée au nouveau professeur, Monsieur Pons. Il succédait à une dame que j'imagine allemande à cause de son accent. Elle s'appelait Hartmann, ce qui bien sûr ne prouve rien. Elle nous avait imposé l'usage du seul alphabet gothique, ignorant la décision qu'Hitler avait prise en 1942 d'imposer l'usage en Allemagne et dans les territoires occupés, du seul alphabet latin, pour rendre plus facile l'apprentissage de l'allemand aux peuples soumis du " Grand Reich ". Avec Madame Hartmann il y avait 22 germanistes : il fallait donc une salle assez vaste pour les contenir. L'année suivante, avec Monsieur Pons il n'en restait plus que 11 ; la toute petite salle SC 10 à une seule fenêtre suffisait désormais pour héberger tous les germanistes. Pourquoi cette hécatombe ? Je l'ignore. J'imagine un siphonnage de germanistes en perdition par une nouvelle seconde langue italienne apparue à la rentrée de 1948 et jugée moins traumatisante par les réfractaires aux déclinaisons. Ce n'est qu'une hypothèse fragile.

La salle d'anglais située en SC 6 ne fut consacrée à cette langue que pour un seul professeur, Monsieur Collé. Cet enseignant devait ce privilège à un très lourd handicap : il marchait très difficilement malgré ses deux béquilles. Il n'aurait pas pu se déplacer d'une salle à l'autre. Monsieur Collé était très " collant ": rares étaient les heures de cours qui se terminaient sans avoir connu une généreuse distribution d'heures de colle pour le samedi après-midi, voire le dimanche matin. Il était exceptionnellement sévère…et efficace. Je possède encore sa grammaire anglaise qu'il nous a dictée en cours et qu'il fallait savoir par cœur. Elle m'a servi jusqu'en propédeutique pour l'épreuve de thème anglais. J'ai aussi gardé des bulletins de note qui témoignent d'une notation qu'on jugerait aujourd'hui peu motivante. En troisième je fus 26° sur 35 avec 1/20. Quelles notes pouvaient avoir les derniers ? En réalité Monsieur Collé mettait des notes négatives sur les copies, mais pas sur les bulletins.

Tous les autres professeurs d'anglais changeaient de salle en même temps que d'élèves.

Je suis à peu près certain que le lycée manquait de salles de classe, et qu'il devait obligatoirement utiliser parfois 4 salles extérieures que nous appelions Ghorfas. Elles étaient basses, avec un toit arrondi et toutes blanches. Elles étaient alignées sur deux rangs parallèles, face au lycée, mais un peu décalées vers la gauche du portail, en sortant. Entre les deux alignements l'espace était assez large pour servir de cour de récréation. Je n'y suis allé, assez rarement, pour des cours ou des études, qu'en 5° et 4°. Daniel Gassier se souvient d'y avoir pris un cours de musique avec un professeur qui avait apporté un cor d'harmonie dont il joua fort bien. Son nom lui échappe ; mais le souvenir de la prouesse instrumentale demeure.

Comme il est précisé sur le plan, toutes mes considérations, sauf exception motivée, ne concernent que la période d'octobre 1945 à juin 1951.

II° QUELQUES LIEUX DE (MA) MEMOIRE

          A/ Dans le rez-de-chaussée du bâtiment
                    1. Dans le hall d'entrée. D'abord un aveu : je ne connais de ce hall, à une exception près, que ce que l'on voit en le traversant pour se rendre dans la cour N° 1. Son architecture est dans le détail, très complexe. Mon esquisse de plan est donc simplifiée et fausse par défaut.

Je ne connais bien que la salle S3 située au bout d'un couloir assez sombre. J'y suis allé chaque semaine régulièrement pendant trois ans pour deux raisons : une musicale et une cycliste. C'est là que Monsieur Emile Moëbs me donnait sa leçon hebdomadaire de violon.

C'est le moment de rendre un hommage appuyé à ce professeur et à cet artiste qui montait à Ben-Aknoun, de mon temps, pour deux élèves seulement. Aujourd'hui je m'en étonne. Il tenait à l'opéra les parties solistes d'alto et de viole d'amour. Après le lycée il m'a mis à l'alto sans abandonner le violon. L'autre élève, Eychenne, est je crois devenu professionnel ; moi pas. Mais je joue encore de l'alto en musique de chambre et en orchestre symphonique amateur. Je dois à cette formation musicale de longue durée les émotions les plus intenses et les plus durables. Merci à lui et à mes parents qui ont payé les cours et acheté les instruments Collin-Mezin de bonne qualité.

C'est aussi là que je garais mon vélo le lundi et le vendredi matin à partir de la 3° lorsque mes parents m'eurent autorisé ce mode de transport qui me permettait de rentrer chez moi le jeudi à midi.

Il est possible, voire probable que cette salle assez grande ait aussi servi, les jours de pluie ou de froidure, de parloir. Mais le plus souvent les parents emmenaient leurs enfants dans le vaste parc forestier en face du lycée.

Tout au bout du hall d'entrée, juste avant de tourner à gauche pour atteindre la première cour, il y avait, à droite, la porte de l'intendance. C'est là que nous devions, en 1945/1946 seulement, déposer nos tickets de rationnement pour le pain. Et par la suite apporter les chèques de paiement de la pension lorsqu'ils n'étaient pas acheminés par la poste.

Comme vous le voyez il y avait trois tarifs. Il fallait ajouter à la pension proprement dite au moins trois suppléments :

350 fr de " contrôle médical "
200 fr à une caisse de " solidarité "
50 fr à l'association sportive.

Les paiements étaient trimestriels et exigibles par avance. " Il est rappelé aux familles que les règlements exigent que les frais scolaires soient payés d'avance au commencement de chaque trimestre et sans avis de l'administration. En conséquence aucun élève ne pourra être reçu à la rentrée d'octobre quelque soit l'heure d'arrivée, s'il n'a pas acquitté le trimestre. Présenter la quittance du lycée ou le talon des chèques postaux. Pour les boursiers la somme payée en trop par la famille sera aussitôt remboursée ".

Il est bon de rappeler aux plus vieux et d'apprendre aux plus jeunes qu'en ce temps-là les manuels n'étaient pas fournis par l'établissement et qu'ils devaient tous être achetés dès le sixième.

                    2. Dans la première cours dite alors des sixièmes. Avant d'arriver aux salles de cours il fallait passer devant les bureaux de la Direction et du Secrétariat. Je ne suis jamais entré dans les bureaux du secrétariat moins encore dans celui de Monsieur le Directeur. Il valait mieux n'être jamais convoqué dans le bureau de Monsieur Batistelli ou dans celui de son successeur Monsieur Thibault-Chambault. Que le titre de Directeur ne vous surprenne pas : Ben-Aknoun n'étant qu'une annexe de Bugeaud, son Proviseur était celui du lycée Bugeaud (Fresneau à ces dates-là). Au printemps 1950 les deux classes de première furent conviées à se joindre au convoi funèbre de Monsieur Batistelli qui fut inhumé au cimetière d'El-Biar.

Le bureau du Directeur était pourvu d'une porte d'apparat qui donnait sur le hall d'entrée. J'ai toujours vu cette porte fermée.

Nous avons souvent le samedi après le déjeuner, fait la chaîne devant la porte du secrétariat pour obtenir le bulletin de sortie, après vérification rapide de nos droits (autorisation des parents et pas d'inscription au registre des colles de la semaine).

De l'autre côté de la cour se trouvait l'entrée du réfectoire des petits. En 1945, après le départ des dernières troupes alliées parties combattre en Europe à l'automne 1944, nous buvions et mangions dans les quarts et les gamelles en métal tout cabossé que les soldats qui occupaient tout ou partie du lycée depuis novembre 1942, avaient abandonnés. A la rentrée 1946 nous eûmes droit à de la vraie vaisselle. Les tables étaient de 8, 10 ou 12. Il en fallait beaucoup. Je ne me souviens pas si un seul service suffisait ou s'il en fallait deux. Les élèves mangeurs de porc et les autres s'asseyaient, pour d'évidentes commodités de service, à des tables séparées. Les plats étaient acheminés sur des chariots et posés sur les tables. La cuisine étant toute proche ils arrivaient chauds. Je n'ai gardé aucun souvenir des mets qui nous étaient imposés (ni libre-service, ni choix). J'en conclus que je ne me plaignais pas et que nous avons tous mangé à notre faim. On aurait pu craindre des problèmes au moment du partage des plats ; je n'ai aucun souvenir de ce type : les parts devaient être assez abondantes et le surveillant de service assez vigilant. Pour boire il n'y avait que de l'eau. Dans ce réfectoire dit des petits on servait aussi à midi, les demi-pensionnaires, filles et garçons mêlés. Daniel affirme que le bon appétit des garçons était utile au maintien de la ligne des filles, car ils se servaient copieusement. Pourtant les filles ne leur en savaient aucun gré.

                    3. Dans la cour numéro 2. Cette cour, ainsi que la première, servait de cour de récréation grâce sans doute à la présence de larges préaux pourvus de WC à la turque, d'urinoirs et d'un point d'eau. Peut-être aussi parce que c'est dans ces deux cours que s'ouvraient toutes les portes des services de surveillance. La cour numéro 2 hébergeait la surveillance générale. Il y avait deux surveillants généraux. J'ai oublié l'aspect de Monsieur Brune : mais je me souviens bien de la chevelure toute blanche et de la carrure de Sari-Bey qui avait un comportement placide et rassurant. Il n'élevait jamais la voix. Etait-il d'ascendance ottomane avec un nom pareil ? Je l'ignore. Possible.

Sur deux côtés de la cour on trouvait 2 réfectoires. La porte du réfectoire des grands donnait sur le préau ; celle que j'ai appelée par commodité, du personnel, ouvrait sur la cour. Mais les deux salles avaient une communication directe avec le cuisine : on pouvait manger chaud partout. Le mot personnel englobe professeurs, agents et surveillants. J'ignore si des cloisons légères séparaient ces trois clientèles.

Je ne saurais dire si du vin était servi aux " grands " ; aux autres sûrement oui.

Pour entrer et pour sortir de cette cour il fallait emprunter, dans le prolongement de la galerie couverte qui longeait le bâtiment principal, un couloir sombre aménagé au bas des cages d'escalier conduisant aux dortoirs. Entre les cours 2 et 3 une modeste " cantine " avait été prévue sous l'escalier. Fermé par une porte en temps normal, ce minuscule espace était ouvert durant les récréations de 10 heures pour 10 ou 15 minutes. Une fois la porte déverrouillée une tablette apparaissait ; relevée elle laissait entrer la cantinière, abaissée elle servait de comptoir. La cantine était tenue par la femme du concierge avec l'accord du Directeur et à condition que cela n'entraîne pas de retard en cours. On pouvait y acheter de menues fournitures scolaires (gommes, buvards, encre etc.) et quelques friandises.

                    4. Dans les petites cours 3 et 4. Ce sont des cours presque jumelles : petites, triangulaires, en impasse et fermées par un haut mur ; mais reliées l'une à l'autre par un couloir obscur. En 1945/1951 ces cours hébergeaient les six " grandes " classes de troisième, seconde et première, classiques et modernes.

Mais là s'arrêtent leur gémellité et leur symétrie : la 3 a sa pointe tournée vers le soleil levant et l'autre vers le soleil couchant. La disposition des portes et des fenêtres donne l'avantage à la 3 car elle dessert 5 salles de classe et, tout au fond, la bibliothèque. Ce ne sont pas les élèves de ma génération qui ont usé ses livres : nous n'y sommes jamais allés que forcés et sous la conduite d'un professeur lui-même en service commandé. Nous y fûmes en touristes, pas en usagers. Il est possible que cette bibliothèque ait aussi servi de réserve pour les cartes murales.

Au bout de la cour 4 la petite porte ne s'ouvrait que sur une minuscule salle à une seule fenêtre que j'eus le privilège de fréquenter une heure par semaine pendant trois ans. Elle était encombrée de divers objets en déshérence, mais il restait assez de place pour y monter deux pupitres et y ranger deux violons. Ce fut, avant la S3 la première salle où, avec Eychenne, nous prîmes nos leçons de violon

                    5. Dans les cours 5 et 6. Ce sont les cours les moins connues : on n'y allait que rarement et on n'y traînait jamais. C'était des cours de transit essentiellement, encadrées sur deux côtés par des bâtiments sans porte et sans galerie couverte : que des fenêtres. Elles étaient interdites durant les récréations sauf pour les filles dont la cour de récréation, à l'abri des garçons, était la N° 6, la mieux isolée. Les filles y avaient aussi leurs WC réservés ; et pas à la turque j'imagine, sans avoir jamais vérifié ! Mais il n'y avait pas de préau ; par temps de pluie les demoiselles étaient contraintes de se rendre en étude. On devait traverser la 5 pour aller en classe de Sciences naturelles (Monsieur Costa) ou de Physique-Chimie (Monsieur Guedj). Elle desservait également une salle dont j'ignore l'affectation et une très grande salle polyvalente appelée souvent salle de cinéma. Je lui ai connu cependant d'autres usages.

En face de la porte il y avait une estrade et un piano. Elle a donc pu servir à divers spectacles, donnés par les élèves. Et en raison du piano les apprentis violonistes de ma génération ont dû répéter, avec un pion bon pianiste dont j'ai oublié le nom, les partitions que nous dûmes interpréter, en service commandé à Bugeaud, lors d'un repas de la Saint-Charlemagne offert à tous les élèves félicités ou encouragés des deux établissements. Personne n'a su si Mendelssohn et Beethoven avaient apprécié ; toujours est-il que nous n'avons coupé l'appétit d'aucun élève , nous compris. C'était bien l'essentiel car le repas était excellent.

En 1947/1948 nous fûmes tous, élèves et enseignants, alignés dans une file indienne qui serpentait dans toute la salle, pour être vaccinés. Contre quoi ? Je ne m'en souviens pas. Ce ne pouvait pas être la poliomyélite, malgré de nombreux cas à l'époque, puisque le vaccin n'exista qu'en 1953. Je suis sûr de l'année car derrière moi était Madame Hartmann que nous n'avons eu comme professeur d'allemand que cette année-là. Sa salle ouvrait dans la cour 6 entre la salle de dessin et le gymnase. Peut-être était-ce une campagne de prévention de la tuberculose grâce au test dit de la cuti-réaction.

La salle de dessin était vraiment grande avec, au fond, Monsieur Fredouille qui s'ennuyait sur son estrade en regardant les dos de ses élèves disposés en demi-cercle autour d'une sellette sur laquelle était posé le plâtre à immortaliser. Il lui arrivait d'en descendre, de l'estrade, mais rarement et pas pour longtemps. Il dispensait de judicieux (je suppose) conseils aux élèves capables d'en profiter. Je n'étais pas des leurs. Pour moi ce professeur a droit a la médaille d'or de l'inutilité. Je fus son pire élève et lui mon pire professeur. On ne se gênait pas. On ne se parlait pas. En fait nous nous ignorions superbement. Il notait peu. J'eus tout de même droit pour finir, en troisième, à un 1 et à " extrêmement faible". C'était bien vu.

J'aurais peut-être été meilleur en musique, si nous avions eu un professeur dans cette discipline. Ce ne fut pas le cas : Monsieur Meunier dont le nom et la photo sont visibles sur Internet, a dû arriver trop tard, pour nous, à Ben-Aknoun. C'est pour cela qu'il n'y a pas de salle de musique sur mon plan. Si un lecteur peut combler cette lacune, merci d'avance.

Le gymnase était classique avec les agrès de base : cordes à grimper et barres parallèles, plus deux paniers de basket et de quoi tendre un filet de volley. On pouvait aussi se suspendre aux barreaux d'une sorte d'échelle horizontale placée à 2m au-dessus du sol, et apprendre ainsi à avancer en se balançant, un peu comme un singe, en ne tenant chaque barreau que d'une seule main. Il y avait également une poutre d'équilibre et, je crois, un cheval d'arçon. En fait, le plus souvent les cours d'EPS se déroulaient sur le stade. On s'y rendait en sortant par le passage habituellement fermé situé au bout de la cour. Juste derrière le gymnase un bassin alimenté en eau courante a pu, très rarement, servir de piscine pour des séances de natation auxquels ne participaient que les volontaires.


          B/ Les autres niveaux
Il y en a trois, du moins trois où il m'est arrivé de me rendre, toujours en groupe et sous la conduite d'un surveillant, si toutefois l'on excepte les logements de fonction où il n'était pas question d'aller.

                    1. Sur les logements de fonction des étages je ne sais rien et ne peux que dire qu'il y en avait sûrement au-dessus du hall d'entrée. Mais ça ne devait pas suffire pour tous les personnels assignés à résidence. On peut en imaginer d'autres dans le bâtiment séparant les cours 1 et 6. A noter que le logement du concierge était au rez-de-chaussée du bâtiment d'entrée et que, peut-être, il bénéficiait d'une petite cour privée attenante. Faute de certitude je ne l'ai pas cartographiée.

                    2. Les dortoirs étaient disposés sur deux étages entre les cours 2 et 3, 2 et 5, 5 et 4, 5 et 6. Ils étaient grands et sans aucune séparation interne. De sa chambre aménagée dans une sorte de boîte en verre située au bout de la salle des lits, le pion pouvait voir tous les lits, alignés face à face. Combien ? Quelque chose comme deux fois 25 : soit 50 par dortoir environ. Chaque pensionnaire avait accès à une moitié de meuble de rangement et avait une table de nuit. Il pouvait voir son surveillant en ombre chinoise derrière les rideaux translucides de sa " chambre ". Les lavabos étaient de l'autre côté du mur contre lequel était adossée la chambre du pion. Cette salle était, du moins dans les dortoirs donnant sur les cours 3 et 4, plus large que la salle des lits. Il ne s'agissait pas de vrais lavabos séparés, mais d'une sorte de long abreuvoir, au-dessus duquel courait un tuyau muni de robinets disposés à intervalles réguliers. Je ne sais plus si l'eau était chaude. J'en doute beaucoup. Par contre les dortoirs étaient chauffés très correctement.

                    3. L'infirmerie se trouvait dans le bâtiment séparant les cours 3 et 4, trop court pour qu'on y loge un dortoir comme les autres. Lorsqu'un élève devait suivre un traitement, c'est l'infirmière qui conservait pilules, cachets et flacons de gouttes : il fallait monter à l'étage (mais lequel ?) pour aller prendre ses médicaments aux heures convenues. L'infirmerie disposait de quelques lits bien sûr, pour des élèves souffrant de légères indispositions ou en cas d'accident. Daniel y est resté 3 nuits après qu'un coup de pied malencontreux lui eut abîmé une arcade sourcilière au cours d'une match de foot improvisé dans la cour N° 2. Les séjours étaient brefs ; en cas de problème sérieux le malade était rendu dès que possible à sa famille.

                    4. Le sous-sol était de dimension plus limitée que celle des étages. Il était situé sous le bâtiment des cuisines. Nous y étions conduits, par le surveillant de service au dortoir, au mieux une fois par semaine, pour aller prendre une douche. Là, l'eau était chaude. Le chemin d'accès passait sous le réfectoire du personnel. Je ne sais plus où se trouvait la porte desservant l'escalier. Le plus probable est qu'elle s'ouvrait dans le passage entre les cours 1 et 2. L'escalier empiétait donc sur la salle que j'ai nommée SC 4 sur mon plan. A moins que cette salle n'existât pas ?

Le jour des douches n'était pas attendu avec impatience car il signifiait d'abord lever précoce anticipé au moins d'une demi-heure.

Au même niveau et dans un local proche avaient été placées les chaudières qui alimentaient en eau chaude les douches et les radiateurs en fonte du chauffage central présents dans les classes et les dortoirs. Chaudières encore au charbon ou déjà au fuel ? Je ne sais pas.


          C/ Les alentours du lycée
                    1. A l'intérieur du domaine du lycée. J'ignore où passaient au juste les limites du lycée ; mais je sais qu'on y trouvait au moins les quatre éléments suivants : les ghorfas, le verger, le parc et le stade.

J'ai déjà parlé des ghorfas.

Je ne sais rien de précis sur le verger qui était fermé par un mur édifié le long de la route reliant le lycée à la route nationale.

Le parc était traversé de longues laies forestières dont j'ai trouvé le réseau sur la feuille " Chéragas " de la carte au 1/50 000. Près du lycée quelques bancs permettaient aux parents venus voir leur fils le jeudi après-midi, de s'asseoir au calme ; mieux qu'un parloir quand il faisait beau. Ce parc au sous-bois clairsemé et aux arbres hauts couvrait environ 5 à 6 hectares, mesurant 300 mètres sur 200

Le stade n'a été aménagé que juste avant la guerre de 1939 sur un espace dominant de très peu les bâtiments du lycée. On y accédait par une allée de mûriers ( les points verts du croquis) dont les fruits blancs s'écrasaient en juin sous les pas des élèves montant au stade. Le stade était classique, avec un terrain de football et tout autour une piste où courir. Derrière l'un des buts un grand bac à sable recevait, selon la classe, les sauteurs en longueur ou les sauteurs en hauteur.

Les lignes d'un terrain de basket avaient été tracées en travers du terrain de football.

C'est sur la piste qui entourait le terrain de football que commençaient la plupart des séances d'Education physique. Nous marchions tous en file indienne à l'écoute des commandements du professeur : sautez, courez, marchez à quatre pattes, agenouillez-vous, marchez etc. entrecoupés de fréquents " Respirez ", ce que nous aurions fait de toute façon sans qu'on nous le commandât, c'est sûr. Le professeur parlait de " méthode naturelle " ou d' " Hébertisme ". Cet Hébertisme englobait aussi le grimper à la corde lisse. et la poutre d'équilibre (au gymnase) et au stade les sauts et les courses de vitesse (100 m) et de demi-fond (1500 m). Toutes nos performances étaient notées sur un calepin et servaient à calculer la note qui figurerait sur le bulletin trimestriel. Au véritable Hébertisme il ne manquait, à Ben-Aknoun, que les deux natations sur l'eau et sous l'eau avec plongée.

Je n'étais pas un fana d'EPS, et moins encore de football, mais j' y allais, comme tous les camarades, volontiers.

                    2/ A l'extérieur du domaine du lycée. D'un côté, à l'est il y avait la route d'Alger à la Mitidja par El-Biar et Dély-Ibrahim. De l'autre côté s'étendaient, en 1945, des vignobles jusqu'à l'oued Lekral, 700 mètres à l'ouest du lycée.

Entre le parc du lycée et le carrefour de Châteauneuf, un seul établissement important, celui de la briqueterie Douïeb ; et quelques fermes. La briqueterie se signalait pat une haute cheminée et une profonde excavation d'où était extraite l'argile indispensable. Peu après 1950 tout cela disparut et céda la place aux pavillons de la cité universitaire et à la nouvelle Ecole Normale d'Institutrices (l'ancienne était à Miliana).

Cette route avait été la toute première tracée dès 1830 vers la Mitidja. Elle était alors la RN 1. Elle fut dès 1835 détrônée dans ce rôle par une voie plus directe passant par Birkhadem. Elle devint la RN 1a, puis la RN 36 qui avait son aboutissement aux 4 chemins de la Mitidja, en bas de Douéra.

En 1945 un seul service de transport en commun : celui des trolleybus de la ligne 7 des C.F.R.A, , qui avaient leur terminus juste en face de l'allée conduisant au lycée. La rareté des voitures particulières après la guerre faisait de cette ligne la voie d'accès indispensable, et pour les maîtres et pour les élèves. Le 7 descendait à Alger jusqu'à la place du gouvernement par l'avenue De Bourmont et la rue Rovigo. Un autre chemin dit " chemin romain " offrait aux bons marcheurs un raccourci vers El-Biar, boulevard Gallieni où se trouvait le terminus d'un autre trolleybus, celui de la ligne E des T.A. qui descendait vers la grande poste par la rue Michelet. Ce chemin montait jusqu'au chemin de la Madeleine par lequel on pouvait se rendre à la Colonne Voirol, et au-delà à Birmandreis ou à Hydra. Du chemin de la Madeleine partait une route directe vers Birkhadem. Après le chemin de la Madeleine le chemin romain redescendait. Du lycée jusqu'au terminus de la ligne E, il fallait marcher environ une demi-heure pour un peu plus de 2km.

Plus tard deux autres lignes des services de transport en commun de la ville d'Alger desservirent le lycée : la ligne de trolleybus 7 barré vers la grande poste, mais par un autre itinéraire que celui de la ligne E ; et la ligne de l'autobus N° 15 qui partait de Châteauneuf et rejoignait Chéragas par Dély-Ibrahim et El-Achour. Cette dernière ligne ne permettait donc pas de rejoindre le centre d'Alger, mais elle a dû servir à quelques demi-pensionnaires provenant des villages traversés, filles comprises, car ce lycée de garçons avait été ouvert aux filles à partir de 1944 pour des raisons officielles de difficulté de transport jusqu'aux lycées du centre d'Alger. Quand les transports furent redevenus normaux, l'habitude de recevoir des filles s'était imposée, ne dérangeait personne, et fut donc maintenue ; alors que partout ailleurs, sauf pour les classes préparatoires de Bugeaud, la mixité resta interdite.


III° QUELQUES SOUVENIRS DE SIX ANS DE PENSIONNAT


Pour entamer ses six ans de pensionnat, encore devait-on en avoir le droit. Ce n'était pas si facile. En 1945 l'âge ne suffisait pas : il fallait avoir été reçu à un véritable examen dit " de sixième " passé hors de l'école du candidat et corrigé par des maîtres extérieurs. Il suffisait d'une demi-journée pour passer les quatre épreuves groupées deux par deux : deux en français et deux en arithmétique.
               o   En français une dictée de 80 mots, sans piège : coefficient 2
                Puis une analyse de texte aidée par de nombreuses questions, avec un peu de conjugaison et une courte rédaction : coefficient 4
               o   En arithmétique quatre opérations avec des décimales, et un problème : coefficient 6

Les copies étaient notées sur 10 et les résultats devaient être connus avant le premier août. La suppression de cet examen est intervenue en 1960, logiquement, dans la foulée de l'allongement de l'obligation scolaire jusqu'à 16 ans l'année précédente.

Bien évidemment il fallait que les parents accompagnent le nouvel élève. Cela prenait du temps car le père devait payer d'avance le premier trimestre à l'intendance et monter à la lingerie pour déposer les draps et serviettes du trousseau. Puis un surveillant montrait les classes et le dortoir où il fallait choisir sa place : venait alors le moment de redescendre et de verser les quelques larmes de circonstance.

                    A/ Une journée habituelle dont voici l'emploi du temps des jours de classe

6h30 Lever
7h Petit-déjeuner
7h30-7h45 Brève étude surveillée
8h à 12h Quatre heures de cours interrompus par 3 récréations de 5, 15, et 5 minutes
12h Repas
12h30 à 14h Récréation dans les cours 1, 2, et pour les filles 6
14h à 16h Deux heures de cours avec interruption de 5 minutes
16h à 17h Cours ou étude surveillée (sauf le jeudi et le W.E.)
17h à 18h Récréation
18h à 19h30 Etude surveillée dite du soir : la principale
19h30 Repas
20h 20h30 Etude surveillée
20h30 Montée aux dortoirs
21h Extinction des feux
NB Tous ces mouvements étaient déclenchés par une sonnerie

A cet emploi du temps je n'ajouterai que quelques bribes de souvenirs sur quatre professeurs et sur le cérémonial en usage au dortoir.

En sixième un ballet de professeurs remplace le maître unique du primaire. C'est dire qu'en 6 ans j'ai vu passer tant de professeurs que j'ai oublié leur visage, même si leur nom figure sur les bulletins de notes que j'ai conservés. De Monsieur Verdier (Français 6°) je n'ai gardé comme souvenir qu'une seule phrase sans rapport avec le programme officiel : " j'aurais mieux fait d'être garçon de café car j'aurais gagné beaucoup plus ". Possible ; mais il aurait eu des horaires plus extensibles et des congés rétrécis.

C'est à propos de Monsieur Sautin (Mathématiques) qu'avec Daniel nous avons le plus à dire. Bon cours, mais notation peu motivante. Monsieur Sautin n'était pas, comme Monsieur Collé (anglais) déjà cité une terreur : il ne distribuait pas d'heures de colle, seulement des zéros, des 0,25, 0,5 et 0,75. Pas de notes négatives non plus, zéro étant une sorte de limite mathématique. Daniel se souvient parfaitement de son entrée en fonction en 1° en forme de pseudo questionnaire :

Dieu est-il ici ? Non ? alors personne n'aura 20 sur 20
Et Jésus-Christ ? Non plus : personne n'aura 19
Marie ? Pas davantage : personne n'aura 18.

L'avenir lui a donné raison : personne n'a obtenu ni 20, ni 19, ni 18, ni même 17, 16 15 ou 14. Treize pour les génies peut-être, 12 pour les surdoués et autour de 5 pour le plus grand nombre. J'ai conservé un bulletin de sixième dont je photocopie la ligne remplie par Monsieur Sautin. Vous pouvez voir qu'avec ½ je n'étais pas le dernier : il y avait encore 6 mathématiciens en perdition derrière moi. Par chance j'étais en voie d'amélioration !

J'ai gardé de l'estime pour Messieurs Ousaada (Français) et Noël (Histoire-Géographie). Monsieur Ousaada se distinguait de ses pairs par ses pantalons " golf " étranges pour un homme de sa taille et de son âge. Il marchait légèrement voûté et lentement ; et avait un teint très blanc. Il avait une élocution lente et ne parlait pas fort. Ses cours, comme ceux de Monsieur Noël étaient intéressants et sans stress.

Monsieur Noël, grand lui aussi, avait une voix qui portait loin sans effort. Il devait avoir voyagé un peu plus que ses collègues ; et je ne serais pas étonné qu'il ait enseigné, ou qu'il ait eu des attaches au Québec. Il avait impressionné mon professeur de violon en improvisant un exposé sur l'Ungava, qui n'est pas la province canadienne la mieux connue. Je crois qu'il était agrégé ; hormis lui je n'ai identifié comme agrégé que son collègue Smith (anglais) que j'ai retrouvé à Bugeaud, où les agrégés étaient légion, l'année suivante.

Pour le relevé des noms des absents par la surveillance générale, deux procédures existaient. Soit l'agent chargé de ce travail entrait dans la classe pour tendre au professeur une feuille à remplir, soit il recopiait sans entrer les noms que le professeur avait pris la précaution d'écrire lisiblement dans le coin du tableau noir, en haut à droite. Nous préférions que l'agent entre, surtout s'il était porteur d'une circulaire ou d'informations à faire lire par le professeur : cela offrait à nos neurones une pause favorablement appréciée.

Les tables des élèves étaient à l'ancienne avec une planche où écrire inclinée et munie de deux encriers. Mais les encriers restaient vides. Nous avions des stylos " à pompe " que nous réapprovisionnions en pompant dans un flacon waterman (publicité gratuite). En première la fille qui était assise devant moi me fit découvrir une nouveauté dont elle était fière : un stylo à bille. Je ne fus pas séduit car je le trouvai un peu baveux : c'était un Reynolds. Publicité encore gratuite.

La montée au dortoir se faisait en rangs approximativement par deux. A l'entrée du dortoir l'architecte avait prévu un sas avec, à gauche un local où les pensionnaires concernés pouvaient déposer leur valise, et, à droite, des WC normaux. Une fois dans la longue salle aux 40 ou 50 lits chacun devait se tenir debout au pied de son lit. C'était le moyen le plus simple et le plus rapide de compter et d'identifier les absents. Après quoi nous faisions notre lit avec les draps et couvertures que nous avions pliés le matin et déposés, en carré, au pied du lit. Nous avions un polochon à la tête du lit. Le mouvement vers l'abreuvoir-lavabos était collectif. Le garde-à-vous au pied du lit était également de mise en cas de chahut -ce fut exceptionnel- le temps que la somnolence assagisse les agités.

                    B/ Une semaine habituelle.
Elle commençait en théorie le lundi à 8 heures et se terminait le samedi après le déjeuner. Mais pour les pensionnaires habitant un peu loin, elle commençait le dimanche soir avant 19heures.

Le jeudi était un jour à part car il n'y avait pas de cours l'après-midi. Pourtant, à de rares exceptions près les pensionnaires devaient rester au lycée. Pour les occuper, par beau temps, un ou plusieurs surveillants les menaient dans le parc, de 14h à 16h. Puis on rentrait sans hâte au lycée où un bout de pain et une barre de chocolat à prendre dans un grand panier servaient de goûter.

Le samedi la plupart des pensionnaires partaient chez eux ou chez leur correspondant à Alger. Il ne restait pas grand-monde au lycée : et tout cas pas de quoi remplir un dortoir entier, à moins qu'il n'y ait eu pléthore de collés. Et même dans ce cas l'administration pouvait, par commodité, prononcer un sursis à exécution de la colle. Ceux qui dormaient au lycée le samedi, le quittaient le dimanche à partir de 8h et jusqu'à 19h. J'ignore si des élèves, collés ou pas, restaient au lycée tout un dimanche, et quel pouvait être alors leur emploi du temps. Il me semble qu'il existait des colles du dimanche matin, mais pas du dimanche après-midi.

                    C/ Un trimestre habituel.
L'année scolaire était organisée en trois trimestres séparés par les vacances de Noël et de Pâques. Chaque trimestre se terminait pas un conseil de classe auquel ne participaient ni des représentants des parents, ni des élèves. La présidence était assurée par le censeur.
Ces conseils avaient le droit et le devoir de juger chaque élève et de l'inscrire dans l'une des 6 catégories que voici ; par ordre de mérite décroissant.

Les Félicités. Il y en peu ou pas du tout.
Les Encouragés. Il y en a peu.
Les Inscrits au tableau d'honneur Une grosse minorité.
Les Non inscrits Le troupeau
Les Avertis Il y en a peu ou pas
Les Blâmés Vraiment exceptionnel

Les notes prises en compte pour cette répartition étaient essentiellement celles des compositions ; une composition dans chaque discipline évaluée. On appelait composition un devoir surveillé par le professeur et en temps limité portant sur tout le programme d'études du trimestre concerné. C'était assez stressant : un mini examen de spécialité en quelques sorte.

Les notes obtenues aux devoirs faits " à la maison " ou en étude, ainsi que les leçons (l'élève était alors envoyé au tableau au début de cours) ne servaient qu'à nuancer les appréciations du bulletin envoyé aux parents.

Les compositions ont toujours été notées sur 20 alors que leçons et devoirs " à la maison " ont longtemps été notés sur 10. C'était précisé sur le relevé intermédiaire envoyé aux familles. Les parents recevaient donc des relevés de notes en nombre variable, et trois bulletins trimestriels. Sur le bulletin du troisième trimestre pouvaient figurer d'autres mentions :
        " Admis dans la classe supérieure "
        " Soumis à un examen de passage en octobre (dans 1 ou 2 disciplines au maximum) "
        " Redoublement ".
Ces décisions étaient irrévocables et sans appel.

Sur le dernier bulletin de l'année figuraient les prix et accessits obtenus par l'élève. Il y avait un premier et un second prix ; et un premier, un second, voire un troisième accessit, dans chaque discipline en fonction de la moyenne des notes de composition. J'affiche ci-dessous un exemple de relevé de notes, de relevé des prix et accessits, et un bulletin trimestriel.


Vous avez remarqué, tout en bas, le nom d'un professeur adjoint. C'était le nom du surveillent principal de la classe, chargé notamment de l'étude du soir. Pour des raisons de " poids " j'ai coupé l'appréciation générale avec le tampon de la signature du Directeur. Avec Daniel nous gardons le souvenir d'un surveillant qui avait passé l'âge d'être étudiant comme ses collègues. Il portait presque toujours une longue pèlerine noire et avait une main rigide dans un gant noir. Nous l'imaginions en victime de la guerre de 14 bénéficiant d'un " emploi réservé ".

N'oublions pas qu'en fin de première il fallait passer la première partie du baccalauréat : véritable examen avec écrit et oral , dans toutes les disciplines (sauf l'EPS), créé en 1874 et supprimé en 1963. Il fallait être reçu à l'écrit (on disait admissible) pour avoir le droit de passer les épreuves orales Il fallait être reçu à l'oral (on disait admis) pour entrer en terminale où se préparait, à Bugeaud, la deuxième partie du baccalauréat qui donnait, lui, le doit de présenter, l'année suivante, un examen propédeutique qui donnait, enfin, le droit d'entrer à l'université. Il existait une session de rattrapage en septembre. Si vous ajoutez le BEPC que tous présentaient en fin de troisième bien qu'il ne donnât pas le droit d'entrer en seconde, vous aurez fait le tour de toutes les épreuves subies par les élèves d'avant 1960.