AVIATION
Les ailes bônoises
Texte, illustrations : Pierre Jarrige

------Pierre Jarrige, né en 1940, à Burdeau (dpt de Tiaret), fut pilote privé et pilote militaire (ALAT) en Algérie. Il fait des recherches, depuis très longtemps, sur l'histoire de l'aviation en Algérie. Il a déjà produit trois livres sur l'aviation légère et le vol à voile. Il continue les recherches en vue d'un livre sur l'histoire del'aviation commerciale et militaire.
------ Je le remercie d'avoir eu la gentillesse de nous faire parvenir ces textes afin que vous puissiez en profiter.

Son site : www.aviation-algerie.com

extraits du numéro 40, décembre 1987 de "l'Algérianiste", bulletin d'idées et d'information, avec l'autorisation de la direction actuelle de la revue "l'Algérianiste"
sur site le 20-11-2009

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Pierre Jarrige, chef pilote à l'Ecole nationale supérieure de l'aéronautique et de l'espace de Toulouse, est né en 1940 à Burdeau (ancien département de Tiaret). Il a été pilote de tourisme, puis pilote militaire dans l'A.L.A.T. (Aviation légère de l'armée de terre). Avant juillet 1962, il avait déjà effectué six cents heures de
MM. Laforgue, Alexandre Teddé, Marcel Cosse, Jean Galano, Philippe Pace, Ignace Olivetti, Joseph Xicluna.
vol au-dessus du territoire algérien.
A côté de la stèle à Léonce Ehrmann, de gauche à droite :
MM. Laforgue, Alexandre Teddé, Marcel Cosse, Jean Galano, Philippe Pace, Ignace Olivetti, Joseph Xicluna.


Les anciens de "l'aviation militaire" lancent le club

En 1929, quelques aviateurs bônois qui, pour la plupart, avaient fait la guerre dans la " Cinquième arme ", ont l'idée de se grouper avec un programme initial modeste. Animés par M. Herbert, ils désirent, par des conférences, par des articles et au besoin par des banquets, " répandre l'idée aéronautique dans le public".

En 1930, alors que les fêtes du centenaire commencent à battre leur plein dans toute l'Algérie, le noyau des précurseurs ne veut pas rester en retard et crée, le 9 février, les " Ailes bônoises". M. Herbert décède prématurément des suites de ses blessures de guerre et le premier bureau du club est constitué par Marcel Dayre, président; Robert Volmerange, vice- président ; Choupaut, trésorier; Roger Ritoux-Lachaud, secrétaire général et Brayard, secrétaire adjoint. Tous les membres du bureau sont pilotes ou observateurs de réserve.

Bône, qui possède une hydrobase depuis la guerre, n'a pas d'aérodrome. Les dirigeants du club jettent un regard lourd de convoitise sur l'hippodrome de l'Allelick qui a servi avant la guerre à des meetings et qui est maintenant utilisé par la compagnie Air Union, dont les pilotes Robert Bajac et Paul Perrichon ont déjà effectué quelques vols de reconnaissance sur la ligne Bône-Tunis, inaugurée le 10 avril 1930 en Farman 190. Le ministère de la Guerre a concédé un bail à Air Union et, avec l'accord de celle-ci, un grand meeting est organisé le 22 juin 1930. Ce meeting, sous la présidence du général Vuillemin, est un succès. Les grands noms de l'aviation y participent : Max Knipping, Maryse Hilsz, Rouland, René Lefèvre...

Avec raison, les dirigeants du club pensent que la population bônoise s'intéresse à l'aviation et les premiers projets d'installation sont discutés. Après des mois de palabres, de démarches et de correspondance, les Ailes bônoises obtiennent la rétrocession du bail de l'Allelick, qui devient hippo-aérodrome

Si le problème de l'aérodrome est réglé, reste celui de l'argent. Des appels sont lancés, et la municipalité et la chambre de commerce répondent efficacement. Grâce à leur concours, sont construits un grand hangar de 550 m2 pouvant abriter 10 avions et un club-house avec bar (indispensable à tout essor aéronautique).

Le terrain est en partie nivelé et drainé et, les crédits épuisés, c'est grâce à la générosité des Ets Bertagna que peuvent être nivelés 25 hectares supplémentaires et que les derniers drains sont établis vers la Seybousse. L'aérodrome mesure maintenant 600 m sur 575 m.

Tout est prêt pour recevoir les trois premiers avions : le " de Havilland " DH 60 " Moth " (moteur Gipsy) du club, le Caudron C 270 " Luciole " (moteur Salmson) F-ALVP de Marcel Bouilloux (garagiste) et le Caudron C 286 " Phalène " (moteur Gipsy) F-AM10 de Durafour qui arrivent au printemps 1933.

Au mois de juin 1933, Marcel Bouilloux achète le " Phalène " de Louis Durafour et revend son " Luciole " à Marcel Dayre qui le baptise " Kissou ". Marcel Bouilloux qui s'entraîne avec l'ancien pilote militaire Rolland, passe le brevet de pilote à Alger au mois de juillet.

Les Ets Ballot offrent le rond d'atterrissage signalant le terrain, les Ets Bertagna entretiennent les fleurs et les arbustes et l'activité aérienne peut vraiment commencer au mois de juillet 1933. Les anciens pilotes militaires s'inscrivent pour se réentraîner, les élèves pilotes affluent et Robert Volmerange et Marcel Dayre se chargent de l'instruction. Une voiture assure la liaison avec la ville distante de 1,5 km et le logement du mécanicien Alzonna est terminé.

Le 17 juin 1933, Maryse Bastié, voyageant pour le compte de la maison Potez rend visite au club.

Au mois de juillet, à l'occasion du décès du docteur Petrolacci, Marcel Dayre et André Fadda se rendent à Tunis pour saluer la dépouille mortelle du maire de Bône.

Le 7 août 1933, arrive le Potez 43 " Ville de Bône ", acheté par souscription de la municipalité et convoyé depuis Alger par Robert Volmerange et Pierre Truchot.

Marcel Dayre entraîne ou réentraîne Roger Ritoux-Lachaud, Candas et Gonon, tandis que Robert Volmerange s'occupe de Marceau Della Giustina, André Dhorlac (directeur des Lièges de l'Edough), Gaffiero et Jean Bazinet.

Les premiers résultats des Ailes bônoises ne se font pas attendre : le 4 octobre 1933, le capitaine Domerc et le sergent Villain du 3e groupe d'aviation d'Afrique de Sétif, font passer les épreuves du brevet de pilote à Roger Ritoux-Lachaux, Marceau Della Giustina et André Dhorlac.

Les anciens pilotes de guerre Albert Tucci (deux victoires aériennes homologuées), Boussod et l'architecte Pierre Truchot volent régulièrement et Rolland donne de nombreux baptêmes de l'air.

A la fin de l'année. Marcel Bouilloux achète le Potez 36 de M. Kraft (d'Alger).
Le 26 janvier 1934, Etienne Chartoire, qui participe sur l'avion de construction amateur "Dupuy" à la coupe du président de la République sur l'itinéraire Paris - Saïgon, fait escale à l'Allelick.

Le 15 mars, ce sont André Malraux et Corniglion-Molignier en Farman 291 qui s'arrêtent en revenant d'Arabie où ils ont, disent-ils, découvert le palais de la reine de Saba.

Le 22 février 1934, le capitaine Pierre Domerc fait passer le brevet du 1 er degré à Candas et Jean Bazinet.

Le 25 février, se tient l'assemblée générale du club. Quelques changements ont lieu dans la composition du bureau : président, Marcel Dayre ; vice-président, Robert Volmerange ; trésorier, Choupaut ; trésorier adjoint, Bravard ; secrétaire, Roger Ritoux-Lachaud ; secrétaire adjoint, Marceau Della Giustina. Le comité d'honneur est composé de MM. Laurens et Saint-Martory.

Le 24 mars 1934, un Bônois est à l'honneur : Gaston Laffannechère reçoit la Légion d'honneur. Gaston Laffannechère est né à Bône le 15 septembre 1904. Après avoir servi dans l'armée comme pilote, il entre aux Lignes Farman puis à la Compagnie Air France où il fera une brillante carrière de pilote de ligne.

Au printemps 1934, de nouveaux élèves s'inscrivent : Maurice, Paul et Didier Germain, Stephan et Francis Nuncie, Henri Scotto, Albert Appap, Piquet, André Gallo, Alain Jossaud et Mercier ; alors que Marceau Della Giustina achète un avion.

L'aérodrome de l'Allelick, réputé par la qualité de son accueil, reçoit de plus en plus de visiteurs d'Europe et d'Afrique du Nord ; le 26 avril c'est le pilote de raid Christian Moench qui fait escale avec son de Havilland " Leopard Moth ". Un avion fréquente l'aérodrome, le Potez 58 FANYG de la Compagnie des phosphates du Kouif dont l'exploitation se trouve aux environs de Tébessa et le terminal d'embarquement au port de Bône. Le pilote de la compagnie, Gilbert Hirsch, deviendra célèbre sous le nom de Gilbert Granval, après avoir commencé la guerre comme adjudant pilote, et milité dans la Résistance.

Jean Tapie donne son nom à l'aérodrome

Le 1 er juin 1934, l'aérodrome prend le nom d'un enfant de Bône : Jean Tapie. Jean Tapie a eu une brève mais brillante carrière de pilote et ingénieur d'essai. Issu de l'Ecole polytechnique et de Sup'Aéro (promotion 1927), il entre à la section d'Essais en vol du Service technique de l'aéronautique. Il collabore activement à la mise au point de méthodes d'essais de stabilité et participe à plusieurs vols expérimentaux dans des conditions critiques, sinon dangereuses.

C'est en courant la Coupe Cecil à l'occasion du meeting de Vincennes le 20 mai 1928 qu'il a un accident grave en Breguet 19. A l'arrivée, en légère survitesse et à basse altitude, le plan supérieur du Breguet est arraché et heurte le front de Jean Tapie qui, éjecté, est sauvé par le déclenchement automatique de son parachute. Son co-équipier, le capitaine Brager, meurt en s'écrasant avec l'avion.

Jean Tapie ne se remettra pas de cet accident ; il est retrouvé dans le coma avec l'os frontal défoncé et diverses fractures; une anesthésie effectuée dans de mauvaises conditions aggrave son état de santé par des complications pulmonaires. Il reprendra cependant sa place aux essais en vol et deviendra le chef du cen tre mais il mourra des suites de son accident.

Lors de l'inauguration des locaux du bouievard Victor de l'Ecole nationale supérieure de l'aéronautique, le 17 décembre 1932, le foyer des élèves est baptisé " Salle Tapie ". (Georges Tapie, frère de Jean Tapie, obtiendra la médaille de bronze en canoë, deux-barré, aux Jeux Olympiques de Berlin de 1936.)

Des journées aéronautiques, organisées régulièrement dans les villages de la région, permettent à toute la population environnante de profiter des baptêmes de l'air et des promenades aériennes.

Le 27 juin 1934, un événement tragique a lieu sur l'aérodrome : Paul Germain, avec le Potez 43, accroche un poteau électrique en approche finale et se tue le jour même du lâcher de son frère Didier. A la suite de ce drame, Didier et son père, Maurice Germain, cessent de voler.

Le 6 août 1934, la Compagnie générale transsaharienne inaugure, en Caudron " Phalène " avec le pilote Monteil, la liaison quotidienne Bône - Tunis. Cette ligne sera aussi éphémère que celle d'Air Union.

Le 26 juillet, arrive le Potez 58 F-ANDK " Ville de Bône ", convoyé par Jacques Duchêne-Marullaz.

En septembre 1934, Albert Tucci (viticulteur), accompagné de son épouse et de Jacques Duchêne-Marullaz, va prendre livraison de son Potez 58 (F-ANFI) à Meaulte et rentre par l'Espagne et le Maroc. Toujours en septembre, débutent Dalaise et Robert Beghain (viticulteur) alors que le sympathique Albert Appap est lâché.

Marcel Bouilloux vole activement ; il réalise plus de deux cents heures de vol en un an et demi. En janvier 1935, il vend son " Phalène " à Alain Jossaud et achète un Caudron " Luciole ".

En février 1935, le général Lacolley et le capitaine Arsac, en tournée d'inspection, visitent l'aérodrome en Potez 25. Les équipages militaires d'Algérie et de Tunisie fréquentent assidûment l'aérodrome Jean-Tapie avec des Leo 20, des Morane 230, des Nieuport 62 ou des Potez 25. Tout comme leurs camarades pilotes civils, ils apprécient l'ambiance chaleureuse qui règne sur le terrain.

Le 14 février 1935, Michel Trouilleur, officier pilote de réserve, ingénieur de l'usine électrique, qui vient de Philipeville où il a contribué à la création de l'aéro- club, fait, devant une nombreuse assistance, une conférence sur l'aviation dans la salle du conseil municipal.

En avril 1935, cinq pilotes sont brevetés : Stephan et Francis Nuncie, André Gallo, Albert Appap et Robert Beghain.

Le 15 avril, les Lignes aériennes nord- africaines d'Henry Germain, inaugurent, avec le Fokker VII F-AJUD, la nouvelle liaison Alger - Bône.

En mai, toujours par l'Espagne et le Maroc, Marcel Bouilloux ramène le nouveau Potez 58 (F-ANIR) du club en faisant Rabat-Oujda-Bône dans la journée (dix heures de vol).

Le hangar abrite maintenant 7 appareils : les 2 Potez 58 du club, le Potez 58 d'Albert Tucci, le " Phalène " de Marcel Dayre, le " Phalène " d'Alain Jossaud, le " Luciole " de Marcel Bouilloux et le Farman 202 d'Albert Appap.

Au printemps 1935, au début de la troisième année de leur activité, les Ailes bônoises peuvent être satisfaites des résultats obtenus : 5 pilotes du 2e degré, 7 pilotes du 1 er degré.

En mai, à l'issue de l'assemblée générale du club, le bureau change peu : président, Marcel Dayre ; vice-président, Robert Volmerange ; secrétaire général, Roger Ritoux-Lachaud ; secrétaire adjoint, Michel Trouilleur ; trésorier, André Dhorlac.

De 1935 à la Seconde Guerre mondiale

Les membres des Ailes bônoises, sur les avions du club ou sur les avions particuliers, font de nombreux voyages d'affaires ou d'agrément à travers toute l'Afrique du Nord mais ce sont Roger RitouxLachaud et Marcel Dayre qui retiennent le plus l'attention.

Le 14 août 1935, ils s'envolent tous deux, à 21 h 50, de l'aérodrome Jean- Tapie avec le " Phalène " (moteur Gipsy 105 ch, 260 I d'essence) de Marcel Dayre. Les deux hommes ont l'intention de réaliser le plus rapidement la liaison Bône- Casablanca et retour. La météo n'est pas fameuse ; ils survolent Philippeville à 22 h 35 et Blida à 2 heures du matin. Vers Orléansville, l'équipage rencontre de la pluie et du brouillard et une magnéto donne des signes de défaillance. Néanmoins, ils atteignent La Sénia à 4 h 30 du matin, après un vol de nuit sans escale de 775 kilomètres.

Après le plein d'essence effectué en six minutes, les ennuis de magnéto les contraignent à ne repartir qu'à 9 h 35 pour atterrir à Casablanca à 15 heures.

Ils prennent le chemin du retour à 15 h 40, mais la magnéto défaillante les oblige à se poser à Fez à 17 h 35 (247 kilomètres). Le 16, décollage à 10 h 30 pour Blida qui est atteint à 17 h 10 (792 kilomètres) et de 17 h 50 à 21 h 15, dernière étape vers Bône (450 kilomètres) où ils atterrissent sur le terrain éclairé tant bien que mal par quelques phares de voitures. La belle randonnée représente 3 000 kilomètres franchis en vingt-quatre heures et vingt-trois minutes dont neuf heures de vol de nuit.

Quelques jours plus tard, Roger RitouxLachaud et Pierre Dhorlac, procureur de la République à Beyrouth, effectuent un tour de la Tunisie en trois étapes, 1 200 kilomètres et huit heures de vol.

La fin 1935 voit se développer le mouvement " Pou du Ciel " auquel Bône ne reste pas étranger : Max Millot, architecte, construit le Pou no 99 en collaboration avec Philippe Pace (marchand de motos), les frères Bernardi et Charles Xuereb (" Charlot "), mécanicien de l'aéra-club. D'abord piloté par Max Millot, le Pou effectue quelques lignes droites, puis, enlevé par Marcel Dayre en 50 mètres, il effectue un premier vol entre 50 et 80 mètres. Peu de temps après, Marcel Dayre réceptionne en vol le Pou n° 121 des frères Kuonen (restaurateurs suisses), équipé comme le Pou de Max Millot d'un moteur Poinsard 35 ch et d'une hélice Chauvière.

Un vin d'honneur suit ce premier vol et Marcel Dayre félicite chaleureusement Max Millot et les frères Kuonen pour leurs réussites.

Le Pou des frères Kuonen ne volera pas longtemps ; en effet, un des frères qui n'était jamais monté en avion, ni comme élève, ni comme passager, s'avise, le 24 janvier 1936, de sortir l'appareil, de mettre le moteur en marche, de s'asseoir aux commandes et de décoller. Il arrive à prendre l'air en moins de 40 mètres, fait un premier tour de terrain à 60 m, puis un second tour et perd alors la tête, s'affole et écrase l'appareil dans un champ de vigne à proximité immédiate de l'aérodrome. Le pauvre Pou est brisé, à l'exception du gouvernail et de l'aile arrière et le pilote est blessé au menton, sa tête étant venu frapper le tableau de bord.

Le club continue son activité, de nombreuses personnalités sont transportées vers diverses villes d'Algérie et de Tunisie : MM. Munck, Deyron et Prunetti, délégués financiers, le député Joseph Serda et le docteur Pantaloni, maire de Bône. M. amar, directeur du célèbre cirque, vient de Tunis en pilotant lui-même son Caudron <‹ Luciole ".

Un nouveau membre arrive en décembre 1935 : Alex Perrichon, né à Bône en 1894, pilote depuis 1918, muté d'Oran à Bône comme conservateur des hypothèques (il est le frère du pilote de ligne Paul Perrichon). Il participera dorénavant très activement à la vie des Ailes bônoises.
En janvier 1936, un avion sanitaire Caudron " Pélican " destiné au club est ramené de métropole par Roger RitouxLachaud.

Le capitaine Arsac vient étudier sur place la possibilité de créer un centre d'entraînement pour les pilotes et observateurs de réserve de la région qui doivent se rendre régulièrement à Sétif pour effectuer leurs périodes. Les Ailes bônoises entretiennent d'ailleurs d'excellentes relations avec les équipages militaires qui viennent nombreux sur l'aérodrome : capitaines Bondson et Wasmer, lieutenant Domergue, adjudant-chef Ledda, sergent- chef Martin, sergent Grapoli...

Marcel Bouilloux achète un nouveau Caudron qui vient grossir la flotte basée sur l'aérodrome Jean-Tapie, alors que Marcel Dayre achète un Caudron "Aiglon " (baptisé " Kissou 2 ").

Le 8 mars 1936, l'assemblée générale de l'aéro-club entérine le départ de Robert Volmerange qui a pris, à Alger, la direction des Lignes aériennes nord-africaines et un nouveau bureau est formé : président d'honneur, Robert Volmerange ; président, Marcel Dayre ; vice-président, Roger Ritoux-Lachaud ; trésorier, Marcel Bouilloux ; secrétaire général, Alex Perrichon; adjoint technique, André Gallo.

Un nouveau terrain est en vue

A la fin de leur troisième année d'existence, les Ailes bônoises peuvent s'enorgueillir de résultats flatteurs : 22 pilotes brevetés, 2 000 heures de vol, 3 000 baptêmes de l'air, des voyages à Casablanca, Oran, Touggourt, Biskra, Tunis, Gabès, Alger et Paris, dont certains effectués de nuit, de nombreuses évacuations sanitaires avec le " Pélican " sanitaire (souvent piloté par Marcel Dayre, accompagné du docteur Marcel Taïeb).

Le grand projet est maintenant le futur aérodrome ; des études avaient été entreprises à l'époque d'Air Union par J. Breguet et le général Vuillemin mais rien ne fut décidé et le temps passa. Les Ailes bônoises relancent l'initiative et la 5e région reprend le projet qui reçoit l'agrément du ministère de l'Air.

La mise en service du nouvel aérodrome devient urgente car le club effectue maintenant une moyenne d'une centaine d'heures de vol par mois, de nouveaux élèves débutent : Devicq, Monpère, Haren, Galla, Borgeaud, Pierre Mariage, le docteur Amor et le futur président du club, Paul Albagnac, qui est breveté le 1 er octobre 1937.

Le centre aérien démarre son activité au profit des pilotes et observateurs de réserve : Marcel Dayre, André Dhorlac, Pierre Truchot, Roger Ritoux-Lachaud, Eparvier, Michel Trouilleur, Candas, Chalumeau, Rolland, Mathieu.

Le capitaine de réserve Truchot, président de l'Amicale des officiers de réserve de l'Armée de l'air du Constantinois, organise des rassemblements et des manifestations avec les centres voisins de Constantine et de Sétif.

En 1937, sous l'impulsion de Philippe Pace, est créé le "Modèle Air-Club de Bône" avec comme président M. Charpentier, directeur de l'Air-Liquide, aidé par Gaches, Robert et Lampe. Le Modèle Air- Club ne s'intéressera qu'aux modèles réduits et commence son existence en faisant une exposition réussie dans les vitrines des Galeries de France.

Du 10 au 18 janvier 1939, le club héberge Maryse Hilsz obligée de se poser à Bône avec son Caudron " Simoun " à la suite d'une panne de moteur entre Alger et Tunis.

En janvier 1938, avaient commencé les travaux du nouvel aérodrome de Bône- Les Salines, à 9 kilomètres de la ville, sur la route de La Calle. Il se verra doté de vastes hangars civils et militaires, d'un atelier de réparations, d'une station météo, d'un club-house et d'une piste de 1 200 m.

L'aéro-club des Ailes bônoises aurait pu avoir enfin des installations à la mesure de ses moyens et de son enthousiasme. Mais à la déclaration de guerre il est encore à l'Allélick où son hangar abrite deux avions-école, un avion sanitaire et huit avions privés. Ce matériel sera entièrement détruit à la suite de la mise en route malencontreuse d'un avion militaire qui viendra percuter le hangar et y mettra le feu.

Pierre JARRIGE.

N.D.L.R. - L'auteur et L'Algérianiste remercient MM. Marcel Fenouillet, Pierre Gassiot, Didier Germain et Philippe Pace, pour la documentation qu'ils ont aimablement communiquée.
Après une introduction ayant pour titre " Les débuts de l'aviation civile en Algérie" (L'Algérianiste, no 30, juin 1985, p. 30), Pierre Jarrige a entamé une rétrospective des aéro-clubs d'Algérie, depuis les origines (1909) jusqu'à 1962. On trouvera dans L'Algérianiste les articles suivants :
- " Aéro-club de Bougie-Soummam " (no 32, déc. 1985, p. 15).
- " Aéro-club de Blida-Mitidja " (no 33, mars 1986, p. 11).
- " Club aéronautique de Tiaret " (no 34, Juin 1986, p. 18).
- " Aéro-club de Djidjelli " (n° 35, sept. 1986, p. 17).
- " Club aéronautique de Saïda " (no 36, déc. 1986, p. 8).