Alger, Algérie : vos souvenirs
La page de Jean-Paul Ballester
Souvenirs d'Enfant. Ma placette du Boulevard Gambetta
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mise sur site le 3-11-2004

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ddu balcon du 4ème étage, du 20 boulevard Gambetta.
du balcon du 4ème étage, du 20 boulevard Gambetta.
Souvenirs d'Enfant. Ma placette du Boulevard Gambetta.

--------------Au balcon du premier étage de mon immeuble situé au 20 Boulevard Gambetta, mes yeux d'enfant scrutent, en surplomb du marché de la Lyre, la mer avec le passage de gros bateaux. Parfois on entend, par temps de brume, sonner la corne du port .
--------------Que de souvenirs de ce balcon où j'ai pu observer au loin cette mer Méditerranée imaginant de l'autre côté la France.
--------------Regarder les enfants du quartier, de toutes confessions, jouant sur cette placette au ballon, à des parties de noyaux ou de billes pour les garçons sans oublier les gendarmes et les voleurs. Les filles avaient une préférence logique pour l'époque, c'était de jouer à la corde à sauter , à la marelle… Bien sûr, il m'est arrivé souvent de rejoindre les copains sur cette placette pour disputer une partie de billes ou de foot, mais mon lieu privilégié, jusqu'à 7-8 ans, était tout de même mon balcon, une sorte d'observatoire, où je trouvais un réel plaisir à regarder vivre les gens du quartier ou plus exactement ceux entourant cette placette.

--------------Je me souviens de la famille BONICI au numéro 16, le père Alphonse avait une Aronde Simca, il m'avait emmené plusieurs fois avec ses enfants à la plage. Les BONICI cousins de ma voisine de palier , Anna MARIE, voisine qui n'était autre que ma marraine. Toujours au 16, Madame CASTELLANO qui tenait toujours un brin de causette avec ma maman en remontant du marché de la Lyre. Juste en face du numéro 16, de l'autre côté de la placette, au coin d'une rue entrant dans la Casbah , le crémier Monsieur LARBI avec sa djellaba , son turban où je me rendais pour acheter du beurre fraîchement sorti de la baratte ainsi que du lait. Un peu plus loin , en bas des marches arrivant sur une autre placette, la boulangère où en revenant de l'école Mailhes ma mère m'achetait pour mon quatre heures un petit pain au chocolat.
--------------Mais revenons sur ma placette, dans mon immeuble du 20 boulevard Gambetta. En entrant sur la droite Mustapha (facteur de son métier) , sa femme Miryèm et ses enfants m'invitaient souvent à venir chez eux regarder la télévision et en particulier des films égyptiens que je trouvais superbes. De l'autre côté la concierge: Fatima qui m'invita à la cérémonie de mariage de sa fille; Un grand jour pour moi, petit garçon de confession catholique, au milieu de ces femmes de confession musulmane, plus belles les unes que les autres enfermées dans une pièce avec des enfants sans la présence d'hommes pour faire la fête. Oui plus belles les unes que les autres dans des habits différents dont certains étaient brodés de perles, des bijoux autour des poignets, des chevilles, de magnifiques boucles d'oreilles, des pendentifs… un peu comme dans les films égyptiens que je regardais chez Mustapha. Soudain une femme se mit à danser en ajustant un foulard autour de ses hanches, puis d'autres …
-------------Cela a été un moment inoubliable pour moi, j'ai gardé en moi cette merveilleuse image qui m'a donnée beaucoup plus tard, dans ma profession artistique, la notion des couleurs et du rythme féerique du spectacle. Dans l'immeuble il y avait les familles ROUFFIE, NACACHE, SAINT MARTIN, CHOURAQUIE sans oublier Odette SOULIER au quatrième étage, la copine d'enfance de ma mère, Elle a été de tous les événements de la famille.
--------------Dans l'immeuble voisin , au 18, je me souviens d'une fille (Henriette je crois) de quelques années plus âgée que moi avec qui j'ai fait un tour d'autos tamponneuses au square Guynemer -Laferriere, il y avait Pierre Michel avec qui je jouais sur la placette, Madame et Monsieur NEBOTTE au premier étage chez qui ma mère allait très souvent et bien d'autres personnes jeunes et moins jeunes de cet immeuble et des autres immeubles entourant la placette dont les noms échappent à ma mémoire mais dont les visages me sont restés gravés.

--------------Sur cette placette, il y avait la venue du marchand ambulant de " calentita " où en peu de temps sa plaque se trouvait vidée pour quelques francs par les gamins du quartier dont je faisais partie. Un peu plus haut au coin du boulevard Gambetta et de la rue Montpensier le marchand de beignets avec une boutique regorgeant de gâteaux de toutes sortes en période de ramadan. A son ouverture le soir, au coup de canon, nous étions des dizaines à nous précipiter dans la bousculade pour nous approvisionner. Une vie de quartier ordinaire où les habitants étaient aussi bien attachés à effectuer leurs courses chez les commerçants du boulevard que chez les commerçants de la rue Montpensier : Charcuterie ORTUNIO, l'alimentation SEGURA, etc. Ou encore chez ceux de la rue Rovigo face au square Montpensier. Square où mon père allait jouer aux boules.

--------------Un quartier peuplé de gens simples, de confessions différentes, dotés d'une puissante richesse intérieure et d'un humour se mariant magnifiquement bien avec les saisons , un petit peuple d'amis occupant son espace par la gesticulation des mains, des bras, par la portée de la voix et des rires. Je me souviens encore que lorsqu'on devait sortir de ce " quartier Gambetta, Montpensier, Rovigo " pour se rendre rue Michelet, rue d'Isly,… on disait on va en " ville ", alors il faut bien s'habiller.

Jean Paul Ballester.