Alger lutte pour résoudre le douloureux problème des bidonvilles et de la casbah

110 bidonvilles
8.000 baraques
35.000 habitants

Tel est l'aspect du " phénomène Bidonville " à Alger. Cela n'a rien de comparable avec les bidonvilles géants de Casablanca ou de Tunis, mais compte tenu de l'accroissement très rapide de la population, le problème demande à être traité de toute urgence.

--------Extrait de l"Alger-Revue", mai 1955. Merci à Pierre Chatail qui m'a adressé les documents.
mise sur site le 10-12-2006
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110 bidonvilles
8.000 baraques
35.000 habitants

Tel est l'aspect du " phénomène Bidonville " à Alger. Cela n'a rien de comparable avec les bidonvilles géants de Casablanca ou de Tunis, mais compte tenu de l'accroissement très rapide de la population, le problème demande à être traité de toute urgence.

Un musulman sur 4,5 habite en bidonville, dans des conditions d'hygiène et de promiscuité lamentables.

Il paraît inutile de décrire ces baraques de vieilles planches disjointes et de tôles rouillées, où se pressent des familles de 8 ou 10 personnes sur une surface de 6 ou 7 mètres carrés.

La chaleur étouffante de l'été, le froid en hiver, la pluie, l'absence de commodités (égouts, eau, électricité) donnent à la moindre perturbation atmosphérique l'ampleur d'une catastrophe.

Souvent, les baraques sont établies sur des terrains en pente, argileux, glissants, propres aux éboulements. Une forte pluie provoque des inondations qui entraînent sur leur passage les baraques et leur contenu. L'incendie est un fléau aussi fréquent.

Dans de telles conditions de vie, l'épidémie est reine. Ce sont les enfants qui en pâtissent surtout.

Le plus dur pour ces pauvres gens, est sans doute l'indifférence et l'exploitation dont ils sont victimes.

On penserait que ces miséreux ont pu au moins édifier leur case comme ils le voulaient.

Non. Déjà conditionnés à l'excès par le milieu physique et économique où ils sont inscrits et qui les écrase, ils sont exploités honteusement par quelques individus qui, au mépris des droits les plus élémentaires de l'humanité, ont fait profession de rançonner les pauvres gens.

Certains propriétaires ou locataires de terrains exigent des loyers énormes allant jusqu'à 3.000 francs par mois pour des baraques qu'ils n'ont même pas édifiées eux-mêmes. Les pas de porte se vendent plusieurs dizaines de milliers de francs. Certains de ces "caïds" se font des revenus de 200.000 francs par mois. L'un d'eux a volé aux pauvres plus de 10.000.000 en cinq ans.

Les pauvres gens qui sont obligés d'en passer par de telles conditions, ne gagnent que 15.000 à 20.000 francs par mois, quand ils ont du travail, et doivent s'endetter pour conserver leur pauvre gourbi.

Dans ces conditions, on se demande comment les gens de la campagne peuvent être tentés par la grande ville.

Pourtant, la ville est le seul endroit où un homme non spécialisé ait des chances de gagner quelque argent en déchargeant des navires ou les colis des halles.

En ville, les enfants sont rentables, ils peuvent cirer les chaussures, vendre des journaux.

Enfin, à Alger, les pauvres gens peuvent bénéficier de l'assistance médicale gratuite et même d'une assistance matérielle (la Commune distribue de 100.000 à 130.000 repas par mois dans 9 centres, situés dans les quartiers les plus pauvres).

Dans ces conditions, il serait inhumain de prendre des mesures de coercition pour empêcher toute immigration. D'ailleurs, l'immigration ne représente que 1,5 % sur les 4 % d'accroissement annuel de la population musulmane.

La seule solution est que les possibilités de travail en ville croissent au rythme de l'accroissement de la population, qu'une mise en valeur des terres de l'intérieur retienne dans leur douar les éventuels clients des bidonvilles d'Alger.

Cela est du ressort de la planification et de l'industrialisation de l'Algérie et intéresse le pays tout entier. Nous croyons savoir que M. le Gouverneur Général s'y intéresse profondément.

La Ville, de son côté, a fait vivre des milliers d'ouvriers en créant des chantiers de chômage et surtout en donnant à l'industrie du Bâtiment un essor jusqu'alors inconnu. II y a 3.000 ouvriers sur les chantiers de Mahçoul, Saâda, Climat-de-France. Grâce à eux, depuis près de deux ans, 20.000 personnes peuvent vivre plus décemment.

Parallèlement, un très gros effort a été entrepris pour effacer les bidonvilles les plus criards en remédiant aux injustices dont nous avons parlé.

Des cités de recasement dotées d'égouts, d'eau, de W.C. publics et d'électricité ,abritent plus de 6.000 personnes.


Une cité de recasement, la Cité Legembre. Ces réalisa
tions pour louables qu'elles
soient, ne peuvent constituer que des solutions transitoires.

630 logements à normes réduites ont été édifiés à Mahçoul, pour abriter décemment la population la plus défavorisée.

Avant même que soient terminées les cités qui ont fait d'Alger la ville-pilote du logement, d'autres programmes sont mis en route avec des moyens encore accrus pour aller plus vite que la natalité, et que bientôt chaque famille vive heureuse dans un logement clair.

C'est toujours au même problème que s'attaque le programme géant de la cité du Climat-de-France, où 4.000 logements abritant 25.000 personnes permettront de décongestionner cet autre bidonville qu'est la Casbah.

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La Casbah d'Alger. -- Un nom de légende... mais aussi un quartier où, sur 15 ha, vivent 42.000 habitants.
La Casbah d'Alger. -- Un nom de légende... mais aussi un quartier où, sur 15 ha, vivent 42.000 habitants.

Là, 42.000 personnes se pressent sur 15 hectares, dans des maisons anciennes où chaque chambre abrite une famille nombreuse (5,75 personnes par logement, en moyenne). Les quartiers avoisinants sont également surpeuplés; les conditions d'hygiène et la promiscuité y sont pires que dans les bidonvilles.

Même 6.000 personnes qui n'ont pu trouver à se loger à l'intérieur, ont édifié leur bidonville sur les terrasses de la Casbah. En décongestionnant et en nettoyant la vieille ville musulmane qui est un des joyaux d'Alger, la Municipalité entend redonner au tourisme la place qu'il doit avoir dans l'économie de la cité.

Ainsi, en prenant pleine conscience de tous les problèmes qui ont compliqué à l'extrême la situation économique et sociale, Alger entend retrouver et redonner au pays dont l'activité est liée à la sienne, un équilibre dynamique, source de paix et de prospérité.

 

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Répartition des bidonvilleset des cités de recasement

Répartition des bidonvilleset des cités de recasement