La contribution des hôtels "Transat" au tourisme algérien.
par Louis Robin

Société des voyages et hôtels nord-africains

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LISTE DES HOTELS DE LA S. V. H. N. A.
LISTE DES HOTELS DE LA S. V. H. N. A.
EN AFRIQUE DU NORD

Algeria et l'Afrique du nord illustrée, revue mensuelle, noel 1961, n°61.Édition de l'Office Algérien d'Action Économique et Touristique (OFALAC), 26 bd Carnot ou 40-42, rue d'Isly, Alger
mise sur site le 13 -12-2005...+janv. 2017

Echo d'Alger du 28-7-1923- Transmis par Francis Rambert
janv. 2017
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le port en 1910
Alger, tel que le voyaient, en 1910, les touristes qui visitaient l'Algérie. Le building du Gouvernement général, l'Hôtel Aletti, le nouvel hôtel de ville n existaient pas encore ; les actuelles gares maritimes non plus : des pontons de chalands reliaient les navires aux quais. Voici, aux appontements de la Transat et de la Mixte, les ancêtres du " Ville-de-Tunis " et du " Kairouan "

--------POUR dresser une sorte de bilan du tourisme algéro-saharien, il est nécessaire de se reporter d'abord au début du siècle, avant la première guerre mondiale. A cette époque, les Anglais hivernent à Mustapha-Supérieur, quartier résidentiel d'Alger qui compte plusieurs hôtels confortables, parmi lesquels le célèbre Saint-George. Ils y séjournent plusieurs mois, réservant leurs appartements longtemps à l'avance.
--------La reine Victoria et le prince de Galles, futur Edouard VII, fuyaient l'hiver les brumes de leur île, pour aller à Nice ou à Biarritz. Leurs sujets suivaient leur exemple illustre en s'essaimant dans le bassin méditerranéen et sur le rivage atlantique. La Côte d'Azur, la Côte basque, l'Algérie, l'Egypte, les Canaries même recevaient la visite d'innombrables majors Thomson type 1900. Le Maroc lui-même, grâce à Lyautey, entrait dans le concert des pays à vocation touristique.
--------Les Britanniques eurent des émules parmi les Nordiques, les Belges, les Suisses et les Allemands. Et quelques citoyens de la grande République nord-américaine firent de timides apparitions, promesses d'apports plus importants dès que l'invitation au voyage aux pays du soleil pourrait les atteindre en grand nombre
--------En 1904. II y a cinquante-sept ans, je prenais contact avec la Compagnie générale Transatlantique et avec son secrétaire général Dal Piaz.
--------Dal Piaz était entré à la Transat en 1888, à vingt trois ans en qualité de secrétaire du président Eugène Pereire. Chef né, ayant une connaissance aiguë des services complexes d'une exploitation maritime qu'il a promptement assimilée, John Dal Piaz était un homme séduisant, d'une distinction rare de grand seigneur, un incomparable cerveau qui allait donner quarante années de sa vie à la France africaine.
--------En 1904 déjà, il était en fait le " Patron ", avec tout ce que ce mot affectueux comporte de tendre admiration et de dévouement total. Pour beaucoup de gens en rapport avec elle, la Transatlantique, c'était Dal Piaz.
--------Me proposant de lui exposer mes idées et mes espoirs quant aux possibilités de développement du tourisme en Afrique du nord, j'eus la surprise de constater combien il était averti du sujet et que sur de nombreux points nos vues étaient communes.
--------Et cependant, notre conversation fut pratiquement sans suite dans l'immédiat.

*****

--------Le 11 novembre 1918, je suis dans le bureau du directeur général de la Transat, John Dal Piaz. C'est l'Armistice.
--------Des fenêtres, nous contemplons toute une ville en délire. La rue Auber noire de monde. Cris de la foule en liesse : " Vive Foch ! ", " Vive Clemenceau ! ". Des cortèges se forment : drapeaux, bannières. Les gens, sans se connaître, s'embrassent, pleurent de bonheur; 40 000 personnes se pressent place de l'Opéra où, tout à l'heure, Noté et Marthe Chenal, drapeau tricolore déployé, vont chanter la " Marseillaise ".
--------Nous aussi, larmes aux yeux, nous nous mêlons à la foule, pas à pas, bien péniblement tentant le passage, nous dirigeant vers le domicile de Dal Piaz, rue de Téhéran.
--------Boulevard Haussmann, on peut circuler un peu plus commodément... on peut parler. Nous voici à l'angle de la rue Tronchet, devant le magasin des Tortues - je m'en souviens comme d'hier. Et là - l'idée venait de mûrir au milieu de tous ces cris, de ces transports de joie, - tout à coup, sans aucune préparation, Dal Piaz de me dire : " Si nous reprenions votre idée d'avant guerre... On pourrait faire une caravane d'invités d'Alger à Marrakech... On verrait ensuite à exploiter cela commercialement... Réfléchissez... Venez donc demain m'en parle . "
--------Demain! Voilà le beau cerveau créateur qui va, à point nommé, entreprendre sur la terre d'Afrique la mise en valeur de son capital touristique, et son lancement près de la grande clientèle internationale. Dix jours après, je parlais pour un premier voyage d'êtudes, dans le plus grand secret. Quelques hautes personnalités étaient dans la confidence d 'un vague projet de caravane de la Cie Générale Transatlantique, sens autre précision. Seuls, les gouverneurs généraux Lutaud et Jonnart, le directeur de l'Agriculture, du commerce et de la Colonisation, Charles Brunel (futur maire d' Alger) et le général Lyautey, surent que nous tentions une oeuvre d'avenir.
--------Mais, préalablement, devaient etre résolus les épineux problèmes du logement et des transports, et j'étudiai particulièrement les solutions qui pouvaient être envisagées.
--------Je trouvai le Maroc en pleine effervescence. A Marrakech existait encore un marché d'esclaves. À Taza, les coups de fusil claquaient la nuit sur la Maison des hôtes, alors que je dressais les plans du futur hôtel que je devais soumettre au " Patron ".
--------J'entendais m'inspirer des enseignements sur le tourisme américain rapportés des U.S.A. par Pierre Chabert, dont l'étude était mon livre de chevet. j'étais guidé aussi par l'expérience du cher et grand Rondet-Saint, qui avait acquis une grande expérience du tourisme " colonial " au cours de ses voyages. Enfin, je ne saurais dissimuler l'aide précieuse q u e m'apporta M. Charles Lutaud, alors gouverneur général de l'Algérie, qui se passionna pour mon oeuvre dont il suivit en détail l'évolution, même après qu'il eut quitté son haut poste.

*****

--------En vérité, ce ne fut qu'à mon deuxième voyage en Algérie - Tunisie - Maroc que les choses se précisèrent. Que de concours précieux s'offrirent, dans un même élan d'amour pour cette France africaine - que le visionnaire de génie Prévost-Paradol avait définie, qui allait bientôt, grâce à la Cie Transatlantique, être portée au premier rang, dans le monde, en cette industrie toute nouvelle du tourisme.
--------A Ténès, grâce à M. Lauprêtre, maire et conseiller général, fut déterminée dans les pins, au bord de la mer, l'installation d'un camping, premier village de toile, une forme de tourisme estival fort à la mode aujourd'hui !
--------J'avais la pleine confiance de Dal Piaz. Il adopta mon village de toile, dont j'avais puisé l'idée dans le livre de Chabert, qui en avait souligné !a pleine réussite aux Etats-Unis.
--------Nous avions choisi Alger-Oran par le littoral comme la meilleure route touristique, après avoir, avec le comte Charles de Polignac, alors président de la Fédération des Syndicats d'initiative d'Algérie, écarté celle du Chélif et du Sersou.

--------A Tlemcen, mon ami le célèbre arabisant Alfred Bel, que je fus si heureux de retrouver assumant la présidence du Syndicat d'initiative, épousa tout de suite mon point de vue : à Tlemcen, perle d'Islam dans un jardin de Touraine, c'est au milieu des cerisiers, des ceps qui donnent ce vin chaud et velouté de Mansourah, qu'il fallait construire un hôtel comme ceux que Rondet-Saint préconisait pour en avoir tant admiré à Java. " Laissez-moi chercher ", avait dit Alfred Bel.
--------Et quand je repassai, il avait trouvé... le plus beau terrain qui puisse être, en pleine position touristique, devant Sidi-bou-Medine accroché tout en face sur la mystique colline, sur la route même qui mène au saint marabout, tout près du va-et-vient incessant des musulmans se rendant le vendredi à ce poétique cimetière.
--------Alfred Bel avait aussi trouvé le plus généreux des propriétaires, qui vendit son terrain seulement à cette condition : l'édification d'un hôtel de tourisme où flotterait au faîte le pavillon blanc à la lune rouge de la Compagnie générale Transatlantique. Dal Piaz avait la baraka.
--------Partout, nous eûmes cette préoccupation primordiale : faire un hôtel de tourisme, donc le situer en pleine position touristique; qu'il soit adapté au caractère touristique de la ville ou du site. Ce programme avait tout de suite la sympathie de tous : " Vous prenez les choses par le petit bout, m'écrivait Charles Lutaud, c'est-à-dire par le bon bout. Toutes les fois que dans mon cabinet, à Alger, j'ai reçu des personnalités venant m'entretenir de projets de vastes palaces, j'ai prédit l'échec complet. "
--------Si André Citroën, quand il pensa, quelques années plus tard, équiper le Sahara, s'était inspiré des mêmes données, qui semblent absolues dans le domaine du tourisme africain, il n'aurait pas eu a enregistrer un échec.
--------La création d'un hôtel Transat à Fès mériterait à elle seule de longs développements que je me dois d'écarter car ils dépasseraient singulièrement le cadre de cet article. Je dirai simplement qu'elle fut une réussite audacieuse car il s'agissait de l'installer en pleine Médina, dans une demeure seigneuriale jusqu'alors réservée aux femmes, située dans un quartier pratiquement interdit aux chrétiens. Elle put être menée à bonne fin grâce à l'intervention éclairée du général Lyautey. De sorte qu'un palais ligne des contes des Mille et Une Nuits devint hôtel Transatlantique.
--------L'histoire de l'hôtel Transatlantique de Meknès ne le cède en lien - en pittoresque et en audace - à celle du palais Jamaïe de Fès.

--------Même formule à Meknès qu'à Tlemcen : la préfabrication, les pavillons démontables s'inspirant de ceux que j'avais vus à la foire coloniale de Bordeaux. Ma conception était donc celle du "bungalow-system " que Rondet- Saint avait rencontré à Java et qu'il vantait dans ses ouvrages: hôtel extensible qu'on améliore en dur,petit à petit, suivant les nécessités et le succès de l'exploitation.

-------L'hotel Transatlantique de Meknès accuse aujourd'hui un long succès qui ne s'est jamais démenti même au cours des dures années de la crise. C'est qu'il pouvait compter, outre sa clientèle de touristes, sur une clientèle locale qui s'est faite de plus en plus importante, avec le développement de la ville nouvelle, comme nous l'avions pressenti.
--------Les contemporains de cette époque, dite héroïque et historique du Maroc, n'ont pas oublié le prodigieux spectacle du long ruban d'arabas, de charrettes arabes, attelées de mules et se déployant sur 230 kilomètres, du port de Casablanca jusqu'au coeur du Maroc, à Meknès. C'était l'hôtel Transat du président Dal Piaz qui passait morceaux par morceaux : bâtiments, mobilier, jusqu'aux petites cuillères, tout ce matériel immense et divers qui constitue un hôtel.
--------Le président fonçait sur l'obstacle, et nous suivions tous, entraînés par cette foi, cette entière confiance, cette divination, ce... chic, si français. Car Dal Piaz gardait toujours cette tranquille assurance, cette distinction suprême d'un lord, sûr de son destin.

-------A Rabat, l'hôtel Transat se situa près de la Casbah des Oudaïas, encore en pleine position touristique, près du fameux caouadji où l'on sirote le thé à la menthe, dans ce décor incomparable de l'embouchure du Bou-Regreg, devant la blanche Salé, en la compagnie des cigognes.

--------A Casablanca, ville moderne, c'est un hôtel moderne, en plein centre, qui fut réalisé. Toutes les fines gueules de Casa s'y donnaient rendez-vous.
--------Le général Lyautey ayant stipulé, dans le cahier des charges de la Société concessionnaire des transports sur routes au Maroc, l'obligation de construire un hôtel de tourisme à Marrakech, ma demeure arabe à Bab Doukala, dans la Medina, près des souks, fut une solution d'attente pour les touristes de la Compagnie générale Transatlantique. Et quand surgit de terre, dans son jardin des Hespérides, le palace, magnifique entre tous, qu'est la Mamounia, aujourd'hui de renommée mondiale, il entra, en tant que gérance, dans le cycle des hôtels Transatlantique.
--------Avec Taza et Oujda, la route, au Maroc, était équipée sur les talons des soldats.

ALGER - BISKRA - TUNIS

--------SUR le conseil de M. Faralicq, de la Direction des services d'exploitation du chemin de fer P.L.M., nous nous abouchâmes avec la Société des Transports autamobiles industriels et commerciaux, affiliée à Renault, qui assura, après étude que nous fîmes sur place avec un de ses inspecteurs, un service de tout premier ordre, absolument impeccable, bien digne de la grande Compagnie de navigation française qui prenait sur terre, comme en mer, la pleine responsabilité du confort de ses grands clients anglo-saxons. Les touristes français qui les accompagnaient devaient être fiers de montrer aux étrangers que la France se plaçait, en Afrique du nord, à la tête de l'industrie nouvelle du tourisme.
--------Ce fut un éclatant succès. La Transat pouvait faire valoir à un passager qui prenait son billet à San Francisco pour l'Europe et, curieux d'un pays extraordinaire de couleur et d'orient, qui s'ouvrait au tourisme, qu'il était assuré, à la date choisie, de trouver, partout sur son parcours, sa chambre avec bains, claire et gaie, dans un cadre d'intérêt et d'agrément toujours renouvelé, et toujours sous la garantie du même pavillon : sur le bateau, en car, à l'hôtel. Bon gîte et bonne table. Bonne table ! Là, ce fut une révolution.
--------A part quelques établissements : à Alger, Biskra, Tunis, qui recevaient la clientèle des hiverneurs avant la première guerre mondiale, ce n'était, en Algérie, en Tunisie, que méchantes auberges. Au Maroc, tout était à créer. Pour accomplir un voyage - d'exploration - en Afrique du nord, il fallait donc avoir le coeur et... l'estomac solides.
--------C'était une des plus grondes préoccupations du président Dal Piaz. On sait la réputation mondiale de la cuisine sur les lignes de navigation françaises ; elle ne devait pas démériter sur les auto-circuits nord-africains. Pour ce faire, le président Dal Piaz trouva la bonne porte où frapper : la Société des cuisiniers de Paris. Il n'engagea que des professionnels, de véritables chefs, qui surent en Afrique prêcher d'exemple. Le réseau des hôtels Transatlantique fut le point de départ d'un heureux changement : aujourd'hui, on mange bien en Afrique du nord.
--------La conception était donc celle du billet forfaitaire, tout compris, les boissons seules étant décomptées à part. C'était aussi beaucoup et en somme normal de trouver, sur les confins du désert, une bonne bouteille de vin d'Algérie, mais encore toute la gamme des grands vins français. Et certes, pour que l'euphorie soit complète, rien n'est plus indiqué que de sabler le champagne au Sahara.
--------Avant que de pousser plus loin au Sahara, il fallait équiper la route Alger - Biskra - Tunis, compléter le circuit algéro-marocain par le circuit algéro-tunisien et pousser une pointe sur Biskra et sur Touggourt.

Nous nous en ouvrîmes au président. La réponse fut comme l'éclair d'une lame : " M. Robin, pas de mégalomanie. " Rien à répliquer ! Mais encore un trait de Dal Piaz : l'idée avait porté. II avait réfléchi et finalement il acceptait la suggestion, puisque moins de dix jours après - c'était en plein mois d'août il nous appela et
nous dit pour la deuxième fois le Partez qui nous comblait de bonheur. Et ce ne fut plus qu'un jeu d'équiper Alger - Constantine - Biskra - Tunis, forts de l'expérience acquise sur la route Alger - Marrakech, ayant derrière soi, en puissance, l'organisation automobile toute préte à accroître ses services.
--------Mais pouvait-on concevoir de ne pas étendre les possibilités du grand tourisme international à cette rocade merveilleuse complétant Alger - Marrakech, de la traversée du Djurdjura, avec la vision extraordinaire du pays kabyle, par ses crêtes impressionnantes et ses grands peuplements de chênes-liège jusqu'à Bougie couchée dans son golfe d'azur. Chemin faisant, nous déterminions une étape en pleine montagne, à Michelet : autre formule, celle d'un hôtel alpestre.

Puis Bougie, point de départ de cette corniche, qu'on dit être la plus belle de la Méditerranée, qui conduit à Djidjelli. Chemin faisant, les fameuses gorges du Chabet el Akra. L'étape de Constantine demandait une importante installation, de par son intérêt touristique unique et sa situation sur le chemin du Sud Constantinois. Pour la première fois, le président Dal Piaz hésita, à notre proposition de l'achat, qui était alors possible, du principal hôtel de !a ville, notre idée étant d'y réserver un ou deux étages à nos touristes et de bénéficier du rapport d'un établissement travaillant toute l'année " ... Je ne suis pas hôtelier ", nous avait répondu le président. II préféra faire son hôtel Transatlantique avec affectation exclusive pour ses touristes.
--------Sur le chemin de Tunis, un hôtel touristique : Les Chênes, en pleine forêt de Kroumirie. Sur celui de Biskra, un hôtel à Batna, à proximité de Timgad. Dans le massif de l'Aurès, si cher au gouverneur général Lutaud, la Transat devait, un peu plus tard, exploiter pour ses touristes les bordjs qui y avaient été aménagés dès 1917, en pleine guerre, par le gouverneur général lui-même : " Riposte ironique et française aux plans de l'Allemagne elle avait prémédité l'insurrection, tablant sur l'éloignement moral d'une région choisie. Nous répondions en y inaugurant le tourisme. "
--------Lutaud, promoteur du tourisme algérien, se rencontrait avec Dal Piaz, comme Lyautey, promoteur du tourisme marocain, avait vu venir à lui le constructeur audacieux qui devait impérissablement marquer son nom dans les fastes de la colonisation.
--------La route de l'Est : Alger - Tunis, devait se compléter bientôt, avec l'antenne Constantine - Biskra - Touggourt, par l'équipement de la Tunisie, qui offre aux touristes d'autres impressions d'Orient non moins émouvantes, mais totalement différentes de celles du Maroc et de l'Algérie. Le réseau des hôtels Transatlantique ne s'arrêta qu'au désert, au pied des dunes, dans les casis du Djérid aux dattes de miel et que Mme Myriam Harry a si bien chantées.
--------Bientôt subjugué par l'incomparable féerie saharienne, le président Dal Piaz confiait au commandant de La Forge, Saharien de l'école des Vuillemin, des Weiss, des Meynier, des Lehuraux, l'équipement de la boucle du Grand Erg. De très bons hôtels à Béni-Abbés, à Timimoun, à El-Goléa, à El-Oued, à Touggourt, à Laghouat, à Ghardaïa, complétaient en 1928 un réseau de 44 hôtels Transatlantique de tourisme en Algérie, Tunisie, Maroc et Sahara.
--------Sur les routes circulaient à plein les autocars, d'octobre à juin, et sur les pistes c'étaient les six roues qui franchissaient les dunes d'or.
--------II était possible d'emprunter une voiture particulière et de déterminer un itinéraire de son choix, comme aussi d'effectuer le voyage dans sa propre voiture en utilisant toute l'organisation Transat. Tels étaient les auto-circuits nord-africains. Telle fut la réalisation impériale du président Dal Piaz," œuvre à laquelle il apporte, disait André ChevrilIon, avec la volonté organisatrice et patiente d'un vrai chef, une ferveur particulière parce qu'elle est une création de son patriotisme français ".
--------Ce grand Français fut un de ces héros de l'intelligence constructive, a dit Louis Forest. " Son goût d'agir, d'entreprendre, de " lancer ", d'être le premier, a été tout bonnement admirable. "
--------Le président Dal Piaz mourut en 1928, quand son oeuvre avait atteint son apogée. Il avait, peu de temps auparavant créé la société des voyages et hôtels nord-africains, à qui fut confiée la gestion des hôtels Transatlantique.
--------Deux ans après sa mort, la crise économique gagnait l'Europe et l'Afrique du nord après avoir pris naissance en Amérique. Le mouvement touristique fut particulièrement frappé, et l'hôtellerie avec lui. La dernière guerre acheva ce que la crise avait commencé.
--------La S.V.H.N.A. connut des heures difficiles qui exigèrent des sacrifices. Des hôtels furent vendus. Les hôtels Transatlantique du Maroc passèrent aux mains de la Compagnie des Chemins de fer marocains, qui en a continué l'exploitation.
--------Mais la S.V.H.N.A. réussit, malgré bien des vicissitudes, à sauvegarder l'oeuvre algérienne du président Dal Piaz. Les touristes ont encore à leur disposition les hôtels Transatlantique qu'il a créés à Bou-Saâda, Constantine, Tlemcen, Biskra, Touggourt, Ghardaïa, El-Goléa. Celui de Ténès est provisoirement retiré du circuit, mais l'on peut espérer que lorsque la paix reviendra le premier hôtel Transat créé en Algérie retrouvera sa destination.
--------Les hôtels de Bou-Saâda et de Ghardaïa ont été agrandis et modernisés, comme a été rénové récemment celui de Touggourt.
--------A Colomb-Béchar, à l'une des extrémités de la splendide vallée de la Saoura, a été construit un hôtel Transat et Ouargla aura bientôt le sien, et cela au moment même où l'Algérie connaît les heures les plus cruelles de son histoire.
--------L'oeuvre de Dal Piaz a donc survécu à de nombreux bouleversements, et il convient d'en rendre hommage à ce grand visionnaire, qui sut imposer ses vues et sa volonté créatrice à tous ceux qui furent ses collaborateurs et ses amis et qui, comme moi, gardent à sa mémoire un souvenir fidèle et reconnaissant.