Maison-Carrée
texte adapté de " Contribution à l'étude de la vulnérabilité urbaine au risque d'inondation dans un contexte de changement climatique - Cas de la Vallée de l'Oued El Harrach à Alger "
Contrer les risques d'inondations

Damien Conaré : "....rédacteur en chef de la revue Courrier de la planète, je me permets de vous contacter dans la mesure où nous préparons un prochain numéro consacré aux changements climatiques avec un dossier sur le bassin méditerranéen. Nous publions notamment une contribution de Mmes Ewa Berezowska-Azzag et Nadjet Aroua (Ecole nationale supérieure d'architecture d'Alger) à propos des crues de l'oued el harrach. J'ai vu sur votre site une très belle reproduction de carte postale ancienne intiulée "maison carrée : le vieux pont de l'harrach". Elle viendrait utilement illustrer cet article.(note du site: j'ai fait parvenir la carte)

sur site le 13-12-2009...déplacé ici en avril 2018

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Il s'agit de cette carte...

Note du site.- J'ai reproduit ci-dessous une partie du texte. Pour l'ensemble et les illustrations , se reporter au PDF.Cliquez ici
Plus ou moins déjà évoqué , en 1960, dans :" Une tache dans le grand Alger, L'HARRRACH - parfois fleuves aux crues désastreuses, le plus souvent pestilentiel égoût ....Voir ici

texte adapté de " Contribution à l'étude de la vulnérabilité urbaine au risque d'inondation dans un contexte de changement climatique - Cas de la Vallée de l'Oued El Harrach à Alger ", présenté au 5th Urban research Symposium, Marseille, 28-30 juin 2009. www.urs2009.net

Avec des inondations dont on prévoit qu'elles seront plus fréquentes à l'avenir, la vallée de l'oued El Harrach, en banlieue d'Alger, sera particulièrement exposée. Sans compter que l'urbanisation qui s'y est développée selon des modes inappropriés contribue pour beaucoup à accentuer la vulnérabilité de cette zone. Des plans d'aménagement urbain plus pertinents s'imposent donc, où l'eau excédentaire deviendrait une opportunité plutôt qu'une menace.

Alger
Contrer les risques d'inondations

NADJET AROUA & EWA BEREZOWSKA-AZZAG
Ecole normale supérieure d'architecture d'Alger*

Selon les modèles de projection climatique, à horizon 2020, l'Algérie connaîtra une réduction des précipitations de l'ordre de 5 à 13 %, alors que la température augmentera de quelque 0,6 à 1,1 °C. Le pays connaît déjà une accentuation des sécheresses et donc l'aggravation des phénomènes de désertification, salinisation des sols, pollution des eaux superficielles et par conséquent une dégradation progressive des ressources en eau (alors même que les besoins en eau doubleront de volume sous la pression de la croissance démographique et de l'urbanisation continue). Cependant, sur une période de 60 ans (1931-1990), l'analyse des données pluviométriques par la station d'Alger laisse présager une augmentation relative des précipitations au printemps (+ 16 mm), malgré une baisse générale de la pluviométrie de l'ordre de 10 %, et en été (+ 9 mm). Le scénario climatique moyen à horizon 2020 confirme ces résultats qui supposent un report de la saison des pluies au printemps-été au lieu de l'automne-printemps. De même, les inondations seraient plus fréquentes, surtout durant le printemps et l'automne.

Ainsi, à l'avenir, l'événement naturel, probablement plus fréquent et plus fort, aura-t-il un impact plus grave pouvant causer des catastrophes, notamment dans la plaine orientale d'Alger et la vallée de l'Oued El Harrach, où les caractéristiques physiques, climatiques et socio-économiques déterminent un niveau de risque élevé. Dans cette plaine, si l'urbanisation se poursuit selon les modes et rythmes actuels, manifestement inappropriés (lire encadré p. 104), elle contribuera à augmenter la vulnérabilité spatiale aux inondations, dont elle intensifiera le risque localement. Or, en agissant sur certains critères pertinents, la planification urbaine peut faire en sorte que l'eau excédentaire ne constitue plus une menace mais une opportunité et une source d'inspiration à l'aménagement urbain pour réduire la vulnérabilité de la commune d'El Harrach.

AMÉLIORER LA RÉSILIENCE La probabilité des changements climatiques souligne la nécessité de rechercher de nouvelles options de développement urbain à moindre impact sur la sécurité, les équilibres naturels et la santé humaine. Fondée sur le principe de précaution et les récentes perspectives d'hydrologie urbaine, la stratégie de réduction des risques liés à l'eau, notamment hydro-climatiques s'oriente vers des mesures proactives d'atténuation du niveau d'exposition,
d'adaptation et d'amélioration de la résilience. Elle s'appuie sur des techniques alternatives d'assainissement fondées sur la récupération des eaux de ruissellement pour recharger des nappes souterraines, pour maintenir un volume d'étiage minimal et pour satisfaire les usages urbains.

Dans la mesure où son impact sur le cycle de l'eau est considérable, l'éco-urbanisme peut contribuer efficacement à cette stratégie en ciblant trois objectifs : (re)donner à la rivière son espace naturel ; restreindre les inondations à son périmètre propre ; contrôler le développement urbain et réduire les dommages potentiels liés aux inondations (Friesecke, 2004).

Nous nous limiterons ici à la lecture critique de la loi du 25 décembre 2004 relative à la prévention des risques majeurs et à la gestion des catastrophes dans le cadre du développement durable. Principal texte de référence, son objet est de définir les règles de prévention de " toute menace probable pour l'homme et son environnement ", en l'occurrence le changement climatique et les inondations, afin de limiter leur vulnérabilité aux aléas naturels et technologiques.

Il y est explicitement recommandé la prise en compte des risques et la réduction de la vulnérabilité dans l'utilisation des sols en ciblant prioritairement leurs causes plutôt que leurs effets. La démarche est conforme à la stratégie internationale de réduction des catastrophes naturelles (Wiechselgartner et Obersteiner, 2002), confortée par la récente procédure d'élaboration des plans d'occupation des sols (POS), désormais obligés de transcrire sous forme de périmètres de protection ou de servitudes les zones et terrains exposés selon leur degré de vulnérabilité.

Soulignons la nature proactive louable de ces textes, plus facilement applicables sur les nouveaux projets urbains que sur le tissu existant, qui doit progressivement intégrer les aménagements nécessaires à sa sécurisation. De même, il paraît clairement que ces mesures relèvent essentiellement de l'atténuation du risque et de ses effets. Alors que ce sont les mesures d'adaptation qui permettent de En agissa réduire la vulnérabilité et améliorer la certains résilience à terme. Dans l'hypothèse pertinent du changement climatique, la capa- planifica cité d'adaptation de la ville est vitale. urbaine Elle s'appuie sur certains aménage- en sorte ments urbains simples et intelligents excédent participant à la gestion intégrée du constitue cycle de l'eau.
Or, la stratégie nationale de changement climatique ne semble pas inclure l'urbanisme parmi les domaines de recherche scientifique ou projets d'étude à développer en vue d'atténuer l'impact des bouleversements annoncés.

MESURES DE PRÉCAUTION Bien que l'Harrach fasse partie des communes algéroises qui affichent un taux de croissance faible à nul, ce qui laisse supposer une saturation urbaine relative, un effet notable sur la ressource en eau est d'ores et déjà appréhendé. Pour ce qui concerne la vallée de l'Oued El Harrach, il est toutefois important d'observer le principe de concomitance tant pour ce qui concerne les risques naturels que l'impact de l'urbanisation existante ou projetée des communes limitrophes, notamment Mohammadia : les vingt dernières années du XXe siècle ont été l'occasion d'un étalement et d'une densification du tissu urbain non planifié d'Alger, auxquels la vallée de l'Oued El Harrach la vallée de l'Oued El Harrach n'a pas échappé. Même le Plan directeur d'aménagement et d'urbanisme approuvé en 1995 prévoyait l'extension de zones d'activités industrielles le long de l'Oued El Harrach et autour de l'Oued Smar notamment.

En 1830, la France occupe le fort d'El Kantara sur la rive droite de l'Oued El Harrach et donne au poste l'appellation " Maison carrée ". À partir de cette date, son peuplement n'est interrompu que par les crues périodiques de l'oued. La situation privilégiée de Maison carré, à proximité du port et à la croisée des routes et chemins de fer vers Alger, dynamise l'essor industriel de la ville. Notamment entre les deux guerres où de nombreuses usines et ateliers s'y établissent. La proximité de l'oued profite déjà à certaines industries fortement polluantes telles que distilleries et fabriques de produits chimiques. Alors que le site demeure insalubre et peu sûr, les quartiers d'habitations s'étendent sur le plateau de la rive droite, " à l'abri des inondations et des miasmes de l'Harrach " (Lespes). De nouvelles cités ouvrières émergent non loin de la gare à partir de 1950 et des lotissements de villas avec jardins gagnent peu à peu les terrains de culture arrachés aux marais.

Pour le Plan d'urbanisme de 1948, cette agglomération " la plus forte des environs immédiats d'Alger " (Lespes) et sept autres communes forment la banlieue de la capitale. À la veille de l'Indépendance, le premier village spontané s'est transformé en agglomération urbaine à trame régulière. La commune reprend le nom d'El Harrach et poursuit son extension tout azimut, principalement sous forme de lotissements et quartiers d'habitat collectif (Deluz, 2001). Puis le territoire se scinde en trois communes : El Harrach, Oued Smar et Mohammadia.

L'historique des inondations prête à croire que des événements meurtriers se seraient succédés à partir de 1846 liés aux crues de l'Oued El Harrach ou de l'un de ses confluents, Oued Djemaa et Oued Smar notamment. Les fortes pluies des régions montagneuses augmentent sensiblement le débit de l'oued dont le cours supérieur subit une forte érosion. Des volumes considérables de sédiments, graviers et objets solides divers sont alors charriés vers l'aval. Au début de l'hiver 2005, un phénomène similaire a provoqué l'effondrement du pont de Sidi Moussa qui relie Alger à Blida. rétude d'inondabilité de l'Oued El Harrach aurait recensé parmi les facteurs aggravants la topographie quasiment plate du terrain et sa faible perméabilité due à la présence d'une nappe peu profonde (nappe de la Mitidja) provoquant la saturation rapide du sol. Tout cela permet de confirmer l'exposition de la vallée d'El Harrach aux risques cumulés d'inondation, érosion et pollution, particulièrement les communes situées à l'embouchure de l'oued.
N. A. & E. B.-A

Par ailleurs, les opérations de rénovation et restructuration prévues aujourd'hui le long du littoral algérois sont appelées à en modifier tant l'image que la perception. Il s'agit de plusieurs kilomètres de métro, tramway et voies rapides qui relieront, voire réconcilieront, la capitale avec son aile droite. Le projet d'aménagement de la baie d'Alger autour du pôle d'El Hamma et celui de la Medina dans la commune de Mohammadia affecteront directement le devenir de la vallée.

Eu égard à l'état de l'Oued, la capacité d'accueil et de charge de la commune d'El Harrach semble avoir outrepassé le seuil d'équilibre écologique. Si aucune mesure d'adaptation n'est envisagée et mise en oeuvre, sa vulnérabilité aux inondations l'expose à des sinistres et dégâts matériels et sa faible résilience la met devant le sombre pronostic de leur aggravation à terme.

La gestion intégrée des inondations offre de nombreuses opportunités au développement de l'approvisionnement en eau, tant à l'échelle locale que régionale. Elle constitue de surcroît un pas significatif vers l'adaptation à la sécheresse, dont l'Algérie souffre depuis de nombreuses décennies et qui risque de s'aggraver dans l'hypothèse d'un changement dimatique global.

Dans cet esprit, certaines prescriptions urbaines permettraient de maintenir et/ou rétablir un équilibre optimal entre les surfaces pavées imperméables et les caractéristiques du réseau de voirie (tracé et pentes), introduire certains aménagements liés à l'eau afin de réduire les volumes de ruissellement, favoriser la recharge des nappes phréatiques et, enfin, récupérer 10 à 30 % des eaux de pluie pour l'usage urbain. La gestion intégrée des inondations et plus particulièrement celle des eaux de pluie peut ainsi servir, tout à la fois, à protéger contre l'aléa et à parer à la pénurie d'eau, bénéfice inestimable en cas de sécheresse, notamment dans un dimat aride à semi-aride comme c'est le cas en Algérie. o