Villa de l'Agha
C'est à cette villa, aujourd'hui disparue, que
le moderne quartier
de l'Agha doit son nom.
Cette villa était comprise dans l'espace que délimitent
nos rues Sadi
Carnot, Richelieu, Michelet
et le boulevard Victor-Hugo.
La propriété de l'Agha, celle de Mustapha-Pacha, à
Mustapha-Supérieur,
le Jardin du Dey (devenu l'hôpital militaire), représentaient
les trois plus importants domaines de la banlieue d'El-Djezaïr.
"Cette ferme, dit un ancien document, située entre le Ras
Tafoura ( Cap Tafoura où se
trouvait le Fort Bab-Azoun.) et Aïn-erReboth ( Quartier
du Champ-de-Manoeuvre.), a été élevée
sur un terrain tout de rochers."
Elle touchait au cimetière turc et au ravin de Chaabâan Khodja
(que côtoie l'actuelle rue de Mulhouse).
Ainsi que son nom l'indique, elle servait de résidence à
l'Agha, sous l'autorité de qui était placée la cavalerie
du Dey.
L'Agha, en outre, exerçait un droit de juridiction sur les tribus
établies dans les environs de la ville. Les oliviers centenaires
du voisinage furent utilisés maintes fois comme gibets par ce chef.
Les quinze Aghas des spahis habitèrent successivement cette ferme
( Ce furent : Ali-Agha, Casdali-Agha,
Hadji-Ali-Agha, Hassen-Agha, Khaznadji, Hadji-Mohammed, Hassen-Agha, SalahAgha,
Mustapha-Agha, Omar-Agha, Mustapha-Agha, Mamich-Agha, Cherif el-Midani,
Yahia-Agha, Ibrahim-Agha).
Son fondateur fut Ali-Agha, fils de Soliman, qui en acheta le terrain
"au milieu de R'bi el-Ouel 1203" (décembre 1789).
Le premier acte parlant de cette propriété date de l'année
1125 de l'hégire (1713-1714).
Le domaine de l'Agha se composait de plusieurs parcelles qu'Ali légua
à ses enfants.
Il est ainsi fait mention de son legs sur les registres du Cadi :
1°
Le Sid Ali-Agha Sbaïhia (Agha des spahis), fils de Soliman, a fait
donation (habous et ouac-fe) ( Sous
condition d'inaliénabilité.) de toute la portion
de tette (susdésignée) et du jardin qui en dépend,
à ses enfants Mustapha et Zaara, ainsi qu'à leurs descendants.
A défaut d'héritiers, la dite propriété sera
dévolue à une fontaine, située dans Alger, à
l'entretien de laquelle ses revenus serviront.
2°
Le Sid Ali a fait aussi donation (habous et ouac-fe) du terrain où
se trouve une fontaine, à ses enfants Mohammed et Mustapha, à
leur mère Fatma, fille de Mohammed, de Mostaganem, et à
leurs descendants. A l'extinction de la lignée, le bien reviendra
aux pauvres des deux villes saintes (La Mecque et Médine).
3°
Ali-Agha a aussi fait don du terrain qui se trouve à Ras Tafoura,
à l'Ouest de Aïn er-Reboth, hors de la porte d'Azoun, ainsi
que du terrain devenu jardin, situé dans la campagne de Ras Tafoura,
à ses enfants Said, Mustapha et Zaara et à leurs descendants.
A défaut d'héritiers, le bien reviendra à une fontaine
d'Alger.
4°
Ali-Agha a fait, en outre, don habous du jardin situé à
Rahbania, à son fils Said Mustapha et à sa fille Zaara.
En cas d'extinction de la descendance, la propriété sera
attribuée à une fontaine d'Alger ( Un
acte de l'époque nous apprend qu'Ali-Agha acquit un jardin limitrophe
en donnant, en échange, des chambres qu'il possédait dans
une maison, située rue Socgémah, près de la fontaine
de ce nom.).
Ce fut sur une portion de ce domaine qu'Ali construisit, pour les Aghas,
une ferme qu'il "habousa", établissant qu'elle ferait
retour à la Caserne Kherratine, située rue Bab-Azoun.
La maison, comprenant de vastes écuries, fut occupée dès
le mois de septembre 1830 et affectée à la cavalerie (deux
escadrons de Chasseurs).
Peu après, les petits-enfants du fondateur Ali-Agha cédèrent
toute la propriété au Général Clauzel ( Clauzel,
on le verra plus loin, avait commandé à Saint-Domingue.
A ce sujet, un détail. Fiancé à une jeune créole,
il partit avec elle pour New-York. A la suite d'un naufrage sur la Côte
de Floride, le couple, plusieurs jours, ne vécut que de crabes.
En souvenir de quoi, le Comte fit, plus tard, figurer des crustacés
de cette espèce dans ses armes dont une reproduction se trouve
sur son tombeau, à Mirepoix.) sous condition d'une rente
annuelle et perpétuelle de 550 réaux boudjous (990 francs).
A ce propos, le Général, qui était devenu acquéreur
de plusieurs immeubles dans la région, écrivait, le 25 décembre
1830 : " Je vais donner un grand exemple en achetant, un des premiers,
des propriétés dans un pays où nous avons tant de
raisons d'attirer les Européens."
A quelque temps de là, le Général loua la ferme à
l'État qui y avait toujours ses deux escadrons. Les constructions
très délabrées, nécessitèrent diverses
réparations qui coûtèrent exactement 4.800 francs.
Les bâtiments, qui couvraient une surface de 2.665 mètres
carrés, comprenaient deux parties : les écuries (citées
plus haut), pour 250 chevaux, présentant un développement
de 104 arcades de trois mètres chacune (quelques logements y étaient
annexés) et une maison de maître avec jardins, fontaines
et kiosques. Là, furent installés les officiers. Le Général
s'était toutefois, réservé les jardins.
Peu après son retour en France, le Général Clauzel
qui venait d'être nommé Maréchal, se vit contester
son droit de propriété sur cette ferme.
Son plus ardent contradicteur fut le Colonel Lemercier, directeur des
fortifications d'Alger, qui s'efforça de prouver que la ferme appartenait
en principe, au Beylik, que le Maréchal n'en était qu'usufruitier
et qu'elle devait faire retour aux Domaines, à l'extinction des
héritiers ( Quelque temps auparavant,
une discussion s'était poursuivie entre le Maréchal et l'Administration,
au sujet du prix de la location que l'on avait fixé à 5.000
francs seulement en raison des réparations qu'avait nécessitées
l'état des bâtiments.)
Le Maréchal soutint ses droits auprès du Duc de Dalmatie,
alors Ministre de la Guerre. En même temps (en 1833), il présenta
à celui-ci des doléances au sujet de méfaits commis
par les troupes, dans sa propriété. "Plus de cent cinquante
beaux oliviers, disait-il, y ont été coupés. Dans
le pavillon des officiers, les dégâts s'élèvent
à plus de 10.000 francs. Dans la cour, un kiosque, une fontaine
de marbre ont été brisés depuis 1830, dommages qu'on
ne réparerait pas avec 5.000 francs." Il terminait en disant
qu'en Afrique comme en France, les soldats avaient pour mission de protéger
la propriété et non de la détruire.
Des plaintes du même genre furent adressées au Ministre,
pour la ferme de Maison-Carrée que le Maréchal Clauzel avait
également louée à l'armée. Lemercier en contestait
pareillement son droit de possession au Maréchal qui déclarait
amèrement "Partout où il faut me nuire, se trouve
le Colonel...."
Une action judiciaire fut intentée contre Clauzel.
Au grand regret de Lemercier, on ne put choisir, comme avocat Maître
Unis, réputé le meilleur d'Alger, "celui-ci plaidant
au même moment, pour le Maréchal, dans une affaire de diffamation".
Le choix dut se porter sur un autre avocat.
Des recherches nombreuses furent faites dans le but d'établir qu'Ali-Agha
n'était pas le vrai propriétaire de la ferme.
Selon Lemercier, le fonds appartenait à un Maure auquel une rente
annuelle de 40 sultanis (216 francs) aurait été payée
par chaque Agha.
Certains prétendaient que cette rente était de 100 mahboub
(405 francs).
On affirma encore qu'après la disgrâce, l'exil à Kalaâ
"d'Oran", et le suicide d'Ali -Agha, le Dey qui avait confisqué
les biens de celui-ci, fit servir à la famille, par les Aghas,
et à titre de charité, une rente annuelle de 50 sultanis.
Certains Aghas auraient refusé de payer cette rente, qui ne pouvait
d'ailleurs, leur être imposée.
On fit ressortir, d'autre part, que les Aghas, successeurs d'Ali, enrichirent
par des constructions diverses, le domaine qu'ils habitaient, et cela,
"avec l'argent que l'État mettait à leur disposition".
Des écuries, des bâtiments annexes, des puits, des norias
furent ainsi créés.
D'autres faits furent révélés : Hadji-Ali avait fait
construire les terrasses de la "Grande Maison", Omar-Agha, "quatre
ans avant le bombardement de Lord Exmouth", avait introduit dans
la propriété, les eaux d'une source de la montagne voisine.
(Les revenus d'une boutique qu'il donna au Khodja des fontaines furent
affectés à l'entretien des tuyaux d'adduction des eaux).
Il avait en outre, complété les bâtiments commencés
par Ali et par Hadj-Ali.
Ibrahim-Agha avait construit "la cour de marbre et son jet d'eau."
Chaque Agha fut cité pour les oeuvres dont il était l'auteur.
On établit encore que les matériaux de construction dont
il fut fait usage pour la Maison des Aghas, provenaient des chantiers
du Beylik. Les briques, la chaux furent fournies par
Bab-el-Oued; les bois, les fers, les outils, par la Marine
et par l'Arsenal.
Quant au pain des ouvriers, il provenait des fours de la Jénina.
Baba-Youb, grand Oukil el-Hardj, sous Omar-Pacha et sous Hussein, rappela
qu'une loi turque édictait que les constructions élevées
par les agents du Gouvernement au cours de leurs fonctions, appartenaient
à l'État.
Cette loi s'appliquait à l'Agha, au Khasnadji (le Trésorier),
au Khodjet el-Kheil (Ministre des Haras), au Beït el-Maldji (Directeur
des Domaines) et à l'Oukil el-Hardj bab el-Djezira (Ministre de
la Marine).
A ces renseignements, d'autres furent ajoutés, relatifs aux produits
de la propriété.
Lemercier fit savoir que la ferme de l'Agha avait à fournir, tous
les jours, des légumes à Ali Khasnadji, à l'Agha,
au Beït el-Maldji, à l'Oukil el-Hardj, au chaouch de l'Agha;
que les fleurs, cultivées en ses jardins, étaient portées
à la Casbah, chez le Dey; enfin, qu'à l'arrivée d'un
navire étranger, c'était à la ferme de l'Agha qu'étaient
pris les légumes, les fruits, les moutons dont il était
fait présent au capitaine du dit navire.
On apprit encore que la ferme possédait mille moutons, qu'on en
expédiait chaque jour, quatre au Palais du Dey et deux chez l'Agha,
et que quatorze autruches appartenant au Beylick, y étaient élevées.
Consulté à son tour, sur la question, M. Girardin, Directeur
des Domaines à Alger, depuis 1832, déclara que le Dey payait
une indemnité aux enfants de l'Agha, mais pour les jardins seuls
qui avaient été affectés à des services publics.
On songea aussi aux registres de l'Agha, que l'on eût été
bien aise d'examiner. Mais ceux-ci, qui se trouvaient jadis dans le bureau
de l'Agha Yahia, à l'entrée de la Casbah (
Là, furent installés dans la suite, un café maure
puis une école religieuse.), avaient été
détruits en 1830. A ce propos, Sidi Osman, Kaïd el-Poder,
venu récemment du Maroc, lequel avait servi d'abord sous Hassen-Agha,
et plus tard, devint Bey de Tittery, déposa qu'à l'arrivée
des Français dans la citadelle, l'Agha avait remis les clés
de ce bureau à un colonel. Les vainqueurs étaient donc seuls
responsables de la disparition des archives qui s'y trouvaient.
Interrogé également, Ben Négro, secrétaire
du dernier dey, déclara qu'il existait à la Casbah "un
grand sac rouge" contenant les actes des propriétés
confisquées, pour lesquelles une charité était payée
aux héritiers de ces biens. Mais qu'étaient devenus aussi
ces documents ?.. On dut se contenter des témoignages mentionnés
ci-dessus, auxquels un dernier s'ajouta, affirmant que le domaine possédé
réellement par AH, n'était pas la ferme dite : "de
l'Agha", mais bien la campagne Oued el-Kolaï (Colonne
Voirol) ( Aujourd'hui dénommée
: Château- d'Hydra.).
On le voit - malgré certaines lacunes - l'argumentation présentée
contre le Maréchal Clauzel ne laissait pas que d'être inquiétante
pour sa cause.
Néanmoins l'affaire ne prit pas pour lui la tournure défavorable
à laquelle on s'attendait. Un arrêté fut pris à
la date du 14 juin 1834, par le baron Voirol, Lieutenant- Général,
commandant en chef des troupes d'occupation, et par le Maître des
Requêtes, Pichon, Intendant Civil de la Régence, en vertu
duquel le Maréchal était exproprié pour cause d'utilité
publique.
Cependant, en 1835, le Maréchal Clauzel revenait à Alger
comme Gouverneur de la Colonie. Il habita alors la ferme, pour laquelle
il continuait de plaider, faisant valoir maintenant l'expropriation dont
il était l'objet, et qui était la reconnaissance même
de son droit de propriété sur cette ferme de l'Agha.
Enfin, en 1838, une transaction eut lieu entre le Maréchal et l'Etat,
à la suite de laquelle le Ministre prescrivit la remise immédiate
au Comte Clauzel, du quartier de l'Agha qu'occupait une section du Train
des Équipages.
Le Ministre faisait en même temps connaître que l'on était
en arrangement avec le Maréchal pour la location de cet immeuble.
Ainsi fut close cette affaire pour l'instruction de laquelle d'intéressants
détails historiques furent découverts et présentés
par les adversaires de ce chef militaire ( Sur
l'emplacement de la villa passe aujourd'hui
la rue Clauzel.
Deux rues du voisinage portent les noms de " Pierre " et de
"Colonel Bourlon" (époux de deux petites-filles du Maréchal).).
Description de
la Villa
Bavoux décrivit
la villa en ces termes :
"C'est une fort belle habitation, dévastée maintenant,
mais dont on peut encore admirer le passé dans ses restes, image
brisée de sa splendeur détruite."
"Le pavillon occupé par le colonel commandant le Camp, est
fort curieux. Au centre de la cour, se trouve un bassin de 12 à
15 pieds carrés : c'était le bain des femmes dans lequel
celles-ci descendaient par des gradins placés aux angles. Tout
autour règne une galerie, soutenue par des colonnes en marbre,
d'ordre corinthien, avec la feuille d'acanthe. Les officiers et les soldats
occupent les autres bâtiments, habités autrefois par l'Agha
lui-même."
"L'un de ces bâtiments, le plus grand de tous, forme un carré
comme d'habitude, avec une galerie au rez-de-chaussée, laquelle
s'élève au premier, harmonieusement encadrée de colonnes,
cannelées de haut en bas, fines, délicates et blanches,
surmontées d'une élégante couronne. La spirale de
marbre s'échappant du piédestal rond et uni, va se perdre
dans un chapiteau corinthien. Le tout est en marbre de Carrare, apporté
à grands frais d'Italie et mêlé partout à la
faïence qui offre de gracieux dessins, artistement nuancés.
Il y a là aussi des mosaïques brillantes dont l'émail
poli répand, dans toutes ces délicieuses galeries, un parfum
de coquetterie et de fraîcheur."
"Les dalles de la galerie, les marches des escaliers, les portails
cintrés avec encadrements admirablement découpés
en festons, sont perpétuellement en marbre blanc."
"Des marabouts élégants, petites pièces religieuses,
regardent la mer; les détails intérieurs en sont charmants.
Ils sont ornés de dessins gracieux à dentelle, avec verres
de couleurs que nuance le soleil."
Bavoux, parlant aussi de ce qui restait en 1841, au Maréchal Clauzel,
de son ancien domaine, dit : "C'est une petite propriété
où se trouve la collection la plus remarquable d'orangers. L'habitation
est complètement abandonnée et saccagée. Dans la
cour, une fontaine charmante versait ses eaux en une coupe de marbre blanc,
d'un travail précieux : cette coupe a été brisée
par le vandalisme de nos soldats qui, lors de la conquête, ont frappé
dessus à coups de sabre. Le jardin est fort petit, mais remarquable,
surtout par quatre allées d'orangers admirables. Il s'y trouve
un certain nombre de citronniers et de bananiers."
Rozey, qui décrivit aussi cette
campagne, disait en 1833 :
"Là, se trouvaient les écuries des janissaires. En
arrière, était la maison de campagne proprement dite, avec
un parc magnifique rempli d'orangers, de grenadiers, de figuiers et de
toutes sortes d'arbres d'agrément."
"Il s'y trouvait une salle remarquable, dont les officiers français
firent leur salle à manger. Elle se composait de trois rangs de
colonnes perpendiculaires entre eux. La vue donnait sur la mer. En avant
se trouvait un fort joli bassin à plusieurs jets d'eau, ombragé
de hauts arbres et entouré de treillage de jasmins, de chèvre-feuille
et de vigne, allant s'entremêler au-dessus du salon et y formant
le plafond."
" Autour de cette maison, il y avait plusieurs résidences
appartenant aux officiers supérieurs de la Milice."
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La Ferme de l'Agha fut occupée, le 15 juillet 1830,
par le Général Loverdo.
Elle fut, peu après, convertie en hôpital et reçut
200 malades.
A quelque distance de la campagne de l'Agha, se trouvait la campagne de
Ben Hamden. Au-delà de cette dernière, était la villa
du général Bernell, qu'habitèrent le Général
Rebwel, puis M. Delaunay. (Voir à : Route de Mustapha-Pacha).
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Quelques justifications
du Maréchal Clauzel
au sujet de ses acquisitions immobilières
Le Maréchal, affirmant qu'il avait
par ses acquisitions dans la Régence, contribué à
l'essor de la Colonie, disait dans une lettre :
"En l'an X, j'avais donné le même exemple. Pour encourager
les habitants de Saint-Domingue et les engager à la reconstruction
de la ville, j'achetai aux enchères publiques et avec la permission
du Général en Chef, la maison de Toussaint- Louverture.
Dès lors, la confiance revint et la ville fut rebâtie. Avant
cela, on n'avait pas relevé une seule maison."
"Les habitants m'offrirent alors le remboursement du prix de l'acquisition
que j'avais faite. Je refusai cette offre. Ils voulurent alors me donner
4.000 francs par mois pour frais de table et de représentation.
Je refusai encore cette proposition, mais je les engageai à consacrer
les sommes qu'ils voulaient me donner, à la construction des défenses
de la ville et, sur cette invitation, 500.000 francs furent dépensés
pour les fortifications."
"Les habitants de Cayes, touchés de cette conduite, m'envoyèrent
une députation pour me prier d'accepter le commandement de la province
du Sud. Ils m'offrirent en même temps, en don, une des belles habitations
de M: Delaborde. Cette magnifique propriété avait 400 nègres
et portait plus de 300.000 francs de revenus. Je refusai encore ces nouvelles
offres; je poursuivis le cours des succès que j'avais obtenus dans
la province du Nord. J'achevai l'entière soumission des noirs et
les ramenai au travail. Un mois après mon départ de Saint-Domingue,
les travaux furent abandonnés; et les noirs reprirent les armes."
"J'ai fait en Afrique, ce que j'ai fait à Saint-Domingue.
Y ai-je trouvé la même reconnaissance ?"
Clauzel qu'on accusa de dilapidations, après son départ
d'Alger, écrivait encore :
"J'ai eu dans mes mains les trésors du roi de Sardaigne et
la magnifique galerie de ses tableaux. De tous ces tableaux, je n'en ai
accepté qu'un ( la "Femme Hydropique", de Gérardow),
et ce tableau, je l'ai donné immédiatement au Musée
National. C'est le seul qui, en 1815, n'ait pas été enlevé
par les Alliés, parce que c'était le seul qui venait d'un
présent volontaire fait par le roi de Sardaigne."
"J'ai commandé à Saint-Domingue, une portion de, l'île,
et j'ai eu dans mes mains la fortune de beaucoup de ses habitants."
"J'ai commandé l'Illyrie, j'ai gouverné Raguse, j'ai
été Général en Chef en Espagne et au Portugal,
ces deux pays où se cache la source de tant de fortunes."
"En 1831, j'ai eu un million de fonds secrets à ma disposition
et j'ai rendu 900.000 francs au Trésor."
"Dans cette même expédition de Constantine, sur laquelle
vous savez tant de choses, j'avais 50.000 francs de fonds secrets, j'en
ai rendu encore près de la moitié au Trésor."
"J'ai dit, et je l'explique ici, complètement : il m'a été
offert de négocier l'abandon d'Alger moyennant la somme de 100
millions pour la France et 5 millions pour moi. Et après 44 ans
de service, je suis resté avec un patrimoine pauvre qui ne suffirait
pas à l'ambition de la carrière la plus vulgaire, un patrimoine
dont la plus grande part me vient de mon père, dont l'autre ne
vient que de mes économies."
"Voilà ce que j'aurais à dire, si une parole pouvait
terminer une pareille discussion!" (1Archives
de la Guerre.)
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