l'enseignement à Alger, en Algérie
Contribution du cinéma 8 mm à l'enseignement des sciences naturelles en Algérie de 1956 à 1962

En voyant toutes ces séquences sur la vie des animaux que la télévision nous diffuse, trop parcimonieusement à notre goût, ainsi que cet excellent film " Microcosmos ", le désir nous prend de faire savoir ce que nous avions tenté pour améliorer l'enseignement des sciences naturelles en Algérie. Nancy et Marc Rayret
Extrait de la revue du Cercle algérianiste, n°96, décembre 2001
avec l'autorisation de la direction de la revue "l'Algérianiste"...et de Mard Rayret, l'auteur.
mise sur site le 29-03-2004
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------Nous sommes, mon épouse et moi, la troisième ou quatrième génération, selon les branches familiales, à être née en Algérie. " Pur mélange " d'Alsaciens, d'Espagnols et d'Aveyronnais, plus " Pied-Noir que ça, tu meurs!". Bien que née à Tlemcen, mon épouse, fille de cheminot, a toujours vécu à Hussein-Dey. Elle y a fait ses études primaires puis, pour les secondaires, à Pasteur et Delacroix. Quant à moi, né en Algérie, j'ai vécu à Mostaganem où mes parents s'étaient installés pour le travail de mon père, vinificateur (on dirait œnologue aujourd'hui), et j'y ai fait mes études primaires et secondaires au lycée René Basset.

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C'est à la Faculté des sciences, au début des années cinquante, que nous nous sommes rencontrés. Il est vrai que l'amphi B, dont l'entrée dominait la rue Berthezène, facilitait ces rencontres. Prévu pour cent cinquante étudiants, il en contenait jusqu'à quatre cents pour certains cours. Ce n'était plus un amphi de fac, c'était l'agence " tasse ". Les futurs médecins (P.C.B.) (1) venaient suivre quelques cours avec nous (S.PC.N.)(2). Raconter " l'ambiance " qui régnait pour les cours de biologie végétale avec un certain professeur manquant d'autorité, risquerait d'épuiser tous mes superlatifs.

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Par contre, nous avons eu l'indicible bonheur (et honneur à la fois) de suivre les cours de sommités comme MM. Berlande en chimie, Bernard en zoologie, Hollande, décédé récemment, et qui nous parlait déjà de l'ADN et de sa double hélice alors que l'encre de la publication et des découvreurs, Watson et Crick, n'était pas encore sèche. En biologie animale et travaux pratiques de zoologie, nous avions également M. Dieuzède qui était le directeur de l'Aquarium de Castiglione, où il nous invitait à admirer la flore et la faune méditerranéenne. Le mot " invitait " n'est pas trop fort car nous nous souvenons d'un jour où, alors que nous nous étions levés à 6 heures pour prendre le car, il nous demanda entre 10 et 11 heures
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" Voulez-vous un sandwich napolitain ? ". Nous avions vingt ans ! Autant demander à des SDF s'ils veulent gagner au loto ! Quelques minutes après, nous les avons vus arriver, Mme Dieuzède et lui-même, les bras chargés de bouteilles de sodas et de plateaux de petits pains beurrés, dans lesquels ils avaient glissé une allache (grosse sardine) pochée. Les Napolitains avaient donc inventé le " Hot-Fish " sinon le "Hot-Dog". Mais Dieu, que c'est bon quand on a faim.

------Et comment ne pas parler de M. Robert Laffitte que les Algérianistes connaissent bien et qui sera un peu plus tard le doyen de la Faculté des sciences. Il nous épuisait à le suivre dans des sorties de géologie. Il est vrai que nous n'avions pas, comme lui, les 20000 km à pied dans l'Aurès comme entraînement. À chaque pause, nous n'avions qu'une hâte, nous apprentis géologues, celle de chercher une " couche ".
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À propos de M. Laffitte, j'aurais un reproche à lui faire. En effet, sans ses remarquables travaux sur la géologie de l'Algérie et sur les recherches pétrolières..., nous serions peut-être encore là-bas.
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Parce qu'il connaît l'admiration que nous avons pour lui, je sais qu'il prendra cela comme une boutade.

------Pour en terminer avec l'université d'Alger, il faut dire qu'il fallait " s'accrocher ", comme on dit de nos jours, car le niveau en était très élevé et la sélection aux examens, très sévère (une centaine de réussites au P.C.B. sur 300 candidats et 13 sur 87 au S.P.C.N. l'année de notre promotion). Et comme j'ai eu l'occasion de le faire remarquer à un collègue qui pensait que notre université était "facile", les professeurs du P.C.B. refusaient les étudiants qui, ayant échoué en mai-juin à Alger, revenaient en première année de médecine après avoir passé l'examen en métropole dans une fac plus coulante. Tout cela pour faire savoir aux générations actuelles d'étudiants, que la surpopulation universitaire et la sélection draconienne ne datent pas d'aujourd'hui.

------Donc, nos études presque terminées (il nous restait encore un certificat que nous devions passer en octobre pour avoir le nombre de certificats requis pour présenter le concours du C.A.P.E.S (3), nous avons postulé
pour un premier poste d' adjoint d'enseignement. Nous avons donc été nommés, ma future épouse au lycée de jeunes filles et moi, au lycée Duveyrier de Blida en octobre 1955. Et en mars 1956, nous avons célébré nos noces à l'église Saint-Augustin, comme toute ma famille.

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C'est donc avec une somme, cadeau de mariage envoyée à mon épouse par une tante vivant au Maroc, que nous avons décidé d'acheter une caméra 8 mm avec une petite idée derrière la tête. Nos premiers cours nous avaient, en effet, montré qu'il n'était pas aisé de parler à nos élèves de choses qu'ils ne connaissaient pas et que nous ne pouvions pas leur montrer. Des petits films de dix à quinze minutes au maximum, muets pour nous laisser faire les commentaires adaptés à chaque classe, nous permettraient d'illustrer nos cours.

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Notre caméra était un modèle de base, donc sans visée reflex. À l'aide d'un objectif, retiré d'un vieil appareil à soufflet qu'un sympathique collègue m'avait donné, j'ai réalisé un téléobjectif pour faire du macrocinéma. Deux lamelles couvre-objets de microscope à 45° et une petite lentille placées dans un tube en cuivre soudé au téléobjectif, me donnaient un viseur reflex analogue à ceux que l'on trouve sur les camescopes actuels. Toutes ces pièces étaient réalisées avec les moyens du bord du lycée : un petit moteur électrique et une lame de scie à métaux meulée en guise de tour et d'outil. Bien sûr, l'image était inversée comme dans une télé qu'on regarderait la tête en bas, car doter mon " viseur " d'un véhicule, c'est-à-dire un système à deux lentilles ou à prismes pour redresser l'image, était hors de la portée de mon outillage. Qu'importe, nous allions " faire avec " ! Les années d'entraînement au microscope nous avaient appris à inverser les mouvements dans nos observations. Cela allait nous servir. Oh, il n'était pas question de filmer un lièvre à la course! Et c'est pour cela que nous avons commencé par un escargot, qui risquait moins de nous en faire baver.

------Enthousiasmés par le rendu de ces images en gros plans que nous projetions à nos élèves avec un petit projecteur acheté d'occasion rue Colonna-d'Ornano à Alger, nous avons décidé de continuer dans cette voie. Pensant à nos classes de Première M' (4), que nous avons eu le plaisir de créer à Blida dans nos lycées respectifs, nous avons filmé des dissections, dont celle de l'escargot, qui étaient à leur programme. Car, hormis le fait qu'elles nécessitaient de sacrifier de nombreux animaux, elles étaient souvent très délicates et c'était le professeur qui devait réaliser une bonne partie des dix ou douze selon les groupes de la classe, d'où une perte de temps considérable. Un pied de camera spécial pour ce travail étant très onéreux, c'est encore le "système D" qui est venu à notre secours. J'ai fabriqué avec du matériel de récupération, un support avec deux fortes lampes pour éclairer la cuvette de dissection, et un déclencheur souple que j'actionnais avec les dents tout en suivant mon travail au travers de l'objectif. Il était impossible de procéder à deux; nous nous serions gênés. D'autre part, je ne filmais que par courtes séquences pour économiser le film couleur et n'avoir que très peu de " rushes " (c'est le terme consacré au cinéma commercial) à couper au montage. Tout le monde sait qu'un professeur débutant, surtout à cette époque, n'a pas un traitement mirobolant; il fallait donc songer aussi à manger. Or, un escargot disséqué n'est plus comestible!

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Ce qui nous intéressait surtout, c'était la grande mobilité du système : un projecteur très léger que l'on posait sur une table, un écran au tableau, des rideaux aux fenêtres et par un petit film de quelques minutes, on remplaçait des quarts d'heure d'explications.

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Où le film est presque indispensable, c'est dans le cas d'observations au microscope du plancton, des protozoaires ou encore des crustacés d'eau douce. Ces petits êtres étant très mobiles, le temps que votre élève se mette à votre place derrière le microscope et le règle à sa vue, au lieu de voir le peloton de tête que vous vouliez lui montrer, c'est la caravane publicitaire qu'il voit passer. Allez lui dire après cela, que le " maillot jaune " avait les yeux bleus

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Nous avons ainsi réalisé sept ou huit films, surtout durant l'été 1956 que nous avons passé à Mostaganem, chez mes parents. Tous les jours, nous descendions aux Sablettes ou à la Salamandre et nous remontions avec quelques animaux capturés et vingt-cinq litres d'eau de mer dont je remplissais un petit aquarium. Et l'après-midi, à l'heure de la sieste (oh sacrilège!), nous tournions des séquences sur les oursins, les holothuries (boudins ou concombres de mer), les méduses, les aplysies (lièvres de mer), les poulpes, les crabes, les crevettes, etc..., en faisant vite car l'eau de mer se corrompt très rapidement (un aquarium d'eau de mer entretenue était hors de notre portée, financièrement parlant) et nous voulions nos animaux en pleine vitalité. C'est ainsi que nous avons pu filmer des reproductions (d'oursins entre autres), des repas, la locomotion... Bref, la vie au fond de l'eau!

------Nos élèves aimaient beaucoup la petite crevette grise de 2,5 cm de long, mangeant délicatement un petit poisson mort, trois fois plus gros qu'elle; ou encore le crabe qui le portait à ses mandibules en le tenant entre les pinces comme " nous autres on faisait d'une sardine frite dans un bistro à kémias à la marine en bas le port ! ".

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Tout cela naturellement, nécessitait des heures de patience, l'œil vissé à l'oculaire, à attendre que celui-ci ait faim, que celui-là veuille bien nager ou pondre.---J'ai le souvenir d'un poulpe dont je voulais filmer les changements de couleurs pour expliquer le rôle des chromatophores et qui se refusait à ces changements tout en semblant me regarder d'un oeil goguenard en croisant deux bras comme pour me faire un " tentacule d'honneur ". Ou bien ce bernard-l'ermite dont nous avions brisé, en partie, la coquille d'adoption pour obliger à en changer devant la caméra et qui, calmement pendant que la caméra tournait, prenait son temps pour choisir son nouveau mobil-home avec... vue sur la mer ! Ou encore, cette mante religieuse à laquelle nous avions présenté un mâle en vue de filmer leurs étreintes et qui l'a consommé avant que lui-même ait le temps de... consommer. Encore un qui a été victime de mots d'amour du genre: " Je t'aime; tu es tendre! ".

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-------Mais je crois que le record fut celui de cette mouche à..., enfin cette mouche bleue que nous avions enfermée dans une minuscule boîte de verre avec un morceau de viande en décomposition pour qu'elle y ponde sans sortir du champ de la caméra. Elle nous a fait attendre tout un dimanche après-midi. Fine mouche..., bien que grosse, elle avait dû se dire que, prisonnière d'un professeur, elle était un peu fonctionnaire et qu'il n'y avait pas de raison de se casser le..., l'oviducte en dehors des 35 heures ouvrables! Et ce n'est qu'à la tombée de la nuit qu'elle a consenti à arrondir son orifice comme le fait un Anglais avec sa bouche quand il veut faire des " the ".

--------En utilisant de la pâte à modeler et le déclenchement vue par vue, nous avons réalisé également des films d'animation permettant d'expliquer, beaucoup mieux qu'une suite de schémas, plus ou moins clairs au tableau, la circulation sanguine ou la division cellulaire. Ce dernier film, par exemple, nous a demandé une centaine d'heures de travail pour dix minutes de projection. Comme je l'ai souvent dit, cela demandait 10 % de connaissances et 90 % de patience.
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Voulant reproduire, en accéléré, la germination d'un grain de blé, puis d'un haricot, j'ai dû construire un système qui n'existait pas dans le commerce. Il me fallait, toutes les trente à quarante-cinq secondes, éteindre une lampe qui simulait le soleil durant le jour, allumer deux projecteurs une fraction de seconde pendant que la caméra prenait une vue d'un petit pot de terre où germait un grain de blé ou un haricot,puis allumer de nouveau la lampe "soleil". Le tout était placé dans un placard obscur pour deux raisons. La première était qu'il ne fallait pas être gêné par le jour extérieur pour avoir une uniformité d'éclairage. Et la seconde raison était que, logeant à cette époque dans une HLM au neuvième étaie en face de la montagne de Chréa, ces éclairs successifs, de nuit, n'auraient pas manqué d'attirer l'attention d'un gendarme trop zélé. J'avais utilisé pour construire tout ce mécanisme, un vieux tourne-disque électrique complété par quelques pièces de Meccano qu'un jeune cousin algérois m'avait prêtées. L'ensemble a fonctionné pendant un mois sans interruption pour chaque graine.
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Naturellement, il y avait un gros travail derrière tout cela, et pris sur nos loisirs, mais quelle récompense de découvrir les réactions de nos élèves qui, pour la plupart, voyaient cela pour la première fois et dont l'enthousiasme n'était pas encore émoussé par toutes les heures de télévision, souvent débiles qu'ils subissent actuellement !

------En plus de cet encouragement moral, nous avons eu le bonheur de faire la connaissance de deux hommes remarquables dans cette aventure.

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Tout d'abord M. Rey, professeur agrégé de sciences naturelles au 1ycée Bugeaud d'Alger, qui avait été désigné comme notre conseiller pédagogique pour la préparation de la partie pratique du C.A.P.E.S. Très vite, il devint notre ami et, en supplément de tous les conseils très utiles aux professeurs débutants que nous étions, nous donna celui de persévérer dans la voie " cinématographique ". Et une première récompense nous arriva sous la forme d'une excellente mention au C.A.P.E.S. dont le jury nous avait dit avoir été intéressé par le côté pédagogique de ces petits films. Enfin, M. Rey en a parlé à M. Fresneau, agrégé de sciences physiques, qu'il connaissait bien puisqu'il avait été proviseur du Lycée Bugeaud et qui était à ce moment-là, inspecteur pédagogique. Il devint ensuite vice-recteur de l'Académie d'Alger au début des années soixante. C'est donc lui qui, s'étant déplacé à Blida pour visionner la petite douzaine de films déjà tournes et montés, nous a proposé de transformer notre artisanat bénévole en un travail plus officiel et rémunéré.
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En l'espace de quelques mois, il nous a acheté nos films, payés sur un budget d'heures supplémentaires, les a fait copier en 150 exemplaires, dans un premier temps, et les a distribués gratuitement comme dotation de matériels scientifiques dans tous les lycées d'Alger et nombreux collèges, avec un projecteur et un écran.

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Quant à nous, les originaux ne nous appartenant plus, il nous donna une copie de chaque film et nous prêta du matériel professionnel 16 mm car les copies de 16 vers 8 sont meilleures que les copies de 8 vers 8. Il nous avait également demandé de fournir un petit texte explicatif pour chaque film afin de faciliter la tâche de chaque professeur.

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Enfin, à deux reprises, d'abord devant un petit nombre de professeurs de lycées et de collèges algérois au rectorat, puis ensuite dans une salle de cinéma d'Alger en présence du recteur et de trois cents personnes intéressées par ces films, M. Fresneau m'avait demandé d'en faire une démonstration d'emploi. Il avait même prévu, devant les difficultés de déplacement de toutes ces personnes, que nous irions dans l'Oranais et le Constantinois pour les mêmes démonstrations. Malheureusement, nous avions entamé les années soixante et ces réunions n'ont jamais pu se faire.

------Et voilà comment en juin 1962, nous sommes venus en métropole pour des " vacances prolongées " avec une valise pleine de vingt-cinq copies de films qui nous avaient été données, les originaux et tout le matériel qui nous avait été prêté étant restés "là-bas". Que sont-ils devenus? De toute façon, que peuvent avoir à faire des intégristes d'une dissection d'un petit mammifère, eux qui ne peuvent pas voir une souris dévoilée?

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Au début de juillet 1962, M. Fresneau, en tant que vice-recteur d'Alger, nous a reçus dans un couloir de la Sorbonne, n'ayant à sa disposition que deux chaises et une table, pour nous annoncer qu'il y avait encore deux postes doubles au choix : l'un à Caen, l'autre à Château-Thierry. Nous avons retenu ce dernier car nous étions dans le même lycée mon épouse et moi-même.

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Enfin, non sans émotion, il nous a donné un dernier conseil " N'abandonnez pas le travail que vous avez fait là-bas, faites profiter l'enseignement en métropole de votre expérience. Allez voir le directeur du Centre
de matériel scientifique et de l'audiovisuel du secondaire à Paris et montrez-lui vos films
".

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C'est donc ce que nous avons fait au début de 1963, en prenant rendez-vous avec le directeur de cet organisme.

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Venant de Château-Thierry, nous sommes arrivés au jour et heure fixés, mais le directeur n'était pas au rendez-vous et nous a fait recevoir par une jeune secrétaire qui nous a demandé de lui projeter nos films. Nous en avions choisi trois parmi ceux qui avaient eu le plus de succès. Or, après nous avoir dit péremptoirement que le 8 mm n'avait aucun intérêt et que nos films étaient un " aimable brouillon ", elle nous demanda de les lui laisser pour les faire visionner par le directeur. Nous ne les avons récupérés qu'au bout de trois mois, après deux appels téléphoniques et une lettre recommandée, envoyés par la poste, enveloppés dans des vieux journaux et sans aucun mot. On ne voulait sans doute pas de nos pieds-noirs dans ces plates-bandes. Par contre, nous avons reçu plusieurs lettres de professeurs éparpillés dans l'hexagone qui, ayant obtenu notre adresse je ne sais comment, nous demandaient où se procurer nos films. S'ils nous lisent, ils comprendront la raison de nos réponses négatives à leurs demandes d'alors et qu'ils en soient remerciés.

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Quant à nous, nous avons continué à passer, en transportant notre propre projecteur, les copies que nous avions ramenées dans nos classes respectives de 6e, 5e, 3e, 1ère et surtout terminales à Château-Thierry puis à Sète où nous avons fini notre carrière. En 3e et terminales, les films sur la dissection d'un petit mammifère, la contraction cardiaque, la division cellulaire, etc..., nous permettaient d'illustrer nos cours de physiologie aux programmes de ces classes.

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Je voudrais pourtant signaler qu'il arrivait à mon épouse, à Sète où nous avons fini notre carrière, d'acheter pour ses cours dans les années quatre-vingt, au Centre de Documentation de Montpellier, des films scientifiques et ils étaient en... 8 mm.

------Enfin, en guise de conclusion, je voudrais raconter une petite anecdote. En 1995, lors d'une réunion des " Anciens des lycées de Blida ", nous avons eu la joie de retrouver un ancien élève, actuellement ophtalmologiste à Alès, qui m'a dit au cours du repas : " Vous savez, dans le petit jardin de ma maison à Alès, j'ai planté des haricots et en les voyant pousser, j'ai dit à ma femme que ces haricots me rappelaient celui du film de mon professeur à Blida ! ". Et cela, croyez-moi, vous récompense de toutes vos peines, même si vos lunettes s'en trouvent un peu embuées!

------*Ce n'est pas seulement dans tous les collèges et lycées d'Alger mais d'Algérie que nos films avaient été distribués.
------*Dans les anecdotes,j'avais dit que je travaillais avec une petite cage en verre (fabrication maison)respectant exactement le cadre de la caméra dans laquelle j'enfermais les petits animaux pour pouvoir les filmer à mon aise et, entre autres une pholque, araignée commune de nos plafonds, ce qui prouve que nous étions en avance sur la métropole, puisque c'était là la première version de "La cage aux pholques"!