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-L'enseignement primaire en Algérie
Éditorial
par Maurice Calmein.

------L'école d'Algérie, c'était enfin le premier contact avec l'autre : le Juif, le Kabyle, l'Arabe, le Roumi, le Métropolitain, l'Espagnol. Les premières comparaisons, les premières amitiés transcendant les différences ; la découverte de traditions et d'expressions différentes ; l'acquisition, au contact de cette diversité, d'une " plus-value socio-culturelle ", d'une richesse intérieure. Ce fut le premier creuset où vinrent se côtoyer, puis se fondre, les différentes civilisations qui se rencontrèrent sur notre terre.
Le texte ci-dessous est extrait d'un numéro spécial de "l'Algérianiste", bulletin d'idées et d'information. - n°14 - 15 mai 1981.avec l'autorisation de la direction actuelle de la revue "l'Algérianiste"
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EDITORIAL
Maurice Calmein, du Comité de rédaction

10 sur 10 pour nos enseignants !

----------Fils d'instituteurs algériens, petit-fils d'une grand-mère institutrice métropolitaine qui partit pour l'Algérie, élevé et presque né dans une école d'Oranie, c'est avec joie et fierté que j'apporte aujourd'hui ma modeste contribution à ce numéro de L'Algérianiste consacré à l'enseignement.
----------L'école est cependant un sujet qui touche profondément chacun d'entre nous car il évoque de nombreux souvenirs en même temps que la plus belle période de notre vie : notre enfance.
----------L'école d'Algérie, c'était d'abord des images, des odeurs, des jeux (les billes, les noyaux, la toupie, le pitchac, les parties de " Papa-Finga ", etc.), des amis aussi, disparus depuis dans la tourmente de l'exode.
----------C'était aussi une excellente école car issue du peuple qui naissait dans ce pays et qui, comme tous les peuples jeunes, avait soif de connaître, de s'instruire, de s'élever.
----------Deux preuves de la qualité de l'enseignement que nous avons reçu me viennent à l'esprit. La première réside dans le fait que beaucoup d'enfants d'Algérie ont atteint un niveau de connaissance, de compétence et de responsabilité élevé. On ne compte plus aujourd'hui les savants, médecins, professeurs, avocats, chefs d'entreprises, grands journalistes, écrivains, hauts fonctionnaires et officiers supérieurs pieds-noirs ou Français musulmans.
----------C'est peut-être aussi de cet enseignement que nous avons tiré un sens certain des valeurs morales.
----------La deuxième preuve, je l'ai rapportée d'un récent voyage en Algérie au cours duquel j'ai pu constater que, malgré une politique d'arabisation forcenée, la grande majorité des hommes, des femmes et même des enfants, qui vivent aujourd'hui dans ce pays parlent français entre eux.
----------L'école d'Algérie, c'était enfin le premier contact avec l'autre : le Juif, le Kabyle, l'Arabe, le Roumi, le Métropolitain, l'Espagnol. Les premières comparaisons, les premières amitiés transcendant les différences ; la découverte de traditions et d'expressions différentes ; l'acquisition, au contact de cette diversité, d'une " plus-value socio-culturelle ", d'une richesse intérieure. Ce fut le premier creuset où vinrent se côtoyer, puis se fondre, les différentes civilisations qui se rencontrèrent sur notre terre.
----------Il était indispensable que notre revue rendît hommage à ces milliers d'instituteurs et de professeurs qui, non seulement contribuèrent à répandre la culture française, mais surent aussi éduquer, aider, soigner ceux qui en avaient besoin.
----------Combien de fois ai-je entendu mes parents raconter comment, alors qu'ils étaient instituteurs du bled, ils avaient dû soigner la teigne, apprendre l'hygiène à leurs élèves, et jouer bénévolement le rôle d'écrivain public pour les adultes du village !
----------Cette page de notre histoire est souvent passée sous silence car on préfère ne présenter de nous que les images peu flatteuses d'un colon esclavagiste ou d'un militaire brutal et impérialiste écrasant sous sa botte les traditions ancestrales.
----------Lorsque, d'aventure, on évoque l'enseignement en Algérie, c'est pour en déformer ou en salir l'image. Et le mensonge n'est pas rare dans ces cas-là...
----------Ainsi nous a-t-on laissé entendre, lors de la diffusion du lamentable feuilleton télévisé " Les chevaux du soleil ", que les enfants arabes n'étaient pas admis à fréquenter les écoles françaises !
----------On accuse aussi nos enseignants d'avoir appris à leurs élèves que leurs ancêtres étaient des Gaulois !
Non seulement cette " accusation-tarte à la crème " est stupide et infâmante, car elle revient à prendre vraiment nos instituteurs pour des imbéciles, mais, ce qui est plus grave encore, elle est totalement injustifiée. Beaucoup de Pieds-Noirs se souviennent sans doute, comme moi, du manuel d'histoire de l'Algérie qui nous était donné à l'école primaire, en même temps que le livre d'histoire de France. Dans quelle autre province française procède-t-on ainsi, même en 1981 ?
----------Ayons, en revanche, une pensée émue pour tous les petits descendants de Vikings, Romains et autres Vandales que l'on abuse aujourd'hui encore en leur faisant croire que leurs ancêtres étaient des Gaulois !....
----------Je me contenterai d'un souhait, en guise de réponse à ces accusations. Que l'enseignement français actuel soit aussi bon et objectif que le fut celui de l'Algérie française ; que l'on cesse de nous salir et de nous insulter dans des manuels d'histoire qui apparaissent davantage comme des instrument de propagande politique que comme des ouvrages scolaires.

Maurice CALMEIN.