EDITORIAL
Maurice Calmein, du Comité de rédaction
10 sur 10 pour nos enseignants
!
----------Fils
d'instituteurs algériens, petit-fils d'une grand-mère institutrice
métropolitaine qui partit pour l'Algérie, élevé
et presque né dans une école d'Oranie, c'est avec joie et
fierté que j'apporte aujourd'hui ma modeste contribution à
ce numéro de L'Algérianiste consacré à l'enseignement.
----------L'école
est cependant un sujet qui touche profondément chacun d'entre nous
car il évoque de nombreux souvenirs en même temps que la
plus belle période de notre vie : notre enfance.
----------L'école
d'Algérie, c'était d'abord des images, des odeurs, des jeux
(les billes, les noyaux, la toupie, le pitchac, les parties de "
Papa-Finga ", etc.), des amis aussi, disparus depuis dans la tourmente
de l'exode.
----------C'était
aussi une excellente école car issue du peuple qui naissait dans
ce pays et qui, comme tous les peuples jeunes, avait soif de connaître,
de s'instruire, de s'élever.
----------Deux
preuves de la qualité de l'enseignement que nous avons reçu
me viennent à l'esprit. La première réside dans le
fait que beaucoup d'enfants d'Algérie ont atteint un niveau de
connaissance, de compétence et de responsabilité élevé.
On ne compte plus aujourd'hui les savants, médecins, professeurs,
avocats, chefs d'entreprises, grands journalistes, écrivains, hauts
fonctionnaires et officiers supérieurs pieds-noirs ou Français
musulmans.
----------C'est
peut-être aussi de cet enseignement que nous avons tiré un
sens certain des valeurs morales.
----------La
deuxième preuve, je l'ai rapportée d'un récent voyage
en Algérie au cours duquel j'ai pu constater que, malgré
une politique d'arabisation forcenée, la grande majorité
des hommes, des femmes et même des enfants, qui vivent aujourd'hui
dans ce pays parlent français entre eux.
----------L'école
d'Algérie, c'était enfin le premier contact avec l'autre
: le Juif, le Kabyle, l'Arabe, le Roumi, le Métropolitain, l'Espagnol.
Les premières comparaisons, les premières amitiés
transcendant les différences ; la découverte de traditions
et d'expressions différentes ; l'acquisition, au contact de cette
diversité, d'une " plus-value socio-culturelle ", d'une
richesse intérieure. Ce fut le premier creuset où vinrent
se côtoyer, puis se fondre, les différentes civilisations
qui se rencontrèrent sur notre terre.
----------Il
était indispensable que notre revue rendît hommage à
ces milliers d'instituteurs et de professeurs qui, non seulement contribuèrent
à répandre la culture française, mais surent aussi
éduquer, aider, soigner ceux qui en avaient besoin.
----------Combien
de fois ai-je entendu mes parents raconter comment, alors qu'ils étaient
instituteurs du bled, ils avaient dû soigner la teigne, apprendre
l'hygiène à leurs élèves, et jouer bénévolement
le rôle d'écrivain public pour les adultes du village !
----------Cette
page de notre histoire est souvent passée sous silence car on préfère
ne présenter de nous que les images peu flatteuses d'un colon esclavagiste
ou d'un militaire brutal et impérialiste écrasant sous sa
botte les traditions ancestrales.
----------Lorsque,
d'aventure, on évoque l'enseignement en Algérie, c'est pour
en déformer ou en salir l'image. Et le mensonge n'est pas rare
dans ces cas-là...
----------Ainsi
nous a-t-on laissé entendre, lors de la diffusion du lamentable
feuilleton télévisé " Les chevaux du soleil
", que les enfants arabes n'étaient pas admis à fréquenter
les écoles françaises !
----------On
accuse aussi nos enseignants d'avoir appris à leurs élèves
que leurs ancêtres étaient des Gaulois !
Non seulement cette " accusation-tarte à la crème "
est stupide et infâmante, car elle revient à prendre vraiment
nos instituteurs pour des imbéciles, mais, ce qui est plus grave
encore, elle est totalement injustifiée. Beaucoup de Pieds-Noirs
se souviennent sans doute, comme moi, du manuel d'histoire de l'Algérie
qui nous était donné à l'école primaire, en
même temps que le livre d'histoire de France. Dans quelle autre
province française procède-t-on ainsi, même en 1981
?
----------Ayons,
en revanche, une pensée émue pour tous les petits descendants
de Vikings, Romains et autres Vandales que l'on abuse aujourd'hui encore
en leur faisant croire que leurs ancêtres étaient des Gaulois
!....
----------Je
me contenterai d'un souhait, en guise de réponse à ces accusations.
Que l'enseignement français actuel soit aussi bon et objectif que
le fut celui de l'Algérie française ; que l'on cesse de
nous salir et de nous insulter dans des manuels d'histoire qui apparaissent
davantage comme des instrument de propagande politique que comme des ouvrages
scolaires.
Maurice CALMEIN.
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