Alger, Algérie : documents algériens
Série militaire

Le port d'Alger*
mise sur site le 16-6-2011
* Document n° 2 de la série : Militaire - Paru le 30 septembre 1946 - Rubrique MARINE

36 Ko
retour
 
D'autres pages sur le port d'Alger
- Le port
- Les ports maritimes algériens : Alger
- Autres documents algériens : le port d'Alger

Le Port d'Alger

LE SITE D'ALGER.

Le site d'Alger est géographiquement médiocre et rien n'y appelait à priori la fondation d'une capitale ou d'un port ; il n'y a là ni l'aboutissement d'une grande voie fluviale, ni le débouché d'un arrière- pays considérable, ni l'abri sûr qui invite à développer une grande cité maritime.

Alger est situé au pied du massif de la Bouzaréa qui culmine à 407 mètres, mais la configuration de la côte à partir du Cap Caxine, l'orientation Nord-Sud du port, ne lui assurent qu'une protection naturelle aléatoire dans une baie ouverte aux courants et à presque tous les vents.

L'histoire de la région d'Alger abonde d'ailleurs en catastrophes maritimes : la plus célèbre est celle qui fit échouer Charles-Quint devant Alger lorsque 150 bâtiments (le quart de sa flotte) furent détruits dans la nuit du 25 au 26 octobre 1541.

Cette hypothèque d'ordre nautique a longtemps pesé et pèse encore dans une certaine mesure sur le port d'Alger.

Le port d'Alger est devenu ce qu'il est en raison de sa situation centrale sur la côte d'Afrique du Nord (situation qui a en outre l'avantage d'être à mi-chemin entre les ports de l'Europe du Nord et le Canal de Suez) et en raison du rôle joué par la ville d'Alger ; il a commencé comme base principale d'opérations de l'Armée d'Afrique, il s'est développé ensuite parallèlement à la capitale politique de l'Algérie et en fonction de nécessités économiques croissantes.

LES ORIGINES.

Alger ( Alger est la corruption du nom arabe cl' " El-Djezaïr " (les îles), sans doute à cause des rochers dont la réunion constitue aujourd'hui l'îlot de l'Amirauté.) n'apparaît réellement dans l'histoire qu'au XVIè siècle, lorsqu'elle devint vassale de l'Espagne, ainsi que les principales villes de la côte.

Les Espagnols construisirent alors sur l'îlot situé en face de la ville le Fort du Penon, mais leur domination fut de courte durée.

Le célèbre pirate Khaïr-Ed-Din Barberousse, qui était à ce moment l'allié de François Ier, s'installa à Alger et s'empara du Penon en 1529.

Ce fut lui qui fit construire aussitôt par des esclaves chrétiens une jetée reliant le Pernon à la terre et un môle qui constituèrent le premier port d'Alger.
Ce port dura jusqu'à la conquête et demeura le principal repaire de la piraterie barbaresque, en dépit de ses imperfections nautiques qui obligeaient les bâtiments à aller hiverner à Bougie.

Alger abrita ainsi pendant trois siècles une curieuse association de forbans, qui connut son apogée au début du XVIIè siècle.

Les interventions contre Alger furent multiples, mais elles furent rarement puissantes et elles n'obtinrent jamais que des résultats temporaires.

Il y eut, entre 1505 et 1830, 43 expéditions de quelque importance contre le littoral algéro-tunisien, dont 19 furent dirigées contre Alger. Les Espagnols tentèrent deux fois de reprendre pied à Alger, en 1571, sous Charles-Quint, puis en 1775, et essuyèrent chaque fois un échec complet.

Avant la conquête d'Alger, les Français avaient une situation commerciale relativement privilégiée; cependant, les exactions, les infidélités aux accords conclus nous amenèrent à intervenir également et à faire au cours du XVII' siècle, douze expéditions dont quatre contre Alger ; la plus importante est
celle que commanda Duquesne en 1682, qui détruisit une cinquantaine de maisons ; c'est en représailles que le Père Le Vacher, notre représentant à Alger, fut attaché à la bouche d'un canon et que ses membres furent jetés en défi à nos bâtiments en 1683.

Mais nos consuls d'Alger, établis depuis 1577, n'en furent pas moins maintenus jusqu'à la conquête, laquelle eut, comme on le sait, pour prétexte, le coup d'éventail que donna le Dey Hussein à notre dernier représentant, M. Deval.

LE PORT D'ALGER DE 1830 A 1870.

Le mérite de l'expédition d'Alger revient à Charles X et à son Ministre de la Marine, le baron d'Haussez ; ils surent triompher de nombreux obstacles, notamment de l'opposition de l'Angleterre et de l'hostilité des chefs de la Marine qui réalisaient mieux que tous autres les difficultés d'un débarquement sur une côte inhospitalière.

L'expédition comprenant 38.500 hommes et environ 400 bâtiments, sous le commandement du Général de Bourmont et de l'Amiral Duperré.

Le débarquement se fit dans la baie de Sidi-Ferruch et aboutit en 20 jours à la prise d'Alger, le 5 juillet 1830.

La darse des Turcs, en raison même de sa petitesse et de ses défauts nautiques, convenait assez bien à des corsaires qui y trouvaient un refuge inviolable ; elle ne pouvait convenir, même dans la plus modeste mesure, aux besoins maritimes de la France.

Les projets et les travaux concernant le port d'Alger ont suivi les vicissitudes de notre politique algérienne ; pendant les premières années, lorsque le vent était à " l'occupation restreinte "", il était évidemment difficile de prévoir et d'entreprendre de grands travaux.

Le soulèvement d'Abd-el-Kader, en 1839, nous obligea à accroître nos forces miliaires et, par suite, à envisager l'extension du port qui était leur base principale d'opérations ; ce n'est pourtant qu'en 1848, après de multiples tergiversations, qu'on fut d'accord pour un plan définitif qui devait aboutir à " l'ancien port " actuel.

C'est le Second Empire qui donna au port aussi bien qu'à la ville d'Alger la physionomie qu'ils ont sensiblement gardé depuis ; cette impulsion fut sanctionnée par la visite, en 1860, du couple impérial, visite au cours de laquelle fut inaugurée, sous le nom de Boulevard de l'Impératrice, la vaste avenue qui domine le port et qui est une des beautés d'Alger.

Pendant toute cette période, le port d'Alger répondait surtout à des besoins militaires. La Marine de guerre, en effet, ne fut pas seulement le soutien indispensable de toutes les opérations, elle resta pendant longtemps le lien quasi unique avec la Métropole aussi bien qu'entre les villes de la côte, tant que les liaisons terrestres entre ces dernières restèrent insuffisantes ou dangereuses.

C'est ce qui explique qu'un premier projet de l'Ingénieur hydrographe Lieussou ait prévu un important port de guerre au Sud de l'îlot de l'Amirauté, le port de commerce étant rejeté au Nord sans possibilité d'extension. Quant au projet final de 1848, il prévoyait dans le Sud du port la construction d'établissements pour la Marine, toujours dans le cadre de l'idée première qui était de faire d'Alger un Toulon africain.

L'achèvement de la conquête, la mise en service en 1842, de lignes de navigation normales, le développement du cabotage privé, firent passer progressivement Alger du plan militaire sur le plan commercial.

En 1857, il fut décidé qu'Alger ne serait qu'un port de réparations et de ravitaillement ; l'évolution fut marquée ensuite par la loi douanière de 1867 qui faisait de l'Algérie un prolongement du territoire français et créait un courant de transactions régulier, enfin en 1869 par l'ouverture du Canal de Suez, qui allait développer le rôle d'Alger comme port d'escale.

LE PORT D'ALGER DE 1870 A LA GUERRE DE 1914-1918.

La guerre de 1870 interrompit l'essor du port d'Alger dont les travaux ne purent être repris que vers 1879.

Il fallut d'abord diminuer le ressac qui restait parfois très violent, et, jusqu'à la fin du XIXe siècle, on se préoccupa surtout d'améliorer l'ancien port, d'abord en prolongeant et en renforçant la jetée Nord, ensuite à partir de 1892 en rétrécissant la passe d'entrée, amélioration qui devenait possible avec la raréfaction des naviresà voiles.

La mise en valeur progressive de l'Algérie, et notamment de la plaine de la Mitidja dont Alger est le débouché naturel, le développement énorme du nombre des bâtiments en relâche, rendirent urgent le développement du port d'Alger ; le bassin de l'Agha, commencé en 1897, fut livré au commerce dès 1912.

C'est pendant la période qui précéda la guerre de 1914 qu'Alger se développa de façon extraordinaire, presque soudainement : la ville, qui avait 96.000 habitants en 1896, en comptait 206.000 en 1921.

Le trafic du port se développa parallèlement au développement économique de l'Algérie et en particulier de la région d'Alger.

Il faut aussi faire intervenir le cabotage qui, si ingrate que fut la côte d'Algérie, y a toujours été et y demeure une nécessité absolue, car on peut dire que les voies terrestres le long de la côte y sont plus ingrates encore que les voies maritimes.

Il faut enfin signaler le rôle important d'Alger comme port de relâche ; ce rôle n'a cessé de croître avant 1914 ; aux avantages de sa position géographique, Alger joint en effet celui d'une escale agréable et celui d'une eau excellente.

Alger était en outre très fréquenté par les compagnies de tourisme et servait de tête de ligne aux bâtiments conduisant chaque année les pèlerinsà la Mecque.

LE PORT D'ALGER DE 1914 A 1939.

Le port d'Alger n'a pas joué de rôle essentiel au cours de la guerre 1914-1918 ; l'activité générale du port a fortement diminué, et ce n'est que lentement qu'elle a repris après 1918.

Avant même que soit achevé le bassin de l'Agha, on avait projeté en 1913 l'extension du port d'Alger par la construction d'un avant-port de 115 hectares et de deux nouveaux bassins dits de Mustapha et du Hamma, l'un de 80, l'autre de 60 hectares, le second comportant trois formes de radoub de 300, 200 et 150 mètres.

Ces projets, interrompus par la guerre, furent votés en 1921 et la première pierre du bassin de Mustapha fut posée en 1922 par M. Millerand, Président de la République.

Conçu dans une période de prospérité, le programme de 1921 dut être ramené à des proportions plus modestes ; on commença par le bassin de Mustapha, bassin qui, en 1939, était déjà très avancé, puisqu'il n'y manquait que le second môle ; on n'envisage plus d'autre part qu'une seule forme de radoub supplémentaire, de 200 m., à construire au môle Amiral-Mouchez, à côté des deux formes déjà en service.

On dut entre temps, à la suite de violentes tempêtes en 1930 et 1931, renforcer la protection générale du port contre les gros temps, et notamment prolonger la Jetée Nord ; grâce à ces travaux, le ressac a considérablement diminué dans le port.

D'autres améliorations ont été effectuées entre les deux guerres: constructions d'un quai des combustibles sur la jetée extérieure, agrandissement du môle Al-Djefna, construction du môle de pêche, construction du " Môle des Voyageurs " destiné à recevoir la nouvelle Gare maritime, perfectionnement et multiplication de l'outillage, etc...

Enfin, l'extension du port vers le Sud-est a permis d'étendre les terre-pleins dont l'insuffisance - due à la géographie - était une cause de faiblesse pour l'ancien port d'Alger.

LE RÔLE MILITAIRE DU PORT D'ALGER JUSQU'EN 1939.

Depuis 1871, le rôle militaire d'Alger était bien atténué ; cantonnée dans le petit coin vieillot de l'Amirauté, la Marine de guerre n'entretenait plus qu'un modeste point d'appui pour petits bâtiments.

Mais le port d'Alger restait un des principaux points d'embarquement de nos troupes d'Afrique vers la Métropole.

D'autre part, il était toujours prévu pour recevoir et ravitailler éventuellement des bâtiments de guerre et il n'a jamais cessé d'être fréquenté par eux, au cours de leurs croisières.

La plus importante manifestation de la Marine de guerre à Alger fut la très belle Revue navale qui eut lieu le 10 mai 1930, à l'occasion du Centenaire de l'Algérie.

La guerre de 1939 allait de nouveau remettre Alger dans l'ambiance guerrière qu'elle n'avait plus connue pratiquement depuis 1830 et redonner à la Marine à Alger, une importance éphémère et inattendue.

LE PORT D'ALGER PENDANT LA GUERRE DE 1939-1945.

Comme pendant la guerre de 1914-1918, le port d'Alger ne joua d'abord qu'un rôle effacé.

C'est avec les événements du 8 novembre 1942 qu'Alger entre véritablement dans l'histoire de la guerre et va y jouer pendant deux ans un rôle prépondérant.

Dès le 9 novembre 1942, le port d'Alger, placé sous le commandement britannique, entrait à nouveau dans l'effort de guerre allié, avec un concours français qui s'est affirmé et accru progressivement.

D'importants débarquements de troupes et de matériel ont eu lieu sans arrêt, avec des pointes lors des opérations de Tunisie (janvier, février 1943), lors du débarquement de Sicile (juin, juillet 1943), enfin lors du débarquement en France (août, septembre 1944).

Les périodes les plus actives furent celles de février 1943, où l'on vit une arrivée de 42 cargos le même jour, et celle de juin-juillet 1943, au cours de laquelle on vit jusqu'à 210 bâtiments à la fois dans le port.

Les bassins de radoub et les ateliers de réparations ont fourni, de leur côté, un travail considérable.

Les alliés ont surtout utilisé le môle Billiard (mole n° 1 du bassin de Mustapha), qui avait été spécialement étudié et construit, d'ailleurs, pour les mouvements de troupes et de matériel de guerre.

Ils ont, en outre, surtout depuis 1944, utilisé largement Alger comme port d'escale) ; l'importance exceptionnelle du port, comme point de ravitaillement en eau (qualité et abondance) a été mise de nouveau en relief.

L'effort français dans le port d'Alger, comme dans tous les ports d'Afrique du Nord, a été spécialement méritoire parce qu'il s'exerçait avec une main-d'œuvre mal nourrie, peu habillée, dont les cadres étaient réduits par une mobilisation sévère, et avec un matériel usé qu'il était difficile de réparer.

Il s'est surtout exercé en dépit des attaques aériennes ( 39 attaques dont 22 avec bombardement.) et sous-marines de l'ennemi, en dépit de 3 grosses explosions qui causèrent la mort de quelque 300 hommes (dont un tiers de civils) et qui ont laissé dans le port ou dans la rade le témoignage éloquent de dix épaves.

LA MARINE A ALGER PENDANT LA GUERRE 1939-1945.

Alger, pendant toute la période qui s'étend du 8 novembre 1942 à la libération de la France, a joué plus ou moins un rôle de capitale et a été le siège des diverses organisations qui ont finalement abouti au Gouvernement provisoire de la République française.

Alger est devenu ainsi en même temps qu'une importante base militaire, un important centre administratif et politique.

C'est dans ce cadre qu'à la fin de 1943 les Services du " Commissariat à la Marine ", héritiers des " Forces maritimes d'Afrique " dont la direction était à Casablanca, et des " Forces navales françaises libres " dont la direction était à Londres, se sont organisés à Alger ; ils y sont restés jusqu'à la réinstallation du Ministère de la rue Royale, à l'automne de 1944.

Cette période de cohabitation avec l'état-major général et les Services du Commissariat à la Marine fut pour la Marine à Alger extrêmement active.

Son modeste établissement, devenu une véritable " plaque tournante " de toute la Marine, a dû faire face à un afflux continuel de personnel provoqué par la mobilisation, par la création de nouvelles unités, par l'organisation des Services féminins, enfin par la réception de nombreux évadés.

Alger devint pendant cette période la base d'opérations de nombreux navires qui ne lui étaient 4 pas affectés en propre et la principale tête de ligne, notamment pour nos liaisons avec l'Angleterre, avec l'A.O.F., et finalement avec la côte Sud de France.

C'est d'Alger que sont parties les troupes qui, avec la reconquête de la Corse, ont commencé la libération de la Métropole ; c'est ensuite la Marine à Alger qui a organisé les convois et maintenu les liaisons indispensables.

L'automne de 1944 a vu la fin de la période que l'on peut dire opérationnelle ; l'activité de la Marine à Alger a alors changé de caractère :
Les questions de relève, de rapatriements, de permissions, les débuts de démobilisation, toutes choses fort importantes pour le moral du pays et la remise en place définitive de bien des déracinés sont devenues essentielles.

Alger, pratiquement seule tête de ligne au moment de la reprise des relations avec la Métropole, a assumé ainsi une charge d'autant plus lourde que c'est la période au cours de laquelle nous avions à recueillir dans divers domaines la succession des Britanniques, et à retrouver ainsi quelque souveraineté.

LE RÔLE D'ALGER COMME PORT AÉRONAVAL.

C'est la Marine qui a installé pendant la guerre de 1914-1918 la base d'aéronautique de l'Agha.

Cette base vendue en 1920 à la Chambre de Commerce, a desservi la ligne commerciale d'hydravions Alger-Marseille.

Au moment de la guerre de 1939, Alger était une des " Bases de départ " de l'Aéronautique navale, avec un centre de captifs.

Mais cette base de l'Agha s'était révélée dès 1932 pleine de dangers et d'inconvénients.

La protection insuffisante de la baie d'Alger oblige les hydravions à décoller ou à amerrir généralement à l'intérieur du port ; l'accroissement des dimensions des appareils utilisés, l'encombrement croissant du plan d'eau de Mustapha rendirent la manœuvre de plus en plus difficile et dangereuse ; l'existence de la Base restreignait les possibilités d'amarrage des bâtiments le long des quais voisins et empêchait l'extension prévue des terre-pleins.
Aussi avait-on envisagé une autre base d'hydravions et examiné à cet effet divers projets ; ces projets reposaient sur la prééminence de l'hydravion et sur la nécessité de pouvoir appuyer une flotte aérienne sur Alger, tant du fait de sa situation géographique que de son importance administrative et militaire.
Cependant, dès 1938, on s'était orienté vers la solution de l'emploi d'avions terrestres, et la ligne commerciale devait, à partir du 1" janvier 1942, utiliser le terrain de Maison-Blanche.

La Marine avait d'ailleurs, dès 1925, prévu une base sur ce terrain, et la première tranche de travaux était achevée en 1929 lorsque la base fut cédée au Ministère de l'Air.

La guerre a confirmé ces vues et l'aviation alliée, depuis novembre 1942, n'a guère utilisé, à Alger, que des appareils terrestres ; on peut dire qu'Alger n'est plus qu'occasionnellement un point de relâche pour les hydravions qui utilisent normalement les plans d'eau bien préférables d'Arzew et de Bizerte.

L'emprise alliée depuis 1942 et la future emprise commerciale sur le terrain de Maison-Blanche ont amené le repli de l'aviation militaire française d'Alger sur le terrain de Boufarik.

L'Aéronautique navale y a installé une petite base avec un détachement de liaison, des appareils de servitude et des avions de transport.

L'AVENIR DU PORT D'ALGER.

A la fin d'une guerre qui fut dévastatrice pour presque tous nos ports de la Métropole, Alger, comme les autres ports de commerce de l'Afrique du Nord, a l'avantage immense d'être à peu près intact. Encore ne faut-il pas oublier que son exploitation intensive a épuisé les rechanges et usé considérablement un matériel qu'il faut d'abord reconstituer ou remettre en état.

La reconnaissance du port d'Alger dépendra ensuite de plusieurs inconnues :
Comment se rétabliront les relations essentielles avec la Métropole ? A cet égard, la destruction des ports métropolitains peut réagir sur l'Algérie.

Si le monopole du pavillon français, en vigueur depuis 1889, doit être maintenu, ces relations seront essentiellement fonction de la reconstruction, qui peut être longue, de notre Marine marchande.

Dans quelle mesure le trafic des voyageurs, si important jadis pour Alger, sera-t-il perturbé par la mise en service de lignes aériennes puissantes ?
Comment l'économie algérienne, largement perturbée par la guerre, matériellement et moralement va-t-elle évoluer ? Dans quelle mesure sera-t-elle affectée par le nouveau statut des indigènes, par le séjour et par l'interférence des alliés en Afrique du Nord ?
Quand pourra-t-on établir à Alger la zone franche dont il est question depuis longtemps et qui favoriserait le développement de certaines industries, celles du tabac par exemple ? Cet établissement est lié à la construction du deuxième môle du bassin de Mustapha, c'est-à-dire à des travaux encore lointains ( Mentionnons pour mémoire la reprise possible des travaux du Transsaharien, qui intéressent avant tout le port d'Oran.).

La Chambre de Commerce d'Alger, dans sa séance du 10 mai 1944, a maintenu pour l'avenir le programme d'agrandissement interrompu par la guerre mais en donnant la priorité aux travaux visant à améliorer le port actuel : diminution du ressac, perfectionnement de l'outillage et des installations, en particulier des installations frigorifiques qui pourront favoriser l'exportation des primeurs.

Les événements de 1942 ont donné à Alger où y ont accru certaines caractéristiques d'un port militaire : quelques petits bâtiments y ont été basés normalement, des écoles y ont été créés, une Direction des constructions et armes navales s'y est développée.

Cet aspect survivra sans doute quelque temps car il nous faudra utiliser au maximum les ressources qui nous restent en attendant la remise en état de nos installations métropolitaines.

Cependant la situation acquise de la Marine à Bizerte, les projets de Mers-el-Kébir et de Casablanca ramèneront probablement la Marine - qui ne peut se disperser sans dommage - à reprendre à Alger une situation analogue (2) à sa situation d'avant guerre.

Mais la guerre a fait d'Alger, beaucoup plus qu'un port de guerre, un " port en opérations " ; tout port de commerce devient " port en opérations " dès l'instant qu'il se trouve dans la zone-3 des armées ou qu'il participe activement à des opérations militaires.

C'est sous cet aspect que la Marine se doit surtout d'envisager, en ce qui la concerne, l'avenir du port d'Alger.

Au seuil d'un monde nouveau, alors que bien des facteurs anciens de la prospérité d'Alger se trouvent perturbée, il est bien difficile de conclure.

Il y a encore trop d'incertitudes, comme nous l'avons vu, pour que l'on puisse essayer de sonder l'avenir ; il y a trop de besognes essentielles qui s'imposent aujourd'hui pour spéculer sur celles qui pourront s'imposer demain.

(2) Les principaux changements qui pourraient être entérinés sent :
----- le maintien à Alger et non plus à Bizerte, de l'autorité maritime la plus élevée en Afrique du Nord, pour qu'elle soit placée auprès des plus hautes autorités civiles et militaires correspondantes, et dans une situation centrale ;
----- le maintien d'une petite D.C.A.N., en liaison avec la construction de la nouvelle forme de radoub de 200 m.
----- le maintien d'écoles, qui pourraient devenir indigènes, au Cap Matifou.