Chéragas - Alger, ses alentours :
Beni-Messous, l'orphelinat
Souvenirs de Claude Ferrer

-Guides Bleus en 1955:« 16 km.,Guyotville, petite ville de 8100 hab.,à 25 m d'alt.,en bordure de mer.A g. de la rue principale, square et monument aux Morts, par Gaudissart.
-----Environs :-Plages de l'Ilot et de la Madrague (3km.N)- Dolmens de Beni-Messous(3 km S.E) dans la propriété Kuster (route de Chéragas, puis à dr.), un dolmen a été transporté au jardin du musée Stéphane-Gsell, à Alger.- Chéragas (7 km S.E), par une bonne route à travers les vignobles.

C'est le 22 août 1842 que Chéragas est créé, après Kouba, Douéra et El-Achour. Ce sera un village de 50 familles avec fortification, soit un mur d'enceinte et trois tours pour une brigade de gendarmerie. Il y aura 50 lots à cultiver répartis en fonction de la taille des familles : 20 lots de 8 ha, 20 de 6 ha et 10 de 4 ha. Le village ne doit pas être enclavé. Mais la route qui vient d'être construite de Dély-Ibrahim à Staouéli en passant par Béni-Messous évite Chéragas. (voir plan, je n'ai trouvé aucun Beni-Messous sur une carte d'époque ). On le raccorde donc par une traverse de 342 mètres, ce qui, croit-on, a valu la curieuse appellation de "Chéragas par la traverse", sujet inépuisable de plaisanterie.


mise sur site le 5-1-2008...+ le 19-2-2012

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Ce nom me rappelle six années de ma tendre enfance, c'est en effet, celui de l'Orphelinat auquel mon Père m'avait confié à la disparition brutale de ma Mère, emportée par un cancer du sein à Page de 41 ans.

Après ce décès, mon Père qui exerçait la profession de Commis de ferme, n'avait pas la possibilité de nous garder mon frère et moi auprès de lui. Je fus donc confié à cette Institution à l'âge de 7 ans. Cela peut paraître bizarre, mais c'est de ces années là que j'ai gardé le plus de souvenirs précis.

Une amie d'une de mes tantes travaillait dans cet établissement, c'est elle qui m'avait pistonné pour me faire admettre, et m'avait ensuite en quelque sorte pris sous son aile pour rendre moins douloureuse la séparation d'avec ma famille.A mon arrivée, elle m'avait conduit dans un dortoir à la place qui m'était affectée, et je me revois poser sur le radiateur situé prés de mon lit, les quelques livres illustrés que l'on avait pris soin de m'acheter. Ce dortoir me paraissait immense, j'étais un peu perdu, mais la présence de ma " Protectrice " me rassurait un peu, et comme j'étais de nature sage et obéissante, j'acceptais mon sort sans crise de larmes.

Cet orphelinat était de construction moderne, la façade aux murs tout blancs comportait de larges baies vitrées .L'entrée débouchait sur un vaste préau, avec au centre une cour (j'ai su plus tard qu'elle s'appelait Cour d'Honneur) agrémentée par un bassin central où trônait une énorme boule recouverte de petites faïences multicolores, et qui faisait office de fontaine. De larges couloirs plantés de gros piliers, entouraient cette cour et desservaient les divers services. Le bâtiment comportait deux ailes, les garçons occupaient la gauche, l'aile droite étant réservée aux filles, la mixité n'étant pas encore à la mode à cette époque.

Un petit couloir qui débouchait sur un hall, donnait accès à l'espace de vie, en face un long couloir desservait les deux dortoirs, eux-mêmes séparés par la chambre de la surveillante, au fond, les lavabos et les toilettes. Chaque aile comportait un grand préau, un réfectoire, ainsi que les salles de classes.

L'établissement accueillait des enfants très jeunes, qui logeaient au rez de chaussée, et ce qui m'avait impressionné à mon arrivée, lors de la visite des lieux, c'était l'alignement des mini-cuvettes de W-C et des mini-lavabos placés à faible hauteur afin qu'ils soient accessibles aux tous petits. C'était mignon comme tout !

La vie à l'orphelinat était bien entendu réglée comme à la caserne, sans pour autant découler d'une discipline stricte et rigide. Un personnel laïc nous encadrait, avec des surveillantes qui semblaient prendre en compte le manque de tendresse dont souffraient bien entendu les petits orphelins que nous étions.

L'orphelinat comportait un grand champ clos par un grillage, sous lequel nous passions pour aller chaparder du raisin dans la vigne toute proche. Outre ce champ, nos espaces de jeux se situaient dans le grand hall et dans la cour jouxtant les salles de classes.

L'enseignement se limitait au primaire. Un tableau d'honneur placardé dans le couloir donnant accès aux classes, recevait les noms du 1 er au 6ème des classements mensuels du CM2. J'ai eu l'honneur d'y figurer, souvent en pôle position. Ceci m'amène d'ailleurs à relater un événement qui est resté gravé dans ma mémoire. Nous étions en fin d'année scolaire 41/42, elle se terminait par la remise des prix. Je dois préciser tout d'abord que le ler de la classe du CM2 avait l'honneur de hisser chaque jour les couleurs, devise de l'époque oblige " Honneur, Famille, Patrie ". Ce jour là,un Inspecteur d'Académie avait fait le déplacement.Tous les élèves alignés en rangs serrés qui observaient un silence parfait, lui faisaient face, sauf moi qui me trouvais derrière lui au pied du mât . Ce personnage, prenant la parole, indiqua qu'il allait appeler un à un les récipiendaires, et qu'a l'annonce de leur nom les élèves lèveraient le bras. Vous aurez compris qu'étant préposé aux couleurs j'étais le 1er de la classe. A l'annonce du premier nom, le mien, je levai le bras, l'Officiel ne voyant personne obtempérer, s'adressa au Maître : Cet élève n'est pas là ? Mais si Mr L'Inspecteur, il est derrière vous ! Et c'est ainsi que je reçu le ler Prix, en l'occurrence un beau livre dédicacé par le Maréchal Pétain. Un regret cependant, ce livre n'a pas survécu à l'exode.

Bien qu'a l'époque nous soufrions des restrictions, la nourriture était suffisante. Ce qui me déplaisait cependant, c'était l'assiette de soupe à la semoule que l'on nous servait en guise de petit déjeuner le matin, mais quant on a le ventre vide, le palais s'accommode !!

Passage obligé, la ration d'huile de foie de morue ;A présent,elle est parfumée, mais à l'époque ce n'était pas le cas, et l'on rechignait toujours lorsque l'on apercevait la surveillante brandir sa cuiller. Tous devaient, bon gré, malgré y passer, et cette brave dame s'assurait, avant que l'on tourne les talons, que nous l'avions bien avalée, en nous faisant rouvrir la bouche.

Comme je le disais plus haut, la discipline n'était pas trop sévère, bien que de temps en temps quelques petites fessées s'abattaient. Mais une punition que l'on n'appréciait guère, c'était la privation de notre barre de chocolat qui accompagnait la tartine de pain servie au goûter de l'après-midi.

Lorsque nous étions en liberté dans le champ, nous en profitions pour aller faire un tour à la décharge des cuisines, pour nous approvisionner en trognons de chou ou chou-fleur. Alors là, celui qui avait la chance de posséder un petit canif, chose rare, était l'objet de toutes les attentions, car il fallait parvenir à dépiauter les trognons, pour en retirer le cœur, objet de nos convoitises.

Une activité qui ne nous déplaisait pas, car nous la considérions comme un amusement, était le cardage de la laine de nos matelas. Un vrai chantier s'installait tout le long du grand couloir qui desservait les chambres. Les surveillantes décousaient les toiles, et de gros tas de laine en ressortaient. Notre travail consistait, avec nos petits doigts à défaire les boules et les enchevêtrements de la dite laine, afin de lui redonner du volume, et le soir cela nous faisait tout drôle de nous allonger sur un matelas tout gonflé.
IL est arrivé à plusieurs reprises, qu'un pensionnaire se fasse la belle, tentative aisée lorsque nous étions lâchés dans le champ, le grillage de clôture ne présentant pas un obstacle infranchissable. Bon nombre de familles habitaient Alger toute proche, et le fugitif empruntait tout bonnement la départementale qui y menait, aussi il était souvent rattrapé avant qu'il ait eu le temps de se fondre dans la ville. En général le fugueur ne faisait pas une nouvelle tentative, car la menace de se voir transféré à l'Orphelinat de St Vincent de Paul, l'en dissuadait. En effet, le dit établissement était tenu par des Religieuses, et là on ne rigolait pas toujours, la discipline étant tout autre.

La visite des parents était permise le dimanche. J'attendais ce jour avec toujours l'espoir d'être appelé pour revoir mon Père ou une de mes Tantes, l'espace d'un après midi. C'était aussi l'occasion de recevoir quelques friandises, que l'on partageait bien entendu avec les petits copains. Quand le dimanche se déroulait sans visite, un petit coup de chagrin s'installait, et il fallait retenir ses larmes.
Au cours de l'année 1942, dernière de mon séjour là-bas, se produisit un événement qui me fait maintenant sourire quand je l'évoque.

A la suite d'une punition générale que nous" les grands," avions jugée imméritée, une révolte (un bien grand mot pour les minus que nous étions), avait été décidée. Nous n'avions pas une idée précise de la forme qu'elle devrait revêtir, mais nous étions tous d'accord qu'il fallait que l'on se fasse entendre. Après maints palabres et conciliabules, un plan d'action fut mis au point. Le jour J, consigne fut donnée à toute la chambrée de récupérer après le repas du soir, les cars et les cuillers. Munis de ses ustensiles dissimulés sous nos vêtements nous avions regagné notre dortoir. Conformément aux instructions données par les meneurs, hum... .dont je faisais partie, tout le monde devait se mettre au lit comme si ne rien n'était, et après l'extinction de la lumière, attendre que la surveillante rassurée par le calme régnant dans la chambrée , ait fermé la porte de sa chambre, et se soit endormie.

Ainsi donc, tard dans la nuit, les préparatifs de la révolte commencèrent conformément aux instructions. Outre la porte de la chambre de la surveillante, le dortoir communiquait avec le couloir par une porte centrale à deux battants. Le plan consistait d'abord, à bloquer ces deux accès. Avec d'infinies précautions, et en nous mettant à plusieurs, deux lits furent soulevés et déposés contre ces portes, et pour renforcer la barricade, deux autres lits vinrent appuyer les premiers. Ainsi tout était en place pour que la révolte démarre ! !

Au signal donné par le Chef,(ce n'était pas moi !!), les cuillers se mirent en branle en cognant sur les cars, ainsi que sur le sceau à pipi, ceci accompagné de cris et de sifflements, ce qui provoqua un vacarme indescriptible. La première à réagir fut bien entendu la surveillante, laquelle tirée de son sommeil se précipita sur la porte, mais celle-ci ne céda pas. Le vacarme dura un long moment, les cuillers frappaient les cars à qui mieux mieux, tantôt en cadence, tantôt dans le plus grand désordre, jusqu'au moment ou un cri provenant du couloir se fit entendre. C'était le Directeur Mr Glatz qui tiré de son lit par la surveillante, tentait d'ouvrir la porte centrale. Ouvrez cette porte de suite criait-il !. Il faut avouer que nous ne la menions pas large, aucun d'entre nous, même pas le Chef n'osait répondre. Après un long silence, le Directeur repris : Je vous donne une demi-heure pour rouvrir cette porte, après quoi j'appelle les Gendarmes ! !

Ayant plus ou moins la trouille, et sans même nous consulter, nous entreprîmes la levée des barricades, et chacun ensuite, de sauter dans son lit et de s'enfouir sous la couverture. Silence total, on aurait entendu une mouche voler. Un long moment s'écoula avant que l'on entende des bruits de pas dans le couloir, annonciateurs du retour du Dirlo ; Tout le monde bien entendu feignait de dormir. Après un sermon suivi de menaces de représailles, il brandit sa canne, et passant de lit en lit il asséna à chacun d'entre nous un coup a hauteur des fesses, partie pro imminente de la couche. Le lendemain matin, la surveillante y alla aussi de sa série de remontrances, mais il n'y eut pas d'autres conséquences, et somme toute nous étions plutôt satisfaits de notre démonstration de force ! !

Mon récit et l'évocation de ces quelques souvenirs auraient pu s'arrêter là, si je n'avais pas eu la chance de retrouver récemment, ici en France un co-pensionnaire. En effet depuis pas mal de temps, l'idée de retrouver quelqu'un qui aurait pu être à la même époque que moi en cet Orphelinat, me trottait dans la tète. Aussi je me décidai a faire insérer un avis de recherche dans la Revue " Les Enfants de l'Algérois,et quelle fut ma joie de recevoir quelques jours après une lettre de Lucien ISEN, dans laquelle il me disait qu'il se trouvait aussi à mon époque à L'Orphelinat de Beni-Messous.

Aussi je pris sans tarder la décision d'aller le retrouver à Perpignan Ville ou y résidait, et ce ne sont pas les 300 km qui nous séparaient qui allaient me rebuter.

Plus de 60 ans s'étaient écoulés depuis notre séjour à l'Orphelinat, aussi au moment des retrouvailles, nous ne nous sommes pas reconnus physiquement, mais par contre ensuite, quelle foule de souvenirs communs nous avons pu évoquer.

Si comme je le disais plus haut, j'avais bien en mémoire la topographie des lieux, Lucien lui, en plus de cela, se souvenait d'une foule de détails, mais également du nom de bon nombre de personnes composant le personnel ; Il m'a cité, Mr Kayron Directeur ayant précédé Mr Glatz, Mr et Mme Mercier les Instituteurs, Melle Granger Infirmière, les cuisiniers Mr et Mme Laurin, à l'entretien Mr Ducreux , les surveillantes Mmes Estève et Pagés, cette dernière lisant dans les lignes de la main ! ! , et l'Abbé Guintz.
Lucien m'a précisé, qu'à l'époque l'Orphelinat de Beni-Messous était l'établissement de ce type, le plus moderne de France. 350 pensionnaires y étaient accueillis, filles et garçons, chrétiens et musulmans, répartis par dortoirs de 30 enfants, dont bon nombre de tout-petits.

Lucien m' a raconté en outre, ce qui l'avait profondément marqué, c'étaient les journées d'adoption ; Les orphelins de père et mère, qui n'avaient donc plus de parents, étaient alignés sous le préau entourant la cour d'Honneur, et là, les couples désireux d'adopter, faisaient leur choix; bonheur mêlé de crainte pour ceux qui partaient, désillusion pour les autres, mais peut être ,avec quelque part une forme de soulagement de ne pas être arrachés à cet environnement où ils avaient tous leurs repères.

Pratique médicinale employée à l'Orphelinat et que Lucien m'a aussi rappelée, le traitement des engelures, dont beaucoup d'entre nous souffraient. Elle consistait à plonger ses mains dans le seau d'urine qui trônait au centre du dortoir, et qui le matin contenait tous les trop-pleins de nos petites vessies. Dire que c'était vraiment efficace, je n'irai pas jusque là ! !

Lucien se souvenait aussi de l'environnement de L'Orphelinat, la forêt de Baïnem toute proche, ou l'on allait cueillir des arbouzes, le cimetière Musulman lieu d'approvisionnement en figues de barbarie, les fermes Ricome et Vidal, les vestiges Romains etc.

Vous dire combien j'ai apprécié ces retrouvailles, j'avais en moi ce besoin de retrouver quelqu'un qui avait eu ce même vécu, en quelque sorte un témoin de cette période de ma tendre jeunesse, c'était comme si je recherchais un parent.

Lucien, tout comme moi, n'avons pas gardé un mauvais souvenir de ces années passées à l'Orphelinat, et je n'ai jamais fait reproche à mon Père de m'y avoir placé, alors qu'il avait gardé mon frère auprès de lui. Lucien lui, va même plus loin, car là ou il m'a surpris et m'a laissé quelque peu perplexe, c'est quant il m'a dit : Les années passées à l'Orphelinat ont été les plus belles de ma vie ! A méditer non ?

Je terminerai mon petit récit, en exprimant le souhait qu'il soit lu par d'autres ex-pensionnaires de Béni-Messous, et que ceux-ci aient la gentillesse, s'ils en ressentent le besoin, de me contacter afin d'échanger, comme nous l'avons fait Lucien et moi des souvenirs de notre jeunesse Orphelinalisée ! !

le 18-2-2011 - ORPHELINAT de BENI-MESSOUS (suite)


Le souhait exprimé à la fin de mon premier commentaire sur l'Orphelinat de Béni - Messous est en train de se réaliser.

En effet, après avoir retrouvé Lucien ISEN, ce qui fut pour moi une grande joie, je souhaitais retrouver d'autres co-pensionnaires.

C'est ainsi qu'un beau matin à 8 heures, le téléphone sonne chez moi. Je me demandais qui pouvait bien m'appeler de si bonne heure (pour un retraité). Je décroche et j'entends : " Vous êtes bien Mr Ferrer ?, je vous téléphone d'Israël !!" Je pensais alors à une quelconque plaisanterie, mais cette dame poursuivit : " Je vous appelle de la part de ma mère qui était avec vous à Béni-Messous. Nous avons trouvé votre récit sur l'Orphelinat, sur le site de votre neveu Bernard Venis. Si vous saviez comme elle a pleuré à sa lecture, cela lui rappelait tant de souvenirs. Ma mère est a Marseille, mais elle n'ose pas vous téléphoner."

Qu'à cela ne tienne, je vais faire le premier pas , et l'appeler de suite. Le contact fut pris, suivi d'une visite à Marseille. Henriette occupe un gentil appartement dans un immeuble de l'avenue Maréchal Foch. Elle vit seule, ayant perdu son mari il y a quelques années.

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Henri et Henriette
Henri et Henriette

De confession Israélite, elle et son frère avaient été renvoyés de l'Orphelinat sous le régime Pétain, et après moult périples, la famille s'était retrouvée en Tunisie.

Mais chose étonnante, malgré tous ces chamboulements, Henriette a toujours conservé précieusement ses derniers cahiers de classe, que l'on appelait alors cahiers de composition, et, à l'occasion de cette visite je les ai parcourus. En CM2 notre maitresse nous faisait échanger nos cahiers entre élèves pour le contrôle des devoirs, et là, qu'elle fut ma surprise de retrouver mon nom au bas d'une de ses dictées que je lui avais contrôlée.
Ainsi, non seulement j'avais retrouvé en la personne d'Henriette une co- pensionnaire, mais chose inespérée, après plus de 70 années, une trace personnelle de ma présence dans cet établissement. J'avoue que cette découverte m'a quelque peu bouleversé.

Mais mes retrouvailles ne se sont pas arrêtées là. Nouveau contact téléphonique :
Pierre Marcadier m'appelle : "Tu es Claude Ferrer, j'étais à l'Orphelinat à la même époque que toi, et cela me ferait plaisir de te revoir. Seulement il y a un problème, je suis à Ajaccio !"

Pas de problème, la distance n'est pas un obstacle pour moi, je viendrai te voir un de ces jours. Et c'est ainsi qu'en avril dernier, retrouvailles dans le hall de l'Hôtel Impérial d'Ajaccio où j'étais descendu.

Tout comme avec Lucien Isen que j'étais allé retrouver à Perpignan, nous ne nous sommes pas reconnus physiquement, 70 années s'étant écoulées depuis l'époque où nous partagions les mêmes jeux sous le préau de l'Orphelinat.

Pierre a 85 ans, je m'attendais à trouver un petit pépé pantouflard, et c'est un phénomène que j'ai rencontré. Pierre a en effet une forme physique peu commune à cet âge. Il court comme un lapin, grimpe aux arbres, descend faire ses courses en courant et remonte pareillement en petites foulées, un phénomène vous dis-je !!. Il est connu comme un loup blanc à Ajaccio, il est vrai que Pierre a plusieurs cordes à son arc. Très habile au pinceau, j'ai en effet pu admirer plusieurs de ses toiles. Il fait partie de l'Association des Peintres Amateurs, et a accroché ses toiles à diverses Expositions.
Mais ce n'est pas tout, fan de Tino Rossi, il pousse allégrement la chansonnette avec une voix imitant son idole, surtout lorsqu'il entonne la fameuse chanson, AJACCIO.

Il n'est pas avare de paroles non plus, une tchatche de pied noir à la sauce Corse, c'est vous dire !! Son épouse dit d'ailleurs : quand il ne parle pas, il chante !! La plaisanterie, il aime cela aussi. Entre autres il m'a dit : Tu sais que nous avons le TGV en CORSE ?? Oui, le Train à Grande Vibrations !! Il m'a dit aussi :Tu as remarqué sur les routes , le goudron n'a pas toujours la même couleur. ? Quand il est noir c'est qu'il y a deux couches, c'est l'ENROBE, et quand il est rouge, c'est qu'il n'y a qu'une couche, et là c'est le DEROBE !!

Vraiment ces retrouvailles m'ont procuré beaucoup de plaisir, et je crois que cela a été réciproque. Lui-même et sa famille m'ont accueilli de façon bien sympathique et je pense qu'ils ont particulièrement apprécié le fait que je fasse ce voyage pour venir le retrouver. Pierre est natif de Constantine, et son épouse née à Alger est d'origine Corse ; Aussi Lucien a tenu à me conduire à MURZO, village natal de la famille Bonini, perché dans cette magnifique montagne Corse où serpente une route pas très large mais bien entretenue, qui vous l'aurez compris comporte très peu de lignes droites !! Pierre me faisait admirer la beauté des précipices au fonds desquels coulent les fleuves, noms donnés en Corse aux petits ruisseaux !!

Au lieu-dit U PONTE (Le Pont), nous avons fait une halte à midi, à la paillotte tenue par ses neveux Xavier et Marie-Pierre POLI, et là, j'y ai dégusté une des meilleures entrecôtes de boeuf cuite au feu de bois.

Halte à midi, à la paillotte : Claude Ferrer, Jeanine et Pierre Marcadier.
Halte à midi, à la paillotte : Claude Ferrer, Jeanine et Pierre Marcadier. Perpignan - septembre 2009
anciens pensionnaires de Beni-Messous.
Lucien Issen, Claude Ferrer



Tout comme avec Lucien Isen, que de souvenirs communs ont refait surface, les jeux de l'époque, comme la pelote fumée, fava-vinga, la toupie, les noyaux. Les repas dans ce grand réfectoire, les chambrées souvent théâtre de batailles rangées de polochons. Mais aussi ce grand champ, notre terrain de jeux préféré où l'on construisait des cabanes, et où l'on pouvait gambader à notre aise en jouant au gendarme et au voleur !!

Merci Pierre pour tout le plaisir que tu m'as procuré au cours de ces quelques jours passés en ta compagnie, aussi je peux dire que le voyage en valait vraiment la chandelle !!

Une autre personne qui avait séjourné à l'Orphelinat s'est également manifestée.

Nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises, nous avions même ensemble rendu visite à LUCIEN à Perpignan, mais nos contacts ont cessés. Aussi, n'ayant pas eu son accord pour la citer dans mon récit, je n'en dirai pas plus, ayant compris que cette personne ne souhaitait pas, pour des raisons qui sont les siennes, que l'on évoque ce passé.

Perpignan - septembre 2009
Perpignan - septembre 2009
anciens pensionnaires de Beni-Messous.
Lucien Issen, Claude Ferrer

Ce sont ainsi quatre co-pensionnaires que j'ai retrouvés, ce qui m'a procuré beaucoup de satisfaction, mais j'espère ne pas en rester là.

Aussi, si d'autres personnes ayant séjourné à l'Orphelinat venaient à prendre connaissance de ce récit, je leur demande de prendre contact avec moi afin d'élargir encore le cercle des retrouvailles.

Claude FERRER

(N.B : contacter le webmaster pour joindre Claude Ferrer.Merci)