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BABA HASSEN par Edgar
Scotti ( décédé)
Ce centre créé en 1844 sur 1148 ha à
l'emplacement d'une ancienne ferme domaniale est situé dans le
Sahel algérois. Cette zone de coteaux localisée entre le
littoral et la Mitidja
bénéficie d'un climat fortement influencé
par les vents marins humides de nord-ouest et d'est apportant une pluviométrie
de 600 à 700 mm en moyenne annuelle. À une altitude de 185
m au-dessus du niveau de la mer, la température évolue entre
10 °C en hiver et 40 °C en été.
Distant de 6 km de Saoula, Baba-Hassen est à 18 km au sud-sud-ouest
d'Alger et à 17 km au nord de Boufarik.
Pour le courrier, le village était rattaché à la
poste de Douera à 4 km, dont le facteur-boîtier assurait
la distribution et la levée.
Baba-Hassen et Saoula sont dans le bassin de l'oued Kerma.
En 1900, le village était desservi par des " corricolos
" (Grande carriole faisant office
de diligence et de transport urbain) de la société
Bonifay circulant entre Alger, Birmandreis,
Birkadem, Saoula, Baba-Hassen et Douera.
L'organisation
municipale en 1900
Baba-Hassen avait déjà un groupe
scolaire comprenant une école de garçons et une école
de filles. Ce centre connaîtra une rapide augmentation de sa population
qui passera de 410 habitants en 1897, à 611 personnes en 1900 dont
564 Européens et 57 fellahs venus des douars de Kabylie. Quelques
années plus tard, en 1908, le village comptait 718 habitants avec
une augmentation continue, consécutive à la sensible augmentation
de l'activité économique inhérente à la proximité
de la Mitidja.
Commune de plein exercice, rattachée au canton de Boufarik avec
Birtouta, Bouinan, Chebli, Crescia, Douéra, Mahelma, Saint-Ferdinand
et Souma.
Chaque année se tenait à Baba-Hassen le grand comice agricole
du Sahel présidé par M. Fénagutti. Baba-Hassen en
1900, c'était aussi quelques petites maisons basses, groupées
autour du chemin de grande communication n° 12 allant de Birkadem
à Douera et du chemin d'intérêt commun n° 13 rejoignant
à Birtouta, la future route nationale n° 1. Entourées
d'un jardinet, ces maisons dont les murs de pierres reposaient sur de
fragiles fondations, n'avaient que deux ou trois pièces séparées
par un couloir et une cuisine dont l'évier revêtu de carreaux
de céramique rouge était appelé " potager "
parce que c'était dans cette cavité que l'on pelait et lavait
les légumes du potage.
Le conseil
municipal en 1900 :
MM. Basile Chollet (maire); Ferdinand Cazayous (adjoint);
Alphonse Lambotin (secrétaire de mairie); Jean Robert (garde
champêtre, crieur public); Alphonse Lambotin (instituteur);
Mlle Marie Fischer (institutrice); MM. Beaugendre (postes, facteur-boîtier);
l'abbé Crégut (curé); Goetzmann (agent voyer);
le docteur Babilée (médecin communal).
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Les artisans et commerçants en 1900
Entouré d'agglomérations comme Sainte-Amélie,
Draria, Crescia, regroupant de minuscules propriétés de
polyculture, Baba-Hassen avait un artisanat très diversifié
susceptible de combler les besoins d'agriculteurs viticulteurs, mais aussi
ceux des
maraîchers et d'éleveurs de quelques bovins laitiers.
La vie quotidienne de Baba-Hassen était rythmée par l'arrivée
des corricolos devant une des auberges avec le déchargement des
colis et du courrier.
Artisans
et commerçants en 1900:
MM. Chollet fils et Antoine Morel aubergiste
et épiciers, un boulanger (M. Esmann), un charpentier menuisier
(M. Mascaro), des cordonniers (MM. Pathenay, Vidal et Venantio),
un cordier (M. Louis Blaisius), un distillateur (M. Hudelot), des
entrepreneurs de travaux (MM. Jean Pesc, Masonnet, Mascaro, Antoine
Gomès); des forgerons (MM. Morel et Olivès frères)
des jardiniers (MM. Alliot et Rippol) et enfin des transports terrestres
(MM. Alliot, Auguste Nuss et Orfila).
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Les agriculteurs
et viticulteurs en 1900
À Baba-Hassen l'eau était abondante et de
bonne qualité. Sur les coteaux, la vigne à raisin de table
ou de cuve se révéla rapidement comme un excellent support
de l'activité économique. En 1898, un jeune vignoble couvrait
déjà 400 ha produisant 27680 hl d'un vin recherché
de belle couleur et d'une teneur variant entre 9° et 13° d'alcool
suivant les cépages cultivés : aramon, carignan ou alicante-bouschet.
Originaires du Sud de la France, soixante-deux viticulteurs se partageaient
ce vignoble, soit en moyenne 6 ha auxquels ils prodiguaient tous leurs
soins. Ils avaient acquis de leurs aïeux une formation qu'ils transmettaient
à leurs enfants. Leurs plants étaient conduits en gobelet
ou en cordon, simple ou double de Royat permettant une meilleure exposition
au soleil des grappes couvertes de pruine.
Les petites maisons blanchies à la chaux avec leur noria et un
bassin, ponctuaient les parcelles aux différents feuillages (carignan,
cinsaut et
grenache) et les rangées d'oliviers qui couvraient les côteaux.
La vigne fournissait du travail à des tailleurs, greffeurs ainsi
qu'à des maraîchers. Entre les rangs de vigne, des cultures
intercalaires de pommes de terre procuraient un revenu supplémentaire
non négligeable sur des propriétés ne dépassant
pas une dizaine d'hectares. Les talus eux-mêmes portaient des semis
d'hiver de radis, de plants d'artichaut ou d'épinards à
développement très rapide.
Agriculteurs
et viticulteurs en 1900 :
MM. Adrover, Allier, Mme Vve Amiral
Baudin, MM. Amidieu, Audouard, Mme Vve Brédard, MM. Calmés,
Cazayous, Chabanis, Chazot, Mme Vve Chifflet, Baptiste Chollet,
Paul Chollet, Mme Vve Couderc, MM. Covès, Didier, Mme Vve
Galan, MM. Louis Garcias, Thomas Garcias, Gauthier, Charles Gontard,
Lucien Gontard, Gomila, Guinier, Lutinier, Moya, Joachim Molinès,
Célestin Molinès, Dominique Morell, Morineau, Nadal,
Neyrand, Nizet, Nuss, Pastor, Pietrelli, Mme Vve Robert, MM. Santacreu,
Sarrobert, Séguin, Mme Vve Thiot, MM. Joseph Victori, Ménard,
Octave Troyon, Guerry, Mme Vve Lapeyre, MM. Caratalla, Orlando,
Gabarrou, Escalès, Font, Baptiste Rosello, Oliva, Michel
Victori, Michel Serra, Mme Vve Pons, MM. Anselme Mascaro, Massip,
Massonet, Joseph Mas.
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L'Union
Musicale de Baba-Hassen dans les années trente.(d-
18)
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Les agriculteurs
viticulteurs en 1953
Une cinquantaine d'années plus tard, le vignoble
de Baba-Hassen couvrait une superficie de 628 ha de coteaux, cultivés
par soixante-six propriétaires dont chacun soignait en moyenne
9,5 ha. Cependant en 1953, la vigne à raisin de cuve n'était
plus une monoculture essentiellement européenne. Enfin 92 ha produisaient
6416 quintaux de raisins vinifiés à Draria par d'autres
viticulteurs ou vendus en raisin de table à MM. Azzopardi et Brahimi
Mohamed, expéditeurs de Saoula, ou à MM. Jean et Joseph
Fédélich à Birkadem. La proximité d'importants
débouchés sur l'agglomération algéroise ou
à l'exportation incitait des viticulteurs à modifier leur
encépagement. L'aramon disparaissait au profit de variétés
à raisin de table comme les muscats d'Alexandrie ou de Hambourg,
du dattier de Beyrouth et des variétés indigènes
comme l'Ameur bou Ameur ou le Bezzoul el Khadem, un magnifique cépage
donnant des grains fermes et croquants d'une belle couleur ambrée.
Dans des chantiers de ciselage, un personnel attentif et soigneux détachait
aux ciseaux les grains abîmés et rangeait les belles grappes
dans des
cagettes ou billots fabriqués par la manufacture d'emballages Ben
Ouenniche et fils, rue de l'Industrie à Hussein-Dey. Ces magnifiques
raisins à la saveur incomparable, recouverts d'une fine pruine
blanche se retrouvaient dès le soir sur les quais en instance d'embarquement
pour Marseille ou dès le lendemain matin sur les marchés
d'Alger.
Les viticulteurs de Baba-Hassen produisaient aussi d'excellents vins blancs.
Par leur travail ils apportèrent une certaine prospérité
et incitèrent d'autres agriculteurs à planter de la vigne.
Un pépiniériste, M. René Masanet mettait à
la disposition des propriétaires des plants greffés soudés
de différents cépages nobles comme la syrah, le cabernet,
destinés à améliorer le bouquet des vins. L'entreprise
Oliver et fils défonçait les parcelles à l'aide de
grosses charrues Fowler afin, encore et toujours, de planter de la vigne.
Le développement de cette petite viticulture devait participer
dès 1922 au raccordement de Baba-Hassen au réseau de distribution
de courant électrique. Enfin, c'est en 1950 que l'ancien réservoir
d'eau a été remplacé par l'adduction du village au
réseau intercommunal approvisionnant El-Achour et Draria. Entouré
de vignes, le petit cimetière communal de Baba-Hassen, comme ceux
de tous les autres villages d'Algérie avait deux parties bien distinctes.
L'une d'entre elles, la plus moderne située à l'entrée,
se reconnaissait à ses beaux monuments funéraires, ses fosses
maçonnées étaient surmontées de solides chapelles
où se lisaient les noms des défunts. L'autre remarquable
par des allées incertaines le long desquelles le visiteur accédait
à des entourages de fer forgé surmontés d'une pauvre
croix blanchie par le soleil et la pluie sur laquelle le nom de l'humble
défricheur était à peine lisible. Et pourtant ces
hommes et ces femmes inhumés à même le sol, croyaient
que planter de la vigne, des oliviers, des arbres fruitiers, ou des pommes
de terre, construire des maisons, c'était préparer l'avenir
de leurs enfants. C'est bien ce que nous retiendrons de la vie de ces
hommes de nos villages d'Algérie.
Agriculteurs
et viticulteurs en 1953 :
Les héritiers Amer, MM. Raymond
Anastaze, Noël April, les consorts Bortolotti-Yvorra, Mme Vve
P. de Burine, MM. Aimé Cabot, Carratala, Baptiste Casanovas,
Cazayous, Jacques et Michel Cerda, Basile et René Chollet,
Mme Jacqueline Cordier, Guillaume Covès, André Dussaule,
ElHadjim Bachir, Antoine Féménia, François
Florit, Mme Vve Galley et son fils, Thomas Garcia, Jean Gomila,
Maurice Granger, Gaston Hégé, Marcel Houradou, Mohamed
Kisraoui, Khelifi Hamoud, Julien Laden, Mohamed Lasfer, Roger, René,
et Pierre Lutinier, Jean Massanet, Sébastien Molto, Alexandre
Moulet, Maxime Noux, Jacques Olivier, Germain et Robert Orfila,
Mme Vve Pastor, Mmes Vves Rogier-Jourdan, MM. Rogier-Jourdan, Claude
Séguin, Georges Suduca, Suner-Maymo, Christian Souyris, Jean-
Baptiste Vila.
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Dans la tourmente des années
soixante
Entouré de beaux vignobles, le village abritait
alors 1050 habitants. Deux compagnies de transport en commun assuraient
les liaisons avec Alger et les agglomérations voisines.
La Société des autocars Seyfried, successeur direct des
transports Bonifay, assurait avec des autobus Berliet ou Saurer la desserte
de Baba-Hassen, Birkadem, Crescia, Dély-Ibrahim, Douéra,
Draria, El-Achour et Saoula. Dans la rue principale, le café-hôtel
Chollet était tenu par M. Basile Chollet, en souvenir d'un aïeul
qui fut maire de Baba-Hassen en 1900. Un peu plus loin la boulangerie
de M. Amar Khodja avait dans sa vitrine de gros pains à croûte
épaisse, des pains fantaisie ainsi que d'autres saupoudrés
de graines d'anis, sans oublier les moelleuses fougasses.
Baba-Hassen avait aussi sa pharmacie Laporte-Cholet.
Dans de petites fermes dispersées dans les coteaux, accessibles
par un chemin empierré, quelques fellahs avaient recours aux services
d'inséminateurs de l'Institut agricole de Maison Carrée,
pour fertiliser quelques vaches laitières de race hollandaise ou
comtoise.
Bouchers et épiciers, parfois aussi un marchand de poisson venu
de la pêcherie d'Alger avec sardines et allaches, accomplissaient
leurs tournées dans les fermes.
Toute proche de la mairie, l'école communale. La joyeuse sortie
des salles de classes était ponctuée des cris des enfants,
attendus par un chien en liberté.
De sombres et lourds nuages planaient alors sur une Algérie meurtrie.
Dans la tourmente générale, chacun discrètement,
recherchait les moyens propres à éviter de laisser exposer
à la violence ambiante le collaborateur ou le patron avec lequel
il avait grandi. Des solidarités silencieuses se nouaient entre
les hommes précipités au coeur d'une tourmente qui ensanglantait
l'Algérie. Ces petites communes du Sahel d'Alger, c'était
avant tout des hommes, des femmes et des enfants reliés entre eux
par des liens familiaux ou affectifs. Il y avait les cousins de Saoula,
de Birkadem, de Birmandreis, de Draria,
de Crescia ou de Maison Carrée. Ces centres ne furent pas épargnés
par les attentats, enlèvements et mutilations. Leurs conséquences
dépassèrent largement le cadre du village, se répercutant
dans tout le Sahel, précipitant inéluctablement les départs
et la dispersion des familles.
Afin de rejoindre le port ou l'aéroport de Maison-Blanche, combien
de menaçants barrages à franchir avant de gravir, après
une longue et éprouvante attente, la passerelle d'un bateau ou
celle d'un avion. Des familles entières sont ainsi parties abandonnant
tout derrière elles. Parfois accompagnées par des voisins
algériens avec lesquels on partagea tant d'événements
heureux ou malheureux (naissances, mariages, décès) et tant
de fêtes religieuses.
Alors que s'estompait la vision de la " Ville Blanche ", il
fallait déjà penser à la prochaine rentrée
scolaire avec le choix de l'établissement et corrélativement
celui du quartier le plus proche d'un bon lycée. Ces hommes et
leurs enfants n'avaient plus tellement envie de faire le même métier
qu'en Algérie où ils venaient de laisser, sans rien emporter,
des bâtiments, des vignobles, des terres en pleine production. Ces
exilés n'ont rien pris à l'Algérie. Quoi qu'il leur
en coûtât, il leur fallait s'orienter vers d'autres activités
et comme leurs aïeux s'investir à leur tour, dans d'autres
tâches, ouvrir d'autres sillons, d'autres perspectives.
Aujourd'hui après un saut d'une génération, les petits-enfants
dispersés des " volontaires " parisiens de 1848, ou de
ceux venus des rivages de la Méditerranée, veulent savoir
ce que leurs lointains aïeux pouvaient bien faire dans ces villages
aujourd'hui oubliés.
" Il faut
compenser l'absence par le souvenir,
La mémoire est le miroir où nous regardons les absents ".
(Joseph Joubert)
Nos remerciements s'adressent tout particulièrement
aux personnes qui nous ont écrit ou téléphoné
pour nous encourager dans la rédaction de ce travail sur les villages
du Sahel d'Alger. Nous exprimons nos sentiments de bien vive gratitude
au D' Georges Duboucher, à Mme L. Desmons-Vidal, MM. Louis Dulac
et Jacques Piollenc qui ont eu l'extrême amabilité de mettre
à notre disposition des archives de différentes époques.
Bibliographie:
- L'oeuvre agricole française en Algérie, ouvrage collectif
édité par l'Association amicale des Anciens élèves
des écoles d'agriculture d'Algérie.
- Différents annuaires algériens.
- Les notes et souvenirs de l'auteur.
- Qui se souvient de Draria, ouvrage de mémoire de Mme L. Vidal-Desmons.
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