Les quais et le port
d'Alger
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------------Construits
après la Première Guerre mondiale, deux ascenseurs
dressaient leur fine silhouette entre le bleu des eaux du port et l'amphithéâtre
de la ville blanche. Accoudés au bastingage des paquebots en approche,
leurs passagers éblouis admiraient ces deux édifices, figures
de proue élancées, prenant appui sur les boulevards et sur
les quais. Edgar Scotti 31000 Toulouse |
LES ASCENSEURS
D'ALGER Qui de nous ne s'est plaint, soit durant les chaleurs caniculaires de l'été, soit pendant les averses d'automne ou les giboulées d'hiver, d'être obligé, par une démarche urgente à la Douane ou dans les bureaux des Compagnies de navigation, voire l'attente d'un ami. d'un parent à la gare, de descendre et de remonter les interminables rampes d'accès ou de grimper ces escaliers aux marches gluantes, encombrées de détritus malodorants, sous la menace continuelle d'une chute toujours dangereuse. La création d'ascenseurs s'imposait. Dès longtemps, une Société s'était montée dans ce but, mais elle n'aurait mis à la disposition du public que des appareils à eau. La Société primitive qui avait obtenu la concession des ascenseurs hydrauliques n'ayant pu parvenir à réaliser son projet, une nouvelle concession pour ascenseurs électriques fut adressée au Gouvernement en 1904. En 1911, la concession était accordée à la Société anonyme des Ascenseurs Monte-Charges du Port d'Alger et. malgré toutes sortes de difficultés et d'empêchements, les travaux étaient entrepris en 1913. La déclaration de guerre interrompit l'exécution du projet qui ne put être achevé qu'en juillet 1920, mais l'impossibilité de se procurer le courant électrique nécessaire à la marche des machines retarda encore la mise en service des ascenseurs. Grâce à l'intelligente ténacité du groupe financier qui a pris à cur la réussite de cette entreprise et donné là une nouvelle preuve de son dévouement à l'intérêt public, nous pouvons actuellement utiliser celle précieuse installation dont la faveur de plus en plus marquée des usagers proclame éloquemment la nécessité indiscutable. Elle comprend deux pylônes en ciment armé reliés au boulevard de la République par deux passerelles dont la première est enracinée au droit de la place du Gouvernement et la seconde en face le square Bresson. Chacun de ces pylônes - au reste absolument identiques d'aspect et d'installation intérieure - contient deux ascenseurs. L'un de ceux-ci, très puissant, peut recevoir trente personnes, ainsi que des bagages, voire des charretons à bras : l'autre, de dimensions plus restreintes, est suffisant pour 12 personnes. Le premier est du type employé pour le métro de Paris, station de l'Opéra ; huit câbles y sont affectés, un seul suffirait d'ailleurs pour que la sécurité soit pleine et entière. Le second est muni de quatre câbles, alors qu'un seul serait également suffisant. L'électricité constitue, bien entendu, la force motrice ; le voltage est de 500 à 550 volts, la machine actionnant le grand ascenseur développe 35 H.P., celle actionnant le petit de 18 à 20 H.P. Les ascenseurs fonctionnent à partir de 6 heures du matin : la fermeture en est fixée un quart d'heure après l'arrivée du dernier train, quel que soit le retard de ce dernier. En outre, en cas d'arrivée des paquebots durant la nuit, un appareil sera toujours à la disposition des passagers. Le tarif est ainsi fixé : 0.05 par personne pour la descente. 0,10 - -- montée. Ces prix sont ceux primitivement fixés par le cahier des charges élaboré à une époque où le courant et la main-d'uvre étaient loin de valoir autant qu'aujourd'hui. Mais, dans un esprit qu'on ne saurait trop louer, le Conseil d'administration a décidé de n'appliquer aucun relèvement à moins que le maintien du statu quo n'entraîne une exploitation trop nettement déficitaire. Les bagages jusqu'à 10 kilos sont admis gratuitement avec les personnes qui les accompagnent ; de 10 à 100 kilos, même tarif que pour le public. Les départs sont aussi fréquents qu'il est nécessaire et l'on n'attend jamais : le trajet s'effectue en quelques secondes, un tiers de minute exactement. Les machines que nous avons pu admirer ont été construites par la maison Roux et Combaluzier, de Paris, dont la raison sociale est aujourd'hui Verne et Cie. Celle firme a été chargée entre autres fournitures de celle des ascenseurs du Métropolitain de Paris, dans des conditions de concours et de garanties des plus rigoureuses. En fixant son choix sur ses appareils, la Société anonyme des Ascenseurs Monte-Charges du Port d'Alger a entendu donner au public algérois le maximum de confort et de sécurité. On n'a pu, malgré tout le désir du Conseil d'administration, exécuter en sous-sol les travaux d'installation des machines : l'eau est rencontrée. en raison de la proximité de la mer, à moins d'un mètre cinquante dans les fouilles : on se rend compte des frais énormes qu'eût entraîné, dans ces conditions, la création de locaux en terrain aussi mouvant que celui des abords de la mer. C'est pour cette raison que le sommet des pylônes dépasse légèrement le niveau du boulevard ; mais on a donné à ceux-ci un aspect aussi séduisant que possible et auquel nous sommes aujourd'hui habitués. Nous ne pouvons donc que nous féliciter de voir notre ville dotée enfin de ces grands ascenseurs dont la nécessité se faisait depuis longtemps sentir. Terminons en remerciant M. Jammy, le sympathique administrateur et ingénieur de la Société qui a bien voulu, avec son affabilité coutumière, nous donner les détails techniques qui nous permettent de fournir à nos lecteurs, sur la valeur et la sécurité des appareils mis à leur disposition, tous les renseignements désirables. Et réjouissons-nous une fois encore d'une innovation qui répondait à un besoin urgent. |