Les peintres
de l'Algérie du Sud
Marion Vidal-Bué
Le Sahara, pourtant pays de l'aridité
a toujours exercé un véritable envoûtement sur les
esprits; ses étendues désertiques ont fait germer une
production exceptionnelle de tableaux, en même temps qu'une abondante
littérature.
Tous les amateurs d'orientalisme le savent, c'est le désert égyptien
qui fut offert tout d'abord à la curiosité générale,
grâce à Napoléon Bonaparte, Premier Consul, qui
suscita en 1799 la première grande exploration saharienne "
L'expédition d'Egypte et son cortège de savants touchèrent
au Sahara, par le Nil, 50 ans avant que les troupes de Bugeaud n'y abordassent
. par l'Algérie ". Les Romantiques s'emparèrent du
thème tellement accordé à leurs penchants et le
public se mit à rêver de caravanes et de sables brûlants
avec Prosper Marilhat, Théodore Frère, puis Jean- Léon
Gérôme et Léon Belly.
Initiée dans les années 1840, principalement dans le Sud
Constantinois et à partir d'El-Kantara,
la découverte du sud algérien prit rapidement la forme
d'un véritable engouement qui conduisit des centaines d'artistes
de toutes nationalités à suivre l'exemple de ces maîtres
de l'orientalisme dans un pays où les points d'intérêt
se multipliaient.
Après la prise de possession de l'oasis de Biskra par les Français
en 1844, la région des Ziban devint le but privilégié
des voyageurs avides de palmeraies et le demeura pour longtemps.
Jules
Magy, " La Caravane " (Musée des Beaux-Arts de
Strasbourg).
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Dans le Sud-Algérois, la région
de Bou-Saâda
quoique proche de la capitale et offrant tous les aperçus
de la vie saharienne, pâtissait des conditions de voyage et de
sécurité difficile dans le Hodna autour de 1850 et ce
fut Laghouat, bien plus au sud, qui suscita les rêves d'Eugène
Fromentin, premier peintre visiteur de la ville au printemps 1853, peu
de temps après l'assaut donné par le général
Pélissier.
Fromentin
fut en tous points le " découvreur " artistique de
ces régions. Son deuxième voyage en Algérie l'amena
de Constantine à Biskra, en mars 1848, avec son ami le peintre
Auguste Salzmann. À El-Kantara, qui " garde le défilé
et pour ainsi dire l'unique porte par où l'on puisse, du Tell,
pénétrer dans le Sahara ", il ressentit les premières
émotions fortes et, de Biskra, dans l'enthousiasme, il écrivit:
" Si je pouvais enlever de France et transporter ici ma famille
et toi et tous ceux
qui me sont le plus chers, je me coucherais sur le sable chaud du désert
et ne demanderais plus rien à la Providence pour combler ma vie
". A la fin mai 1853, pendant son troisième et dernier
séjour dans le pays, brûlant de revoir " le ciel
sans nuages, au-dessus du désert sans ombre " et ayant
laissé pour cela sa femme à Alger, Fromentin partit pour
un périple mémorable à Laghouat,
qu'il prolongea jusqu'à Tadjemout et Aïn-Madhy.
Le récit réunissant les impressions de ces deux séjours,
Un été dans le Sahara, parut en 1856. Grâce
à lui, " le grand désert, à peine entrouvert
à la France entrait dans la littérature par un ouvrage
magistral, qui, un siècle après, n'a rien perdu de sa
force et de sa beauté [... 1. Il suscita bien des vocations sahariennes
". C'est ainsi qu'en 1859, après le Salon de Paris où
l'on put admirer une flambée de sujets inspirés par le
désert, Théophile Gautier constatait " [...1 le
Sahara voit maintenant se déployer autant de parasols de paysagistes
qu'autrefois la forêt de Fontainebleau ".
Pour respecter les réalités géographiques, il faut
préciser que le véritable Sahara ne commence, pour sa
partie algérienne, qu'après les hauts reliefs de l'Atlas
saharien et que certaines des oasis parmi les plus admirées n'en
sont que les prémices. Cependant, avec tous les artistes qui
appelaient ainsi le Sud, continuons de baptiser Sahara " le pays
du perpétuel été " célébré
par Fromentin.
Deux autres grands peintres, après Fromentin, ont marqué
par l'importance et le pouvoir suggestif de leurs créations la
riche production picturale consacrée aux paysages et aux habitants
du Sud algérien pendant les dernières années du
XIXè siècle : Gustave Guillaumet, qui aborda l'Algérie
par un séjour à Biskra en 1862 et Étienne Dinet
qui, dès son premier contact avec Bou-Saâda en 1884,
s'éprit du désert et en particulier de la petite oasis
qui allait devenir sa terre d'élection pour plus de quarante
ans. L'un et l'autre ne se contentèrent pas non plus de peindre
leurs enchantements sahariens, ils en témoignèrent également
par des ouvrages littéraires. Nous suivons une partie du parcours
de Guillaumet dans son recueil de textes intitulé Tableaux
algériens. En collaboration avec Sliman Ben Ibrahim qui fut
son point d'ancrage à Bou-Saâda et son mentor dans la religion
islamique, Dinet illustra ou écrivit entre autres Le Printemps
des coeurs, légendes sahariennes, ainsi que Mirages,
scènes de la vie arabe, puis Khadra, danseuse Ouled Naïl
et Le Désert. Il reste sans conteste le peintre le
plus internationalement connu, celui dont le nom vient aux lèvres
de tous lorsque l'on parle de l'Algérie.
À l'orée du Sahara, en plein centre du pays, les villes
blanches du M'Zab ibadite, Ghardaïa en tête, constituèrent
un fort pôle d'attraction à partir des années 1880,
sans doute le plus important à la période moderne, tandis
que dans la première moitié du xxe siècle, Ouargla
puis, en remontant vers l'est, Touggourt dans le bassin de l'Oued Rhir
et El Oued dans celui du Souf, recevaient les artistes les plus déterminés
à sortir des sentiers battus.
De même pour le Sahara occidental et les oasis du sud oranais,
dont les plus fréquentées furent Aïn-Sefra, Béni-Ounif
de Figuig, Colomb-Béchar et Beni-Abbès, mais tardivement
et par un nombre moindre de peintres, qui poursuivaient parfois leur
visite jusqu'au Maroc.
Le Hoggar, cette étrange et magnifique contrée à
l'extrême sud du Sahara oriental, fermée aux étrangers
jusqu'aux alentours de 1910, ne s'ouvrit vraiment qu'à partir
de la mission scientifique Henri Lhote en 1928, occasion pour le peintre
Paul-Élie Dubois d'explorer le territoire qui le rendrait célèbre.
François
Lauret, " Les Nomades ", (coll. particulière)
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D'innombrables tableaux de qualité
inégale, mais souvent remarquables, sont nés des séjours
d'artistes de toutes origines, combinant pour leur plus grand bonheur
enrichissement de leur peinture et agrément personnel sous un
soleil quasi permanent. Ils décrivent des lieux qui ont beaucoup
changé: le El Aghouat de Fromentin " alors ville à
moitié morte et de mort violente, un poste avancé du désert
", est devenu une ville moderne, tout comme le Biskra de Paul Leroy,
le Bou-Saâda de Noiré ou le Ghardaïa de Bouviolle.
Les nomades Chaamba et les Touaregs ont remplacé dromadaires
et méharis par des véhicules ultramodernes, les puits
de pétrole ont surgi et le désert s'est mécanisé.
Isabelle Eberhardt, l'amoureuse du désert, morte dans
une crue de l'oued à Aïn-Sefra, le pressentait: "
Pourtant, elle va finir cette grande vision de la vie primitive dont
on ne reverra bientôt plus l'inoubliable splendeur, avec la sécurité
et les chemins de fer ", écrivait-elle dans ses Notes
de route.
Restent les peintures, qui nous permettent de revivre le voyage dépaysant
de leurs auteurs. Elles adoptèrent dans les premiers temps des
thèmes très généraux, multipliant les scènes
alors jugées comme fortement exotiques et aptes à évoquer
un monde plus coloré.
Puis, avec les nouvelles générations d'artistes installés
dans le pays ou devenus familiers de ces contrées, les représentations
des moeurs se firent plus proches des individus, dans la mesure où
les artistes arrivaient à faire poser ou à " croquer
" des personnages, en même temps que les paysages donnaient
matière à des recherches picturales toujours plus hardies.
Nous suivrons, pour les découvrir, plutôt qu'un strict
itinéraire géographique, leur progression dans le temps
et dans les différents centres d'intérêt.
Palanquins et
caravanes
La caravane resta pendant les premières
décennies de la vogue orientaliste, en Algérie comme au
Moyen-Orient, le thème majeur des peintres voulant symboliser
la vie au désert. Se partagèrent leurs faveurs celles
des marchands menant leurs bêtes de somme, chargées de
dattes lorsqu'elles remontent vers le nord et de grains, d'épices
et d'étoffes lorsqu'ils en reviennent, ou bien celles des Bédouins
se déplaçant en petit groupe ou par tribus entières
pour changer de campement au gré de " cette transhumance
au rythme large et régulier, battement du coeur de l'Afrique,
qui, d'hiver en été, des pierrailles ou des dunes sahariennes
jusqu'aux pacages du Tell, ramène chaque année les nomades,
sur plus de mille kilomètres de pistes, dans leur poursuite à
l'herbe, l'achaba traditionnelle et millénaire ".
Sans avoir nécessairement à se déplacer très
loin, certains artistes purent rencontrer des caravanes venues du sud
dans les proches environs des grandes villes, dans ceux d'Alger par
exemple, où elles parvenaient en Pïoassant par le gros bourg
de Maison-Carrée
et le Gué de Constantine, sur l'ancienne route arabe
coupant l'Oued-eel-Harrach.
L'on remarque a.ainsi de William Wyld, l'un des pionniers avec son voyage
en 1833, un passage du gué par des dromadaires chargés
de marchandises, qui pourrait aussi bien se situer dans la Mitidja que
dans la campagne de Tlemcen et, de Curtius Ghlig comme de Pierre Thuillier,
autres précurseurs, plusieurs tableaux de caravaniers au repos
près d'une fonttaine ou traversant un oued dans des lieux imprécis
mais presque toujours ombragés de palmiers, qu'ils pourraienr-st
avoir observés dans n'importe quel endroit da Tell. Ce fut également
l'un des leitmotivs de Théodore Frère, aussi à
l'aise sur ce sujet en Algérie qu'en n Égypte.
En même temps que Les Tentes de la smala de Si Ahmed Bel À
Hadj, Fromentin présenta au Salon de 1849 Le Passage à
gué de l'Oued-Biraz dansle Sahara, tableau que Gautier décrivait
ainsi: «La troupe passe ayant l'eau à mi- jambe, et
déjà sur le revers opposé, grimpent les chevaux
encapuchonnés dans les Iongs burnous blancs de leurs cavaliers[...].
Tout cela marche, à pied, à cheval, à chameau,
dans l'eau ou sur la terre, avec une vie, unes activité à
faire illusion. On a peur, en retournant voir le tableau, de n'y plus
retrouver personne, tant la caravane marche d'un bon pas et s'es va
bien ".
" L'autre moitié de sa vie se passe en voyages",
écrivait de son côté Fromentin en parlant du nomade
algérien. " Un autres jour, je le parlerai de la tribu en
marche, nedja: admirable spectacle qui renouvelle, ici sous nos yeux,
en plein âge moderne, à deux pas de l'Europe, les migrations
d'Israël ". " Il le fit, en effet, dans la suite
de son récit, avec un grand luxe de détails sur l'ordre
de marche et la composition du rahil, le déplacement de tribu
qu'il croisa dans les environs du Djebel Amour, celle des Arba en l'occurrence,
l'une des plus opulentes, " la mieux montée peut-être
des tribus sahariennes ", d'après ses observations.
" Les cavaliers venaient en tête en peloton serré,
escortant un étendard aux trois couleurs Au-delà et sur
le dos de dromadaires blancs ou d'un fauve très clair, on voyait
se balancer quatre ou cinq atatiches de couleur éclatante; puis,
arrivait un bataillon tout brun de chameaux de charge, stimulés
par la caravane à pied; enfin, tout à fait derrière,
accourait, pour suivre le pas allongé des dromadaires, un énorme
troupeau de moutons et de chèvres noires divisé par petites
bandes, dont chacune était conduite par des femmes ou par des
nègres, surveillée par un homme à cheval et flanquée
de chiens ...À l'exception du harem, qui voyageait en litière
fermée, toutes les femmes venaient à pied sur les deux
flancs de la caravane, sans voiles, leur quenouille à la ceinture
et filant ". Suivaient les petites filles portant les plus
jeunes, les vieilles femmes appuyées sur de longs bâtons,
les vieillards portés " par de tout petits ânes,
leurs jambes traînant à terre ", les serviteurs
tenant les nourrissons coiffés de la chéchia rouge
ou menant par la longe " des juments couvertes, depuis le
poitrail jusqu'à la queue, de djellale à grands ramages,
et suivies de leurs poulains ", ou encore, conduisant "
par les cornes des béliers farouches, comme s'ils les traînaient
aux sacrifices ". " C'était aussi beau qu'un bas-relief
antique ", concluait le peintre écrivain.
Charles Dufresne,
" La Caravane (Le fils du caïd des Ouled Sidi Brahim)
",
(coll. part.).
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Un bas-relief antique, c'est très
exactement ce que composèrent à tour de rôle François
Lauret et Jean-Joseph Bellel dans deux de leurs tableaux. Le premier,
avec une caravane modeste dont seul le chef, portant en croupe une fillette,
montait un cheval, lui-même et les autres bédouins allant
pieds nus, mais tous paraissant ennoblis par les longs plis de leurs
vêtements et par la disposition en frise de leur procession. Le
second déployait un convoi beaucoup plus impressionnant, dans
le tableau qu'il présenta au Salon de 1859 et qui se trouve à
présent au musée Fabre de Montpellier : Nezla d'Ouargla
à la recherche d'un campement. Les deux scènes se déroulaient
le long d'un lit d'oued, dans un paysage très proche de la description
de Gautier commentant Fromentin " une déchirure de terrain,
décharnée, ravinée, pulvérulente de soleil,
effritée de chaleur et couronnée ça et là
de quelques glaives d'aloès ".
Bien plus tard, dans le même esprit esthétique, Numa Marzocchi
de Bellucci dressait la silhouette d'un dromadaire de profil sous un
croissant de lune, pour représenter l'arrivée au campement
d'une famille de nomades chez laquelle l'animal transportait la femme,
son enfant et l'équipement traditionnel destiné à
l'installation de la tente.
Le passage du gué, ou la halte de la caravane au bord d'un oued
offrant son mince filet d'eau, fut l'un des thèmes les plus fréquemment
traités et pratiquement tous les artistes s'y attelèrent,
appréciant l'occasion de déployer leur technique pour
décrire le miroitement de l'eau et les nuances du paysage. Parmi
les premiers, Victor-Pierre Huguet en donna de nombreux exemples, ses
oeuvres étant presque toujours situées dans les régions
prédésertiques où poussent encore l'alfa et les
agaves. On remarque souvent des bassour drapés de haouli écarlates
sur la bosse de ses dromadaires, alors que, chez la plupart des peintres,
on contemple un aperçu de la fantaisie de couleurs décrite
par Fromentin pour ces " sortes de corbeilles enveloppées
d'étoffes ", " ces somptueux berceaux "
qui faisaient office de litière de voyage pour les femmes "
de grande tente ".
La halte des chameliers dans la palmeraie ou devant l'oasis s'enrichissait
du charme des arbres prenant des teintes vert sombre ou argentées
selon les heures du jour. Georges Washington traita ce motif à
plusieurs reprises dans une atmosphère de naturel particulièrement
séduisante, profitant du cadre pour introduire de petites saynètes
faisant intervenir des personnages très vivants, sans que jamais
n'y manquât l'un de ses chers cavaliers. On constate la plupart
du temps dans les caravanes de Jules Magy ou de Paul Pascal, outre leur
talent de coloristes délicats, leur goût commun pour la
description des troupeaux et des pasteurs accompagnant les chameaux.
Vers 1860, Félix Ziem créa une somptueuse version de caravane
dans le désert, bien éloignée des conventions,
et prétexte comme toujours avec lui, à une étude
sur la lumière. L'impressionniste Jean Seignemartin, qu'un voyage
en 1875 avait mené de Constantine vers Biskra, peignit sobrement
sous une lumière mélancolique, un rare Paysage d'hiver
décrivant un maigre convoi de mulets et de chameaux dans le creux
d'un oued.
Honoré Boze, Étienne Billet, Gustavo Simoni, Joseph Sintès,
même, pourtant peintre attitré des sites d'Alger, puis
Lewis Shonborn, Gaspard de Toursky, Antoine Gadan ou José Ortega,
parmi tant d'autres, illustrèrent successivement le thème
incontournable. Émile Boivin affectionna le cadre des contreforts
de l'Aurès dont il saisit avec finesse les nuances à différents
moments du jour. Albert Rigolot traitait volontiers les cortèges
étirés en longueur dans le même décor ou
dans celui des alentours de Bou-Saâda. Émile Bertrand apporta
son graphisme élégant et son coloris délicat. Marie-Aimée
Lucas-Robiquet et Frederick Arthur Bridgman déployèrent
toutes les séductions d'un néo-impressionnisme chatoyant.
Avec Eugène Girardet, toutes les situations se trouvèrent
déclinées; il fut certainement le plus fécond et
le plus fidèle illustrateur de la vie des nomades, et encore
davantage, celui des ksouriens conduisant leurs troupeaux à travers
le village ou par les montagnes désertiques.
On lui doit l'une des scènes les plus spectaculaires de convoi
parvenant à l'entrée du ksar d'El-Kantara, avec tout l'équipage
de personnages et d'animaux représentés dans une telle
exactitude de détails et de coloris que l'on croirait entendre,
en même temps qu'on en admire le spectacle, les bruits qui l'accompagnent.
Comparable dans son ampleur et son rythme à celle de Girardet,
mais bien différente par son étonnante stylisation, une
toile de Jules Van Biesbroeck dans le même défilé
constituait l'un des modèles du genre. Alexis Delahogue figure
lui aussi en tête des peintres de caravanes traversant les ksours
ou les étendues désertiques, pour le nombre et la qualité
de ses tableaux.
Avec Alphonse Birck, Alphonse Rey ou Édouard Herzig, les descriptions
de dromadaires et de leurs harnachements revêtirent les couleurs
fraîches de la gouache et de l'aquarelle. Le musée des
Beaux-Arts de Nantes détient l'une des multiples Caravane en
marche de Paul Lazerges, dont on connaît le goût de traiter
de mille manières le sujet des hommes, Kabyles ou nomades, se
déplaçant pour assurer leur subsistance. Il fut également
l'un de ceux qui réussissaient le mieux dans la représentation
des chameaux, cet exercice obligé de tout bon orientaliste.
Le motif graphique des bassour aux tissus chatoyants tendus sur leur
armature n berceau fournit quelques beaux sujets d'études à
Eugène Deshayes, lui permettant de personnaliser avec son chic
habituel le thème de la caravane, lorsqu'il ne se dédiait
pas à figurer les flamboiements d'une nature exceptionnelle entourant
le convoi.
Dans un tout autre esprit, Charles Dufresne se sentit transporté
à l'époque de la Renaissance italienne à la vision
d'une procession de caravaniers, et interpréta la théorie
de personnages, de chevaux et de chameaux à la manière
de Benozzo Gozzoli à Florence pour son Cortège des rois
mages. Monté sur un cheval blanc, un jeune fils de chef arabe
dont il avait pris une photographie pendant son voyage à Bou-Saâda,
y paradait tel Laurent de Médicis dans la célèbre
fresque.
(À suivre)
Avec l'aimable autorisation de Paris- Méditerranée.