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        DOUÉRA Historiquement Douéra 
        est apparu bien avant la rédaction du plan Guyot. Mais le Comte 
        Guyot, responsable de la colonisation à Alger de 1838 à 
        1847, en parle très longuement dans son plan daté du 12 
        mars 1842. Ce centre, rattaché à la troisième ceinture 
        de protection d'Alger, est celui auquel il consacre le plus long paragraphe. 
        Il vaut la peine d'être reproduit intégralement ; puis commenté. 
         
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                | Douéra est sur le 
                    territoire de l'ancienne tribu de ce nom ou sur la ferme de 
                    Bordj el hamar vendue il y a quelques années et actuellement 
                    possédée par Monsieur Locré.
 Il a été créé par l'armée 
                    sur ce point, un camp considérable et un hôpital 
                    magnifique.
 
 A peu de distance il s'est groupé un petit nombre de 
                    maisons qui constituent le village provisoire de Douéra, 
                    et sont bâties sur des terrains loués à 
                    très haut prix à Monsieur Locré.
 
 Aucune culture n'existe pour diverses raisons qu'il est inutile 
                    d'expliquer ici et parmi lesquelles il faut placer la nature 
                    du terrain. L'existence des établissements militaires 
                    et du commencement du village en question, et la position 
                    avantageuse de la localité traversée par la 
                    route d'Alger à Blida, et centrale pour cette partie 
                    du Sahel, a déterminé en 1840 la création 
                    d'un chef-lieu du district de Douéra.
 
 Les mêmes motifs m'engagent à proposer de l'y 
                    maintenir. Seulement d'accord avec le Génie militaire 
                    je propose de joindre les habitations au camp et de donner 
                    à l'enceinte une extension telle qu'elle puisse contenir 
                    250 familles. Le plan est préparé et va être 
                    proposé à l'approbation ministérielle. 
                    Mille hectares y seront joints. Ces terres sont généralement 
                    couvertes de broussailles, il y a de fort bonnes parties et 
                    presque tout le sol pourra être défriché. 
                    L'exposition est saine, en plein nord, et préservée 
                    des émanations de la plaine. Les eaux courantes sont 
                    peu abondantes, mais on trouve l'eau à peu de profondeur 
                    ;des puits publics y suppléeront aux fontaines, et 
                    à la rigueur des citernes pourraient être construites 
                    sous les établissements.
 |  |  Ce texte confirme ce que les autres monographies du Sahel 
        nous ont déjà appris : à savoir qu'autour de chaque 
        camp militaire viennent s'agglutiner quelques commerçants, cabaretiers 
        ou charretiers. Un hameau se forme alors, sans plan d'ensemble. Guyot 
        évoque l'existence de ce centre civil, tout en précisant 
        pour 1842 " aucune culture n'existe " ; étrange 
        village dont je n'ai pu trouver une date de création incontestable. 
        Si la date de mai 1835 parfois évoquée 
        est vraisemblable pour le village spontané, elle est précoce 
        pour la commune et fausse pour l'installation de colons sensu stricto.
 On peut imaginer, comme pour les centres voisins, une arrivée de 
        colons concessionnaires en 1842, 1843 ou 1844. Je n'ai trouvé nulle 
        part ailleurs le nom de Douéra associé à un chef-lieu 
        de district.
 Guyot ne fournit pas d'explication suffisante pour l'origine 
        des terrains à coloniser en 1842. Il n'évoque aucune saisie 
        de terres à une tribu émigrée en 1839. Peut-on imaginer 
        un achat, comme dans la commune voisine de Baba Hassen, à " 
        un particulier qui, comprenant ses véritables intérêts, 
        sollicite l'administration de l'exproprier d'une partie de son domaine 
        " ? Pas impossible si l'on sait que la famille Nacef Khodja possédait 
        d'immenses propriétés à la fois dans le Sahel et 
        dans la Mitidja, et si l'on se souvient qu'encore en 1962, il subsistait 
        à Baba Hassen un grande ferme nommée Nacef Khodja. Pas impossible 
        ; mais pas sûr non plus. L'explication du toponyme Douéra n'est guère 
        crédible ; je préfère croire à une prononciation 
        approximative de Douïra ou Douïrat (petite maison ou petites 
        maisons). De la même façon la traduction de Bordj el hamar 
        (le fort rouge) donne à penser qu'ici, comme à Mahelma, 
        l'armée française a pris la suite d'un poste de surveillance 
        turc.  Il est vrai que Douéra est bien placé pour 
        y situer un poste d'observation des mouvements de cavaliers dans la plaine 
        ; il est exact que jusqu'en 1845, Douéra fut sur la grande route 
        d'Alger à la Mitidja et à Blida (ensuite cette route par 
        El Biar et Dély Ibrahim fut détrônée par une 
        nouvelle plus commode par Birkhadem). La sécurité de cette 
        route était essentielle pour le développement de Boufarik, 
        au milieu de la plaine, où Drouet d'Erlon avait installé 
        en octobre 1834 un camp près 
        d'un souk et Tnine (marché du lundi), et où il avait même 
        favorisé l'établissement de colons dans une zone difficile 
        car paludéenne et constamment menacée par des incursions 
        hadjoutes (tribus maghzen restées fidèles aux Turcs). Des 
        indigènes leur vendaient assez volontiers des terres à un 
        prix bas. L'acheteur européen faisait un pari sur l'avenir en achetant 
        ces terrains inondables l'hiver, comme il aurait acheté un billet 
        de loterie : il y eut peu de gagnants. Le vendeur espérait que 
        l'acheteur dégoûté ou trop menacé finissant 
        par s'en aller, il récupérerait son bien tout en gardant 
        l'argent. Cela faillit d'ailleurs arriver à l'automne 1839. Comme 
        les Ouled Mendil avaient des terres dans la Mitidja et dans le Sahel du 
        côté de Douéra, on peut imaginer qu'eux aussi ont 
        été tentés par ces ventes. Le camp de Douéra fut créé au plus 
        tard en 1834, et pourvu d'une grosse 
        garnison capable d'intervenir dans la plaine en soutien de celles de Boufarik 
        et d'Oued el- Alleug. Douéra a donc une double histoire ; celle d'une 
        place militaire permanente de 1834 à 1962, et celle d'un village 
        apparu vers 1835, et ayant grandi suffisamment pour jouer un rôle 
        de chef-lieu local, sans en avoir le titre ; du moins sous la Monarchie 
        jusqu'en 1848.                        
        Quelques 
        épisodes marquants de la place militaireL'armée française n'a jamais quitté Douéra 
        de 1834 à 1962. Bien sûr ce ne furent pas toujours les mêmes 
        unités ; au début ce furent surtout des cavaliers, par la 
        suite plutôt des tirailleurs et à la fin apparurent des unités 
        plus spécialisées, comme les transmissions.
 
         
          |  | o   De 
            1834 à 1842 le camp de Douéra fut avec celui 
            de Birkhadem, l'un des deux camps principaux du Sahel pour la surveillance 
            et le soutien de nos postes avancés dans la Mitidja autour 
            de Boufarik et d'Oued el-Alleug. 
 A partir de l'arrivée des colons la Mitidja devint, pour le 
            Gouverneur Général, un ramassis de problèmes 
            que l'on peut ranger autour de trois dangers principaux : le Hadjoute, 
            le marécage et le moustique.
 
 La garnison de Douéra ne fut concernée que par les Hadjoutes. 
            Cette tribu, jadis au service des Turcs contre exemption d'impôt, 
            avait d'abord estimé que les Français ne feraient que 
            passer. Quand elle s'aperçut que ces derniers allaient s'incruster, 
            elle devint une menace permanente pour les colons et pour les soldats 
            isolés. A l'automne 1839, lorsque Abd el-Kader proclama le 
            djihad, les Hadjoutes répondirent à son appel, brûlèrent 
            les fermes et massacrèrent les colons. Le 20 novembre 1839 
            un convoi fut attaqué près d'Oued el-Alleug : il y eut 
            105 tués et les Hadjoutes emportèrent 98 têtes. 
            Pour mieux apprécier la performance il convient de savoir que 
            la gloire du Hadjoute n'était éclatante que s'il avait 
            décapité et saisi le tête de sa victime sans descendre 
            de cheval. Il avait droit alors au titre envié de " sersour 
            ". Le cheval est moins utilisé aujourd'hui, mais, avec 
            la guerre civile des années 1990, la décapitation a 
            connu un renouveau.
 Clauzel ayant fait évacuer de force tous 
              les colons rescapés et tous les postes militaires sauf quatre, 
              le camp de Douéra fut aux premières loges (avec celui 
              de Koléa) pour intervenir en appui du camp de Boufarik, et 
              pour recueillir les rescapés. Il constitua une sorte de verrou 
              qui empêcha les Hadjoutes de soulever les tribus du Sahel, 
              à un moment où les villages du plan Guyot n'existaient 
              pas encore.La victoire de Clauzel sur les Hadjoutes, dite de la Saint-Sylvestre, 
              le 31 décembre 1839, diminua le danger ; mais la pleine sécurité 
              dans la Mitidja, ne fut établie qu'en 1842.
 
 
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          | o   De 
              1834 à 1845 la garnison de Douéra fut chargée, 
              avec celle de Dély Ibrahim, d'assurer la sécurité 
              sur la route principale reliant Alger à la Mitidja et au 
              sud. Ce rôle fut parfaitement rempli et a sûrement contribué 
              au maintien de la paix dans le Sahel à l'automne 1839. Des 
              tribus du Sahel ont " émigré " c'est-à-dire 
              rejoint les Hadjoutes, mais il y eut peu de troubles dans le Sahel, 
              hormis quelques assassinats de colons isolés du côté 
              de l'oued Kerma. 
 On se souvient que les terres de ces tribus furent ensuite séquestrées, 
              et qu'elles ont servi à la création de la majorité 
              des 22 villages du plan Guyot.
 
 La bonne tenue du camp de Douéra a joué un rôle 
              décisif dans le bon enchaînement de
 ces événements.
 
 
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          | o 
              En 1852 
            Douéra devint un camp déversoir, 
            ou de transit pour les Transportés 
 Une explication s'impose : on appelle officiellement " transportés 
            " les républicains éloignés de Paris pour 
            s'être opposés au coup d'Etat du Président de 
            la République, Louis Napoléon Bonaparte, à Paris, 
            le 2 décembre 1851.
 
 Il y eut 9581 transportés. Douéra fut l'un des centres 
            d'hébergement provisoire et de tri des hommes. Le Gouverneur 
            Général Randon fut embarrassé par cet afflux 
            de personnes non condamnées mais qu'il fallait à la 
            fois surveiller, nourrir, loger et si possible occuper. Les premiers 
            bateaux à débarquer des transportés arrivèrent 
            à Alger en février 1852. Randon dut improviser, puis 
            il édicta, le 20 mars 1852, un règlement dont j'extrais 
            et résume quelques articles.
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                | Extraits du règlement 
                    du 20 mars 1852 sur les transportés en Algérie 
                     
                    
                    
                       
                        | Art.1 | Les transportés seront divisés 
                          en 3 catégories - ceux à interner
 - ceux admis dans les villages
 - ceux autorisés à se livrer à 
                          des exploitations particulières
 |   
                        | Art.2 | Le changement de catégorie est 
                          une décision du Gouverneur G. |   
                        | Art.6 | Seront envoyés dans les villages 
                          les transportés calmes et utiles à l'agriculture |   
                        | Art.7 | Ils y travailleront en escouades de 20 
                          hommes |   
                        | Art.16 | Ils pourront participer à des travaux 
                          de défrichement, assèchement plantations et cultures
 |   
                        | Art.17 | Ils seront payés à la tâche, 
                          selon un prix fixé d'avance. Mais 70% du salaire 
                          seront retenus par l'administration pour les dépenses 
                          consenties (outils, nourriture, hébergement
) |   
                        | Art.18 | Dimanche et jours fériés 
                          seront consacrés à la religion et au repos |   
                        | Art.27 | Ceux qui voudraient rester en Algérie 
                          comme cultivateurs peuvent le demander et obtenir une 
                          concession |  |  Le camp de Douéra put héberger 400 
              ou 500 transportés dont la surveillance et l'orientation 
              furent confiées au Capitaine Monnier qui prit cette responsabilité 
              très au sérieux, trop au regard de beaucoup de transportés.
 Les transportés admis dans les villages furent notamment 
              conduits à Birtouta, tout proche, ou près de Miliana, 
              à Aïn Sultan et à Aïn Benian (futur Vesoul 
              Benian). A noter que Birtouta venait d'être créé 
              le 15 décembre  1851 
              près du 4è blockhaus de la route d'Alger à 
              Blida par Birkhadem.
 Il est probable que certains transportés qui acceptaient 
              de travailler, ont été employés sur des chantiers 
              de construction de routes.
 
 A noter que le camp de Birkhadem reçut la même mission, 
              et que ses derniers clients
 furent envoyés à Douéra.
 
 Quant aux femmes elles furent confiées au couvent du Bon 
              Pasteur d'El Biar dont la clientèle habituelle était 
              celle des filles publiques.
  Cet épisode de l'histoire de l'Algérie 
              et du camp de Douéra fut de courte durée : les premières mesures de grâce intervinrent dès 
              mars 1852 ; d'autres furent prises en février
 1863 et l'amnistie totale fut décrétée le 16 
              août 1859. Les transportés qui restèrent
 volontairement en Algérie, comme colons, furent l'exception 
              qui confirme la règle. Je puis
 tout de même, pour des raisons familiales, citer le cas d'un 
              transporté admis à Birtouta
 et dont le fils monta ensuite à Baba Hassen pour s'y marier 
              ; il s'appelait Lutinier.
 
 
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          |  | o 
              De 
            1852 à 1942 rien de très remarquable. Le camp a été mieux aménagé avec en 
            1902 la construction des bâtiments des casernes
 Damrémont et Bugeaud.
 
 Il a hébergé, à partir de 1923, 
            le Centre d'Instruction des Transmissions.
 
 
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          |  | o 
              En 
            1944 de Lattre installe son Etat-Major 
            au château Holden Le général de Lattre de Tassigny a réussi à 
            s'évader de sa prison de Riom le 3 septembre 1943, puis à 
            rejoindre Londres et enfin Alger où il arrive le 20 décembre 
            1943. Entre temps de Gaulle l'avait nommé le 11 novembre 1943 
            Général d'Armée. Il lui confie début 1944 
            le commandement en chef d'une armée à reconstruire, 
            la future première armée française alors appelée 
            armée B.
 De Lattre s'installa dans une belle villa qui porte le nom de son 
            constructeur anglais, et qui est une annexe du camp de Douéra. 
            C'est là qu'il a étudié les plans des débarquements 
            à l'île d'Elbe, puis en Provence. Il était chef 
            de l'armée B, mais dépendait du Général 
            américain Patch qui commandait la VIIè armée 
            américaine.
 Les soldats de de Lattre participèrent à la reprise 
            de l'île d'Elbe le 17 juin 1944 et au débarquement en 
            Provence, à Cavalaire et Saint Tropez, le 16 août 1944.
 
 
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          |  | o 
              En 
            1959 le bataillon de Joinville occupe le château 
            Holden. Ce bataillon regroupe des conscrits de haut niveau dans diverse 
            disciplines sportives et auxquels on permet ainsi de bénéficier 
            d'un service militaire adapté. Pour les sportifs envoyés 
            en Algérie, c'était donc à Douéra ; et 
            pour les conscrits musiciens au talent reconnu, c'était la 
            caserne d'Orléans , au-dessus de la casbah, à Alger. 
 
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          |  | o 
              En 
            1962 le château Holden reçut des membres de 
            l'OAS en instance de transfert vers la prison de la rue de la santé 
            à Paris. 
 
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          |  | o 
              En 
            1965 le château Holden reçut son dernier hôte 
            de marque, le Président Ahmed Ben Bella qui venait d'être 
            renversé et arrêté par son ministre de la Défense, 
            Houari Boumédiène le 19 juin 1965. |  
                        
        La commune et l'administration 
        françaiseLe rôle et l'importance de la commune et du village de Douéra 
        ont pas mal évolué en 130 ans, mais Douéra est toujours 
        resté un centre mieux équipé que ses voisins. Il 
        serait exagéré de traiter ce village de capitale du Sahel 
        oriental, mais il est sûr que ce centre de colonisation a eu des 
        attributions et des équipements que ses voisins n'avaient pas. 
        D'ailleurs sa population était en 1954 plus nombreuse que celle 
        des autres communes du Sahel non rattrapées par la croissance de 
        la banlieue d'Alger.
 
         
          |  | o 
              Jusqu'en 
            1848 Douéra est surtout habité par des militaires, 
            mais en raison de sa situation stratégique au-dessus de la 
            Mitidja centrale et de la salubrité du site il fut question 
            d'en faire un chef-lieu administratif. Le projet n'aboutit pas, mais 
            Douéra fut tout de même la résidence d'un commissaire 
            civil, une sorte d'auxiliaire de l'intendant de la province 
            d'Alger. La présence de ce commissaire civil signifiait que 
            les civils qui résidaient là échapperaient à 
            l'autorité militaire. En effet le centre de colonisation ayant été officiellement 
            créé des colons vinrent en assez grand nombre; mais 
            cependant pas autant que ce qu'avait imaginé Guyot. En 1848 
            Quétin trouve le village florissant avec 57 familles (et non 
            250 comme annoncé par Guyot).
  En 1843 le 
              rôle de Douéra est accru par l'inauguration de la ligne 
              télégraphique de Blida à Alger. Par contre en 1845 la 
              nouvelle route d'Alger à Blida par Birkhadem diminue
 beaucoup l'importance de la commune comme voie de transit pour les 
              gens et les
 marchandises allant de la Mitidja centrale ou du sud, vers Alger.
 
 Durant cette période l'institution la plus fréquentée 
              par les soldats et les colons, surtout ceux
 de la plaine marécageuse toute proche, fut l'hôpital. 
              On avait renoncé à soigner sur place
 les victimes de crises de paludisme de la région de Boufarik. 
              On les transportait à Douéra.
 Il y avait aussi l'église Saint Antoine dont j'ignore la 
              date de construction, mais qui a dû être
 bâtie assez vite car elle était prévue par le 
              plan Guyot de 1842.
 
 |   
          | o 
                Après 
              1848 la loi du 9 décembre étendit à 
              l'Algérie la départementalisation. Les trois provinces 
              cédèrent la place à trois départements, 
              et Douéra y perdit son commissaire civil. La commune fut 
              intégrée à l'arrondissement de Blida, et non 
              à celui d'Alger. En 1848 elle 
              était immense car quatre communes voisines étaient 
              des communes annexes qui ne devinrent CPE, communes de plein exercice, 
              que plus tard : Mahelma 
              en 1870, Baba 
              Hassen en 1875, Saint 
              Ferdinand en 1894 et Crescia 
              à une date que j'ignore. Seul le hameau de 
              Sainte Amélie, situé tout près de 
              la limite nord de la commune, est resté dépendant 
              de Douéra, alors qu'il est plus près de Mahelma. Douéra a ainsi occupé une place à 
              part dans le Sahel oriental, en raison de sa grosse garnison et 
              des institutions et établissements qui n'existaient pas dans 
              les villages voisins. Les colons de ces villages venaient se faire 
              soigner ou faire leurs achats exceptionnels à Douéra. 
              A l'inverse des commerçants ambulants de Douéra allaient 
              à la recherche de leurs clients dans les villages les plus 
              proches, Crescia et Baba Hassen notamment, au moins jusqu'en 1939. 
              La photo ci-dessus associe à la vue de l'hôpital des 
              rangées de vigne qui sont comme un symbole de la culture 
              principale du Sahel non littoral. |  Quelques dates 
         
          | 1834 - | Installation d'un camp militaire sur 
            la première route d'Alger à Blida |   
          | 1835 - | Arrivée des premiers résidents 
            civils. Création d'une centre de peuplement européen En 1835 ou plus tard, Douéra devient la résidence d'un 
            commissaire civil
 |   
          | 1839 - | Saccage de la Mitidja par les Hadjoutes. 
            Douéra est un refuge pour certains rescapés |   
          | 1843 - | Création du hameau de Sainte 
            Amélie Inauguration de la ligne télégraphique Blida-Boufarik-Douéra-Alger
 |   
          | 1845 - | Ouverture de la route directe Alger-Mitidja 
            par Birkhadem : Douéra est à l'écart de cette 
            route |   
          | 1848 - | Douéra est rattaché à 
            l'arrondissement de Blida créé par la loi de départementalisation |   
          | 1852 - | Le camp de Douéra devient "camp 
            déversoir " pour les transportés du coup d'état 
            du 2/12/1851 |   
          | 1870 - | Mahelma échappe à la tutelle 
            de Douéra |   
          | 1875 - | Baba Hassen échappe à 
            la tutelle de Douéra |   
          | 1894 - | Saint Ferdinand échappe à 
            la tutelle de Douéra |   
          | 1902 - | Inauguration des casernes Damrémont 
            et Bugeaud |   
          | 1923 - | Ouverture du centre d'instruction des 
            transmissions du 19è corps d'armée |   
          | 1942 - | Arrivée de soldats américains 
            en novembre |   
          | 1944 - | De Lattre de Tassigny établit 
            son Etat-Major au château Holden (jusqu'en juin) |   
          | 1959 - | Installation du bataillon de Joinville |   
          | 1965 - | Ben Bella est interné au château 
            Holden après le coup d'état de Boumédiène 
            (19/6/1965) |  Le territoire communal 
         
          | Cliquer 
              sur l'image pour une meilleure lecture ( 150 ko)Territoire communal 
              de Douéra
 |  Comme les territoires des communes voisines, celui de 
        Douéra est triple avec au nord un plateau en pente très 
        faible vers la mer, au sud une étroite bande de plaine et entre 
        les deux un versant parcouru par de nombreux talwegs d'oueds à 
        sec durant l'été. Ce schéma se retrouve d'ailleurs 
        dans tout le Sahel oriental ainsi que dans celui de Koléa au-delà 
        de la coupure du Mazafran. 
        Le plateau
 C'est dans la commune de Douéra que ce plateau est entaillé 
        par le ravin le plus profond, celui de l'oued Ben Amar encaissé 
        d'une soixantaine de mètres.
 
 En fait il scinde le plateau en deux ensembles : celui de Douéra 
        à l'est et celui de Sainte Amélie à l'ouest. Le plateau 
        où est situé le village de Douéra est le plus régulier 
        et le mieux mis en valeur par les colons. Il est presque entièrement 
        couvert de vignes, tant du côté de Crescia que du côté 
        de Baba Hassen. Celui où a été bâti le hameau 
        de Sainte Amélie est à peine plus entamé par les 
        branches amont de l'oued Mahelma.
 L'occupation des sols par la vigne a laissé un peu plus de place 
        aux broussailles, mais guère plus. Il y a au sud de Sainte Amélie, 
        de l'autre côté de la route de Mahelma à Saint Ferdinand 
        un grand domaine, celui de l'haouch Scalladgi.
 
 Les altitudes sont semblables à Douéra et à Sainte 
        Amélie : de l'ordre de 185m, et un peu plus hautes au sud de Douéra 
        dont le " signal " est à 232m.
                        
        La plaineEn face du Sahel de Douéra la route de ceinture nord de la Mitidja 
        s'écarte suffisamment du talus pour que la commune de Douéra 
        empiète d'un bon kilomètre sur la plaine de la Mitidja. 
        Cet espace était en 1939 drainé correctement et presque 
        entièrement occupé par des vignes et parsemé de fermes 
        de colons.
 
 L'altitude de la plaine baisse de 44m en face des 4 chemins, à 
        28m à la limite avec Mahelma. Cette déclivité était 
        imperceptible au regard du passant, mais elle avait des conséquences 
        sur le risque inégal de submersion des champs en cas de pluies 
        violentes. Nous sommes là en limite des marais des Ouled Mendil 
        dont l'assèchement fut tardif ; les travaux débutèrent 
        en 1927.
                        
        Le versantIl descend de 232m à moins de 50m en 2,5km, parfois moins. Il est 
        donc fortement érodé par une dizaine d'oueds qui en période 
        de pluies, faisaient déborder les marais des Ouled Mendil au-delà 
        des limites des communes voisines de Boufarik et de Birtouta. Sur les 
        pentes de ce versant les fermes de colons étaient l'exception et 
        les mechtas des douars la règle. Ces terres argileuses et pentues 
        avaient été laissées aux tribus indigènes 
        ; elles n'étaient pas entièrement cultivées. Pourtant 
        les points noirs des mechtas sont, sur la carte, très nombreux. 
        On y remarque également l'emplacement de deux cimetières 
        musulmans et en bordure de la route, de plusieurs carrières. Sur 
        la carte j'ai repéré les cimetières musulmans , avec 
        seulement l'abréviation cim.
 Le village centreA vrai dire Douéra était plus qu'un village sans être 
        pour autant une ville, même petite.
 
 Il a le plan en damier classique des villages de colonisation ; mais en 
        version élargie, avec dix rues parallèles et non 3, 4 ou 
        5 comme partout ailleurs. Cinq routes y convergeaient.
 
 Il offrait surtout un éventail de services qui étaient utilisés 
        par les habitants des communes environnantes. Sans être exhaustif, 
        je tiens à souligner la présence de quelques institutions 
        absentes de la plupart des villages du Sahel :
 Un temple 
        protestant, en plus de l'église (ici Saint Antoine) que l'on trouve 
        partout,
 Une 
        gendarmerie et un pénitencier,
 Une 
        société philharmonique,
 Des 
        agences bancaires,
 Une 
        grande salle de cinéma (et non un projecteur dans une salle des 
        fêtes)
 Un hôtel 
        ; du Palais Royal sous la Monarchie, de Strasbourg ensuite,
 Des 
        médecins et une pharmacie ; et beaucoup d'établissements 
        de soins qui conféraient à Douéra
 une place et un rôle importants dans le domaine de la santé 
        :
 un solarium 
        ou centre de rééducation pour enfants,
 un asile 
        de vieillards ensuite appelé hospice,
 un sanatorium 
        qui a cédé la place après 1945 à celui de 
        Rivet situé sur le djebel Zérouéla,
 un grand 
        hôpital.
 Il n'est 
        pas impossible que les dimensions inhabituelles du cimetière, s'expliquent, 
        pour une part, par la présence de ce grand hôpital.
 Ce rôle 
        médical a également été illustré par 
        le souvenir laissé par un docteur décédé en 
        1927, le docteur Babilée, dont le buste se trouvait en face de 
        la mairie.
 On peut lire parfois que Douéra était la 
        " reine du Sahel ". Je crois qu'il ne faut pas exagérer 
        : ou alors il faudrait ajouter que la reine avait peu de courtisans, 5 
        ou 6 villages tout au plus car Alger était trop proche et réduisait 
        la zone d'influence de Douéra. Même Boufarik, à 13km, 
        faisait de l'ombre à Douéra. Pour un vrai théâtre, 
        pour le lycée et pour la gare, les gens de Douéra étaient 
        démunis et avaient le choix entre Alger à 20 km de routes 
        sinueuses et Boufarik à 13km au bout d'une longue ligne droite 
        à partir du carrefour des 4 chemins. Une fois fini le temps des voitures à chevaux, 
        la desserte de Douéra a été assurée par les 
        cars de la société Seygfried, avant son rachat par les auto-cars 
        blidéens. Ce sont les mêmes sociétés qui desservirent 
        également le hameau de Sainte Amélie situé dans la 
        même commune, du côté de Mahelma.  Le hameau de Sainte Amélie
 Ce centre a été créé en même temps que 
        Saint Ferdinand, en 1843, et par les 
        mêmes bâtisseurs. La décision fut prise par le Gouverneur 
        Général Bugeaud en personne qui connaissait les lieux pour 
        y avoir fréquenté un pavillon de chasse. Les maisons furent 
        construites par les condamnés militaires du Colonel Marengo, mais 
        peuplé par des colons civils. Malgré l'apport de quelques 
        familles suisses valaisanes en 1851 
        ce centre n'a jamais atteint les dimensions d'un vrai village. Il n'y 
        eut jamais qu'une école à classe unique.
 Le prénom Amélie, ainsi que le prénom 
        Ferdinand, ont été choisis pour rendre hommage à 
        la famille royale. Ferdinand est le prénom du prince héritier 
        Ferdinand, duc d'Orléans mort accidentellement le 13 septembre 
        1842 à Neuilly sur Seine. Amélie est le deuxième 
        prénom de sa maman, Marie Amélie de Bourbon fille du roi 
        des Deux-Siciles et reine des Français depuis 1830.
 Cet hommage pour lequel je n'ai trouvé aucune preuve décisive, 
        me paraît d'autant plus probable qu'à la même époque 
        la reine Amélie participait, pour un tiers, au financement de l'église 
        en construction à Boufarik, et dédiée à Saint 
        Ferdinand.
 Ce hameau est le centre de peuplement européen 
        le plus modeste de tout le Sahel. Le guide Quétin croit y avoir 
        vu 50 familles vers 1848 : ce n'est pas crédible. Il n'y a que 
        deux rangées de maisons entre deux rues tracées un peu à 
        l'écart de la route de Mahelma. En 1939 le village n'avait pas 
        dépassé ces limites qui ressemblent à celles d'un 
        ancien fossé ou d'un ancien talus de protection. C'est ce qui explique 
        qu'il n'ait jamais été promu chef-lieu de commune. Etrangement son nom très chrétien figure 
        encore sur les cartes et les photos satellitaires visibles sur des sites 
        algériens : il semble n'avoir pas été remplacé. 
         Suppléments sur les Ouled Mendil
 Les Ouled Mendil sont la principale tribu arabe de Douéra et du 
        morceau de Mitidja attenant
 et aussi 
        un marécage situé dans la plaine sur leur territoire d'avant 
        1830
 et aussi 
        un hameau européen de 1851 qui a vite changé de nom
 et enfin 
        un village prévu par Guyot en 1842, mais qui n'a jamais vu le jour.
 Je commencerai par ce village.
                        
        Le projet de village abandonnéLe mieux est de recopier le texte du comte Guyot
 
         
          | 
               
                | Ouled Mendil est sur le 
                    territoire d'une tribu émigrée en partie. Le 
                    village pourrait être placé à cheval sur 
                    la route d'Alger à Blida dans l'endroit même 
                    où existe déjà un établissement 
                    des ponts et chaussées. L'eau y est rare, mais dans 
                    le cas où l'on en trouverait pas dans le voisinage 
                    qui puisse être amenée, des puits et citernes 
                    y suppléeraient. Il y a des carrières très 
                    abondantes et dont l'exploitation pourrait devenir fort importante 
                    pour les constructions des villages environnants ou pour celles 
                    de la plaine. Les cultures seraient presque toutes dans la 
                    Mitidja que la position domine de manière avantageuse 
                    pour la défense tant de la localité même 
                    et de la route, que d'une grande partie de la plaine. |  |  Ce texte semble presque décrire le cas de Douéra, 
        à ceci près que Douéra n'a que très peu de 
        terres cultivées dans la plaine. En fait ce village aurait fait 
        double emploi avec celui de Douéra qui est effectivement à 
        cheval sur la route d'Alger à Blida, celle d'avant 1845 bien sûr. 
        Quant à la plaine, c'était alors le domaine d'un marais 
        à géométrie variable selon les saisons et de fièvres 
        que l'on ne savait ni prévenir, ni vraiment guérir, malgré 
        les distributions de quinine.
 Les terres confisquées aux tribus émigrées ont sûrement 
        été réunies à la commune créée 
        autour de Douéra pour celles situées en hauteur, et à 
        celles de Boufarik pour celles, à marécages saisonniers, 
        de la plaine.
 La carte de 1930 confirme la présence de carrières exploitées 
        le long de la route descendant de Douéra vers la plaine.
                        
        Un hameau appelé Ouled Mendil en décembre 
        1851Lorsque la route de Blida à Alger évita Douéra pour 
        passer par Birkhadem, en 1845, la route à protéger ne fut 
        plus celle qui traversait le Sahel, mais celle qui longeait le Sahel en 
        passant dans la plaine de la Mitidja. On renforça les blockhaus 
        qui s'échelonnaient sur cette route. Et en décembre 
        1851 un village fut créé auprès du 4è 
        blockhaus, Birtouta, et un hameau 
        créé au carrefour des deux routes de Blida, l'ancienne et 
        la nouvelle. Ce lieu fut appelé Ouled Mendil : mais cette dénomination 
        fut éphémère car l'habitude fut prise de dire 
        les 4 chemins ; à savoir vers Douéra, Birtouta, 
        Boufarik et le Mazafran. Ce hameau ne grandit jamais au point de devenir 
        un village et resta un lieu-dit de la commune de Boufarik. Les documents 
        algériens actuels ont gardé ce nom français malgré 
        l'existence théorique d'un nom arabe, celui de Tessala el Merdja 
        ; (merdja signifiant marais)
                        
        Le marais des Ouled Mendil Il était encore intact en 1926, et tout près 
        des fermes de Douéra situées dans la plaine. C'était 
        un foyer paludéen dangereux. 
 En été il ne subsistait qu'un marécage de 5ha environ, 
        d'autant plus infecté de moustiques que ses eaux n'avaient pas 
        de poissons. L'hiver il pouvait s'étendre sur 500ha. Il se trouvait 
        dans une cuvette fermée très peu profonde sur le seuil de 
        partage entre le Mazafran et l'Harrach. D'ailleurs en cas de débordement 
        les eaux se dirigeaient des deux côtés, vers l'Harrach par 
        l'oued Terro et vers le Mazafran par l'oued Tleta.
 
 L'idée de supprimer ce dernier foyer d'infection de la commune 
        de Boufarik aurait été émise en 1911 par le Directeur 
        de l'Institut Pasteur d'Alger, le docteur Roux. Mais la guerre de 1914-1918 
        a retardé les travaux qui n'ont été possibles qu'après 
        que l'Institut Pasteur eut reçu une concession de 360ha pour y 
        créer deux fermes expérimentales. Ils ont commencé 
        en 1927 sous la direction des docteurs 
        Etienne et Edmond Sergent. Ils ont été précédés 
        par une campagne dite de " quininisation " des populations locales, 
        afin de supprimer les réservoirs humains d'hématozoaires. 
        Ensuite il s'est agi d'éliminer les eaux stagnantes en creusant 
        de modestes canaux de drainage, en approfondissant et en canalisant l'oued 
        Tléta et en colmatant quelques creux. On a aussi planté 
        des arbres, surtout des eucalyptus censés éloigner les moustiques.
 Ce fut un succès. On a tout de même gardé une " 
        réserve " d'un quart d'hectare comme témoin de ce qu'avait 
        été la Mitidja en 1830. Par la suite on y a introduit des 
        gambusies, petits poissons d'eaux douces longs de 4 à 6cm, et grands 
        amateurs de larves de moustiques.
 Dans les fermes expérimentales ont été 
        plantés orangers et citronniers.                        
        La tribu des Ouled MendilTraditionnellement cette tribu possédait des terres dans la plaine 
        et dans le Sahel. Mais ses gourbis, puis ses maisons, ont toujours été 
        bâtis sur le territoire de Douéra.
 
 Cette tribu est divisée en plusieurs fractions, dont trois sont 
        nommées sur la carte. Le cartographe n'était pas arabisant, 
        c'est sûr : sinon il n'aurait pas placé à la même 
        longitude les Ouled Mendil de l'est (les Chéraga, pluriel de Chergui) 
        et ceux de l'ouest (les Gharbia).
 En réalité les Chéraga vivaient à 
        l'est de la route de Douéra aux quatre chemins, du côté 
        de Crescia et les Gharbia à l'ouest, du côté de Mahelma. 
        Le doute, s'il y en avait un, serait levé en regardant les vues 
        satellitaires figurant sur des sites algériens. Elles mentionnent 
        le nom Ouled Mendil Gharbia au bon endroit.
     |