Le concours-exposition d'Affreville ouvre des perspectives d'élevage
dans le Haut-Chéliff
D'une visite å Affreville, l'on
conserve une impression réconfortante. La ville, clé du
Haut-Chéliff, connaît un bel essor. La région environnante
également.
Aux nombreuses réalisations communales, s'ajoutent; celles des
organisations agricoles. Récemment l'on procédait a l'inauguration
de la sobre et harmonieuse maison du colon.
Hier, organisé par le Syndicat d'élevage, un concours-expositions
agricole drainait dans la cité chère à M. Gougé,
maire, tout ce que l'arrondissement de Miliana, et même de plus
loin, compte d'amateurs d'élevage.
Cette manifestation, la première du genre depuis la fin des hostilités,
a connu un succès justifié et sera un précieux encouragement
pour M. Morant, président du syndicat d'élévage,
et Mongeot, inspecteur du service de l'élevage.
A l'image des agriculteurs et des villageois de cette région, entreprenants
au possible, malgré de nombreuses difficultés. les organisateurs
ont mis sur pied un concours imposant où deux cent cinquante bovins
et ovins. ainsi qu'une centaine de chiens ont été présentés.
L'irrigation et ses problèmes
Nous insisterons plus particulièrement sur la participation des
bêtes de ferme dont l'élevage parait devoir prendre de l'ampleur
dans le
Haut-Chéliff.
Cette partie de la plaine va connaître une totale transformation.
Le miracle de l'eau, provenant du barrage
du Ghrib va enfin jouer son rôle initial et logique :
l'irrigation des terres d'Affreville. Ce sera avec 37.000 hectares le
périmètre irrigable le plus important d'Algérie.
Mais l'irrigation pose de nombreux problèmes. Elle incite même
les producteurs à une certaine réserve, cause un désarroi.
On ne transforme pas facilement une terre sèche. Il convient de
bien réfléchir avant d'entreprendre de nouvelles cultures.
Il n'est pas possible de se fier à l'expérimentation des
autres périmètres. C'est l'inconnu. D'où l'existence
d'une étroite collaboration entre les techniciens et les producteurs
Ces derniers par ailleurs doivent se convaincre de la nécessité
d'entreprendre des travaux sur leurs terres : de dénivellement,
de mise en place de conduites secondaires. Tâches de longue haleine...
Enfin l'orientation des cultures doit être judicieuse. Pour le Haut-Chéliff
l'agrumiculture ne sera pas un exutoire d'autant que la saturation des
marchés de consommation est à prévoir.
L'avenir : production fourragère
Par contre, l'arboriculture, en particulier les oliviers, la culture intensive
des céréales, grâce à l'irrigation, bien que
cela. soulève une délicate technicité, pourront se
développer.
Mais les perspectives générales d'avenir de cette région
se situent dans l'élevage. M. Urbani secrétaire général
adjoint du Gouvernement général, chargé des Affaires
économiques ; M. de Calan, délégué à
l'Assemblée algérienne. ainsi que différentes personnalités
locales, s'en sont déclarés fermement convaincus.
Toute une gamme de plantes fourragères s'offre aux producteurs
du Haut-Chéliff, en tête desquelles la luzerne. Pour M. de
Calan, " il y a possibilité de boucler les douze mois de l'année
".
Ce fourrage devra être ensuite transfomé sur place, c'est-à-dire
en viande, laine et lait. Pour le délégué d'Affreville.
grâce à cette permanence de la nourriture, l'on doit pouvoir
obtenir des viandes de qualité. Par ailleurs, la laine provenant
du mérinos dont l'élevage donne actuellement des résultats
encourageants. doit ouvrir d'importants débouchés sur la
métropole.
Enfin, le lait, estime M. de Calan, du fait de la permanence de nourriture
fourragère sur place, pourra avoir son prix de revient sensiblement
abaissé, permettant ainsi une augmentation de la consommation.
Ainsi le concours-exposition d'Affreville prend un relier particulier.
De magnifiques sujets ont été présentés provenant
d'une race pure acclimatée. Les taureaux, les vaches, les génisses,
d'origine tarentaise, nés, élevés, primés
à Affreville, autorisent tous les espoirs. Il en est de même
pour les
ovins.
Lorsque l'on parle d'0rléansville,
Oued-Fodda, on compare souvent cette partie de la plaine du
Cheliff à une petite Californie.
Demain peut-être, comparera t-on le Haut-Chéliff aux gras
pâturages de la Normandie ?
L'allocution de M. URBANI
A l'issue de la visite des boxes du concours-exposition, et de la présentation
des sujets primés, un banquet offert par le Syndicat d'élevage
a réuni de nombreux invités.
Au dessert, M. Morant a fait l'historique du syndicat d'élevage
de la région ; M. l'agha Ben Souna. conseiller général.
a insisté sur le fait que l'économique devait primer sur
le politique et demandé à l'administration son aide en faveur
de la paysannerie musulmane par l'entremise des S.A.R.. et du T.l.C.
Après que M. Bisgambiglia eut fait un éloquent plaidoyer
en faveur de l'eau , et M. de Calan, dont nous avons ci-dessus exposé
l'opinion, M. Urbani a fait un rapide tour de la situation économique
et précisé la position de l'administration à l'encontre
de certains problèmes locaux.
Le secrétaire général du Gouvernement, avec la compétence
qui lui est unanimement reconnue, a traité de l'organisation des
marchés, nationaux et européens, " qui seule permettra
d'assurer la sécurité des populations rurales ". Il
n'a pas manqué, sur ce point, d'assurer son auditoire du souci
animant le gouvernement de préserver les intérêts
de l'agriculture au cours des conversations économiques européennes.
M. Urbani a également affirmé la préoccupation constante
des Services techniques et leur désir de développer les
S.A.R., " sur lesquels on fonde de gros espoirs " et les T.I.C.
" expérience récente, prélude à une déconcentration
administrative ".
Répondant plus particulièrement à quelques revendications
présentées par M. de Calan, le secrétaire général
adjoint a précisé : que l'implantation du génie rural
allait commencer ; sur le prix de l'eau, qu'il convenait de ne pas créer
une rivalité entre les deux périmètres voisins. mais
qu'il était nécessaire d'assurer l'équilibre de l'exploitation.
" S'il y a péréquation, il y aura forcément
compensation. "
Enfin, M. Urbani a traité du crédit agricole et a rappelé
qu'il était partisan, outre l'investissement public, de l'équipement
particulier par le crédit. La délicate question des prêts
à long terme ne pourra avoir de solutions qu'avec la stabilisation
qui entraînera la confiance.
Sur ce sujet, il a exprimé sa satisfaction d'avoir enregistré
l'accord des dirigeants de l'agriculture en faveur de l'" expérience
Pinay ".
M. Urbani a conclu en transmettant aux producteurs du Haut-Chéliff
le salut de M. le gouverneur général Roger Léonard.
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