DOMBASLE en 1900
Edgard Scotti †
extraits du numéro 116 , décembre 2006, de "l'Algérianiste", bulletin d'idées et d'information, avec l'autorisation de la direction actuelle de la revue "l'Algérianiste"
sur site le 28-9-2011

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dombasle Carte Michelin, 172, Algérie-Tunisie, 1958
Carte Michelin, 172, Algérie-Tunisie, 1958


L'église de Dombasle.


LE CENTRE était en création en 1900. II faisait partie de la commune mixte de Cacherou et dépendait de l'arrondissement de Mascara. II était situé à 16 km de Palikao et à 15,500 km de Cacherou.

Ce nouveau village prit le nom de Christophe, Joseph, Mathieu de Dombasle né à Nancy en 1777, mort dans cette même ville en 1843. Cet agronome français inventa un modèle de charrue, perfectionna les méthodes d'amélioration des sols par le chaulage. Son nom domine l'histoire de l'agronomie française. Au début du 19e siècle, il dirigea à Roville de 1822 à 1840, la première école d'agriculture française et fut, avec la publication des Annales de Roville, un précurseur de l'enseignement de l'économie rurale...

Avec la création en 1826 de " l'institution royale agronomique de Grignon " Mathieu de Dombasle, ouvre la voie à l'enseignement supérieur agronomique dans cinq grandes écoles: Paris, Grignon, Rennes, Montpellier et Alger -Maison-Carrée.

Le centre de Dombasle a été peuplé avec des agriculteurs du sud- ouest de la France, Haute-Garonne, Tarn, et des départements du Languedoc, Aude et Hérault. Ces hommes et ces femmes durement éprouvés par la crise du phylloxera arrivaient dans cette région de Mascara et notamment à Dombasle, avec la volonté de planter des arbres, des oliviers mais aussi de la vigne. Cela faisait partie de leur culture. Ils créèrent surtout un vignoble qui, moins de cinquante ans après la création du village, était en pleine production.

Dombasle faisait partir du terroir de Mascara, dont les vins étaient très appréciés pour leurs qualités organoleptiques. Les rouges étaient très colorés, avec un titre alcoolique avoisinant 14° et un minimum de 12,5 °. Ils étaient très recherchés comme vins améliorateurs. Le climat y est rude, avec des hivers froids et de violents siroccos. Les vinifications étaient rendues plus difficiles par des fins d'été particulièrement chaudes avec emballement des températures des moûts. L'encépagement en rouge, était basé sur carignan, cinsaut, grenache, mourvèdre et alicante-bouschet. Les blancs provenaient des clairettes, ugni blanc et faranah. Le " clos Faranah " était un des plus connus de ces crus. Avec, Aïn-Fekan, Aïn-Farès, Cacherou, Dombasle avec ses 80 viticulteurs, faisait partie de ce réputé vignoble.

Leurs 665 ha étaient répartis entre les nombreux membres des familles : Alibert, Baüer, Baéza, Barthez, Bassieu, Bérat, Besse, Bordin, Boulade, Brahim ould Safi, Bucco, Burlet, Burriel, Carayon, Caudenet, Ceccaldi, Serres, Dayan, Dedieu, Dignac, Escorne, Escot, Gascon, Girard, Gratia, Inguimberty, Jaen, Kharachi Abdelkader, Lacroux, Lafon, Moreau, Munich, Pédebas, Poujade, Pujol, Tourvielle, Ursch, Voisin, Vuillier.

Sur des superficies ne dépassant pas en moyenne 8 ha, les viticulteurs de Dombasle avaient une production moyenne annuelle de 20 000 hectolitres d'un vin très apprécié en métropole. Sur des coteaux arides, les ceps avaient alors le grand mérite, par leurs puissantes racines, de puiser l'eau en profondeur. En moins de cinquante ans, la vigne était ainsi la seule culture susceptible de fournir du travail et de procurer toute l'année des ressources à la population de cette région.

Après des drames atroces, en 1962, agriculteurs et viticulteurs de Dombasle, soixante-deux ans après la création de leur village, partirent, abandonnant maisons, cultures et vignes en pleine production.

Traumatisés, meurtris par des pertes cruelles, ces hommes et ces femmes n'ont rien emporté, ils ont laissé à Dombasle des amis de jeunesse et un vignoble réputé qui leur permettait de vivre et de travailler avec tous ceux qui les entouraient. Ils sont partis,en emmenant seulement leur volonté d'ouvrir ailleurs d'autres sillons ou d'implanter d'autres cultures.

Leurs lointains descendants, sont maintenant dépositaires de l'histoire de Dombasle. C'est à eux qu'il appartient désormais d'enrichir et de développer tout ce qui a été fait dans ce village, par des hommes de toutes origines, au prix de lourds sacrifices. Ce patrimoine complexe leur appartient, c'est à eux d'éviter son fractionnement en mémoires individuelles, au profit d'une histoire unique. Selon Jean Bruhnes, géographe toulousain, " Toute installation humaine est l'amalgame d'un peu d'humanité, d'un peu de sol et d'un peu d'eau ".

Un peu d'humanité, un sol ingrat couvert de la seule culture capable, grâce à ses racines, de puiser l'eau en profondeur, permettaient à des hommes de travailler et de vivre de la vigne. Ce qui était alors un objectif, s'est heurté aux obstacles dressés par l'Histoire.

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Bibliographie:
- Guides et annuaires de l'époque.
- Biographie de Mathieu de Dombasle, extraite de Grignon, le château et l'école, de Risch, Brétignière, Guicherd et Jouvet, aux éditions de la Bonne Idée, 152 rue de Vaugirard, Paris.
- M. André Grasset, directeur de l'école d'Aïn-Témouchent, Le vignoble de Mascara.
- L'oeuvre agricole française en Algérie, ouvrage collectif de 19 auteurs édité par l'Association amicale des anciens élèves des écoles d'agriculture d'Algérie, (dépôt légal 1990).

L'auteur exprime ses sentiments de bien vive gratitude à toutes les personnes qui, par leurs archives ou leurs souvenirs, contribuèrent à la remise en mémoire de Dombasle, notamment le D' Georges Duboucher, MM. Louis Dulac et Jacques Piollenc.