La première classe fut ouverte à Alger en
1872 par un sourd-muet de Bordeaux (M. CHARGEBUF) qui enseigna uniquement
par le système de l'Abbé de L'EPÉE.
En 1887, M. et Mme ROUSSIÉRE fondaient une école que la
Municipalité d'Alger transféra Rampe Valée où
fut créé un internat de 45 élèves.
C'est M. ROUSSIÈRE qui, le premier à Alger, employa la méthode
orale.
En 1905, la Municipalité acquérait la villa "la Chimère"
et y installait l'école.
En 1920, la commune d'Alger la rétrocédait à l'Algérie.
Elle s'est appelée successivement : Ecole Municipale, Ecole Coloniale
des Sourds-muets d'Algérie, Ecole des Sourds-muets et enfin, depuis
Janvier 1958, Ecole des Jeunes Sourds.
J'ai proposé cette nouvelle dénomination pour répondre
au voeu plusieurs fois émis tant par des Congrès de Maîtres
que par les groupements de sourds.
L'appellation de " Sourd-muet " est, en effet, impropre car
le mutisme n'est que la conséquence de la surdité.
L'Ecole d'Alger fut dirigée de 1922 à 1928 par M. ROLLAND,
de 1928 à 1937 par M. AYROLE, tous deux professeurs des Institutions
nationales métropolitaines, de 1937 à 1957 par Mne GAFFIOT,
directrice d'Hôpital.
Après avoir groupé 20, 45 puis 90 élèves répartis
en 7 classes, elle compte maintenant 110 enfants des deux sexes, confiés
à 9 professeurs. Certaines classes sont dotées d'appareils
amplificateurs ultra-modernes. Les élèves peuvent apprendre
la couture, la menuiserie, la cordonnerie et le jardinage-horticulture.
L'école ne peut malheureusement pas recevoir davantage d'élèves,
et la liste des candidats à l'admission s'allonge de jour en jour
; elle est, en effet, le seul établissement de cette nature pour
toute l'Algérie.
Toutefois, un terrain a été acheté en bordure de
l'école pour y élever des constructions qui permettront
de recevoir au moins 350 élèves. Il faut souhaiter que ces
agrandissements soient rapidement exécutés et que d'autres
écoles soient créées en Algérie.
M. GAUTIÉ
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L'Abbé
de l'Épée, vie et uvre
L'Abbé Charles Michel de L'ÉPÉE est né à
Versailles le 24 Novembre 1712. Son père était architecte
des bâtiments du roi et avait laissé, à sa mort, des
revenus appréciables à l'Abbé de L'ÉPÉE.
Celui-ci, dont la bonté était connue des habitants de son
quartier. rencontre, par hasard, un soir d'hiver en 1754, deux soeurs
jumelles sourdes-muettes. Leur maître venait de mourir.
Emu de leur infortune, l'Abbé de L'ÉPÉE, qui a 42
ans, entreprend de poursuivre leur éducation. Cette tâche
menée à bien, il se consacre tout particulièrement
aux enfants pauvres. En 1760, il transforme sa maison, rue des Moulins
à Paris, en une école ouverte à tous les jeunes sourds,
pauvres et riches, indistinctement. Les indigents sont entretenus dans
des pensions du voisinage à ses frais. Les leçons sont gratuites.
Il consacre toutes ses ressources à son oeuvre, il se prive même
de feu et de nourriture.
Pour attirer l'attention des pouvoirs publics et pour faire connaître
à ses contemporains qu'il est possible de cultiver, à l'aide
de procédés appropriés, l'intelligence des enfants
sourds, il organise des présentations publiques d'élèves.
Grâce à elles, il obtient de Louis XVI une rente viagère
de 6.000 livres. En 1785, sur la proposition du roi, une partie du couvent
des Célestins est affectée aux sourds-muets. Aux quatre
coins de France et de l'étranger, des disciples de l'Abbé
de L'ÉPÉE ouvrent des écoles.
Il meurt le 23 Décembre 1789; trois mois plus tard son oraison
funèbre est prononcée officiellement en l'église
Saint-Etienne du Mont. En 1790, son école est élevée
au rang d'Institution Nationale. Un décret de la Convention, en
1794 la transfère à l'emplacement qu'elle occupe encore
Rue Saint-Jacques, à Paris. o
L'Année suivante, en Juillet 1791, la ConStituante prend un décret
où il est dit que " le nom de l'Abbé de L'ÉPÉE
sera placé au nombre de ceux des citoyens qui ont le mieux mérité
de l'Humanité et de la Patrie
Le titre de gloire essentiel de l'Abbé de L'ÉPÉE
est - d'avoir été le promoteur de l'éducation publique
des sourds-muets, non seulement en France, mais dans le monde entier.
Il a, de plus, le mérite incalculable d'avoir montré que
cette éducation était possible.
Marcel GAUTIÉ
Directeur de l'Ecole des Jeunes Sourds d'Alger
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