TAMANRASSET ou FORT LAPERRINE
TAMANRASSET - Le PÈRE DE FOUCAULT - LAPERRINE
extrait du guide vert Michelin de 1956

 


mise sur site le 12-3-2012

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EXRAIT du guide vert Michelin, 1956. Pour lire la totalité, voir le PDF

TAMANRASSET
- Carte Michelin n° 415) - pli 5 - Schéma p. 158.
Tamanrasset, qui n'était au début de ce siècle qu'un minuscule centre de cultures targui au voisinage d'une source, a vu sa renommée s'étendre à la terre entière depuis le séjour qu'y fit le Père Charles de Foucauld et son martyre. Son importance économique a connu un développement analogue car elle est la seule localité que l'on rencontre dans la traversée du Sahara, le long des 1.594 km qui séparent In-Salah d'Agadès.

Située sur un plateau que limitent, à l'horizon, Jes sommets du Hoggar, Tam, comme l'appellent tous les Sahariens, est une toute petite ville moderne d'une belle couleur violacée et rouge-orangé. Ses larges rues, plantées d'éthels, sont bordées de maisons aux architectures originales.

Les couchers de soleil de Tamanrasset sont célèbres. Alors, les ombres s'allongent sur le plateau, les maisons de la ville et les sommets voisins s'embrasent et revêtent des couleurs insoupçonnables. Brusquement une nuit sereine, calme et reposante, fraîche à cause de l'altitude de 1.395 m., bleutée, s'empare de tout le massif et l'oreille, attentive, perçoit alors aux alentours, jusqu'à une heure avancée, les manifestations de la vie targuie.

L'ERMITE ET LE SOLDAT

Les noms de Charles de Foucauld et de Laperrine, liés d'une amitié profonde, sont devenus inséparables de l'idée de grand désert et de pacification coloniale française.

CHARLES DE JÉSUS, VICOMTE DE FOUCAULD

Une jeunesse mouvementée. - Né à Strasbourg en 1858 d'une vieille famille chrétienne, Charles de Foucauld (1) tombe orphelin dès son plus jeune âge. Elevé par un de ses oncles, il entre à St-Cyr, puis à l'École de Cavalerie de Saumur. Une crise d'adolescence orageuse et passionnée étouffe en lui toute vie religieuse et son inconduite notoire lui vaut de sévères observations de ses chefs.
En mai 1881, il participe à une campagne de 8 mois dans le Sud Oranais où il se révèle un soldat et un chef de grande classe. Cette nouvelle vie éveille en lui le goût des grandes explorations pour lesquelles Livingstone et Stanley venaient de passionner l'univers. Les cités interdites du Maroc sont là, à sa portée, et le 10 juin 1883, de Foucauld, déguisé en juif Nord-Africain, quitte Alger. Au cours de l'audacieux voyage d'un an qu'il relatera plus tard dans sa "Reconnaissance au Maroc ", il parcourt 3.000 km dans un pays jusqu'alors inconnu et fait, sans le savoir, son apprentissage d'ascétisme.

De retour à Paris, Charles de Foucauld connaît l'abbé Uvelin, vicaire à l'église de St-Augustin, et subit une seconde crise religieuse provoquée sans doute par le spectacle de la foi des populations musulmanes rencontrées au Maroc. La fin d'octobre 1886 voit sa conversion.

Le Bénédictin. - Charles de Foucauld s'efforce alors de modeler sa vie sur celle de Jésus-Christ, et de l'imiter dans son humilité. Il se retire à la trappe de Notre-Dame des Neiges, puis à celle de Cheikhlé, dans le Proche-Orient, puis à Nazareth. Il est ordonné prêtre à Viviers en 1901.

Il se dirige alors vers Beni-Abbès (p. 154) à la porte du Maroc où il espère toujours entrer, mais cette joie ne lui sera pas accordée. Brusquement, il apprend que les Touareg du Hoggar viennent de faire leur soumission. C'est pour l'homme de Dieu un monde mystérieux et jusqu'alors interdit qui vient de s'ouvrir. Sur une suggestion de son ami Laperrine, il part pour vivre au milieu de ce peuple, l'un des plus pauvres du monde.

L'Ermite du Hoggar. - Après avoir parcouru le Hoggar, il arrive à Tamanrasset en août 1905. Ce n'était alors qu'un " arrem " d'une vingtaine de huttes disséminées dans le lit de l'oued. Il se construit un premier ermitage de dimensions exiguës (2 m, 75 X 1 m, 75) qu'il devra remplacer en 1910, par celui qui existe encore au Sud de l'oued. Au cours de cette même année il se construit, sur le plateau de l'Assekrem, un autre ermitage pour passer l'été, dans un site exceptionnel dont la beauté impressionnante favorisait ses méditations.

Au Hoggar, Charles de Foucauld poursuit son travail intellectuel de bénédictin. Afin de pouvoir être d'un plus grand secours aux Touareg qui lui rendent visite, il apprend leur langue. Il écrit le premier dictionnaire français-tamahaq et recueille plus de 6.000 vers des poésies touareg traditionnelles.

Le Martyre. - Le Père Charles de Foucauld devait connaître le martyre le 1" décembre 1916. Au cours de la guerre de 1914, le Hoggar était resté très calme. Mais les troubles qui se firent jour en Tripolitaine avaient été à l'origine d'un soulèvement de la tribu des Senoussites. Les Méharistes touareg étant partis châtier les auteurs de razzias dans le Sud Marocain, le Hoggar se trouvait à peu près vide de troupes.

Les dissidents senoussites apparurent à Tamanrasset le 1" décembre à la tombée de la nuit. Ils recrutèrent pour leur coup de main un cultivateur nommé El-Madani. Ce dernier appela le Père hors du bordj qu'il avait fait élever pour abriter éventuellement les habitants du village et dans lequel il conservait quelques armes dans ce but.

Aussitôt saisi, on lui attache les mains derrière le dos et on le laisse à genoux sur l'étroit terre- plein qui sépare la porte de son muret de protection. Tout à coup une des sentinelles donne l'alarme en annonçant la venue des militaires de Fort Motylinsky. Les Senoussites se portent en hâte vers le lieu d'où proviennent ces appels en laissant un gardien près du "Marabout chrétien ". Une fusillade éclate. Le gardien approche alors le canon de son fusil de la tête du Père de Foucauld et fait feu.

LE GÉNÉRAL HENRI LAPERRINE


Commandant Supérieur des Territoires Sahariens, Laperrine (2) avait, comme Charles de Foucauld étudié aux écoles de St-Cyr, et de Saumur, puis participé à la campagne dans le Sud Oranais en 1881. C'est au cours de cette campagne que les deux hommes s'étaient connus et liés d'une amitié qui sut résister à 20 ans de séparation.

Après huit ans passés en Afrique Noire, le capitaine Laperrine est muté aux Spahis sahariens de Ghardaïa. En 1901, son autorité s'étend à tout le Sahara. Pour mettre fin aux razzias, il crée les " Compagnies sahariennes " recrutées chez les insoumis de la veille, nomades et pillards, errant sans fin dans l'immensité du désert. Les relevés géographiques s'opèrent toujours plus avant dans les zones jusque là dangereuses, des puits sont creusés.

(11 - Pour plus de détails, " Charles de Foucault, explorateur du Maroc, ermite au Sahara "par R. Bazin (Pion - Paris).
(2) - Pour plus de détails, lire, " Laperrine "par L Lehuraux(éd. Encyclopédie de l'Empire fronçais - Paris).

TAMANRASSET (suite).

La guerre de 1914 le surprend en France où il avait été muté 4 ans plus tôt. Mais Lyautey ramène ce grand saharien dans le désert dont les populations étaient sur le point de se soulever. En deux ans Laperrine remet toutes les tribus sur la voie de la fidélité. Au début de l'année 1920, il a préparé lui-même la première grande liaison aérienne de l'Algérie au Soudan. Et le 18 février 1920, quelques heures après son envol de Tamanrasset, son avion doit faire un atterrissage forcé en plein Tanezrouft. Laperrine blessé mourra le 5 mars près de son appareil.

Le 26 avril 1920, son corps était ramené à Tamanrasset, auprès de celui de l'ermite du Hoggar, son grand ami.