" L'Aurès, pays des contrastes
" ! C'est surtout l'hiver que l'Aurès mérite cette
épithète alors que s'offre aux ébats des skieurs
la neige du Mahmel, à 25 kilomètres à peine des premiers
palmiers de l'Oued Abdi.
Par enneigement favorable, des itinéraires de plusieurs jours peu-vent
être effectués entièrement en ski à Sgag et
au Raz Iguedelen, au Mahmel, au Djebel Iddert et au Bou Tlarmine, au Chélia
(2.329 mètres d'altitude, le sommet de l'Algérie) ; l'oeil
s'enthousiasme de paysages inattendus : vastes étendues blanches
et miroitantes au soleil, semées de cèdres givrés,
de chênes lourds de neige, de genévriers thuriférères
torturés.
Lorsque l'enneigement est seulement moyen, comme il l'est tous les ans
pendant deux mois et demi, le vaste plateau du Mahmel, situé tout
entier au-dessus de 1.900 mètres d'altitude, offre aux sportifs
un immense terrain d'exercice, un nombre illimité de pistes de
difficultés graduées sur une surface de plus de 8 kilomètres
carrés. Deux pistes de descente, en particulier, ont été
aménagées cet été par le Ski-Club de Batna
: l'une, droite, de 300 mètres de long, pour les descentes directes
et rapides en, " schuss " et les virages " christiania
", l'autre, de 700 mètres,
moins rapide, pour les descentes sinueuses. Le Ski-Club a construit un
refuge au pied de l'Ich Lichta Tabet.
Avec sa terrasse en béton armé, il constitue une très
heureuse interprétation du style local chaouïa par la technique
moderne. On l'atteint en une heure et demie en quittant la route automobilisable
Batna - Menaa , au kilomètre 35,600 (piste nord) ou au kilomètre
39,400 (piste est). Les deux pistes sont jalonnées. De la crête,
qui constitue le rebord oriental du plateau et à laquelle on accède
depuis le refuge en un quart d'heure, on domine toute la montagne aurasienne,
ses vertes vallées peuplées de noyers et d'amandiers, ses
pentes âpres et brunes ; au loin on aperçoit la chaîne
de l'Ahmar Kraddou, qui s'empourpre au couchant, et, plus loin le Sahara
tout embrumé et attirant. Du refuge on peut atteindre en une heure
le sommet principal, du massif et effectuer en direction du sud une prestigieuse
descente de deux kilomètres.
En semaine celui qui recherche la solitude et le silence y éprouvera
de véritables impressions de hautes montagnes alpestres ; au clair
de lune il pourra errer sur le plateau et ressentir de merveilleuses impressions
dans un monde bleuté et argenté. Le dimanche, les pistes
sont animées par les membres du Club ; des groupes bigarrés
s'exercent, venus de Batna, Constantine,
Biskra, et même de Philippeville, Bône, et Bougie
; on discute technique ; la gaieté règne ; alors s'exprime
la vitalité de ce jeune Club qui a débuté avec six
membres en 1933, et en possède maintenant plus d'une centaine.
Il y a lieu de signaler la qualité de la neige du Mahmel : souvent
poudreuse, elle crisse sous les skis et fuse en gerbe dans leur sillage
; elle forme une couche épaisse de 30 centimètres à
deux mètres qui subsiste de décembre à mars. Le climat
est plutôt sec, la luminosité grande, l'air sain et tonifiant.
Tout cela méritait d'être mentionné d'autant plus
que nous sommes ici en Algérie. Le touriste peut s'exercer toute
une journée sur les champs de ski du Mahmel, et, deux heures après,
se reposer au Bordj-hôtel de Roufi qui domine la palmeraie dans
un site et sous un climat pré-désertique, ou, en trois heures,
regagner Biskra, ses jardins, ses élégances, ses plaisirs.
Le sportif convaincu a le loisir, au contraire, de séjourner au
refuge du Ski-Club, d'y passer plusieurs jours en tre ciel et neige pour
perfectionner sa technique et son entraînement au ski de fond. Ces
possibilités, encore méconnues, ne méritaient-elles
pas d'être signalées à ceux qui sentent, impé
rieux, l'appel de la neige.
G. PLAISANCE.
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