LA PRESSE EN ALGERIE -
LE TELL
LE DOYEN DES HEBDOMADAIRES D'ALGERIE
PARAISSANT A BLIDA LE VENDREDI
fondateur A. MANGUIN (1864) Directeur A. BULLINGER

par Georges-Pierre Hourant

Extrait de la revue du Cercle algérianiste, n°133, mars 2011avec l'autorisation de la direction de la revue "l'Algérianiste"
sur site : avril 2015

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Il existe le PDF avec les repro des n° 8805 et 8806...PDF le tellde 900 ko (pas très net mais...)

LE TELL
LE DOYEN DES HEBDOMADAIRES D'ALGERIE

par Georges-Pierre Hourant


Le numéro 8806 du Tell, paru à Blida le samedi 30 juin 1962, devait être aussi le dernier numéro de ce journal quasi centenaire, sous-titré " Le doyen des hebdomadaires d'Algérie ".

Il avait été fondé en 1864 par l'imprimeur Alexandre Mauguin, dont la famille s'était installée dès 1835 en Algérie, et qui devint maire de Blida pendant vingt ans, de 1881 à 1901. Le journal fut d'abord quotidien à une époque où la presse politique algérienne était nombreuse et diverse, et où beaucoup de petites cités mettaient un point d'honneur à faire vivre un quotidien, voire plusieurs (Voir Ch. R. Ageron, Histoire de l'Algérie contemporaine, PUF, 1979, p. 376 à 378.).

Par nécessité, certains de ces journaux devinrent bihebdomadaires.

Ainsi, en 1889, paraissaient à Blida, outre Le Tell, Le Courrier de Blida et Le Réveil de Blida, d'une durée plus éphémère. En 1899, il y avait encore en Algérie 144 journaux quotidiens, dont cinq à Alger, cinq à Oran, trois à Constantine, deux à Tlemcen; tandis qu'on retrouve à Blida deux bihebdomadaires: L'Indépendant et Le Tell. Ce dernier paraissait alors le mercredi et le samedi, et se déclarait " journal politique et des intérêts coloniaux "; il comportait quatre pages avec, le mercredi, un supplément illustré, évoquant l'actualité locale, mais aussi nationale et internationale.

Outil indispensable pour qui cherche une image objective du passé de Blida et de la Mitidja, Le Tell nous montre la grande richesse culturelle de la petite ville, avec ses très nombreuses associations, ses théâtres, ses cinémas, ses expositions, ses conférences (Voir " La vie quotidienne à Blida en 1930 ", article de Georges-Pierre Hourant, l'algérianiste n° 57 (mars 1992).).

Nous y trouvons aussi l'écho du travail acharné de nos ancêtres, par exemple de Gaston Averseng, maire d'El-Affroun, président des associations agricoles de la région, qui avait créé tant d'institutions humanitaires et sociales dont bénéficiaient aussi bien les musulmans que les Européens. Nous y voyons se développer le tourisme, au Ruisseau des Singes, ou à la station de montagne et de ski de Chréa. Nous y sentons la douceur de vivre qui se manifeste au printemps avec la Fête des Fleurs, ou à la Pentecôte avec les fêtes de la ville...

Plus tard, Le Tell devint hebdomaire et c'est avec cette périodicité qu'il parut pendant les événements, son directeur étant alors l'imprimeur A. Bullinger.
À sa lecture, nous revivons encore des joies comme celles de mai 1958, avec les foules acclamant l'Algérie française sur la place d'Armes; mais aussi les épreuves, la rébellion implantée dans l'Atlas blidéen, les attentats, l'émeute sanglante du ter juillet 1961, pour finir par les enlèvements et l'exode. Du 1er au 18 juin 1962, cent avions décollent du petit aéroport civil de Blida, emportant 9 000 " passagers " qui ne reviendront pas.

La première page du numéro du 23 juin était consacrée à un dernier coup de théâtre: l'annonce des accords entre le FLN et l'OAS, et reproduisait intégralement les discours de Mostefaï et de Susini, tandis que le 30 juin encore, les gros titres étaient consacrés aux lettres du général Salan et de Louis Marquaire, député de Blida, approuvant cet accord, et à deux nouveaux discours de Susini invitant les Français à rester en Algérie.

Pourtant, " suite à la pénurie de personnel affectant son imprimerie ", ce même numéro annonçait à ses lecteurs sa suspension prévue pour une période de trois semaines... mais qui devait s'avérer définitive.

Ainsi s'achevait l'existence d'un des plus anciens journaux d'Algérie.

En 1994, l'arrière-petite-fille d'Alexandre Mauguin, revenue en Algérie, a racheté l'imprimerie de son aïeul et créé à Blida, une maison d'édition portant le nom de Tell***. Mais ce n'est plus le même drapeau qui flotte sur le kiosque de la place d'Armes, et les fêtes d'antan, les belles fêtes du printemps, ont à jamais disparu...

*** Note du site: c'est ici que j'ai acheté les deux volumes de "Feuillets d'El Djezair".
Mais j'ai aussi l'édition originale ( toujours à vendre!)