Madame Jeanne Montupet
Romancière de lAlgérie
A trente-quatre ans, Jeanne Montupet,
en qui se mêlent les sangs corse, italien et irlandais, découvre
les chemins de l'écriture et nous fait découvrir lAlgérie
française à ses débuts.
Les difficultés de linstallation et du peuplement, le défrichement,
la conquête des curs constituent la trame de « La
Fontaine Rouge ».
Ainsi lAlgérie peut se reconnaître dans une trilogie
de leffort et de la joie de vivre sur une terre fructifiée
aussi par la bonté et dont notre Jules Roy, qui a subi son emprise,
me confiait quelle est une terre de courage, où lon
a lhabitude de regarder les gens et les événements
en face.
Avec reconnaissance pour un ciel qui a protégé son enfance,
Jeanne Montupet a fouillé des archives, remué des dossiers,
lu près de 800 livres sur lAfrique du Nord. Loin de prétendre
être une femme de lettres, la romancière de « La Fontaine
Rouge » se présente comme une femme de cur heureuse
de retrouver son Algérie quelle avait quittée en 1938
et le climat de sa naissance littéraire.
- Jai eu une délicieuse jeunesse u sein dune famille
un peu disparate, mais si aimante.
Si lon me disait : « Que désirez-vous le plus ? »,
je répondrais : revivre mon enfance oranaise avec tous ceux qui
me lont faite si gaie, si colorée et si chantante.
Pour lélève du lycée dOran se rappelant
des petites filles en tablier à carreaux bleus, la chaleur incitait
au sommeil ou aux loisirs bien plus quau latin et aux mathématiques.
- Nos grandes vacances se battaient à trois temps : 1, un séjour
au bord de la mer, près dAïn-el-
Turck ; 2, un mois de montagne en France ; 3, une petite visite à
Paris.
Mes plus beaux souvenirs, maintenant, car je ne jurerai pas que je jugeais
ainsi alors, sont ceux de ces plages africaines si blondes et dont le
sable est si intolérablement brûlant aux pieds des petites
filles.
De Saint-Cloud où elle demeure et évoque ces Jours denfant
tout parfumés dune odeur de cuisine espagnole, de Saint-Cloud
auquel elle applique les vers de la comtesse de Noailles, « douce
et monotone, en montées et en vallons. Les maisons peinent tout
au long et lune à lautre se cramponnent... »,
elle a sous les yeux la verdure du Bois de Boulogne, lArc de Triomphe,
le Sacré-Cur, tout ce que, petite Oranaise, elle rêvait
de contempler.
- Ceux qui veulent écrire, a dit Mauriac, je crois, creusent toujours
là où ils sont nés. Aussi mon premier ouvrage et
les suivants dailleurs piochent et piocheront la terre africaine
avec Simon Vermorel, colon de la
Mitidja.
Jeanne Montupet avoue quelle navait Jamais rongé à
écrire. Son sujet « qui nétait pas sans embûches »,
elle la abordé avec l'ardeur de ses pionniers.
Le deuxième volume de « La Fontaine Rouge », intitulé
« Francisca », retracera la vie de la famille Vermorel dans
son domaine reconstruit.
Ce sera dans la Mitidja, nous dit-elle, la fin des tâtonnements
et la grande époque du blé et du tabac, agrémentée
des fastes du second Empire.
Le troisième volume, « Olivier », évoquera le
plein essor de la vigne au temps de « la belle époque 1900
».
Elle semble sétonner de ce que lon désire connaître
sa vie parisienne.
- Pour être celle dune maîtresse de maison qui a ses
obligations, celle dune mère qui a ses devoirs, elle me permet,
car il suffit de sorganiser un peu, décrire trois heures
par jour et de lire autant.
Témoignant de cet « humanisme fraternel » dont parle
Audisio et que son talent garantit, Mme Jeanne Montupet, avec * La Fontaine
Rouge », exprime une lutte morale au tant que physique, le rayonnement
de la terre africaine dont elle est fière et quelle nous
fait aimer.
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