Alger, Notre-Dame d'Afrique
NOTRE DAME DU RAVIN
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TEXTE
mise sur site : juin 2014
2.-
NOTRE DAME DU RAVIN
transmis par Francis Rambert

Graines de Bouzaréa.
LE RAVIN.
A mi-chemin entre le fort Duperré et Notre-Dame d'Afrique. Étroite vallée, profondément encaissée. Inclinaisons rapides, souvent escarpées, recouvertes partout d'arbustes. Par endroits, une flore au coloris délicat. D'épaisses lianes de chèvrefeuille et de clématite tapissent, en les entrelaçant, arbustes et rochers, formant un fouillis de végétation luxuriante. Au fond, murmure l'eau fraîche et pure d'un ruisseau, tantôt cachée sous la mousse, le lierre et les fleurs de ses rives, tantôt sautant en cascade dans un lit de pierre taillé à pic. Tout le long serpente, en suivant les sinuosités du ruisseau, un sentier abrité constamment par l'épais ombrage de grands oliviers qui plongent leurs racines jusqu'au fond du ravin. Au milieu des séductions de la nature africaine tout porte au calme, à la paix, au recueillement mystique. A cette source naquit, il y a bientôt cent ans, le pèlerinage de Notre-Dame d'Afrique. Celui-ci s'en est éloigné ; il est monté sur un plateau.

Le Ravin n'a pas changé. Descendons-y, un jour de sirocco. La déclivité raide nous laisse arriver vite en bas sur une pelouse formée par la rive du petit ruisseau. L'endroit invite à rester. Il fait si frais ici, dans ce berceau de verdure épaisse. Et quel silence, à part le chant d'un oiseau ou le bruit du ruisselet, sonnant si agréablement, lorsqu'il fnit chaud, en haut.

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1-9-1934
aout 2022

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chapelle du ravin

NOTRE DAME DU RAVIN
Graines de Bouzaréa.
LE RAVIN.

A mi-chemin entre le fort Duperré et Notre-Dame d'Afrique. Étroite vallée, profondément encaissée. Inclinaisons rapides, souvent escarpées, recouvertes partout d'arbustes. Par endroits, une flore au coloris délicat. D'épaisses lianes de chèvrefeuille et de clématite tapissent, en les entrelaçant, arbustes et rochers, formant un fouillis de végétation luxuriante. Au fond, murmure l'eau fraîche et pure d'un ruisseau, tantôt cachée sous la mousse, le lierre et les fleurs de ses rives, tantôt sautant en cascade dans un lit de pierre taillé à pic. Tout le long serpente, en suivant les sinuosités du ruisseau, un sentier abrité constamment par l'épais ombrage de grands oliviers qui plongent leurs racines jusqu'au fond du ravin. Au milieu des séductions de la nature africaine tout porte au calme, à la paix, au recueillement mystique. A cette source naquit, il y a bientôt cent ans, le pèlerinage de Notre-Dame d'Afrique. Celui-ci s'en est éloigné ; il est monté sur un plateau.
Le Ravin n'a pas changé. Descendons-y, un jour de sirocco. La déclivité raide nous laisse arriver vite en bas sur une pelouse formée par la rive du petit ruisseau. L'endroit invite à rester. Il fait si frais ici, dans ce berceau de verdure épaisse. Et quel silence, à part le chant d'un oiseau ou le bruit du ruisselet, sonnant si agréablement, lorsqu'il fnit chaud, en haut.
Mais quelqu'un parle derrière nous, tout doucement. Est-ce l'écho du ruisselet ? Nous nous retournons et nous ne voyons personne, rien qu'un petit édifice trapu, adossé au rocher. Nous nous approchons, et là-dedans, au fond, une dame, au joli visage, sourit, mais d'un sourire qui saisit et emplit de bonheur. Il y a un petit enfant à côté d'elle qui sourit de même. Pourquoi donc? Désireux d'en trouver la raison, nous regardons autour de nous, à nouveau. Voilà qu'il y a tant d'écritures sur la porte ouverte et la voûte de l'édifice. On lit. gravé dans une petite plaque en marbre : Angelo Boneilo, Maltais, 1869. On pense que celui-ci doit avoir été le propriétaire. Mais trop de lignes tracées au crayon couvrent tout le petit édifice en arabesques entremêlées. Voilà une écriture de date fraîche " Notre-Dame du Ravin, faites que je trouve du travail ". Une autre ensuite qui se rehausse, apparemment écrite avec instance : " Notre-Dame du Ravin, faites que je me marie avec celui que j'aime de mon cœur ". Une autre, du même sens un peu détaillée : " Notre-Dame du Ravin, faites passer la colère à mon père, que je me marie en blanc avec celui que j'aime (signé) Thérèse ". Mais une main farouche parait avoir écrit en-dessous: " Éloignez-le " Était-ce le père ou le concurrent ? Et même la vendetta a recours à la Dame du Ravin, par : " Vengez-moi ". On comprend que la bonne vierge et son petit enfant doivent sourire, quand les amoureux leur parlent en leur langage spécial.
Mais nous voulions seulement traverser le Ravin. Il fallait nous laisser envelopper par son impression forte, pour être préparés à admirer dans sa vraie perspective ce Monastère perché là tout près, au flanc du Ravin, sur un éperon sorti de la botte de Bouzaréa. Nous suivons le sentier le long du ruisseau et en amont. Nous gravissons, courbés sous la voûte végétale, une côte abrupte. Nous nous risquons à travers un petit pont rustique. Nous sommes surpris de nous trouver dans un immense et joli jardin. Entourée d'un mur s'étend là une vaste propriété dont les bâtiments mauresques forment angle d'une deuxième muraille très haute. Nous sommes chez les Clarisses, venues ici il y a un an, pour y mener la vie, généralement courte, qui plaît aux tempéraments éminemment sensibles aux souffrances du cœur et désirant se recueillir en silence. C'est encore du Ravin, ceint d'une double muraille.
L'habitation des Clarisses avait été le Djenan-el-Bey Rouhou, résidence d'été du Cheikh-el-Islam. On perçoit encore dans le bâtiment du côté du Ravin les fenêtres grillagées, derrière lesquelles se trouvaient les appartements réservés aux femmes. Là vivent maintenant quelques sœurs dans une réclusion où tout matériel est banni. Opposition de conceptions de deux mondes, de deux paradis, du sacrifice imposé au sacrifice librement choisi !
DESHARD.