Nos villages d'Algérie : Mouzaïaville
MOUZAIAVILLE EN 1900
Edgar Scotti (†)
extraits du numéro 142 , juin 2013, de "l'Algérianiste", bulletin d'idées et d'information, avec l'autorisation de la direction actuelle de la revue "l'Algérianiste"

sur site : février 2022

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Cette commune de plein exercice du département d'Alger, créée en 1846, est située au pied de l'Atlas, dont la chaîne atteint à cet endroit 1 604 m. Le centre doté d'un territoire de 13990 ha en plaine et montagne est à 61 km au sud-ouest d'Alger et à 12 km à l'ouest de Blida.

Détruit par le séisme de 1867, ce centre s'est promptement relevé de ses ruines.

A 114 m d'altitude, les températures oscillent entre 5 °C au-dessus de 0° en hiver et 35 °C en été avec des périodes de canicule de 40 °C lorsque souffle le sirocco. Le village abrite une gare PLM, sur la ligne de chemin de fer Alge-Oran.

Au début du )oce siècle, les liaisons avec Blida et Cherchell sont assurées par des voitures à traction hippomobile.

Le territoire de la commune est traversé par l'oued Bou-Ghouaou et par l'oued El-Haâd. Le grand marché du Sebt (samedi) qui se déroulait au haouch ( Haouch : grande propriété agricole logeant propriétaires et ouvriers.) de Smara a été en 1855 rapproché du centre-ville pour en faciliter l'accès aux habitants du village qui, privés d'irrigation, n'avaient alors aucun moyen de produire des légumes.

Administration municipale en 1863

Dix-sept ans après sa création, Mouzaïaville avait déjà une population de 6 972 habitants avec un conseil municipal composé comme suit : maire: M. Caussade; adjoints: MM. Ronchaud, Loubignac et Hitier; conseillers municipaux: MM. Arnaud, Farou, Ferrère, Klène, Verger, Brahim ben Fékaïr.

Administration municipale en 1900

Maire: M. de Lansac; adjoint: M. Cherrier; secrétaire: M. Feutray; conseiller général: M. Pousson;
gardes champêtres: M. Joseph Bréjeon, Saïd Mouaïa;

instituteurs: MM. Pellegrin et Chaffin à l'école de garçons; institutrices: Mme Beausoleil à l'école de filles, Mme Attard à l'école de garçons;
médecin: Dr Guers, médecin de colonisation visitant La Chiffa et El-Affroun;

curé: M. l'abbé Adrien Rouvier;

postes et télégraphe: Mme Boutet, receveuse;

syndicat des eaux : M. Léon Laforge, directeur du syndicat;

garde des eaux : M. Martin Samat.

Artisans et commerçants en 1900

En raison d'une activité économique très diversifiée, de nombreuses professions et différents corps de métiers étaient établis en 1900 à Mouzaïaville.

Assurances: MM. Bertrand, Gustave Sintès et Therminot;
aubergistes: MM. Amiel, Azéma, Boyer, Matte, Sury, Garcia, Mme Vve Simouneau à l'hôtel du Roulage;
bois: MM. Arnaud et Bruxelles, (commerçants en bois);
bouchers : Mme Vve Forges, M. Olivain;
boulangers : MM. Fert, Rosello, Simouneau et Grézet;
bourreliers: MM. Castéras et Aoustin;
charrons-forgerons : MM. Arnaud, Séguy, Domard ;
chaudronnier : M. Gaétano Lombardi;
cordonniers: MM. Finateu, Vergnes;
crin végétal: MM. Bouzid, Duplan, Takbou, séchage et mise en " cortas " du palmier-nain, sous-produit du défrichement;
distillateurs: MM. Guérin (frères), MaisondieuLaforge, (marcs de raisin et géranium);
entrepreneurs, T-P: MM. Mourier, Odosia, Sauterel, Tucci, Boulay, Léglise;
épiciers: MM. Baptiste, Matte, Auguste Trogna, Bruchon, Armand, Berkani, Mouïa ;
ferblantier : M. Calixte Boyer;
mécanicien: M. Trossel;
menuisiers: MM. Barges et Eugène Fragneau;
minotier: M. Ronchaud;
peintre: M. Jean Léglise;
pharmacien : M. Nestor Duc ;
sage-femme : Mme Vve Mahul;
tailleurs : MM. Roujoux et Bouie;
tissus: MM. Finance et Fourment.

Agriculteurs en 1900

Après drainage, cette région de la plaine de la Mitidja était particulièrement favorable à la culture des agrumes, du tabac, des céréales, blé, orge, avoine, maïs, des légumes et plus particulièrement de la vigne. Cette dernière était cultivée avec beaucoup de soins. Afin de prévenir les infestations cryptogamiques, notamment de l'oïdium, quelques viticulteurs plantaient des rosiers en tête de leurs rangs de ceps. Cette plante plus sensible au mycélium que la vigne permettait la mise en oeuvre préventive de traitements à base de soufre. Les vignobles conduits sur porte-greffe 41-B, Richter 99 et rupestris du Lot étaient constitués de cépages tels que carignan, cinsaut, alicante-bouschet qui donnaient d'excellents vins rouges et rosés. L'Alphonse Lavallée ainsi que les muscats, d'Alexandrie et de Hambourg et le dattier de Beyrouth étaient plus particulièrement destinés à la production de raisins de table.

Mme Vve Verger, MM. Pierre Arnaud, Bernardi, Boudet, Chambon, Cazeaux, Deynat, Wilfrid France, François, Gamerre, Germain, Paul Ginestou, Klène, Krempf, de Lansac, Jean-Baptiste Lembezat, Matson, Mougeot, Panier, Ronchaud, Simouneau, Marcé.

Tous ceux qui furent à l'origine de ces cultures durent faire face aux maladies, aux aléas climatiques, à la mévente de leurs produits et aux hécatombes de deux conflits mondiaux. Installés sur des concessions exiguës, dans un milieu souvent hostile, ils ruinèrent leur santé dans la recherche opiniâtre de productions susceptibles de résister aux effets d'un climat capricieux avec la création de vignobles et de vergers d'agrumes, orangers, mandariniers, clémentiniers.

Nombreux sont ceux qui abandonnèrent, en cédant leur lot à d'autres qui réussirent à surmonter ces difficultés.

Ils étaient des hommes et des femmes de leur temps, accrochés à leur terre avec l'énergie du désespoir. Leur aventure profondément humaine mérite qu'un pont soit lancé en direction des générations qui leur font suite. Aujourd'hui leurs arrière-petits-fils ou arrière-petites-filles commencent à se poser des questions sur la façon dont ils vivaient et travaillaient en 1900, soit cinquante-quatre ans après la création de ce village dans la plaine de la Mitidja.

À partir de cultures comme le géranium, le tabac, les agrumes et surtout la vigne qui prospère là où aucune autre ne pourrait être pratiquée, ils contribuèrent à développer le peuplement de ce village où, en 1962, avec 13 330 habitants, des médecins, une pharmacie (Bauzat), des écoles, des artisans, il restait encore beaucoup à faire.

Certainement incomplète, cette note succincte permettra peut-être à quelques-uns de ceux qui eurent des attaches familiales à Mouzaïaville d'en combler les lacunes.

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Remerciements:
L'auteur exprime ses sentiments de bien vive gratitude au Dr Georges Duboucher, à MM. Jacques Piollenc et Jacques Thibaut, qui lui permirent de réunir la documentation nécessaire à la rédaction de cette note.

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