-----Lorsqu'on
suit la voie ferrée de Bône à Constantine après
avoir franchi la station de Medjez-Amar, on laisse derrière soi
la profonde et large vallée de la Seybouse pour entrer dans une
région montagneuse et boisée, d'aspect à la fois
pittoresque et sauvage, comme si, avant d'entrer dans les vastes plaines
dénudées de l'Oued-Zénati et des environs de Constantine,
la nature voulait, par un dernier sourire, le plus frais et le plus
gracieux, se faire pardonner sa platitude et sa nudité à
venir, telle une femme, longtemps aimée, qui trouve encore, au
milieu des larmes de l'adieu, un sourire pour rappeler les tendresses
passées et en faire espérer de nouvelles pour plus tard...
-----Les cimes des montagnes, entre lesquelles
serpente la voie, en laissant, tantôt à droite, tantôt
à gauche, ici des coteaux couverts de vignes, là un ruban
de route poussiéreuse où chevauchent, à l'amble
de leurs mulets, des Arabes gravement engoncés dans leurs burnous,
plus loin des olivettes fraîchement greffées et comme poudrées
à frimas en rondes houppettes sous la brise qui fait scintiller
le revers blanchâtre de leurs feuilles, ces cimes donc, semblent
vouloir se resserrer peu à peu en une gorge étroite quand,
pas du tout, elles s'élargissent tout à coup pour embrasser
dans un vaste amphithéâtre le paysage le plus enchanteur,
le plus bizarre, le plus original, le plus coloré et le plus
surprenant à la fois qu'on puisse avoir sous les yeux au milieu
d'un éblouissement de rayons et de blancheur, sous une coupole
d'azur limpide posée comme un dais de lapis magnifique sur les
crêtes dentelées des monts environnant de toutes parts
ce coin d'Éden africain en un majestueux diadème fermé.
Hammam-Meskoutine apparaît. Il apparaît, cet endroit, dont
le charme n'est égalé que par les souveraines propriétés
thérapeutiques de ses eaux, non seulement avec l'exubérance
peu ordinaire de sa végétation, la grâce unie à
la grandeur de son site, mais avec encore l'aspect étincelant
de ses cascades pétrifiées, dont l'une, placée
tout contre la voie, laisse entrevoir ses stratifications de calcaire
blanc, brunies ça et là de longues et larges rayures comme
un burnous étalé historié de filaments en poils
de chameau faufilés dans son tissu rugueux, avec aussi ses ruisseaux
de lait coulant le long de la voie et d'où s'exhale, au milieu
des fumerolles couvrant toute la campagne et attiédissant l'atmosphère,
une âcre odeur de soufre qui a valu à ces sources chaudes
leur nom arabe "d'Hammam-Meskoutine", bains d'enfer ou bains
des damnés.
-
----Plus haut, en contrebas du plateau où
s'élève l'établissement thermal moderne immédiatement
décelé aux yeux, même avant d'y arriver, par la
nappe de la grande cascade, blanche, jaunie, et comme rouillée
par endroits, quand le soleil couchant n'y met pas des tons de grisaille
ou d'autres teintes encore plus bizarrement nuancées, se déroule
une suite de cônes de taille inégale, monotone, singulière
en son alignement et même quelque peu effrayante en ses rigides
attitudes pétrifiées, où l'Arabe a voulu voir,
dans son esprit simpliste, amoureux du merveilleux, qui explique tout
par la légende, un effet de la colère du ciel.
-----Ils sont là, tels que le feu céleste
les a trouvés, à l'exemple des filles de Loth, victimes
de leur curiosité bien féminine, et la sur et le
frère fiancés incestueusement, et le marabout complice
du sacrilège, et les gens de la famille et ceux de la noce qui
ne craignirent point d'accompagner les deux époux et de les encourager
de la sorte à forfaire aux lois divines et humaines.
-----Et, de fait, ces deux grands cônes
de stature surhumaine, à forme plutôt ovale qu'allongée,
surmontés d'une petite éminence en guise de tête,
avec les longs plis qu'a tracés à leur surface l'usure
des siècles, ne dirait-on pas, l'un dominant l'autre de toute
la hauteur de ses larges épaules, les deux époux maudits,
enveloppés dans leurs épais burnous de fête, où
quelque rare, plante sauvage agitée par le vent met des frémissements
de haïk envolé, et allant d'un pas délibéré
consommer l'acte impie ?
-----Près d'eux, devant, derrière,
ces cônes géminés par couples, les uns plus petits,
les autres plus grands, ne dirait-on pas et les enfants précédant
gaiement, dans leur insouciance, les époux sacrilèges,
et les grands parents suivant d'un pas compassé leur progéniture
maudite ?
-----L'imagination arabe, pour si naïve qu'on
la tienne, a su calquer poétiquement, en tout cas, sur l'apparence
réelle, la trame de sa légende, qui en vaut bien tant
d'autres. Le bruit caverneux du sol sous les pas, c'est la musique de
la noce en enfer, dont la mélopée plaintive et triste
nous parvient à travers les entrailles de la terre.
-----Ce n'est pas sans raison qu'on a appelé
ce lieu "Hammam-el-Meskoutine", le bain des maudits ; car
il a été témoin d'un grand crime et d'un terrible
châtiment. Il y avait autrefois sur ce terrain brûlant,
où des habitants de l'enfer pourraient seuls vivres aujourd'hui,
une tribu nombreuse et puissante. Parmi les guerriers d'élite
dont elle avait le droit de se glorifier, on remarquait Sidi-Arzaq,
le meilleur de ses cavaliers, le plus brave de ses combattants et le
plus riche de tous les Arabes de la province. Heureux si à ces
dons, à ces avantages, il avait joint la crainte du seigneur,
les respects de la loi, sans lesquels valeurs, esprit, science et richesse
ne sont rien ! Mais SidiArzaq était soupçonné fortement
de ne pas faire les cinq prières légales quotidiennes.
On assurait même que pendant le jeûne sacré du ramadan,
il n'attendait pas le coucher du soleil pour prendre de la nourriture.
Peut-être ne lui attribue-t-on toutes ces abominations que parce
que plus tard il est devenu un grand criminel ! Dieu sait la vérité
!
-----Quoi qu'il en soit, Sidi-Arzaq avait une
soeurYamenah, dont la beauté était célèbre
dans tout le pays. Les cheikhs les plus puissants l'avaient demandée
pour épouse, offrant de riches dots en bestiaux et argent. Jamais
son frère n'avait consenti à la donner. Chacun s'étonnait
de ce refus continuel, lorsqu'on apprit que Sidi-Arzaq était
éperdument épris de sa sur, et que même il
songeait à l'épouser. Les vrais musulmans refusaient de
croire à une semblable profanation, et lorsqu'ils ne purent plus
en douter, ils s'en affligèrent profondément.
-----On espérait que le crime ne pourrait
se consommer, parce qu'on ne supposait pas qu'il se trouvât un
Qhadi assez ignorant ou assez perverti pour consacrer une aussi monstrueuse
union.
-----Mais, puissance du rang et de la fortune
! Sidi-Arzaq, à force de présents et d'opportunités,
rencontra le juge prévaricateur qu'il lui fallait ; il eut aussi
des témoins, et le mariage se fit à la place où
nous sommes. Les autres habitants de la tribu éloignèrent
aussitôt leurs tentes pour ne pas autoriser le crime de leur présence.
Au bout de quelques jours, comme on ne voyait paraître ni Sidi-Arzaq,
ni Yamenah, ni le qadhi, ni les témoins, des curieux se hasardèrent
à venir dans l'endroit où on les avait laissés.
Quelles furent leur surprise et leur épouvante en apercevant,
au milieu des mariés, du quadhi et des gens de la noce, ces cônes
blancs qui n'existaient pas auparavant ! On ne douta point que les auteurs
de l'inceste et leurs complices eussent été changés
en pierres, ce fait fut confirmé depuis par les oulèmah,
qui reconnurent, malgré leur transformation, tous les acteurs
de la scène coupable. Dieu est grand ! il n'y a de dieu que Dieu,
et Mahomet est son prophète !
-----Les eaux d'Hammam-Meskoutine sont des eaux
pétrifiantes, riches en carbonate de chaux ; elles sourdent à
une température de 89 à 90° centigrade ; elles renferment
à l'état libre une forte proportion d'acide carbonique.
Ces eaux pétrifiantes ont donné naissance à des
roches de formes très variées et très pittoresques
: nappes, murailles, cônes, escaliers en gradins successifs. On
ne peut faire un pas sans fouler les sédiments laissés
par les eaux. Le débit total des sources actuelles n'est pas
inférieur à 200.000 litres par heure (le plus fort débit
d'eau thermale connu, puisque Amélie-les-Bains, qui vient immédiatement
après Hammam-Meskoutine, pour le débit, ne donne que 50.000
litres à l'heure). Les eaux sont d'une nature saline, avec une
odeur sulfureuse, et se rapprochant par leur combinaison chimique des
eaux de Balaruc, de Plombières et de Bagnère de Bigorre
qu'elles peuvent remplacer au besoin. "Les eaux ont été
analysées à diverses reprises ; l'analyse faite, dès
1839, par M. Tripier, pharmacien aide-major, n'a été que
peu modifiée par celles des autres chimistes, les eaux contiennent
des chlorures de sodium, de magnésium, de potassium et de calcium,
des sulfates de chaux, de magnésie, de strontiane ; les substances
dominantes sont : le chlorure de sodium, le sulfate de chaux, le carbonate
de chaux ; il y a même un peu d'arsenic.
-----Sur
la rive droite du Chedakra, à une faible distance seulement de
la grande et magnifique cascade, dont la moire, tantôt blanche,
tantôt brune et ocreuse, scintille au soleil de mille feux, s'élève
le groupe d'habitations spécialement affectées aux touristes,
voyageurs et malades civils en traitement. Il se compose de pavillons
à simple rez-de-chaussée comprenant des salles à
manger, de lecture, de compagnie, plusieurs chambres, ainsi que des
locaux affectés aux différents services de l'établissement.
Ces pavillons, subdivisés en quatre groupes indépendants
les uns des autres, environnent une esplanade plantée d'arbres
d'essences aussi variées qu'originales comme l'eucalyptus, le
térébinthe, le palmier, qui donnent un ombrage très
agréable et au milieu, autour desquels se trouvent un bassin
à jet d'eau et une vaste pelouse ornée de plantes d'agrément
et environnée d'un musée en plein vent où, à
côté des débris de chapiteaux, de piédestaux,
d'entablements, de colonnes, de pierres tumulaires en marbre blanc et
rose de la Mahouna attestant encore l'orgueil et la puissance de l'art
romain, figurent des tronçons de statues aux longs plis majestueux,
aux belles formes sculpturales, que le temps et les hommes ont pu mutiler,
mais non déformer.
-----Au-dessous
de cette partie de l'établissement, en contrebas du plateau sur
lequel elle a été bâtie, à l'abri de magnifiques
oliviers séculaires, de proportions peu ordinaires, au bord même
des canaux creusés sur le flanc du coteau pour l'adduction des
eaux qui semblent rouler un lait fumant dans leur lit blanchi par les
sédiments accumulés aussi sur les rives pour éviter
tout engorgement, se trouvent les cabines, à une, deux ou plusieurs
places, destinées aux baigneurs. Les baignoires sont formées
de bassins en maçonnerie, où des tuyaux amènent
l'eau froide et l'eau chaude nécessaires à la préparation
du bain. Il existe des cabines particulières pour les douches
et les bains de vapeur. On en prépare pour les inhalations préconisées
dans certaines maladies de la gorge.
-----Les arbres fruitiers, plantés dans
les jardins de l'établissement, sont d'une superbe venue et ne
contribuent pas peu à témoigner de l'exceptionnelle fertilité
de ce sol, où, petit à petit, la nature, guidée,
encouragée par la main de l'homme, au ravissant agrément
du site, a su joindre le doux et réconfortant aspect des cultures
utilitaires succédant à une vaine exubérance de
sève et de vie sans emploi.
-----Le sol d'Hammam-Meskoutine, en effet, placé
à une altitude de 312 mètres, est rarement visité,
en hiver comme en été, par les températures extrêmes
de ces deux saisons, protégé qu'il est, au fond de la
vaste dépression géologique où il se trouve, par
le Djebel-Debar, qui dresse au nord, à près de 1100 mètres
de hauteur, son échine pelée, par la Mahouna, au sud-est,
et par le Ras-El-Akba au sud, enfin, au nord-est, par les crêtes
élevées du Djebel-Taya. Ainsi entouré, ce sol se
prête aux cultures les plus variées.
-----La neige n'y fait jamais son apparition et
- chose curieuse - au cur de l'hiver, tandis que les cimes environnantes
ont toutes endossé un blanc manteau d'hermine, la vallée
d'Hammam-Meskoutine, qui n'a seulement de comparable à la neige
que ses cascades, jouit d'une température très douce et
les vapeurs jaillissantes des sources répandent dans l'atmosphère
environnante une bienfaisante tiédeur. Bref, la température,
en hiver, y descend rarement au-dessous de 10°. En été,
par contre, après la saison des bains, c'est-à-dire pendant
les mois les plus chauds de juillet, août et septembre, elle atteint
parfois 35° et i0° ; mais en revanche, les nuits sont relativement
fraîches et le sommeil réparateur y est possible.
-----Un fait naturel, digne de remarque, c'est
la coloration jaune donnée aux feuilles des eucalyptus, qui environnent
les sources, sans doute par les émanations sulfureuses contenues
dans les vapeurs exhalées (les griffons. On sait effectivement
que les vapeurs du soufre et de ses principaux composés ont de
hautes propriétés décolorantes. Le teint général
de ces eucalyptus ne saurait être, il nous semble, attribué
à une autre cause, comme à l'action du soleil par exemple,
car, à quelques centaines de mètres plus loin, à
la station, les eucalyptus ont conservé la coloration ordinaire
de leurs feuilles qui d'un beau vert-bouteille, plutôt sombre
ou glauque que tirant sur le jaune.
-----Aux griffons mêmes, dont on peut facilement
approcher au sommet de la grande cascade, on voit, tout autour des orifices
par lesquels l'eau s'échappe à gros bouillons, des incrustations
de calcaire d'une forme très curieuse qui rappelle à s'y
méprendre les molaires d'une mâchoire humaine. Certains
de ces griffons, avec les bords rapprochés de leurs incrustations
ainsi faites, ressemblent à des bouches monstrueuses, grimaçantes,
lançant à travers leurs mâchoires largement écartées
des vomissements d'eaux bouillantes. Lorsque l'on examine de près
la contexture extérieure de la roche sur laquelle l'eau s'est
épanchée par couches successives en cascades pétrifiées,
arrosée seulement par une mince épaisseur d'eau, on surprend
sur le vif le travail de l'incrustation. Il s'opère par alvéoles,
en tout semblables à celles d'un gâteau de miel et qui
donnent au premier dépôt sous-jacent à l'eau chaude
l'aspect d'un tissu ou plutôt d'un filet à mailles serrées
tantôt en tous petits losanges, tantôt en tous petits carrés.
Les dépôts calcaires se forment donc, comme on le voit,
suivant les lois de la cristallisation géométrique.
-----Quelquefois la pétrification, par
suite de la présence dans l'eau de certaines matières
étrangères insolubles, prend un aspect grenu. Les Arabes,
continuant l'esprit de la légende ales cônes, veulent y
voir les grains de couscous de la noce, rejetés des entrailles
de la terre où tous les apprêts du festin furent engloutis.
-----Hammam Meskoutine, sous la domination romaine,
portait le nom "d'Aquae Tibilitanae" à cause de son
voisinage (8 kilomètres) de l'importante ville de Tibilis, sise
au sud, au-dessous du plateau de RasEl- Akba. Des thermes importants,
dont (le nombreuses traces ont été retrouvées dans
les environs des sources actuelles et anciennes, ale nombreux vertiges
de villas et de travaux de défense témoignent encore (le
la vogue dont jouissaient ces eaux auprès des Romains.
-----Les anciennes piscines, placées non
loin des griffons disparus, indiquent aussi le lent déplacement
dont nous parlions tantôt.
-----A deux kilomètres plus loin, à
une heure de marche tout au plus de l'établissement, on arrive
devant une ouverture, par laquelle on pénètre sur les
bords d'un lac souterrain, formé dans le courant de l'année
1898 par l'épanchement soudain d'une forte masse d'eau dans une
de ces grandes cavernes, comme il en existe tant, trahies par le retentissement
des pas, dans le sous-sol du terrain qui environne les sources d'eaux-chaudes
sur un rayon de plusieurs kilomètres.
-----M. L. Rouyer, dans son intéressant
opuscule sur Hammam-Meskoutine et ses environs, explique ainsi la formation
de ce lac : "A une distance quelconque
se trouvait une nappe d'eau qui, rompant brusquement ses digues, sous
une influence inconnue, s'engagea, par (les conduits plus ou moins tortueux,
plus ou moins étroits, dans la direction (le la grotte et vint
s) engouffrer avec violence. Sous cet assaut, une partie des piliers
naturels soutenant la croûte supérieure de la grotte ne
tarda pas à s'affaisser et à produire l'écroulement
du sol lui-même. La grotte s'emplit peu à peu ; l'écoulement
continua jusqu'à parfait équilibre des deux vases communicants
; le lac souterrain était formé".
-
----Cette formation subite, qui avait été
accompagnée d'une formidable détonation, fut pendant longtemps
l'objet de la terreur des indigènes qui, cependant, finirent
par s'y habituer, à ce point que leurs femmes n'hésitent
plus maintenant à y venir puiser l'eau dont elles ont besoin.
Cette eau potable est propre à tous les usages comme l'eau de
source. Elle a une température normale.
-----La caverne où s'est formé le
lac, se subdivise en deux immenses trous d'une longueur totale de 100
mètres environ. Ils viennent aboutir l'un et l'autre à
l'entrée de la grotte, dont le plafond,bas, orné de stalactites
bizarres prenant aux reflets des feux de Bengale des allures d'énormes
cous de dragons à la gueule entrouverte, ne permet pas aux visiteurs
de se tenir debout sur la barque qui le conduit sur cette eau dormante
dune profondeur moyenne de 20 mètres. Les cris aigus des chauve-souris
rompent, seuls, le charme silencieux qui règne sur ces eaux noires,
stygiennes, dont l'origine est inconnue. et que l'imagination païenne
n'eût pas manqué de prendre pour une des bouches de l'infernal
Achéron.
-
----Pour terminer cet extrait sur Hammam Meskoutine
il faut se souvenir que pour la "Saint Couffin", le lundi
de Pâques, les Guelmois se retrouvaient pour faire cuire les ufs
sur la cascade bouillonnante. mais ceci est une autre histoire.
"Guelma
89"