Ancien Hôtel
de la Subdivision
Cet immeuble est désigné ainsi
sur les anciens actes arabes :
"Maison située sur la petite rue Amour (rue de Chartres)
et sur Djama KhedarPacha (rue Scipion)."
La Mosquée Khedeur-Pacha qui
dénommait cette dernière rue, est aujourd'hui disparue.
Cette demeure appartenait, avant 1830, au Sid Abdallah qui fut Oukil el-Hardj
( Ministre de la Marine.)
d'El-Djezaïr. A l'arrivée des Français, celui-ci s'enfuit
à Smyrne ( Il habita en cette
ville le quartier Djema Allahik.) où il mourut. Ses
biens furent alors séquestrés.
La maison de la rue Scipion ( Elle portait
autrefois le n° 66.) servit en 1836, de logement au maréchal
du camp : le marquis de Brossait. Le général Yusuf l'habita
en 1862 (ce fut alors l'Hôtel de la Division). En 1850, dit un état
du Génie, y était le général de Brigade de
Salles, Commandeur de la Légion d'Honneur.
Le Sid Abdallah possédait aussi une maison qui était voisine
de la Mosquée Khedeur-Pacha. Elle était dénommée
: Dar Abdallah.
Un Turc de Smyrne, Ali Khodja ben Abd-er-Rahmani,
fondé de pouvoir de la dame Khedidja bent Ibrahim, veuve de l'Oukil
el-Hardj, fut chargé par celle-ci de présenter au Gouvernement
français, en son nom et au nom de son fils, Mohammed Effendi, une
réclamation tendant à l'obtention d'une rente annuelle.
Le 5 avril 1837, proposition fut faite aux héritiers, d'une rente
annuelle et perpétuelle de 1.200 francs, qui serait servie à
partir du ler juillet 1837. La somme de 10.500 francs était en
même temps offerte pour le loyer antérieur. Les héritiers
acceptèrent. Il fut stipulé ensuite que la rente compterait
à partir du ler août 1836.
Cependant en 1839, Mme de Vialar, supérieure générale
des Soeurs de Saint-Joseph, réclama la restitution de la maison
d'Abdallah, déclarant que celle-ci lui avait été
vendue par le fondé de pouvoir de l'ancien ministre de la Marine.
Une longue discussion s'engagea à ce sujet. Ce ne fut qu'en 1849
qu'il fut fait droit à cette réclamation. La rente de 1.200
francs fut alors portée au nom de la famille de Vialar.
La maison qui nous intéresse existait déjà en 1663.
Elle appartenait à un certain Hadj Ali
Jenlir "d'Andalousie", droguiste, qui la légua
à ses filles Khédidja et Yemna. Khédidja mourut la
première. Ce furent alors Yemna, la mère de celle-ci, Fathma
bent Yussuf, et le Beït el-Mal ( Administration
des Domaines) qui s'en partagèrent la possession. La
maison fut estimée 12.000 dinars. A la mort de Yemna, on estima
à nouveau l'immeuble. La valeur de celui-ci fut fixée à
16.000 dinars. 15.880 furent reconnus à Yemna. 220 dinars furent
déduits de l'héritage "pour les frais de linceul
et d'obsèques".
Des tisserands en soie, des menuiseries figurent ensuite parmi les propriétaires
de la maison de la rue Amour. L'un d'eux, nommé Hadj Kassem, la
constitua en habous au profit de ses deux fils "le Sid Emhammed
et le digne Ibrahim Raïs", et au profit de leurs descendants
"tant que ceux-ci resteront fidèles à l'Islamisme".
A l'extinction de la lignée, le bien devait revenir aux pauvres
des villes saintes : la Mecque et Médine. L'acte, selon l'usage,
se terminait ainsi : "Si quelqu'un s'avisait de faire subir quelque
changement ou dérogation à ce habous, il trouverait en Dieu
un vengeur qui lui demanderait compte de son action."
La descendance plus tard, s'étant éteinte, l'usufruit du
bien habous échut conformément au testament, aux pauvres
de la Mecque et de Médine.
Au commencement du XIXème siècle, le fils du Sid Mohammed
: le Sid Abdallah, oukil el-hardj au
palais Dar el-Imara el-Alia (2Maison
de l'autorité supérieure. II s'agit du ministre de la Marine
de 1814.), fit transformer la maison et l'améliora puis
il demanda au bach-chaouch (administrateur
des biens habousés au profit des villes saintes), de prendre la
dite maison en "ana", c'est-à-dire moyennant une
rente annuelle et perpétuelle. Celle-ci fut fixée à
100 réaux. Le tribunal "le Midjeles", consulté,
accorda son autorisation (année 1814).
L'acquéreur constitua alors la maison en habous, à son profit
d'abord, puis au profit de son fils Ibrahim ( Enfant
qui mourut quelque temps après.), de sa femme Seida
Khédidja et de la fille de celle-ci : Seida Galtoun - au profit,
enfin, des descendants de ces trois derniers. En cas d'extinction de la
lignée, le bien devait échoir à la ville de la Mecque.
L'occupation de cet immeuble par l'État français rendit
nulles ces dispositions. Cette maison cessa, en 1908, d'appartenir à
l'Autorité Militaire. Elle fut remise à l'Administration
des Domaines qui la vendit à M. Durand, armateur ( Le
fils de l'ancien Oukil-el-Hardj, fit autrefois, avec l'acquiescement du
Gouverneur, procéder à des fouilles en cette maison où
il assurait qu'un trésor avait été enfoui. Les recherches
ne donnèrent aucun résultat.)
NOTA. - En 1876, l'Hôtel de
la Division fut sur la
Place d'isly, dans un bâtiment devenu, en 1880, Hôtel
du XIXème Corps. Ce bâtiment était l'ancien
Collège arabe- français. Les écuries, construites
en arrière, occupèrent un champ qu'un acte arabe désigne
ainsi : "...terrain situé au-dessus d'El-Medarbia, en face
du Jardin d'El-Euldj et connu sous le nom de Zemamra."
Il avait été question antérieurement, d'édifier
cet hôtel sur un terrain situé entre les rues d'Isly et le
boulevard Bugeaud.
La dépense était estimée à 250.000 francs.
La vente de l'Hôtel de la rue Scipion, occupant une superficie de
150 mètres carrés, devait couvrir une partie des frais prévus.
Après le transfert de la Division sur la Place d'Isly, l'ancienne
résidence d'Abdallah devint Hôtel de la Subdivision.
Celui-ci antérieurement se trouvait au n° 2 de la rue Mahon.
En l'Hôtel de la rue Scipion fut logé, en 1860, le frère
de l'Empereur du Maroc, venu - mais trop tard - pour saluer l'Empereur
et l'impératrice. (Le bey de Tunis avait été installé,
rue de la Charte, à la Préfecture). En août 1933,
la maison fut entièrement ravagée par un incendie.
Hôtel du
Général du Génie (Boulevard Amiral-Pierre)
Cet hôtel oû, à l'époque
de la Conquête, habitaient les représentants des États-
Unis, garda quelque temps le nom de Consulat d'Amérique. Les archives
du Consulat, que l'on voulut bien me permettre de consulter, donnent à
son sujet d'intéressants renseignements, révélant
à la fois, maints différends auxquels donna lieu sa possession.
Cette maison fut, au XVIIIème siècle, saisie par le Domaine
algérien sur les deux beaux-frères : "Cadzi Omar
et Cadzi Hamidou" (1 Cadzi,
pour Hadj.), puis vendue en justice et adjugée au Khasnadji
Cara Mustapha, pour 18.000 mahboubs d'or (Acte de la fin du Moulouet 1797).
Elle fut ensuite vendue par le Khasnadji Cara Mustapha, à Mustapha-Pacha,
pour 2.000 mahboub d'or (1798).
Après la Conquête, sa propriété fut confirmée
à la veuve et aux descendants de Mustapha-Pacha par le Cadi maure
(12 juillet 1831).
Les descendants étaient : le prince Ibrahim et ses neveux et nièce,
Mustapha, Mohammed et Fathma, enfants de Sid Ahmed, lequel était
fils de Aïcha bent Abdallah, deuxième femme de Mustapha-Pacha.
Presque aussitôt, l'immeuble fut restitué par ce même
Cadi aux enfants de feu Cadzi Omar (5 août 1831).
Saisie de l'affaire, la Cour de Justice d'Alger rendit, le 14 septembre
1831, un arrêt d'incompétence, mais le 13 décembre
1831, le général Berthezène, envisageant la chose
autrement, cassa l'arrêt du Cadi maure, du mois d'août 1831.
Au cours de la même année cet immeuble fut l'objet d'un autre
litige.
Le prince Ibrahim ben Mustapha-Pacha le loua au mois de juin pour trois
ans au sieur Joly, lequel le loua, à son tour à bail, au
Consul d'Amérique Lée, puis, au successeur de celui-ci,
M. Brown, au prix de 1.355 francs ( En
l'occasion, un souvenir. Lors de la visite que, le 27 juillet 1830, les
Consuls firent à M. de Bourmont, celui d'Amérique, grand
admirateur de Bonaparte, s'abstint.).
Le prince n'accepta pas cette sous-location et exigea le départ
de ce dernier.
Cependant le 27 du dit mois de juin, la Cour de Justice, que présidait
M. Alexandre Deval assisté de MM. Vincent et Colombon, déclara
le Consul Brown dûment locataire. Ibrahim et ses co-héritiers
protestèrent et, le 22 décembre 1831, demandèrent
que la maison fût évacuée pour le 28 du même
mois, faute de quoi 300 francs seraient demandés à titre
de dommages et intérêts pour chaque jour de retard.
Peu après les 300 francs furent réduits â 100, avec
toutefois, menace de "mettre les meubles et effets du Consul sur
le carreau en cas de résistance".
Le 9 janvier 1832, la Cour de Justice, après avoir entendu M. Brown
qui déclarait que sa location avait été reconnue
valable par jugement du 27 juin 1831, débouta Ibrahim Mustapha-Pacha
et sa famille, et reconnut à M. Brown le droit de demeurer encore
pendant deux ans, au "Consulat d'Amérique", en qualité
de substitué au sieur J.-B. Joly, premier locataire.
Le 24 janvier 1832, la Cour après avoir entendu M. Brown, qui fit
connaître qu'un bail antérieur avait déjà été
passé pour un an entre l'ancien consul M. Lée et M. Joly,
et conclu que celui passé entre ce dernier et lui-même ne
pouvait être annulé, après avoir entendu également
Ibrahim ben Mustapha-Pacha qui déclara que M. Lée avait
un caractère officiel de Consul, tandis que M. Brown, simple agent
commercial, n'en était pas revêtu, la Cour annula ses arrêts
précédents, remit les héritiers de Mustapha-Pacha
en possession du "Consulat d'Amérique" et ordonna à
M. Brown de vider les lieux.
A la suite de ce jugement, le 31 janvier 1832, le baron Pichon invita
le Consul à user de la requête civile, mais la cause apparaissait
définitivement gagnée par Mustapha-Pacha qui, en 1832, loua
pour douze années, la maison à M. Joly. Le loyer annuel
fut de 600 boudjous (1.080 francs).
Cependant, la famille mécontente demanda en justice la résiliation
du bail récemment signé, et le 14 juin 1834, le Tribunal
de première instance annula ce bail.
Le prince offrit alors au Gouvernement, le 20 juin de la même année,
la location de la maison au prix annuel de 2.000 francs. L'offre fut acceptée
du Ministre de la Guerre en février 1835.
Entre temps, appel ayant été interjeté par le sieur
Joly, le Tribunal supérieur cassa le jugement de 1834 et maintint
le bail consenti au requérant, lequel toutefois, avait au cours
de l'action, cédé ses droits à un sieur Petit.
Ce fut donc avec ce dernier que l'État eut à traiter.
En juin 1836, le sieur Petit consentit à louer l'immeuble à
l'État moyennant une rente annuelle de 3.000 francs et une indemnité
de 12.875 francs pour l'occupation de la maison, antérieure au
ter juillet 1836.
Cette maison qu'habitèrent les généraux
Dalton, Voirol, Rapatel, est aujourd'hui la résidence
du général divisionnaire du Génie, Lagarde. Le duc
de Nemours y descendit le 10 mai 1841.
Le prince Napoléon et la princesse Clotilde la visitèrent
le 20 juin 1861.
Elle fut pendant 14 ans (après 1848) siège de la Bibliothèque-Musée.
Fontaine de Birkadem
(entre pages 118 et 119)
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Hôtel de
la Direction du Génie (Dar-el-Hamra)
Cet édifice, qui portait autrefois
le n° 14 de la rue Philippe, était connu anciennement sous
le nom de Dar el-Hamra (la Maison Rouge). Il est occupé actuellement
par le colonel-directeur du Génie ( Le
colonel Friscourt qui, après le colonel Hébert, y reçut
le Comité du Vieil Alger (en avril 1937).). Le général
y habitait à l'époque où la présente résidence
du boulevard Amiral-Pierre servait de Bibliothèque-Musée.
Ce fut le dey Hussein qui le fit construire. Le bâtiment faisait
corps avec les maisons du côté opposé de la rue où
se trouvent aujourd'hui les bureaux de la Chefferie du Génie. La
rue Philippe dénommée, sous les Turcs, Sidi-Ali-Fassi et
Aïn-el-Hamra, passait en ce lieu, sous une voûte qui fut détruite
en 1863. Tout près, se trouvait la Mosquée
Mesdjed-Aïn-el-Hamra qui fut affectée au casernement
de 1830 à 1837 et disparut ensuite avec la voûte.
Un document nous apprend que le Consul d'Angleterre, Robert Saint-John,
qui était mandataire d'Hussein, paya à celui-ci, jusqu'en
septembre 1830, la rente de cet immeuble.
La Maison Rouge fut vendue à l'ana, à la Grande Mosquée,
pour "300 réales boudjous".
L'Autorité Militaire ayant fait occuper la maison, la Grande Mosquée
réclama à l'État, le 24 février 1835, la rente
de quatre années et demie, calculée à raison de 100
réaux par an, soit au total 450 réaux.
Cette rente fut intégralement payée.
La façade de l'édifice est moderne. Elle fut établie
après l'élargissement de la rue Philippe. Une inscription
y rappelle que, le 8 juillet 1830, le général de Bourmont
rendit au Dey, la visite qu'il en avait reçu la veille à
la Casbah. C'est un palais d'un particulier attrait, avec sa cour à
arceaux, sa galerie du premier étage parée de colonnettes
torses et d'ogives coquettes, avec ses pièces enrichies de boiseries
fouillées et rehaussées de polychromie, avec son grand salon
si séduisant dans l'harmonie de ses murs incrustés de dentelles,
de ses inscriptions, de ses bandeaux en émail de Delft, de ses
plafonds à voussures et à caissons sculptés, enluminés,
étincelants d'or.
Dans les sous-sols se retrouvent un ancien corps de garde et une entrée
qui s'ouvrait sur la chaussée d'autrefois (en contre-bas alors),
et destinée aux janissaires ainsi qu'aux esclaves.
Le Comité du Vieil Alger a
demandé la conservation du document d'art et d'Histoire qu'est
Dar-el-Hamra.
Malheureusement, une ordonnance nouvelle prévue pour le quartier,
va tout d'abord nécessiter l'abolition de l'une de ses parties.
Dar Mustapha-Pacha
(Bibliothèque Nationale)
C'est dans cette maison, jadis au Dey Mustapha-Pacha,
( Contrairement au sentiment musulman,
ce dey favorisa les Juifs, ce qui causa un mouvement populaire. Il périt
en 1805, assassiné à la porte d'une mosquée. Son
corps fut jeté hors de la porte d'Azoun. Sa famille le fit inhumer
à Bab-el-Oued. Ses restes se trouvent actuellement à la
mosquée Sidi-Abd-er-Rahman.) qu'a été
installée la Bibliothèque Nationale.
La
bibliothèque d'Alger, créée en 1835 sur
l'initiative du maréchal Clauzel, occupa d'abord un immeuble de
l'impasse du Soleil. Son conservateur fut Berbrugger. Elle fut en 1838
transférée
rue Bab-Azoun, dans l'ancienne caserne turque devenue Collège.
On lui consacra en ce bâtiment, une belle salle à double
colonnade de marbre, décorée en 1828 par Ibrahim-Agha, gendre
d'Hussein, qui l'avait occupée en qualité de janissaire.
Une salle voisine, ornée par les soins de Yaya-Agha, prédécesseur
d'Ibrahim, fut affectée au Musée.
En 1848, comme il vient d'être dit, la Bibliothèque fut installée
dans la rue des Lotophages, en l'ancien Consulat d'Amérique, actuellement
Hôtel du Général du Génie.
En 1862, elle fut transférée dans le Palais de la rue de
l'État-Major, où elle se trouve encore aujourd'hui.
Ce palais fut construit en 1798, sur l'emplacement d'un groupe de maisons
qui appartenaient à la corporation religieuse du Seboul Kherrat.
Le Dey Mustapha-Pacha, qui habitait d'ordinaire la Jenina, ne s'y rendait
que le jeudi, après la prière de Dohor. Ses gardes qui l'escortaient
à l'allée, venaient le reprendre le lendemain à midi.
Cet immeuble que confisqua le Dey Ahmed en succédant à Mustapha-Pacha,
fut, après la Conquête, occupé par le général
de Trobriant, ancien aide de camp de Davout.
Dans les doueras dépendant de cette maison, habitèrent,
en 1835, le Pharmacien en chef de l'armée et, en 1846, le Secrétaire
général du Gouvernement.
Le 17 décembre 1834, Dar-Mustapha-Pacha fut remise entre les mains
du fils aîné du feu Dey, le prince Ibrahim qui, à
sa mort, la légua à son fils Mustapha, personnage des plus
populaires de l'ancien Alger.
En 1846, les héritiers du prince Mustapha contractèrent
à des conditions onéreuses (à 15%), un emprunt de
170.000 francs, moyennant une garantie hypothécaire donnée
sur les immeubles de leur successions.
Par suite de non paiement des intérêts, ces immeubles furent
l'objet d'une saisie; après un procès qui dura huit années,
la maison de la rue de l'Etat-Major fut vendue pour la somme de 100.000
francs.
En 1863, le Département acquit cette maison dont il fit la Bibliothèque
Nationale ( Cette bibliothèque
comprend plus de trente mille volumes; elle possède, en outre,
deux mille manuscrits. Son premier fonds fut constitué avec deux
cents manuscrits rapportés, en 1837, de Constantine, par Berbrugger.),
et la villa de Mustapha-Supérieur qui provenait également
de l'héritage de l'ancien dey, et dans laquelle fut installé
l'Orphelinat Saint-Vincent-de-Paul.
Dar-Mustapha-Pacha qui est classée au nombre des monuments historiques,
occupe une surface de 709 métres carrés..Plus de 500.000
carreaux de faïence, anciens, en décorent l'intérieur
(P. Gavault).
Cette maison, dont l'entrée a été pour raison de
défense, placée dans un redan de la rue, présente
à l'extérieur un magnifique auvent de cèdre sculpté
reposant sur dix- huit chevrons. Sa porte à clous de bronze est
ornée d'une plaque de serrure découpée d'arabesques
et d'un heurtoir ciselé à l'usage des cavaliers.
Dans le vestibule qui comprend deux banquettes d'émail destinées,
l'une au mameluck chargé de la garde de la maison, l'autre à
l'eunuque noir faisant office de portier, se voit une inscription arabe
dont voici la traduction:
"Quel agréable et délicieux palais élevé
par le pacha d'Alger, Mustapha. C'est l'asile de la félicité,
de la gloire, de la puissance, de l'intelligence, de la splendeur, réunies
au calme et à la placidité. L'esprit émerveillé
s'écrie en le voyant : "Il a été achevé
au moment du plus favorable augure, de l'indice le plus assuré
de prospérité et d'abondance."
"L'an 14, après 200 et 1.000 de l'hégire du Prophète"
,1214- (1799). (Colin).
Au-delà, c'est la Squifa, longue salle qui servait de salon. Au
fond, se tenait le maitre et les hôtes de distinction ( En
cet endroit fut placé un buste du Maréchal Clauzel, oeuvre
du sculpteur Fulconis. Ce buste, bien que de plâtre bronzé,
figura là longtemps, agréablement évocateur.Relégué
en une salle basse, il y attend, la restauration légère
qui lui permettrait de réapparaître dignement aux yeux des
arrivants.). Les visiteurs de moindre importance prenaient
place sur les côtés où sont installées en des
niches à colonnettes et à parure d'émail des banquettes
de marbre.
Les faïences plaquées à l'intérieur de ces niches
et présentant d'harmonieux bbuquets, proviennent de Delft, elles
sont signées : Van Maak. Celles décorant l'extérieur
sont de fabrication italienne.
Dans la cour de la maison, toute de marbre, qu'agrémente un jet
d'eau, s'ouvrent des pièces, pourvues de hautes portes à
compartiments, oeuvre du maître Lablabtchi. C'était en l'une
de ces pièces que la femme du Dey recevait ses amies.
A gauche se trouve un corridor dont l'entrée était interdite
aux femmes de la maison et qui mène à la douéra où
le souverain s'occupait de ses affaires... et de ses plaisirs.
Dans l'escalier, des retraites se voient, où le Dey se reposait
et prenait des rafraîchissements.
Au premier étage au-dessus de la cour, se développe une
magnifique galerie qu'orne une balustrade de bois d'un fort beau travail.
Sur la gauche, un passage mène à la chambre fraîche
où le maître faisait la sieste en été. Là
se trouve en un cadre, une lettre autographe du Premier Consul adressée
à Mustapha-Pacha ( Il serait
à souhaiter que ce document fût, pour sa conservation, placé
en un autre lieu.).
A cet étage, ainsi qu'à l'étage supérieur,
les salles sont toutes enrichies de faïences anciennes où
s'épanouissent les traditionnels bouquets d'oeillets et de tulipes.
Sur la terrasse se dresse un kiosque où se réunissait la
famille du Dey.
Ibrahim ben Mustapha-Pacha reçut en cette maison le duc d'Orléans
qui y habita quelque temps ( Les chapiteaux
des colonnes s'offraient curieusement alors, rouges et or.);
Bolle, en 1839, écrivit une intéressante description de
ce palais qu'enrichissaient alors les trésors artistiques possédés
par ce prince. Ses regards, dit-il, furent tout d'abord attirés
dans le vestibule, par une splendide selle de velours cramoisi appartenant
au prince Mohammed, fils d'lbrahim. Le troussequin, le pommeau étincelaient
de dorures. Les étriers étaient recouverts de plaques d'argent
damasquinées en or.
Le jet d'eau qu'il vit dans la cour était surmonté d'un
croissant de marbre et présentait un triple jaillissement.
Le pourtour s'ornait de vases de marbre garnis de fleurs et d'arbustes.
La balustrade de la galerie était uniformément peinte en
vert. Sur la terrasse se trouvaient encore des vases de marbre.
La pièce du rez-de-chaussée où fut reçu le
visiteur était décorée à l'entrée,
d'un tapis de soie. A terre, de moelleux tapis de Turquie et de Mascara.
Les divans étaient recouverts de brocarts d'or. Aux murs apparaissaient
des étagères ogivales, garnies de vases, de flacons, d'amulettes,
d'aspect très original. L'ameublement comprenait en outre, des
coffrets de nacre, une pendule française (déjà!)
et des coffres recouverts de dorures, qu'on voyait à chaque extrémité
de la pièce, enfin des tissus précieux étendus de
tous côtés.
Au fond un rideau de mousseline fermant l'entrée d'un appartement
secret. C'était là le sanctuaire de la sultane favorite.
Au premier étage se tenaient, en un salon, les femmes, toutes étincelantes
de pierreries. Seules, les dames qui accompagnaient Bolle, purent leur
être présentées. L'auteur rapporte qu'il vit sur la
terrasse le vieux Ibrahim "toujours maussade, depuis la confiscation
de ses propriétés par l'État français."
Dar Mustapha-Pacha qui eut comme hôte un prince royal français,
eut aussi la visite de maints hauts personnages :
Le 9 mai 1865, l'Empereur Napoléon III y vint. A citer de même
le Président Loubet, et la Reine Amélie (1903), Edouard
VII (1905), le duc d'Aoste (1932).
La maison, en 1850, fut occupée par les Dames du Sacré-Coeur.
Le pensionnat Bizet y fut installé ensuite.
Une plaquette de marbre s'y trouve, avec l'effigie du savant conservateur,
E. Maupas, célèbre par ses travaux biologiques.
La maison est classée depuis 1887.
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