Alger, Algérie : documents algériens

Bilan de l'activité algérienne durant ces deux dernières années

mise sur site le 2-8-2011

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Nota : pas de correction. Il faut bien que ceux qui pompent ces textes ne se contentent pas d'un simple copier-coller . Qu'ils ttravaillent un peu!!!

Bilan de l'activité algérienne durant ces deux dernières années

Depuis deux ans, l'Algérie clé de voute de la communauté française participe à un de ces mouvements accélérés d'évolution qui fixent en un moment les dispositions et le soufle d'un pays pour y fonder la durée de son histoire.

En septembre 1944, elle remettait à la Métropole à la fois le siège du Gouvernement de la République et le flambeau de la souveraineté nationale que lui avaient confiés les Français combattants demeurés libres et ceux qui résistaient à l'envahisseur.

Tout en demeurant place des Armes et des Solaats de la Libération du territoire, elle se retrouvait dans ses cadres originaux à reconstruire avec les exigences locales à satisfaire selon ses expressions propres à affirmer.

Si elle n'échappe point actuellement au rythme lent auquel se réalisent les mesures envisagées dans le monde pour établir des -.apports d'équilibre entre la production, les échanges et la consommation, elle n'en a pas moins forgé et construit les ouvrages de l'avenir dégageant les ruines de la guerre et franchissant ainsi une étape &oisive de son histoire.

LE PLAN D'ACTION COMMUNAL.

Le comité Francais de la Libération Nationale dès le 11 décembre 1943 soulignait la nécessité de dresser en Algérie un programme complet, dans la vue d'assurer le progrès économique et social des habitants des trois départements nord-africains.

La Commission des Réformes de 1944 préparait à son tour une série de mesures susceptibles de contribuer à la mise en oeuvre de cet important programme.

C'est dans cet esprit que fut adressée, en avril 1946, une circulaire invitant tous les cnefs de commune à établir le plan d'action de leur unité administrative, avec la préoccupation d'éviter les constructions abstraites (Voir " Documents Algériens ", série économique, N° 13.). En choisissant la commune comme unité d'action, M. le Gouverneur Général Yves Chataigneau a tenu à faire appel aux maires, aux administrateurs, aux présidents des centres municipaux ainsi qu'aux assemblées locales qui connaissent les besoins de leurs administrés. Les chefs de communes ont eu à procéder à l'inventaire général de ces besoins et à fournir, après étude concrète, un plan complet, homogène, coordonné pour réaliser en cinq ans avec méthode et continuité, et dans tous les domaines, les créations et améliorations opportunes. Ils ont été priés de prévoir, dès maintenant, les desiderata qu'il y aurait à satisfaire à l'expiration de cette période quinquennale, ainsi que les solutions à donner aux problèmes qui se feraient jour à cette époque.

L'établissement du plan d'action est donc aujourd'hui en plein travail et de nombreux dossiers sont à l'étude aux services compétents. Aussi peut-on avoir un aperçu d'ensemble des programmes envisagés et des difficultés qu'il faudra surmonter, ainsi que des dépenses qui devront résulter de l'exécution du plan de cinq ans.

      Modifications du régime municipal.
Sur le plan politique l'évolution économique et sociale des populations algériennes se traduira par une modification du régime municipal, qui les régit actuellement. Progressivement, centres de colonisation, douars, fractions de douars ou villages, obtiendront leur autonomie municipale. De nouvelles com
munes de plein exercice et de nouveaux centres municipaux seront institués, cependant que des centres de colonisation ou des douars seront rattachés à des communes de plein exercice ou à des centres municipaux.

Ces transformations modifieront la structure actuelle des communes mixtes et si les pi cpositions qui ont été formulées sont reîenues. 55 d entre elles subiront des amputations de territoires et 7 autres disparaîtront

Les premières réalisations, notamment les créations des centres municipaux de Kabylie montrent les difficultés financières assez sérieuses auxquelles se heurte cette organisation. Ainsi, convient-il sans doute d'envisager - afin d'augmenter les recettes des unités administratives les plus déshérités - un remaniement de la réglementation sur l'attribution des produits des droits de marchés assurant une répartition plus équitable des revenus provenant decette taxe, très souvent payée par des populations étrangères à la commune qui les encaisse.

Un projet de loi sur les syndicats, en préparation au Ministère de l'Intérieur, offrira aux municipalités lorsqu'il aura été promulgué, le moyen de se grouper pour une gestion commune de tout ou partie de leurs services municipaux. Les économies qui en résulteront pour elles, leur procureront les disponi Mités et les aisances convenables port assurer la mise en oeuvre de leur plan d'action. I] est permis d'espérer que la réalisation de ces programmes quinquennaux accroîtra la production algerirnne et améliorera la situation financière des entités communales, en augmentant les facultés contributives de leurs administrés.

      Equipement rural.
L'amélioration des conditions de vie des populations rurales ne sera obtenue que par l'application des programmes sur l'habitat, la mise en valeur du sol et le développement des voies de communication. Aussi, la plupart des chefs de communes ont-ils proposé, non seulement la remise en état et l'ouverture des chemins vicinaux, mais encore des modifications et réfections à apporter au réseau des routes nationales et départementales altérées du fait de la guerre et dont la remise en état réclamera l'exécution de travaux importants que les communes ne peuvent prendre à leur charge. Les créations de voies nouvelles se heurtent aux mêmes difficultés financières. Aussi, pour réaliser cette partie du plan sera-t-il indispensable de venir en aide aux budgets locaux d'une manière substentielle.

Les projets établis prévoient des travaux de captage et d'adduction d'eau dans les agglomérations et villages, réclamés notamment par les présidents des centres municipaux kabyles : travaux de création de points d'eau, pour l'alimentation humaine et celle du cheptel, dans les zones de nomadisme et dans les régions habitées par des populations très disséminées ; aménagement des cours d'eau de façon à intensifier la mise en valeur des terres.

En ce domaine aussi, les participations des municipalités seront souvent limitées au quart de la dépense prévue et il faudra demander à l'Algérie de financer la plupart des travaux de cet ordre, afin d'améliorer en définitive la production agricole algérienne et d'assurer la réussite du plan quinquennal.
Il convient également d'étudier pour les programmes d'électrification intéressant la p-,tralation musulmane, des modalités spéciales de financement.

      Développement de l'enseignement.
L'organisation municipale des douars impose des efforts pour développer l'enseignement primaire dans les campagnes. L'étaolissement dés programmes quinquennaux offre l'occasion de compléter et de préciser les projets antérieurs, d'accélérer leur rythme, en tenant compte du nomadisme dans les communes de la zone pré-saharienne ainsi que de la dissémination des populations des hauts plateaux.
Mais si l'enseignement primaire présente un intérêt considérable pour l'évolution intellectuelle et morale des populations, l'enseignement professionnel est essentiel au progrès économique de l'Algérie, car il fournira des agriculteurs et des ouvriers d'élite à l'organisation du paysanat et une main-d'oeuvre qualifiée aux usines nouvelles.

      L'artisanat.
Un artisanat réorganisé et renouvelé préparera le reclassement d'un nombre appréciable de jeunes musulmans tout en augmentant le revenu national.

En effet au cours des dernières années, l'artisanat traditionnel a été désorganisé tandis que certains corps de métiers prenaient un essor nouveau. Cet essor apparaîtra vite précaire et factice. Les importations de produits manufacturés risquent de condamner, tôt ou tard, des métiers artisanaux favorisés par l'indigence et par les besoins du moment.

La perspective d'une crise probable des métiers artisanaux et des arts algériens a donc poussé à intervenir au plus tôt et à envisager, dès maintenant, les solutions à donner à ces graves questions.

Les nécessités d'une saine industrialisation ne sont pas en discordance avec le souci de sauvegarder la physionomie propre du pays par le maintien et la protection de l'artisanat professionnel.

L'industrialisation sera tentée partout où elle paraîtra favorable à l'avenir économique du pays, mais elle ne doit pas, pour cela, condamner des métiers familiaux qu'il importe d'aider et d'encourager. L'artisanat traditionnel algérien se sauvera par la qualité de la production, et par la valeur artistique. A cet effet sont envisagés :
- la rénovation des arts algériens ;
- la mise en valeur et protection suivie de l'artisanat ;
- l'orientation des artisans ;
- l'ouverture des débouchés assurés pour les produits locaux ;
- l'institution d'estampilles officielles pour la garantie des productions traditionnelles.

Les résultats obtenus seront satisfaisants si la mise en oeuvre de ce programme donne aux artisans l'élan et la sauvegarde que les conditions d'une économie saine et bien entendue imposent.

      Education agricole des fellahs.
L'institution d'organismes susceptibles d'aider, de guider et d'éduquer nos fellahs dont l'insuffisance et 1 inexpérience professionnelles sont notoires est à l'étude. Sans doute les se sont-elles appliquées à rénover les méthodes des cultivateurs. Mais leur action doit s'intensifier encore. Une circulaire récente ordonne de créer au sein de ces sociétés des secteurs d'amélioration rurale, cadres économiques et sociaux dans lesquels se fera l'instruction technique et psychologique de l'agriculteur musulman. Certains des projets qui ont été, en l'espèce, présentés sont remarquablement établis et ils contiennent une étude approfondie des possibilités culturales des régions considérées et du mode de préparation ou d'exploitation des terres, ainsi que des caractères essentiels du milieu humain. Une action méthodique conviendra à cet égard, basée sur des renseignements précis, obtenus après enquête soigneusement conduite mais, malheureusement, le recrutement des techniciens s'avère des plus malaisés ; nombre de S.I.P. sont dépourvues d'agents techniques ; les chefs de culture qualifiés, les bons conducteurs de tracteurs sont rares ; le cheptel éprouvé par les dernières années de sécheresse se reconstitue lentement et on ne peut disposer de tous les animaux de trait, dont le besoin se fait sentir intensément. La même remarque doit être faite pour les tracteurs, en raison de la faiblesse des contingents qui sont accordés à l'Algérie.

      Les secteurs d'améliorations rurales.
En tout état de cause, l'amélioration des conditions des agriculteurs musulmans, recasés sur les terres domaniales ou les communaux mis à la disposition des S.I.P. sera la meilleure propagande en faveur de la formule nouvelle.

Les S.A.R., véritables foyers d'évolution économique, se développeront, peu à peu, et engloberont progressivement toute l'agriculture algérienne. Leur extension aura ses répercussions sur le plan social. Au sein de ces nouveaux groupements, les fellahs, en exerçant une activité commune et en prenant conscience de leur solidarité d'intérêts, se prépareront à recevoir leur autonomie municipale, à administrer le territoire auquel, grâce à leur travail, ils auront donné une véritable individualité et une prospérité naguère inconnue.


L'année présente ne se solde d'ailleurs pas uniquement par des simples espérances. Six secteurs d'amélioration rurale sont en plein fonctionnement. A titre d'exemple : celui de la commune mixte de M'Sila où pour le seul douar M'Rabtin Djorf, les plantations d'oliviers qui affectaient 100 ha (soit 1.6D0 arbres) en 1945, ont été portées, en 1946, à 1.500 ha (soit 24.000 arbres) et dont l'extension, si les conditions le permettent, portera, en 1947, sur un total de 10.00 ha, soit sur une plantation globale de 160.003 oliviers,

      Equipement social.
Sept autres S.A.R. ont reçu une fraction d'équipement et sont en voie de démarrage. Grâce à l'application prochaine du plan quinquennal, de nouvelles unités administratives seront en outre, dans un temps réduit, fondées et dotées d'un équipement social suffisant, et en tout premier lieu, d'une installation sanitaire, répondant ainsi au voeu constant des populations qui, en Kabylie notamment, demandent la multiplication des disp-nsaires et salles de consultation et des hôpitaux.

Dans tous les cas, dans chaque agglomération, si petite soit-elle, sera organisée une salle de consultations convenablement aménagées, où les médecins de la Santé pourront travailler dans des conditions normales.

Ainsi l'avenir se dessine : arrêter les plans, établir ou faire établir les projets définitifs, les vérifier, les doter, passer à la réalisation et contrôler l'exécution.

LE CULTE MUSULMAN.

Dans un souci de solidarité humaine et avec le soin d'apporter à tous ceux à qui le régime des temps ote la possibilité d'accomplir les actes les plus respectueux de la foi et de la conscience, l'Administration algérienne a estimé de son devoir d'intervenir pour faciliter aux citoyens musulmans l'accomplissement des devoirs religieux auxquels ils sont attachés.

Elle a pris l'initiative de demander au Pouvoir central, et elle a obtenu l'affectation d'un bateau spécial pour le transport des pèlerins aux lieux sains de l'Islam. En dépit des difficultés de l'heure, ceux-ci ont pu prendre place sur l' " Athos-II ", une des plus belles unités de la marine marchande française.

Aussi ont-ils pu se rendre au Hedjaz dans les meilleures conditions de confort.

LA JUSTICE MUSULMANE.

L'année 1946 a été aussi marquée, pour la justice musulmane, par l'adoption de mesures et l'étude de projets tendant à revaloriser la situation des membres des mahakmas, tant sur le plan matériel que sur le plan moral. Les tarifs appliqués par les magistrats musulmans, lesquels ne correspondaient plus aux prix actuels, ont été rajustés. Les conditions de vie des membres de la justice musulmane se sont donc trouvées relevées, sans pour cela qu'aient été perdus de vue les intérêts des justiciables.

Différents projets tendant à accroître le prestige et l'autorité du magistrat musulman ont été, par ailleurs, adoptés. Enfin, en même temps que la création d'une caisse autonome de retraite des mahakmas était envisagée, d'autres projets ont été mis à l'étude, au premier rang desquels figure la séparation des fonctions juridictionnelle et notariale du cadi, qui, promouvant ce magistrat à la qualité de véritable fonctionnaire, le fera se consacrer exclusivement à son rôle éminent de juge.

Il y a tout lieu d'escompter que cette réforme pourra être amorcée dès le début de 1947. Des crédits sont d'ailleurs demandés, à cet effet, au titre du prochain budget.

A signaler également qu'un projet de décret tendant à accorder aux magistrats musulmans des pouvoirs de police analogues à ceux dont disposent leurs collègues des autres juridictions publiques, a été soumis à l'agrément du Pouvoir central.

L'ENSEIGNEMENT PRIVE.


Par ailleurs, les efforts de l'Administration ont tendu à donner aux écoles privées musulmanes le maximum de liberté compatible avec les exigences de l'ordre public et de la réglementation en vigueur. Le décret du 27 novembre 1944 a fait rentrer, dans le droit commun de l'enseignement Drivé, toutes les
écoles libres qui comprennent dans leur programme des matières d'instruction primaire ; seuls demeurent assujettis au décret de 1892 les établissements qui ne dispensent qu'un enseignement religieux de lecture et d'écriture. L'annonce de la mise en vigueur de cette réglementation avait soulevé quelque émotion dans les milieux de l'enseignement privé musulman ; certains professeurs d'écoles libres musulmans avaient cru, de bonne foi, qu'ils ne pourraient plus exercer, faute de connaissance de la langue française.

L'Administration a donné toutes assurances aux intéressés, en les avisant que l'obligation de connaître le Français ne s'appliquait qu'aux maîtres chargés d'enseigner la langue française, le calcul, l'histoire et la géographie et qu'aucun titre particulier n'était requis des maîtres chargés de diffuser en arabe l'enseignement religieux.

Il importe de noter que, sur tous ces points, le contact est établi entre l'Administration et les représentants des différents milieux musulmans. C'est dans une atmosphère de confiance réciproque que les problèmes soulevés par l'organisation rationnelle de l'enseignement proprement musulman doivent être examinés et résolus. Toutes les suggestions des intéressés seront examinées et acceptées, chaque fois qu'elles pourront, sans inconvénient majeur, être intégrés dans la réglementation générale.

L'ENSEIGNEMENT PUBLIC.

Les problèmes que pose l'existence, en Algérie, de l'enseignement privé, ne sont point obstacle à l'aménagement et au développement de l'enseignement public.

La direction générale de l'Education nationale, prévue par le décret du 27 novembre 1944 et créée en 1945, a désormais franchi le stade de l'organisation intérieure.

Ses services sont en place, spécialement les services de l'enseignement technique, des mouvements de jeunesse, de l'éducation populaire, de l'hygiène scolaire, de l'éducation physique et des sports. Sauf en ce qui concerne l'éducation physique, des inspecteurs régionaux ont été désignés par le Ministre de l'Education nationale et consacrés comme chefs de service.

L'activité de ces organismes est définie et orientée et une collaboration étroite commence à s'établir entre eux.

Le service de l'hygiène scolaire est orienté à son tour depuis le premier trimestre de la présente année scolaire. Dans l'enseignement du second degré et technique, des médecins, chargés du contrôle médical des élèves, ont été désignés ; les assistantes médico-sociales seront affectées incessamment. Dès maintenant, le service médical fonctionne dans tous les lycées, collèges et autres établissements du même degré.

En ce qui concerne l'enseignement du premier degré, l'insuffisance des disponibilités budgétaires n'a pas permis des mesures aussi larges. Néanmoins, le Service de l'Inspection médicale des écoles primaires, préalablement institué dans certaines villes, continue d'assurer effectivement le contrôle de l'état médical des enfants. D'autre part, trois communes mixtes dans le département d'Alger, vingt dans le département de Constantine ont réservé sur leur budget un crédit de 15.000 frs au service de l'hygiène scolaire. On peut croire qu'il sera possible, dès le 1" trimestre de cette année, de faire bénéficier tous les élèves de ces communes des mêmes mesures qui jouent dans les villes les plus favorisées.

Le service des Mouvements de Jeunesse et de l'Education Populaire a arrêté un vaste programme d'action sociale et culturelle à l'effet de coordonner l'activité des oeuvres qui s'intéressent aux jeunes. Aussi donne-t-il tout son appui, en particulier au scoutisme français, notamment au scoutisme musulman, masculin et féminin. Il suit avec attention le développement des colonies de vacances où se trouvent réunis les enfants européens et musulmans. Son activité est marquée par l'organisation de stages nombreux, la création de maisons de culture et l'installation d'une école de montagne et de skis à Tikdja.

Il opère un recensement des oeuvres qui cherchent à venir en aide à l'enfance malheureuse et une commission des oeuvres sera bientôt constituée pour coordonner les efforts, étudier les méthodes répartir plus justement les crédits.

Une transformation complète du personnel de l'Inspection régionale et départementale est en cours. Les associations sportives scolaires sont en plein développement et leur activité est dirigée en vue d'un équipements sportif suffisant, de l'organisation de stades et terrains de sports.

      Enseignement supérieur et scondaire.
Le nombre des étudiants des quatre Facultés de l'Université d'Alger a dépassé, l'année dernière, le chiffre de 4.000. Un important programme d'extension a donc été prévu pour permettre à notre Université nord-africaine de jouer le rôle considérable qui lui est réservé dans la Méditerranée et dans l'Union Française. Ce plan s'étend sur cinq ans. Une première tranche sera réalisée dès 1946-1947. Quant à l'enseignement secondaire classique et moderne sa vitalité se manifeste par l'existence de 17 établissements classiques, 25 établissements modernes, au total 42 lycées et collèges recevant plus de 25.000 élèves. Un collège moderne de filles a été créé à Oran ; un collège moderne de garçons sera créé à Tiaret en 1947.

      Les médersas.
La réorganisation des médersas a été poursuivie. La seconde année du nouveau régime a été créée, et, au mois d'octobre 1948, les médersas entièrement transformées et rénovées, dispenseront aux jeunes Musulmans, après le certificat d'études, le même enseignement que les collèges modernes, en même temps qu'un enseignement purement arabe.

Pour doter les anciens élèves des médersas d'un véritable enseignement supérieur, un Institut d'Etudes Supérieures Islamiques a été créé, par décret du 5 juillet 1946 à l'Université d'Alger. Les cours y sont donnés par des professeurs des Facultés des Lettres et du Droit, et, pour les matières spécifiquement arabes, par des professeurs de Médersa ; afin de compléter ces cours, il est fait appel à ces conférenciers choisis parmi les personnalités éminentes du monde islamique. Si Mahmoud Azmi Bey, ancien Ministre du Royaume d'Egypte, vient d'inaugurer brillamment le cycle de ces conférences. Pour le premier concours d'entrée 31 candidats se sont présentés, dont 15 ont été admis dans les sections traditionnelle et pédagogique ; ce début permet d'augurer favorablement du recrutement futur de l'Institut et du succès de l'innovation tentée pour donner un couronnement à l'édifice de l'éducation musulmane.

Mais les établissements d'enseignement devenant insuffisants pour recevoir toute la population scolaire et estudiantine qui s'accroît, il faudra encore prévoir, pour les années à venir, de nombreuses créations de chaires et d'emplois de professeurs et aussi des agrandissements matériels ainsi que des constructions nouvelles.

      Plan de scolarisation.
L'exécution du plan de scolarisation pour l'enseignement primaire, dont quelques aspects ont été évoqués au sujet du plan d'action communal, ne s'est pas non plus ralentie en 1946. Au mois d'octobre dernier, en effet, 482 classes ont été ouvertes dans l'ensemble des 3 départements. peut-on constater avec satisfaction qu'au cours des deux premières années d'application du décret du 27 novembre 1944 - alors que ce décret n'avait prévu que la la création de 800 classes - 931 ont été effectivement instituées, et ce rythme aurait été certes plus rapide encore s'il avait été possible de disposer de constructions nouvelles.

C'est désormais de la célérité avec laquelle sont effectués les travaux neufs indispensables que dépendront les progrès de la scolarisation. Il n'en reste pas moins qu'après deux ans d'institution du nouveau régime, 50.000 enfants musulmans de plus ont pu être admis dans les écoles ::Timaires, ce qui représente une augmentation de 40 % de l'effectif global antérieur.

Pour instruire ces nouveaux élèves, le recrutement d'instituteurs a pu être assuré dans des conditions satisfaisantes. La Direction Générale de l'Education Nationale a été, en effet, saisie de près de 6.000 candidatures dont 1.500 émanant de brevetés supérieurs et de bacheliers, et elle a pu choisir sans difficulté des maîtres excellents pourvus des titres de capacité normaux et des garanties adéquates.

SITUATION FINANCIERE.


La situation financière de l'Algérie aussi claire et exemplaire qu'elle soit, n'en dépend pas moins d'une situation économique dont les éléments dépassent son cadre.

La circulation fiduciaire, demeurée constante à 25 milliards jusqu'en juillet 1946, atteint maintenant 28 milliards et s'accompagne d'un accroissement des dépôts dans les établissements bancaires qui s'élèvent à 29 milliards. Elle résulte de la hausse des prix, de l'arrêt, après les mesures monétaires de juin 1945, du rapatriement des capitaux métropolitains ainsi que de la réduction des achats à l'étranger.

Son accroissement comporte, certes, des dangers et risquerait, s'il s'accentuait sans mesure, d'influer fâcheusement sur le pouvoir d'achat des classes laborieuses. Il ne doit pas voiler cependant les éléments favorables de la situation financière.

Le public maintient toujours, en effet, sa confiance à l'épargne traditionnelle et l'emprunt 1946, placé au pair et au taux de 3 1/2 en Algérie exclusivement, a connu un vif succès. Les disponibilités du Trésor Algérien n'ont cessé de s'accroître. Elles étaient de 15 milliards au 30 septembre 1946, au lieu de 12 millards 600 millions en 1945. Elles permettent de consentir des avances à des organismes ou à des entités officielles pour en faciliter le fonctionnement.
Le concours financier apporté par l'Algérie au développement de l'activité industrielle a été, en outre, largement étendu pendant l'année écoulée. A côté des lettres d'agrément destinées au financement de productions nécessaires à la vie économique du pays et pour lesquelles le montant total des engagements atteint aujourd'hui 368 millions, l'Algérie apporte son concours sous forme d'une garantie, aux capitaux investis dans les entreprises classées du plan d'industrialisation.

Le montant total des engagements de l'Algérie, à ce titre, s'élève à 885 millions de francs. Des contrats nouveaux, à cet effet, sont en cours d'élaboration.
Enfin, le financement de la réparation des dommages de guerre a été activement poursuivi dans le cadre encore provisoire des ordonnances dec 3, 4, et 5 octobre 1943 et dans l'attente de la mise en pratique des dispositions des décrets récents des 24 septembre et 2 octobre 1946 qui ont étendu à l'Algérie les principes de la législation en vigueur dans la Métropole, sur la matière. Une loi nouvelle, celle du 28 octobre 1946, est venue en outre, fixer de façon définitive les normes générales du droit à répartition et du règlement des indemnités ; une étude des modalités d'application à l'Algérie de ce texte a été immédiatement entreprise dans les services qualifiés de l'administration centrale, qui s'emploiera de son mieux pour que les décisions attendues interviennent au plus tôt, de façon à apporter aux habitants de ce pays frappés par la guerre dans leurs biens, les soulagements qu'ils sont fondés à prétendre. 1.593 avances provisoires ont été, entre temps, accordées pour un montant global de 51 millions de francs.

SITUATION BUDGETAIRE.

La préparation du projet de budget de 1947 s'est heurtée aux difficultés résultant de la nécessité de faire face à des dépenses croissantes et supérieures aux ressources mobilisables.

De ce fait, il a fallu limiter l'effort de reconstruction et de modernisation de l'outillage du pays, pour ne pas dépasser les limites de ses possibilités financières actuelles ; d'autant plus qu'il n'est pas permis d'envisager - au moment où la reprise économique reste le principal facteur de l'amélioration des conditions de vie des populations - une aggravation sérieuse des charges fiscales.

Les charges du budget de 1947 restent donc lourdes et entraîneront des dépenses dont il n'est pas possible de déterminer dès maintenant, d'une façon précise, toute l'ampleur. Il faudra, en effet : consolider et poursuivre la revalorisation des traitements des fonctionnaires, des salaires et aussi des retraites ; mettre en oeuvre le plan de sécurité sociale décidé par le Gouvernement ; assurer les créations d'emplois ou de services nouveaux qui en résultent faire face aux dépenses de matériel et de travaux indispensables à la renaissance économique. Déjà l'année dernière, il était apparu que l'Ale rie ne pourrait satisfaire convenablement à toutes ses charges, si un allégement n'était apporté à son budget ; un appel a donc été adressé, à cet effet, au Pouvoir central.
Cet appel vient d'être entendu et l'Algérie sera libérée, à partir du ter janvier 1947, des dépenses de la Gendarmerie que la loi du 19 décembre 1900 avait expressément laissées à sa charge. D'autre part, la Métropole a accepté, dans un souci de solidarité généreuse, d'apporter une aide importante à la réalisation des travaux du plan de progrès social en Algérie, en consentant une avance importante de fonds à prélever sur les ressources de sa trésorerie et en versant une contribution directe de son budget au fonds de progrès social dont la création est envisagée.


      Le budget ordinaire.
Compte tenu de toutes ces charges nouvelles, le total des dépenses ordinaires retenues pour 1947, et dont le détail est donné dans les états de développement du projet de budget soumis aux délibérations de l'Assemblée Financière s'élève à 12.992 millions. Il est donc supérieur de 2.100 millions à celui du budget définitif de 1946.

L'accroissement de 20 % environ des dotations budgétaires est un accroissement net, et il n'est réduit à ce pourcentage qu'in raison de la disparition de dépenses exceptionnelles ou occasionnelles que le budget de 1946 a eu à supporter et dont la nécessité de reconduction, en 1947, ne s'est pas fait sentir.
Quoi qu'il en soit, et tenant compte du souci de la plus stricte économie qui a présidé à l'examen des propositions des différents services, l'Administration estime que les dotations dont l'adoption vous est demandée, et qui ont été approuvées par les Ministres de l'Intérieur et des Finances, sont de nature à donner satisfaction aux besoins actuellement prévisibles des services.

En matière de dépenses de personnel, en particulier, l'Administration s'en est tenue à la seule application des mesures générales de réforme des traitements, rejetant toutes propositions tendant à des révisions particulières de statuts. Sauf celles réalisées par assimilation avec les cadres métropolitains, elle n'a retenu, au titre des créations ou des transformations d'emplois, que celles correspondant aux nécessités impérieuses de la bonne marche des services ou à l'application du programme des réformes algériennes, admises d'ailleurs par la Commission des Réformes administratives.
L'accroissement des dépenses de personnel, de beaucoup plus important puisqu'il absorbe plus de la moitié du total des augmentations, est dû principalement aux mesures de revalorisation des rémunérations des fonctionnaires et agents publics, avec leurs répercussions sur de nombreux chapitres budgétaires ; elle entraîne également l'aggravation des déficits des budgets industriels : budget des Chemins de fer et budget des Postes et Télégraphes.
En dehors des dépenses de personnel, les autres augmentations portent : sur la Dette (286 millions), sur la contribution militaire (350 millions) dont le total est d'ailleurs repris aux recettes du budget extraordinaire, ainsi que sur le versement de la dotation au fonds de progrès social (250 millions), sur les dépenses de matériel et de travaux (305 millions) sur les travaux d'entretien et de grosses réparations (347 millions), et enfin sur quelques dépenses d'ordre ou diverses.

La couverture de ces crédits nouveaux s'avérait particulièrement malaisée à obtenir, alors qu'il ne fallait pas songer â une aggravation du fardeau fiscal. Les propositions qui sont soumises à vos délibérations sont cependant de nature à résoudre le problème. Elles comportent reconduction des ressources de 1946, compte tenu du rajustement d'évaluations intéressant les produits divers du budget et les recettes d'ordre, ainsi que du transfert au budget extraordinaire du produit de la Loterie Algérienne, ce qui assure 10.300 millions de recettes.

Le supplément de 1.800 millions restant à imputer aux ressources fiscales est obtenu par des mesures insérées en projets de décisions au programme de la session :

- au titre des Contributions directes, par majoration du résultat de la pénultième année, en raison de l'accroissement des revenus imposables des diverses cédules, complété par une majoration des valeurs locatives sur les propriétés bâties ;
- au titre de l'Enregistrement et du Timbre, par majoration de l'évaluation du fait de la hausse de valeur des immeubles dans les tractations immobilières, par relèvement de certains tarifs en ce qui concerne l'impôt du timbre.

Il a été possible, d'autre part, d'envisager une majoration du produit à attendre de la taxe sur le chiffre d'affaires, en raison de la hausse du prix des denrées et des marchandises, et une évaluation plus importante des revenus de rendements de l'impôt sur les tabacs, en relation avec le rendement du droit ad valorem proportionnel au prix des tabacs qui a été relevé.

En dernier lieu, l'équilibre a été parfait par une majoration du produit estimé des droits de douane à l'importation et par l'application, à compter du 1" septembre 1946, de la majoration des droits sur les produits pétroliers.

      Le budget extraordinaire.
Le budget extraordinaire prend, cette année, une place importante dans les travaux de l'Assemblée Financière. Il supporte, en effet, l'effort de constitution de tout l'outillage économique de l'Algérie, condition nécessaire du développement du pays et de l'amélioration des moyens de vie de ses populations. Cette oeuvre, dans laquelle s'intègre maintenant d'importants travaux sociaux par la création d'un " Fonds de dotation de progrès social ", a été entreprise sur le budget de l'année en cours, mais les conditions économiques d'une période encore troublée n'avaient pas permis d'y donner l'ampleur désirable.
Le projet de 1947, outre des crédits d'engagements importants que l'Assemblée Financière est appelée à autoriser, comporte des propositions d'inscriptions de crédits de paiement qui sont doubles de celles de l'exercice précédent. Il est certain que le renchérissement des matériaux et la hausse du prix de la main-d'oeuvre absorbent une bonne partie de ces augmentations et qu'en réalité l'accroissement des crédits correspondant effectivement à des réalisations nouvelles, est moins important que les chiffres le laisseraient croire.

Le développement du programme, selon le rythme accéléré que l'on escomptait primitivement, aurait donc peut-être requis des dotations plus importantes. Malheureusement, ce développement reste lié aux possibilités de son financement, et, par con séquent, aux possibilités d'emprunts de l'Algérie, puisque l'emprunt sera désormais la ressource presque unique à mettre en regard des dépenses du programme des grands travaux.

C'est donc sur cette base que les propositions du budget extraordinaire ont été établies, après examen, minutieux des propositions des Services. Ce budget est, cette année, divisé en deux sections :

- Le programme des grands travaux d'investissements économiques et immobiliers, fait l'objet d'une section A. Il comporte un total de dotations de 6.700 millions, représentant un pourcentage d'augmentation, sur les crédits de 1946, de 90 % environ. Le détail des travaux qui en font l'objet est inséré
au programme de la session et complète à cet égard les indications du projet de budget lui-même. La couverture de ces crédits est assurée principalement par un prélèvement sur les fonds d'emprunts de 5.552 millions, le surplus provenant, d'une part d'un prélèvement de 700 millions sur la Caisse de réserve, d'autre part - en dehors du quart de la contribution militaire ristourné au titre des travaux d'équipement national - de taxes dont le produit reste spécialisé à la couverture des dépenses de grands travaux, notamment la surtaxe sur la vente de l'énergie électrique ainsi que celle du prélèvement sur le capital des sociétés. L'ensemble des ressources autres que l'emprunt fournit ainsi l'appoint nécessaire (soit 1.148 millions à l'équilibre de la Section A).

- Les travaux tendant à l'exécution du plan de progrès social se trouvent groupés, cette année, en une section unique, la section B. Ils sont dotés d'un total de crédits de paiement de 3.120 millions comportant par rapport à ceux de 1946 (1.067 millions) une majoration de près de 200 %. La dotation de ce programme a pu être arrêtée à un chiffre aussi important par suite de la décision, prise par le Gouvernement, le budget métropolitain. La création d'un " Fonds de dotation " admise par M. le Ministre des Finances, et dont l'institution fera prochainement l'objet d'un texte législatif spécial, groupera les participations de la Métropole et de l'Algérie, pour la réalisation des tranches de travaux chaque année inscrites au budget. Pour 1947, la couverture des dotations prévues est assurée :
--------------1° par une avance du Trésor métropolitain de 2.500 millions ;
--------------2° par les versements qui seront faits au fonds de dotation et qui proviendront : d'un versement direct de la Métropole de 100 millions, et de la ristourne au profit de l'Algérie des trois-quarts de la contribution militaire, fixée à 3 % des évaluations des recettes fiscales, soit 270 millions, et d'une contribution du budget ordinaire de 250 millions.

LES FINANCES LOCALES.

Leur réforme telle qu'elle découlait des ordonnances du 27 décembre 1943 et des textes subséquents, avait pour but essentiel de donner plus d'élasticité aux budgets communaux, par l'attribution de ressources nouvelles et l'aménagement de certaines dépenses d'intérêt non exclusivement communal ; de simplifier les rapports financiers entre l'Algérie, les départements et les communes, et enfin de rendre plus efficaces les règles de la tutelle administrative.


Les résultats attendus ont été satisfaisants, bien que la stabilisation ou même la réduction du nom bre de centimes additionnels n'ait pu être obtenue dans chaque groupe de communes.

Il demeurait bien entendu que cette réforme devait évoluer dans le sens des décisions prises en France dans le domaine des finances départementales et communales. Ces décisions ne sont pas encore intervenues, mais l'Administration algérienne a pu s'inspirer des dispositions envisagées dans la Métropole pour établir les projets de textes qui ont été soumis à l'Assemblée Financière et ont pour objet :
--------1° d'alléger la situation des finances départementales et communales par l'attribution de ressources nouvelles, la prise en charge par l'Algérie de dépenses précédemment supportées par ces collectivités, et une plus juste répartition des dépenses d'assistance entre l'Algérie, les départements et les communes ;
------- 2° de modifier, en matière communale, les règles de la tutelle administrative, afin d'obtenir dans les délais normaux l'approbation des budgets ;
--------3° de venir en aide aux départements et aux communes, par la création d'une caisse de solidarité ayant pour but essentiel l'octroi de subventions pour les dépenses d'intérêt général et de voirie départementale.

LA SITUATION ECONOMIQUE.

      Agriculture.
Les cinq années qui viennent de s'écouler ont constitué pour la branche principale de l'économie algérienne, l'agriculture, une période difficile et mouvementée, dont les causes incombent à la guerre et à ses séquelles.

C'est ainsi qu'en 1945 la récolte des céréales fut d'environ 4.500.000 quitaux, soit un peu plus d'un quart d'une récolte normale, que la production fourragère ne permit guère l'entretien normal du bétail, d'où la mortalité importante, réduction des moyens de traction et une diminution des surfaces ensemencées pour la campagnes suivante.

La situation des cultures maraîchères et des cultures industrielles ne fut guère meilleure. Faute de semences, les plantations de pommes de terre furent en régression notable et la production de l'armée 1945 n'atteignit que 650.000 quintaux soit, environ la moitié des récoltes moyennes d'avant la guerre.

La production de tabac, constitue la principale de nos cultures industrielles, ne donna, de son côté, que 4.200 tonnes, soit le quart d'une récolte normale.
La récolte des légumes secs tomba à 78.000 quintaux, soit le cinquième de la moyenne des années qui précédèrent la guerre.

La capacité de production de la vigne et des plantations z. rbustives se trouva à son tour amoindrie. La viticulture ne produisit que 9 millions et demi d'hectolitres, soit approximativement un3 demi récolte d'avant-guerre, et les rendements moyens des agrumes furent également réduits de
Il y a un an, lorsque s'ouvrit la compagne agricole 1945-1946, la pénurie des moyens de production, le manque de rations pour les animaux, la sécheresse persistante de l'automne qui retardait le travail des terres et les ensemencements, le manque de semences, paraissaient devoir constituer des obstacles insurmontables à une amélioration de la situation économique.

Cette campagne se traduit cependant par un redressement du fait d'une pluviométrie meilleure et répartie, et d'un accroissement des ressources en carburants ; le gas-oil fut en vente libre à partir du 1" janvier et le pétrole à compter de septembre dernier ; si l'essence reste contingenté3 ses attributions, dans l'ensemble, suffisent à couvrir une bonne partie des besoins.

Les ressources en engrais sont plus grandes. Les cultures maraîchères disposent d'engrais terciaires ; des contingents importants d'engrais azotés et phospho-potassiques ont été mis à la disposition de la céréaliculture, de la viticulture et de l'arboriculture fruitière. Les produits anticryptogaminues, notamment soufre et sulfate de cuivre, ont été fournis. Les demandes de semences autres que des céréales ont été honorées en grande partie.

Pour l'année 1946, il est permis d'escompter que les acquisitions de tracteurs pourront porter sur 470 appareils, contre 350 en année normale, Si les importations sont encore insuffisantes pour compenser l'usure du parc algérien, elles n'en ont pas moins constitué un facteur important de sa remise en état.

Les résultats de la dernière campagne agricole s'établissent comme suit :

Pour les céréales, malgré l'insuffisance des ensemencements qui est de l'ordre de 25 à 30 %, selon les régions, la récolte est estimée à 15 millions de quintaux, production légèrement inférieure à celle d'avant la guerre. La commercialisaticn, à la date du 1" novembre, a atteint 6 millions de quintaux.

La production de légumes secs est en progression ; elle est estimée à plus de 150.000 quintaux dont la moitié seulement est mise dans le commerce.

La production maraîchère de la dernière campagne a permis de couvrir les besoins des marchés des grandes agglomérations urbaines et d'exporter vers les marchés métropolitains 50 % du tonnages de 1939, c'est-à-dire un total de plus 530.000 quintaux de primeurs, bien qu'il s'agisse là d'exportations contingentées autorisées seulement sur les excédents des besoins locaux et effectuées en pénurie des transports maritimes.

La production du tabac a été intensifiée et la récolte atteint 16.500 tonnes, se rapprochant ainsi de celle d'avant-guerre.

Le progrès des cultures pérennes (vignes et arbres fruitiers) est moins sensible que c.elui des cultures annuelles. La récolte vinicole de cette année est estimée à 8.400.000 hectos seulement ; du fait des fortes attaques du mildiou subies par le vignoble au printemps dernier en Mitidja, et des périodes de siroco dans d'autres régions.

Les envois traditionnels de fruits oont pu reprendre vers la France métropolitaine et, au cours de la campagne 1945-1946, les exportations se sont élevées à 136.000 quintaux pour les dattes, 17.000 quintaux pour les figues sèches, 248.000 quintaux pour les agrumes, 44.000 quintaux pour les raisins de table et 10.300 quintaux pour les fruits frais divers.

Les pertes importantes de cheptel de l'hiver dernier ne sont malheureusement pas encore réparées; mais l'état sanitaire du cheptel est cctuellement satisfaisant.

Alors que, par suite d'une sécheresse exceptionnelle, l'année agricole 1944-1945 avait été caractérisée par une production anormalement faible (5 millions de quintaux de céréales) et par une mortalité du troupeau ovin atteignant 50 % de 1 effectif, la campagne qui vient de s'écouler a été sur la plus grande partie de notre territoire favorisée par une pluviométrie supérieure à la moyenne propice auo développement des cultures fourragères mais favorable aux maladies cryptogamiques et à la verse des céréales, de sorte que les rendements n'ont pas partout répondu aux espoirs que les débuts de la saison avaient permis de former.

La dernière récolte céréalifère peut néanmoins être considérée comme presque bonne, eut égard à l'insuffisance des moyens matériels dcnt ont disposé les agriculteurs. Les débuts de la campagne 194647 sont, jusqu'à présent, moins prometteurs. Une pluviométrie inférieure à la normale retarde les labours et compromet les pâturages.

Les agriculteurs s'orientent de plus en plus vers la motoculture ; ils développent lem parc de matériel et reconstituent celui dont ils disposaient en 1939 et qui, par suite du manque ou de l'insuffisance du stock de pièces de rechange et d'un service intensif, est parvenu à un degré limite d'usure. Aussi le rythme encore insuffisant de nos importations de tracteurs à chenilles et des véhicules utilitaires a-t-il été accéléré.

La reconstitution nécessaire du vignoble pose des questions matérielles : défoncement, acquisition de plants de vignes, de piquets et de fils de fer et des questions de financement : la replantation d'un hectare est évaluée à 100.000 frs et il y a lieu de reconstituer 250.000 hectares sur 350.000.
La direction de l'agriculture s'est p: éoccupée, en lre étape" de résoudre la question des plants et d'assurer leur contrôle sanitaire en vue d'éviter spécialement la propagation du court-noué qui sévit dans la Métropole. Mais l'Algérie n'est pas encore assurée de disposer en temps voulu de la quantité de sujets dont elle aura besoin. Le financement est à assurer par les vignerons eux-mêmes. Il est permis d'escompter que la décision gouvernementale qui a fixé à 120 frs le prix du degré d'hectolitre, contre 80 fr
l'an dernier, leur permettra de consentir l'effort financier auquel ils seront astreints pour assurer la remise en état de leur vignoble.

Les produits agricoles participent au mouvement général de hausse des prix, enrayé plus ou moins par la réglementation.

C'est donc sur l'accroissement de la production que doivent tendre tous les efforts.

Tout d'abord la production terrienne. par la mise en train d'un programme d'expérimentation agricole. Aussi, a-t-il été inscrit dans le budget ordinaire un crédit de 12 millions environ réservé sur le programme des grands travaux ,80 millions pour l'acquisition de nouveaux domaines, l'aménagement matériel et scientifique des stations, leur équipement en vue des recherches agronomiques et de la mise en valeur des périmètres irrigables.

Les spécialistes ont établi, pour chaque région céréalifère, une gamme de variétés peopres aux terrains, de plus le contrôle officiel de la production des semences sélectionnées de céréales a, cette année, mis à la disposition de céréaliculteurs algériens 150.000 quintaux de semences saines et pures de variétés améliorées et adaptées.

Le service de la protection des végétaux a conduit la campagne anti-acridienne, dirigé le contrôle des pépinières, l'exportation et l'importation de produits végétaux et la désinsectisation des denrées alimentaires.

Les services rendus par l'Institut Agricole d'Algérie ont été reconnus par le Pouvoir Central qui l'a érigé en Ecole Nationale d'Agriculture.

      Crédit agricole.
Le financement à court terme des récoltes de céréales, de vins et de tabacs, contribue au redressement général. Les effets escomptés par les caisses de crédit agricole mutuel sont passés de 796 millions au 30 septembre 1945, à 2.219 millions au 3n septembre 1946.

Le volume des prêts consentis, à -.noyen et long termes s'est accru d'une cinquantaine de millions. La confiance des agriculteurs dans leurs organismes mutualistes est telle que les fonds déposés par des particuliers se sont élevés en un an de 2.716 millions à 3.703 millions.

Avec le concours du Crédit Foncier de France et de la Banque de l'Algérie, une fo-2mule souple et peu onéreuse de crédits à cinq ans, dits crédits d'équipement, a été mise au point à Vele_ de permettre aux cultivateurs ne possédant pas de disponibilités suffisantes, de rénover leur outillage vétuste et d'adapter leurs méthodes d'exploitation.

La Caisse des Prêts Agricoles - s'adressant aux petits colons et fellahs en situation di1iicile, qui ne pouvaient trouver, ni auprès des Cais,es de Crédit Agricole Mutuel, ni auprès des Sociét)..s Indigènes de Prévoyance, les crédits nécessaires à l'ensemensement de leurs terres et au maintien de leur exploitation - a accordé, au cours de la campagne 1945-1946, 9.075 prêts, dont 9.042 à des fellahs, oour un montant total de 119.40.000 francs. Le bldget de l'Algérie a pris en outre en charge le règlement de l'intérêt différentiel, de manière à ramener à 1 % le montant de l'intérêt à régler par les emprunteurs.

Pour sa part, le Fonds Commun des Société, Indigènes de Prévoyance a, au cours de l'année 1946, apporté aux sociétés adhérentes un concours financier s'élevant à 629.689.403 francs, notamment par les prêts de semences, la construction de docks-silos, et surtout la reconstitution du cheptel ovin.
Afin de lui permettre de mener à bien les opérations de cette envergure, la loi de finances du 16 septembre 1946, dans son article 5 a porté de 300 à 600 millions de francs, le montant maximum des emprunts que le Fonds Commun des S.I.P. pouvait contracter avec la garantie de l'Algérie.

En amorce de l'application des luis sociales à l'Agriculture, une Caisse mutuelle agricole d'action sociale de l'Afrique du Nord a été créée le 15 mai 1946. Elle groupe plus de 140 associations agricoles ; elle a, d'ores et déjà, recueilli, au bout de six mois d'existence, un volume de cotisations spontanées, évalué à cinq millions pour les allocations familiales et à cinq millions pour les organisations de prévoyance d'entreprise.

      Les forêts et l'alfa.
Le Service forestier a poursuivi, en 1946, son exploitation en régie des bois et charbons de bois. Par ses ventes directes, à la fois aux négociants et aux consommateurs, la régie forestière a joué un rôle de premier plan dans la régularisation des prix.

L'année 1946 a marqué une reprise de l'exploitation alfatière, réduite depuis 1940 à moins de 20.000 tonnes par an, en raison de l'arrêté des exportations sur l'Angleterre. Les transactions avec la Grande- Bretagne se poursuivent depuis le dernier alignement monétaire. L'utilisation de l'alfa pour la fabrication du papier en France dénote, d'autre part, un net progrès ; l'installation de fabriques de papier d'alfa en Algérie est également en bonne voie, à Alger, à Bougie, à Marnia et dans le Sersou.

L'Administration ayant décidé d'allouer gratuitement aux cueilleurs d'alfa une ration supplénntaire de céréales, prévoit que, grâce à ce stimulant la récolte dépassera cette année 100.000 tonnés qui, au prix de 3.600 frs la tonne Fob, représentent une valeur de 360 millions de francs.

Le même encouragement, donné à l'exploitation des souches de bruyère, laisse escompter pour 1947 une exploitation de 2.000 tonnes, représentant, à raison de 40.000 francs la tonne, une valeur de 80vcmillions de francs

      Hydraulique.
Une impulsion nouvelle a été donnée au service de l'Hydraulique et de la Colonisation qui a mis en chantier trois grands ouvrages dont l'exécution se poursuivra en 1947 ; ce sont les barrages de l'oued El-That, de l'oued Sarno et de Foum El Gherza. Le premier permettra une meilleure irrigation du périmètre de Relizane actuellement desservi par le barrage de Bakhadda. Le 2' est destiné à assurer avec plus de sécurité le service de l'eau dans le périmètre de St-Denis-du-Sig. Le 3' facilitera l'Établissement de nouvelles plantations et le sauvetage des palmeraies du Ziban.

Les travaux du barrage d'Igli, actuellement en voie de réalisation sur l'oued Zousfana, à 40 kms au nord de Béni-Abbés, sont destinés à étaler les eaux des crues saisonnières et à maintenir en place des habitants découragés.

Les études et travaux entamés en vue de la réalisation d'importants ouvrages d'hydraulique dans les régions de Tatdjemount et de Taouiala, se poursuivent pour le développement du paysanat moutonnier.

Rappelons les gros travaux entrepris pour assurer l'alimentation en eau potable de la région oranaise et de la région algéroise, ainsi que les études poursuivies systématiquement pour la desserte en eau des villages kabyles.

L'année 1947 verra la pose du réseau de distribution du périmètre du haut Chéliff qui permettra d'exploiter la réserve d'eau.

De nouvelles formules tenant compte à la fois des dispositions de l'ordonnance du 7 mars 1944 et des nécessités de poursuivre la mise en valeur de l'Algérie et d'améliorer son potentiel agricole, ont fait l'objet d'un projet de décret actuellement soumis au Pouvoir. Central, à l'intention des centres en voie de dépérissements.

      Les mines.
La production en minerai de fer est en recrudescence. Elle atteindra en fin d'année un million 460.000 tonnes environ contre 1.202.000 en 1945. Les exportations, principalement vers la Grande-Bretagne et la Belgique, suivent la même progression : 1.500.000 tonnes environ en fin d'année, contre 1.402.300 tonnes en 1945.

L'exploitation des phosphates, à l'exception du gisement de M'Zaita est également meilleure. En fin d'année, 500.000 tonnes auront été extraites contre 400.000 l'année passée. La mise à voie large du tronçon de voie ferrée Oued Kébérit-Tébessa-Kouif a déja permis de porter la cadence des transports à plus de 50.000 tonnes par mois. L'exportation globale des phosphates en 1946, ressortira à 400.000 tonnes contre 326.000 en 1945.

Le centre de Miliana pour l'éducation professionnelle des jeunes mineurs a été réorganisé sur de nouvelles bases.

Le Service des Mines et le Service des Domaines se sont, en ce qui les concerne, préoccupés de procéder à un recensement général des sources thermo-minérales d'Algérie, les évaluations de dépenses concernant leur mise en valeur figurent au plan quinquennal réclamé par l'Assemblée Financiùre.

      Charbons et combustibles.
En contre-partie des exportations de minerais, l'Algérie importe toujours du charbon o en dépit de la crise mondiale 50 à 55.000 tonnes par mois jusqu'au 1" mai 1946 ; puis du fait du ralentissement de la production aux Etats-Unis et en Angleterre, 45.000tonnes en mai et juin. L apport de charbon turc et rhénan permet actuellement de maintenir un strict équilibre.

Les houillères du sud oranais améliorent leur production en qualité et quantité : la production marchande mensuelle qui était de 10.000 tonnes en 1944, atteint en moyenne 17.500 tonnes depuis le début de la présente année.

Le prix de cession moyen des charbons importés est passé de 1.000 à 1.600 frs la tonne FOB au 1" avril, et à 2.100 frs à partir du 1" novembre. Quant au prix des charbons locaux, ils sont alignés sur les précédents et le déficit qui en résulte est provisoirement absorbé par des indemnités compensatrices de la Métropole.

Nos besoins en combustibles solides doivent naturellement se compléter par des importations de produits pétroliers. Le programme établi à ce sujet pour 1947 comporte, par rapport à 1932, les coefficients de majoration :
- de 25 % pour l'essence,
- de 114 % pour le gas-oil,
- de 36 % pour le pétrole,
- de 170 % pour le fuel-oil.

Ce programme est largement justifié par la mécanisation généralisée de l'agriculture, le développement des transports automobiles et l'emploi massif du fuel-oil dans les centrales électriques principales.

La création de la " Société Nationale des Recherches et d'Exploitation des Pétroles d'Algérie " qui a abouti, vient compléter ce programme. Le plan quinquennal algérien contient les imputations budgétaires correspondant à l'effort de recherches que devra, dans ce domaine, fournir l'Algérie de 1947 à 1951.

      Electrification.
Le plan général d'équipement électrique de l'Algérie pour les 20 prochaines années est fractionné lui aussi en " plans quinquennaux D.

On doit pouvoir compter en 1951 sur un accroissement global annuel de la production hydroélectrique de l'ordre de 350 millions de Kwh, grâce à la mise en service, à cette époque, de la totalité des usines du programme de 1940 et des usines de l'oued Agrioun et du Djendjen supérieur dent la régularisation des eaux produira une énergie de haute qualité.

Le premier programme quinquennal de production thermique comprend : la création d une nouvelle centrale thermique sur le port d'Oran, le renforcement de la Centrale de Bône par l'installation d'un nouveau groupe de 25.000 Kwh et d'améliorations aux chaufferies des deux centrales d'A:ger considérées pour l'avenir comme usines de régularisation,d'appoint et de secours.

Les prévisions de mise en place des interconnexions comportent en sus, établissement d'ici la fin 1948, d'une artère de 150 kilovolts allant de la région oranaise à l'est constantinois, afin d'écarter le risque de restrictions et de coupures.

Un programme détaillé d'électrification rurale a été établi avec le souci exclusif de diffuser largement l'énergie électrique au sein des populations européennes et musulmanes, cependant que l'application à l'Algérie des mesures de nationalisation de l'électricité et du gaz, promulguées dans la Métropole par la loi du 8 avril 1946, fait actuellement l'objet d'une mise au point définitive.

Sur la base des engagements conclus antérieurement entre l'Algérie et les sociétés locales d'électricité, qui vont être accordées par le. futur " service nationalisé ", l'Algérie sera appelée à contribuer à la réalisation de la première tranche quinquennale (production et transport) pour une somme de 6 milliards 271.450.000 francs, le solde, soit 9 milliards 734.500.000 francs, devant être pris en charge par le dit service,

     Industrialisation.
La mise en train de ces importants programmes favorisera l'industrialisation de l'Algérie, dont la commission consultative créée par l'arrêté du 8 juin 1946 étudie les projets récemment mis au point ; au nombre de 74 à ce jour.

L'empressement des entreprises à bénéficier des facilités de crédit et des avantages fisoaux qui leur sont offerts laisse espérer qu'à brève échéance, l'initiative privée comblera, dans le cadre du plan d'équipement algérien, les insuffisances et les déficiences si regrettables à tous points de vue de notre production industrielle d'avant-guerre.

L'exécution de la première tranche décennale de ce plan appellera un investissement global de 8.800.030.000 de francs.
Afin d'encourager parallèlement les " industries clefs " qui tardent à se manifester spontanément dans la conjoncture économique actuelle, l'Algérie est entrée en participations avec une s'ciété d'études pour l'implantation dans l'est constantinois d'une usine moderne de ciment comparable à l'usine oranaise de Saint-Lucien.

Cependant, toutes initiatives se heurtent dans ce secteur à une difficulté sérieuse : celle de l'habitat ouvrier, condition de la venue en Algérie des cadres de maîtrise et du maintien auprès des usines en formation de la main-d'oeuvre locale,

LE RAVITAILLEMENT.

Les problèmes de ravitaillement continuent à se poser d'une façon impérieuse.

En dépit d'une récolte de céréales rr.oyenne et d'une commercialisation régulière, l'Ale ie sera dans l'obligation, pour parfaire la soudure en fin de campagne, d'importer environ 3 millions de quintaux de blés exotiques.

Cette éventualité interdit, jusqu'à nouvel ordre, d'envisager une augmentation des rations de pain et de grain, si l'on veut éviter une rupture irrémédiable de subsistance de ses populations.

Des retards de distribution de café ont été enregistrés depuis quelques mois ,par suite de l'irrégularité des arrivages en provenance des territoires français de l'Afrique Occidentale ou de Madagascar et des besoins de la Métropole, nettement désavantagée jusqu'à maintenant, par rapport à l'Algérie.
L'état du marché des corps gras alimentaires ne permet pas en revanche d'attendre une amélioration prochaine des approvisionnements ; aussi bien, les efforts de l'Administration algérienne tendent-ils à commercialiser le maximum de la pr )duction locale.

Pour ce qui est du savon, la situation est également critique et les savonneries algér'ennes ont dû cesser leur activité, faute de matières premières.
L'approvisionnment en lait, denrée essentielle pour les enfants. les malades et les vieillards, soulève de multiples difficultés, palliées dans une certaine mesure par une abondance relative de produits diététiques.

La situation du marché de la viande demeure irritante. Elle n'est pas, sans doute, spéciale à l'Algérie, et Paris connaît la suspension des arrivages de bétail à La Villette. Jusqu'à ces derniers temps, grâce aux efforts de l'Administration, secondée par les représentants des consommateurs, la viande n'avait pas manqué. Toutefois, la hausse spécifique de fin d'année vient cette fois d'atteindre des proportions inusitées, mais les pouvoirs publics sauront prendre les mesures nécessaires pour arrêter toute tentative de manoeuvres spéculatives.

La campagne locale de congélation entreprise au printemps dernier, a abouti à la con: titution d'un stock de 800 tonnes d'excellente viande de boeuf auquel s'ajouteront vraisemblablement des importations.

LE COMMERCE EXTERIEUR.


Le ravitaillement tendra vers la normale au fur et à mesure que les relations commerciales avec l'extérieur se développeront.

Dès maintenant, l'Algérie a renoue avec la Métropole ses échanges traditionnels. Malgré les difficultés de sa propre subsistance, la Frar ce lui envoie des denrées alimentaires ; au cours de la campagne 1945-1946, les exportations de produits d'alimentation se sont élevées à 840.000 quintaux, soit environ 50 %du chiffre de 1938.

Or, les autorisations d'exportation ont porté sur les excédents des besoins locaux et la pénurie des transports maritimes a freiné les envois.

Les exportations de minerai, d'alfa, de liège, augmentent aussi dans les limites des possibilités de frêt.

Le volume des exportations de vins s'est maintenu, de mai jusqu'à juillet aux environs de 99.030 hectolitres par mois. En septembre les exportations sont tombées à près de la moitié de ce chiffre. Devant la chute des quantités exportées, l'arrêté du 16 octobre 1946 a prononcé, sur les instructions impératives du Pouvoir Central, la réquisition de tous les stocks de l'année 1945 et des années antérieures détenus par les, producteurs. Des commissions départementales, 'où sont représentés tous les intérêts en cause, procèdent au recensement de ces stocks pour les répartir entre la consommation locale et l'exportation vers la Métropole, les pays de l'union française ou l'étranger. Elles ont provoqué un reprise des envois sur la Métropole des vins de consommation courante, de 188.610 hectos pour la Ire quinzaine d'octobre à 348.690 hectos pour la période du 15 au 31 octobre.

Le Ministre du Ravitaillement a notifié qu'il entendait user du droit de préemption des figues sèches que lui confère la loi du 4 octobre 1946. La liberté a été rendue aux exportateurs dans la limite d'un contingent de 90.000 quintaux augmenté de 6.000 quintaux pour les exportations vers les pays de l'Union.
Il a été ouvert un contingent d'exportation de dattes de 65.000 quintaux sous réserve que les prix seraient conformes au prix taxé.

Le Ministre du Ravitaillement a également décidé que les exportations d'agrumes ccraient réalisées par l'intermédiaire d'un acheteur unique. Un premier contingent de 1.600 tonnes est, d'ores et déjà ouvert. Les prévisions d'exportations sur la Métropole pour la campagne en cours sont de l'ordre de 40.000 tonnes.

Tous les échanges commerciaux avec l'étranger peuvent en principe être traités par la voie du commerce privé.

Les restrictions qui subsistent tiennent, soit au caractère oarticulier des accords en vigueur, soit à la nécessité d'utiliser le plus judicieusement possible les crédits limités dont l'Algérie dispose.

La plupart des arrangements de cet ordre, conclus avec le.f, pays de l'Europe continentale, sont du type bi-latéral limitant les échanges à des listes de produits. Une partie des contingents de produits figurant sur ces listes est réservée à l'Algérie, et c'est dans cette mesure que les licences sont accordées aux importateurs algériens.

D'autre part, l'Algérie a pu disposer d'un crédit global de 37 624.000 dollards, soit 4.414.800.000 frs, pour les achats de tour, produits. Ce crédit est réparti par tranchcs trimestrielles entre les di,:férents pays fournisseurs et, d'autre part ,de la hiérarchie des besoins locaux à satisfaire. Les commandes de matériel industriel et agricole, qui permettront de renouveler notre outillage y figurent par priorité.

Outre ce crédit de 37.624.030 dollars réservé aux achats courants du commerce privé, l'Algérie a reçu à la suite de la conclusion des accords négociés à Washington par M. Léon Blum, des crédits dont la première tranche a été fixée à 4.625.000 dollars, soit 560 millions de francs pour des achats de matériels destinés à la réalisation de son plan d'équipement.

Malgré la discipline rigoureuse et les multiples entraves qui limitent les achats à l'étranger, le montant de ces achats est considérable. Avant la guerre, les exportations et les importations directes de l'Algérie avec l'étranger se compensaient à 10 % près. Aujourd'hui, la moyenne mensuelle des exportations pour les sept premiers mois de 1946 est de 158 millions contre 750 millions pour les importations.

Néanmoins, les exportations sur l'eiranger prospèrent, puisque leur moyenne mensuelle, l'année dernière, ne dépassait pas 60 millions de francs. Il est à espérer qu'au cours des mois à venir, le chiffre des exportations se rapprochera de celui des importations étrangères, sous réserve cependarr que l'industrie métropolitaine soit en mesure de satisfaire les besoins de l'Algérie et que l'amélioration de la production agricole permette de réduire les achats de denrées de première nécessité pour le ravitaillement des populations.

En revanche, la balance commerciale avec la Métropole est largement favorable, puisque la moyenne mensuelle des exportations (1 milliat-d 600 millions de francs) pour les 7 premiers mois de l'année est à peu près le double de la moyenne des importations (850 millions de francs).

Si l'avenir de l'Algérie dépend, avant tout, de l'accroissement de sa production agricole et de son industrialisation progressive, le pays ne retrouvera sa prospérité d'antan qu'en pratiquant résolument une politique de qualité des produits de son terroir et de ses richesses.

Qualité et excellence de ces produits, présentation agréable, mise en valeur, emballages solides et sûrs adaptés au goût du pays destinati:ire, sont des éléments de succès qui doivent faire l'objet constant des soucis quotidiens de nos agriculteurs et de nos négociants.

Cette politique seule permettra d reconquérir en France même le terrain perdu par la pratique d'errements regrettables qui, au lendemain de la libération trouvaient un prétexte dans la nécessité de ravitailler la population métropolitaine, fût-ce au moyen de produits de qualité secondaire.

L'Algérie parviendra aussi à reprendre les débouchés qu'elle a perdu par une propagande active. L'Administration est décidée à favorise,- cette action féconde par tous les moyens.

En conséquence, un retour aux normes de la standardisation s'impose inexorablement quelles que puissent être les difficultés de l'heure et, à cet égard,l'année 1947 devra être une année d'efforts soutenus et ardents

Ces efforts sont d'autant plus de rigueur qu'aujourd'hui le consommateur métropolitain a tendance à délaisser les produits algériens pour se porter vers d'autres mieux préparés, mieux présentés et mieux conditionnés.

L'heure est venue pour l'Algérie de prendre sa place sur tous les marchés mondiaux et elle le peut d'autant plus aisément qu'elle a commencé à relâcher les liens qui bridaient la liberté de ses échanges avec l'extérieur et que de nouveaux courants commerciaux se forment, dont elle se doit de profiter.

LE CONTROLE ECONOMIQUE.


Agriculteurs, commerçants, industriels et artisans auront à coeur de seconder dans un autre domaine l'action de l'Administration pour enrayer la hausse récente des prix.

Cette hausse généralisée, étendue de proche en proche à tous produits après la décision du Pouvoir Central de relever les prix des céréales et du vin, le relèvement du prix du charbon, a été encore accrue par les prélèvements des intermédiaires. Elle compromet l'efficacité des mesures destinées à améliorer le pouvoir d'achat des salariés,

Il faut craindre d'autre part que la masse de monnaie introduite dans le circuit des échanges, par suite de la revalorisation des produi;n agricoles, ne correspondant pas aux disponibilités en marchandises et produits, n'exerce une incidence fâcheuse sur les prix intérieurs.

Aussi, le maintien de l'économie dirigée n'est-il pas une survivance inextricable. Choque fois que, dans un secteur donné, l'expérience a été faite d'un retour à la liberté des transactions, les prix ont monté en flèche si bien qu'en définitive pour la sauvegarde de l'intérêt général, il vaut mieux une réglementation imparfaite qu'un " laisser aller " anarchique et déréglé.

Dans une interview accordée à un journal parisien du matin, un ancien ministre des Finances a déclaré ces jours-ci : " A l'heure actuelle la liberté économique c'est le rationnement par le billet de banque : tout pour le riche, rien pour le pauvre. La seule politique démocratique est donc le renforcement du contrôle ".

Une réorganisation interne des szrvices de caractère économique est à l'étude pour ccrriger la tendance de chacun d'eux à suivre des solutions fragmentaires et pour dégager une unité d'action.

Il est donc nécessaire de multiplier les contacts, de coordonner les efforts entre les services algérien et métropolitain du contrôle économique. de manière à éviter les contradictions et les discordances.

LES TRAVAUX PUBLICS.


Les travaux publics, dont l'exécution est encore retardée par le défaut de matériel mécanique et de matériaux permettront au fur et à mesure qu'ils reprendront leur rythme antérieur, de fournir sur place l'embauche désirable, à tout ou partie des travailleurs algériens.

Des améliorations se manifestent cependant par suite de la cadence plus régulière des importations, grâce d'une part, à la possibilité qui est offerte de procéder, sous le régime des achats privés, à des commandes importantes de matériel eLranger, d'autre part, à l'essor croissant de la pnyluction industrielle dans la métropole.

Malgré l'insuffisance des ressoui, es algériennes, la remise en état de l'équipement moderne des voies terrestres, reprise en 1945, a été poursuivie. Une participation aux dépenses de réfection des itinéraires dégradés par l'effet du trafic militaire intense après novembre 1942, a été demandée au service central du prêt-bail, au titre des comptes d'aide réciproque alliée. Un crédit global de 650 millions pourrait être accordé par la Métropole.

C'est toutefois aux collectivités intéressées, à l'Algérie, aux départements et aux communes, que devra principalement incomber au cours des annéesprochaines, la lourde charge de la remise en état de l'amélioration de leurs réseaux routiers : oeuvre de longue haleine sur laquelle pèse le renchérissement continu des dépenses d'acquisition des emprises, ainsi que celles de transport et d'achat de matériaux,

Une modification a été apportée an début de l'année au programme des travaux des routes nationales, pour procurer du travail à la main-d'oeuvre en chômage ; ainsi ont été entrepris d'urgence, dans la région oranaise, des travaux de terrassement de la future déviation de la route nationale d'Oran à Valmy. A été réservée en outre sur les crédits inscrits au budget des routes nationales, une somme de 40 millions à titre de participation de l'Algérie aux dépenses de construction par la Marine Nationale, d'une route joignant Mers-El-Kébir à la plaine de Bou-Sfer, par un tunnel sous le Djebel-Santon.

Dans la région algéroise, des travaux de diverses annexes de la route nationale n° 1 ont été activés. Mais il reste encore beaucoup à faire r our donner à l'ensemble du réseau routier une physionomie moderne répondant aux besoins de la circulation et du trafic commercial.

Les événements de 1942-1944 ont démontré que, si la plupart des ports d'Algérie ont une infrastructure suffisante pour faire face aux besoins prévisibles de la navigation pendant de longues années, la mission de certains de ces ports n'en exige pas moins des extensions, notamment à Bône Philippeville, Bougie, Oran, Mostaganem et Nemours-. Comme en d'autres domaines, les travaux d'extension n'ont malheureusement pu être avancés en 1946, faute de crédits suffisants. Le crédit de 85 millions inscrit à la section XVIII, a seulement autorisé l'exécution de la mise en train des travaux les plus urgents de réparation, des dégâts causés par les tempêtes, notamment à Oran et à Nemours, le renlorcement des ouvrages extérieurs de défense à Alger Bougie et Djidjelli ; enfin, la remise en état de divers ouvrages endommagés par faits de guerre à Bône

Le programme d'équipement matériel a reçu en outre, un commencement d'exécution par des commandes fermes à l'étranger, d'un matériel de dragage et d'un nombre important d'engins de levage. Les ressources nécessaires au règlement de ces derniers engins proviendront d'emprunts gagés sur les taxes d'usage et de péage perçues par les Chambres de Commerce. Le Pouvoir Central statuera prochainement sur les demandes d'autorisation d'emprunt de 31 millions et de 195 millions présentées respectivement par la Chambre de Commerce d'Oran et par la Chambre de Commerce d'Alger. Si besoin est, ces organismes recevront de la Caisse Nationalele des Marchés de l'Etat les avances de trésorerie qui leur seront nécessaires.


Enfin, l'outillage des ports sera complété, en tant que de besoin par la construction de docks-silos et chais à vin.

D'une manière générale le trafic des ports algériens tend à s'accroître, tout en restant éloigné encore des chiffres atteints en 1938, dernière année normale qui a précédé la guerre.

En 1945, et pendant les premiers mois de 1946, les importations massives des céréales ainsi que les exportations importantes de vin vers la Métropole ont fourni un élément substantiel de cet accroissement : le trafic du port d'Alger, qui avait atteint en 1938 un tonnage de marchandises (entrées et sorties réunies) de 3.565.615 tonnes a été, en 1945, de 1.793.831 tonnes et pour les 7 premiers mois de la présente année de 1.588.000 tonnes.

L'Algérie s'appliquera à améliorer en même temps les aérodromes existant sur son territoire et à créer de nouveaux terrains en vue de répondre aux besoins croissants du trafic aérien.

Au cours de la présente année, 25 millions environ ont été ainsi consacrés à l'amélioration de terrains d'escale ou de secours, en particulier dans les territoires du Sud.

Le tourisme était déjà, avant la guerre, - et doit devenir dans les années prochaines - un élément appréciable de la prospérité économique de ce pays au même titre que les autres activités.

Aussi, un inventaire des besoins r'.latifs aux voies d'intérêt touristique, sert-il de base à un programme rationnel d'équipement qui sera exécuté au fur et à mesure de la reprise des relations internationales : 18 millions ont été utilisés en 1946 à l'ouverture et à l'aménagement des voles de circuits touristiques et de besoins économiques immédiats.

Mais les plans établis risquent de ne pas porter tous leurs effets si les matériaux indispensables (liants hydrauliques, aciers, bois de construction) ne sont pas importés de la Métropole ou de l'étranger avec plus de régularité et en plus grandes quantités.

L'URBANISME.

La pénurie de matériaux notamment retarde l'aménagement rationnel de nos grandes agglométions et favorise le développement anarchique et sans art de groupements d'habitations des banlieues.

La législation de l'urbanisme avait pratiquement cessé de jouer pendant la période des hostilités ; il importe qu'elle soit à nouveau appliquée.
L'extension des villes a conduit a décider l'assujettissement d'un assez grand nomme de centres urbains ou de stations climatiques et balnéaires à l'obligation de faire établir par des urbanistes, les plans et programmes d'aménagement, d'embellissement, d'extension, que les règlements imposent aux cités en voie d'évolution rapide.

Dans le dessein d'aider les collectivités ou entités locales à se conformer à cet égard au voeu du législateur avec moins de réticences que dans le passé, l'Administration algérienne a donc prévu le relèvement des crédits de subventions auxquels peuvent faire appel les communes en vue de l'établissement de leurs fonds de plans et projets d'urbanisme. Aussi, propose-t-elle l'extension à l'Algérie des dispositions en vigueur ou prévues dans la Métropole envue d'exiger une discipline de la construction immobilière.

Les Algériens comprendront l'importance d'une telle réglementation qui nécessitera un renforcement du personnel, particulièrement à l'échelon départemental.


HABITAT URBAIN.


L'habitat urbain, dont la solution intéresse toutes les populations de conditions /Incestes et de ressources insuffisantes est un problème angoissant.
Avant la guerre, les services pubucs en Algérie s'étaient préoccupés de déterminer les besoins en logement des agglomérations urbaines et d'y donnersatisfaction au moyen de ressources locales et de crédits mis à la disposition de l'Algérie par la Métropole.

L'accroissement rapide et continu de la population des villes, la destruction d'immeubles par faits de guerre, les démolitions de plus en ',lus nombreuses pour cause de vétusté, ont donné à ce problème une acuité toute particulière, aggravée par l'arrêt total des constructions nouvelles.

Pour remédier à une telle situation, il n'était pis possible de faire appel à la législation sur les H.B.M. qui s'adresse à une population disposant déjà de certaines ressources et qui, au surplus, subit actuellement une refonte générale en vue de son adaptation, aux circonstances économiques de l'heure.
Dans ces conditions, un projet de loi instituant l'habitat urbain et répondant aux concertions exprimées par la Commission des réformes a été préparé. Il a pour objet de doter d'une habitation salubre ou convenable les populations sans logis ou mal logées, ou qui sont installées dans des appartements insalubres et insuffisants des quartier. surpeuplés. Il prévoit notamment une contribution importante au budget de l'Algérie pouvant atteindre la moitié de la dépense de construction, ce qui laisse espérer que le loyer pourra être arrêté à un taux compatible avec les ressources réduites des futurs occupants.
L'Administration algérienne n'a d'ailleurs pas eu seulement à se préoccuper de nouvelles constructions, mais encore de rechercher une meilleure répartition des logements existant dans les villes. C'est à ces fins que les dispositions de l'oraonnance du 11 octobre 1945 instituant des mesures exceptionnelles pour remédier à la crise du logement, ont été adaptées à l'Algérie par un décret du 29 juin 1946. Les services municipaux en voie de création, par application de ce texte, auront pour tâche de dresser un fichier des locaux vacants ou insuffisamment occupés en vue de leur affectation à ceux que les événements actuels privent de toit et de foyer.

HABITAT RURAL.

La distinction fondamentale entre l'habitat rural et l'habitat urbain semble devoir être maintenue. Pour le second, la politique poursuivie s'attache à favoriser l'édification de cités indigènes par le groupement dés populations, rassemblées dans des masures dépourvues de confort. L'applica,ion des plans établis pour la construction de ces cités ne se heurtera pas toujours, dans la pratique, à des obstacles financiers insurmontables, nombre des futurs bénéficiaires offrant une certaine capacité de paiement.

L'habitat rural, en revanche, pose des problèmes plus complexes, notamment dans les où les populations sont disséminées car il implique des regroupements dans des villages rationnellement équipés ; difficultés à affronter sans la mise en valeur préalable ou concomitante des portions du territoire sur lesquelles ces rassemblements sont envisagés ; ils doivent s'accompagner de remise aux fellahs d'une maison qu'ils puissent amortir, tout au moins en partie, grâce au surcroît de ressources dont il doit bénéficier.

Qu'il s'agisse d'ailleurs d'habitat urbain ou d'habitat rural, des dispositions spéciales doivent être prévues pour le financement des projets. Devant l'impossibilité d'appliquer la législation sur les habitations à bon marché, un projet de loi sur l'habitat social, permettant de porter à 50 % la participation de l'Algérie dans le financement des travaux, a été préparé et adressé au Pouvoir Central. Dans l'attente de la promulgation de ce texte, le Gouverneur Général a prescrit, par circulaire récente, d'aligner sur ses dispositions les modalités de financement de l'habitat rural. C'est sur ces bases que seront dotés les projets actuellement en cours.

La modicité de ressources des populations rurales oblige a serrer les prix de revient. A cet effet, des prototypes ont été édifiés sur les terrains de l'Institut Agricole de Maison-Carré' et du Clos Salembier, près d'Alger ; des recherches ont été orientées vers le système de la maison pré-fabriquée. Ces expériences ont fourni de précieux renseignements.

LA SECURITE SOCIALE.

Le souci de la sauvegarde des masses laborieuses qui trouvent avec peine dans le trouble actuel des moyens de subsistance, fait un de\,oir à l'Administration algérienne de veiller au droit social et de provoquer l'extension progressive à l'Algérie de la législation ouvrière de la Métropole.

A cet égard, les mois passés ont été marqués par l'intervention de l'application dans ce pays de très nombreux textes.

Les uns visent les conditions même du travail ; ils concernent la durée du travail et le régime de rémunération des heures supplémentaires (loi du 13 mai 1946), le travail de nuit (décret du 20 mai 1946), la réparation des accidents du travail (décret du 6 juin 1946), dont les mesures d'application doivent être très prochainement examinées par la Commission consultative du Travail.

Tous ces textes constituent un ensemble réglementaire considérable dont l'application, en quelques mois, implique un effort soutenu de la part des services de contrôle dont l'augmentation des moyens d'action a été demandée à l'Assemblée Financière.

Le problème des salaires, qui touche si directement la vie ouvrière, a continué à faire l'objet d'une étude attentive, et une mesure d'ens,mble faisant suite aux augmentations décidées dans la Métropole, a majoré de 30 %, au mois d'août dernier, les salaires de tous les travailleurs algériens de l'industrie, du commerce et de l'agriculture. La Commission centrale des salaires agricoles, réunie il y a quelques jours, a proposé, par ailleurs, la fixation des salaires de plusieurs catégories de travailleurs agricoles non encore réglementées. La situation sociale des travailleurs agricoles tend ainsi, de plus en plus, à s'harmoniser avec celle des autres salariés.

La participation des travailleurs au fonctionnement et à la gestion des entreprises industrielles et commerciales a fait l'objet des lois des 16 avril 1946 sur les délégués du personnel, du décret du 16 avril 1946 et de la loi du 16 mai 1946 sur les comités d'entreprises. Une Commission supérieure des Comités d'entreprises, au sein de laquelle l'Assemblée Financière est représentée, a été créée et se réunira très prochainement.

Cet esprit d'association des milieux professionnels doit imprégner aussi les efforts nécessaires en vue de parer au chômage qui se manifeste en Algérie. A cet égard, il n'existe pas de mer; en, à la fois plus efficace et plus digne, que de perfectionner les connaissances techniques de la main-d'oeuvre. Les essais prometteurs de formation professionnelle accélérée entrepris durant l'été à Oran, Constantine et Bône par les Services du Travail et de l'Enseignement technique, en collaboration avec les syndicats patronaux et ouvriers, ont nécessité la demande de crédits susceptibles de réaliser une formation professionnelle de la main-d'oeuvre, destinée à faciliter son placement, et indispensable, par ailleurs, à l'industrialisation de ce pays.
Cette formation bénéficierait en outre à la partie de la main-d'oeuvre algérienne qui cherche à s'employer dans la Métropole et les efforts nécessaires ont été faits pour que les accords indispensables interviennent en vue d'éviter en France tout afflux désordonné de main-d'oeuvre, dont sont victi?
mes les travailleurs eux-mêmes et leur famille.

L'esprit d'association des milieux professionnels et l'importance du concours demandé aux organisations ouvrières, dans l'oeuvre à la fois économique et sociale de l'industrialisation de l'Algérie, impliquent un programme de construction de " Maisons du Travail ". Celles-ci doivent être le cadre matériel des efforts d'organisation à accomplir dans ce pays sur le plan technique et professionnel, en liaison avec tous les autres éléments qui concourent à la production.

Le problème de la sécurité sociale, dont les données ont été profondément modifiées en France par le Gouvernement issu de la libération a fait l'objet, dès la fin de l'année 1945, de propositions de la part de l'Administration. Une étude attentive en a été faite au sein de Commissions interministérielles : leurs travaux ont aboutit au dépôt pac le Gouvernement, le 24 septembre dernier, d'un projet de loi dont il y a lieu d'espérer le vote très prochain par l'Assemblée Nationale, vota qui marquera ainsi la voicnté de la Métropole d'apporter à ce pays les aménagements sociaux indispensables.

L'ASSISTANCE.

La guerre qui vient de bouleverser le monde, a malheureusement provoqué des miseres physiologiques et une augmentation considérable du nombre des hospitalisations dans ce pays. Pour faire face à cette situation, la santé publique ne possède que des moyens insuffisants d'autant plus été ralenve la cadence des constructions hosp.calières. Le manque de main-d'oeuvre qualifiée, la pénurie de matériaux ont empêché de poursuivre la réorganisation sanitaire envisagée dès avant la guerre. D'autre part, plusieurs établissements ont subi des dégâts importants du fait des bombardements ou des occupations ; leur capacité hospitalière a été réduite d'autant.

     Les hopitaux.

Il était urgent de porter remède a ces déficiences, sans attendre de disposer de matériaux indispensables pour entreprendre les nouvJles constructions. C'est pourquoi il a été demandé à l'autorité militaire de céder à l'Algérie des hôpitaux qui n étaient pas déjà compris dans la conventon du 10 janvier 1935, de façon à mettre le service ce la Santé Publique en mesure de disposer d'établissements supplémentaires et d'augmenter son équipement. D'ores et déjà, M. le Ministre des Almées a bien voulu consentir la cession de l'infirme" ie-hôpital de Coléa, d'une capacité de 120 lits. La remise de l'hôpital de Ténès, d'une capacité de 73 lits, a déjà été effectuée, et celle de l'hôpital de Batna d'une capacité de 130 lits environ également. Ce3 deux établissements étaient compris d'ailleurs dans la convention susvisée. A signaler à ce sujet la transformation récente en hôpital civil de l'ancien hôt,ital militaire d'Aïn-Béïda dont la capacité était de 30 lits. Cette formation portera le nom du regretté docteur Boumali en hommage à la mémoire du grand citoyen et du maire eminent.
Enfin, les opérations de remise à l'Algérie des hôpitaux de Mascara, de 230 lits et de Tiaret, de 95 lits, sont en cours. L'Algérie a pu obtenir par ailleurs l'hôpital naval américain de P itit-Albin près d'Oran ainsi que l'infirmerie installée au dépôt de St.-Eugène à Oran.

Toutes ces nouvelles aéquisitions permettront de parer aux difficultés rencontrées pour 1 équipement des nouveaux services sanitaires.

     Lutte contre la tuberculose.

La guerre a ravivé la progression de la tuberculose. Jusqu'en 1940 les tuberculeux, originaires d'Algérie, dont l'état nécessitait une cure sanatoriale, et les tuberculeux chroniques étaient envoyés dans les sanatoria de la Métropole, où des lits leur étaient réservés en vertu de contrats passés entre ces établissements et les départements algériens. Quant aux tuberculeux relevant d'un traitement actif, ils étaient admis sur place dans les hôp;!-,:tux pourvus d'un service de phtisiologie. Depuis la guerre la question de leur hospitalisation a changé d'aspect. D'une part, il n'est plus possible de continuer à les placer comme auparavant dans les sanatoria de la Métropole ; d'autre part, le nombre de ces malades s'est accru dans de fortes proportions, par suife notamment du rapatriement des tuberculeux de guerre, prisonniers et déportés.
Pour faire face à cette nouvelle situation des plus angoissantes, un programme de mesures a été mis au point, dont l'ouverture recente dans le minimum de temps, grâce à l'aide de l'Algérie, du sanatorium de Rivet, d'une capacité de 100 lits, et l'ouverture du préventorium de La Calle. Enfin, il est actuellement procédé à la détermination des hôpitaux auxiliaires dans lesquels pourront être installés des services de tuberculeux chroniques pour décongestionner les services hospitaliers

     Assistance aux aveugles.

L'Algérie comporte un nombre pari iculièrement élevé d'aveugles et dont le sort fait l'objet de toute la sollicitude de l'Administration, C'est pourquoi a été mis à l'étude l'adaptation à l'Algérie de la législation métropolitaine sur la protection de ces déshérités. Une commission s'est réunie au Gouvernement Général pour mettre au point un projet de décret qui doit déterminer les conditions de l'extension des textes nécessaires. Ce projet a même introduit des innovations quant au mode de calcul de la location qui est rendu plus souple ; mais u ne faut pas négliger que les charges entraînées par l'application de cette nouvelle législation seront de l'ordre de 100 millions de francs, dont la répartition devra s'effectuer par tiers entre l'Algérie, les départements et les communes. D'autre part, l'accroissement de l'assistance médicale aux populations des centres ruraux a été envisagé par la mise en oeuvre de mesures prophylactiques visant les maladies transmis.sibles et l'application de moyens curatifs.

     Lutte contre les épidémies.

La médecine préventive est égales:frit organisée par l'extension de procédés tendant à rendre inoffensifs les porteurs de germse, par l'ielement des contagieux et stérilisation des réservoirs de virus.

Des tournees de dépistage et de pr,phylaxie ont été régulièrement effectuées sur l'ensemble du territoire. Elles ont été multipliées dans les régions où sévissaient les maladies transmiss.bies : typhus exanthématique, fièvre typhoïde, variole et fièvre récurrente. Dans un autre domaine -- malgré les difficultés du ravitaillement et des transports - le nombre de consultations aux mères et aux nourrissons a été augmenté.

Il a paru opportun de renforcer certaines dispositions de législation en vigueur sur ; hygiène des populations en mettant à l'étude l'extension à l'Algérie du décret-loi du 30 octobre 1945, relatif à la protection des eaux potables, et du decret-loi du 24 mai 1938 relatif à la destruction des ::remeubles et îlots insalubres ainsi que la loi du 25 juin 1938 concernant la vaccination antidiphtérique obligatoire.

En outre, les services du Gouvernement Général en liaison étroite avec la direction de l'hygiène du Ministère de la Santé Publique, ont entrepris l'organisation d'un contrôle sanitaire aux frontières de mer, de terre, et de l'air en vue d'empêcher l'introduction dans la Métropole par la voie maritime des affections contagieuses en provenance des 3 départements algériens, à l'effet en meme temps d'assurer l'adaptation à l'Algérie de la réglementation internationale concernant le contrôle sanitaire aérien, ainsi que la surveillance médicale des frontières terrestres.

Par des moyens de fortune, les services compétents ont pu organiser la protection sanitaire de la Métropole par voie de mer. Mais une question importante reste à résoudre, celle du contrôle médical de la main-d'oeuvre se rendant dans la 11(4ropole dont le but est non seulement d'éviter la transmission de maladie pestilentielles mais aussi de dépister les sujets tuberculeux, physiquement inaptes ou atteints d'affections vénériennes, pour éviter ne deviennent des candidats à l'hospitalisation loin de leur famille et de leur foyer.

Le plan d'action de préservation humaine sera de toutes façons complété par une lutta intense contre les maladies sociales et notamment par l'adaptation à l'Algérie des textes métropolitains concernant la tuberculose, les maladies vénériennes et la protection maternelle et infantile.

     Lutte contre le paludisme.

Mais il est un mal qui, cette année a revêtu une gravité particulière et pris l'allure d'une pandémie, c'est le paludisme. Cette maladie a toujours les mêmes causes immédiates, la pluviométrie tardive du printemps qui a pour effet de multiplier des mares et des flaques d'eau durables, dans toutes les dépressions du sol et de provoquer un développement abondant de l'anophèle.

Répondant aux appels des collectivités publiques, les médecins paludologues départementaux, assistés des équipes sanitaires mobiles départementales et de celle du service central, se sont portés inlassablement sur les points menacés. Pratiquant des dizaine de milliers d'injections de quinine dans les communes et les douars, ainsi que de larges distributions de dragées de quinine et de Succédanés synthétiques, ils sont arrivés à obtenir une régression notable de la pandémie.

Mais en prévision d'accidents semblables, avant le printemps prochain, des contacts sont pris avec les organismes spécialisés, en vue de l'application dès le mois de mars de l'épandage de produits larvicides par avion. On trouvera précisément au budget de 1947, au titre du service antiopaludique, une énumération des travaux qui sont prévus en vue de servir de base à l'application d'un plan complet d'assainissement et de défense contre cette redoutable maladie.

     Assistance aux nécessiteux.

L'Administration n'a pas manqué également de se pencher sur le sort des nécessiteux dont le nombre a tendance à s'accroître au cours des années présentes. La cause doit en être recherchée dans la suite des mauvaises récoltes qui frappèrent les agriculteurs et aussi dans les séquelles qu'a léguées la dernière guerre.

L'aide de l'Administration Française s'est manifestée à l'égard de ces déshérités sous un double aspect ; d'une part, par la lutte constante et opiniâtre contre le chômage, sous la forme de l'organisation de chantiers de travail ; d'autre part, par l'attribution de secours aux invalides, sous la forme de subsides en nature et la création de soupes populaires. Toute cette organisation a nécessité l'emploi de crédits importants, 120 millions pour les chantiers, 70 millions environ pour les distributions de secours. Elle a donné à l'ensemble de la population la moins fortunée de ce pays, les secours qui l'ont mise à même de subsister au cours d'une des pério des les plus critiques qu'ait eu à subir l'économie algérienne.

Cette oeuvre n'est point terminée. Si l'économie générale du pays s'est sensiblement améliorée, il n'en reste pas moins des zones où risquent de sévir, cette année encore, la misère et le chômage, notamment sur les Hauts-Plateaux à économie pastorale, où le cheptel décimé par des années de sécheresse persistante n'a pu se reconstituer. Dans ce secteur, l'oeuvre d'assistance de l'Administration française se poursuivra sans répit durant la saison prochaine en fonction des moyens financiers disponibles.

Un effort particulier en vue de pallier le plus possible la pénurie qui règne en manière de tissus et de vêtements sera accompli. Un plan d'habillement dont les modalités viennent d'être arrêtées, recevra prochainemnt un commencement d'exécution avec le concours des services de l'Entr'aide Française.
Malheureusement, le manque de matières premières, les difficultés d'approvisionnement à l'étranger ne permettront pas de donner à ce plan toute l'ampleur qu'exige l'étendue des misères à secourir.

LES BEAUX-ARTS ET LES ANTIQUITES.

Le budget de 1946 comportait au titre du Service des Beaux-Arts des crédits importants.

Une augmentation de crédit pour le Musée national des Beaux-Arts d'Alger, augmentation corrélative à la hausse des prix, a été envisagée au titre des budgets ordinaire et extraordinaire pour l'exercice 1947.

Il s'agit en l'occurrence d'enrichir le patrimoine artistique de l'Algérie et d'accroître son rayonnement intellectuel.

L'Ecole nationale des Beaux-Arts est à réinstaller dans des locaux neufs et appropriés. En 1946, un crédit de 10 millions a été inscrit pour l'acquisition d'un terrain ; des pourparlers sont en cours. Mais un nouveau crédit s'avère indispensable pour entreprendre, en 1947, les premières de ces constructions. C'est à cette fin qu'une somme de 10 millions de francs a été prévue au budget extraordinaire.

En attendant, il a été jugé opportun de porter au budget ordinaire des sommes suffisantes pour améliorer immédiatement les conditions de travail et d'enseignement de cet établissement.

Dans le dessein de favoriser également, dans la plus large mesure possible, l'épanouissement des arts, a été proposé le relèvement des crédits à inscrire au titre des bourses et subventions aux artistes et aux sociétés artistiques et au titre des expositions et représentations, concerts et conférences.
Fondé d'autre part, sur un voeu de la Commission des Monuments et des Sites d'Algérie, un programme de mise en valeur des richesses archéologiques de nos trois départements a été préparé. Ce plan doté de 100 millions de francs et qui devait être réalisable en cinq années, par tranche de 30 millions chacune pour les premières années, a déjà été approuvé par l'Assemblée Financière ; un crédit de 30 millions de francs a été voté pour l'exercice 1946. Cette année, la deuxième tranche a été réduite à 27 millions, avec un crédit d'engagement de 3 millions pour 1948 ; cette deuxième somme, si elle est consentie par l'Assemblée Financière, donnera les moyens de poursuivre activement les réalisations envisagées.