LE CONGRÈS DES TRANSFUSIONS
Les hématologues visitent à Chéragas lusine
de sang sec
Ils ont été reçus par M. Léonard au Palais
dÉté
Les travaux des congressistes
se sont poursuivis dans la journée dhier. Rapports et communications,
présentés par des sommités algéroises, de
la métropole et de létranger, étaient orientés
sur les groupes sanguins et les différentes techniques de transfusion.
Hématologie, spécialité-clef
Le grand public connaît plus ou moins lexistence de quatre
grands groupes sanguins ; A, AB, B, O. En réalité, il
en existe plusieurs dizaines dautres, ce qui a amené les
spécialistes à réviser certaines notions, en particulier
celle du « donneur universel ». Et pour éviter de
graves déboires, chaque opération de transfusion est précédée,
à lheure actuelle, dun essai « in vitro ».
Les progrès de lhématologie ont, en outre, mis en
évidence le « facteur rhésus », importante
découverte qui déborde sur dautres spécialités
médicales, la gynécologie notamment. Le facteur « rhésus »
serait à la base davortements, de grossesses difficiles,
toutes choses qu'on imputait auparavant à une hérédité
chargée.
En ce qui concerne les différentes techniques de transfusion,
lAlgérie, avec les professeurs Malmejac et Aubaniac préconisant
de nouvelles méthodes, se place à lavant-garde.
« L'usine-pilote » ou « conserves de vie
»
La visite au domaine
de la Trappe, près de Chéragas, procura aux
congressistes quelques heures de détente. On sait que depuis
la fin de la guerre, et grâce à la générosité
du sénateur Borgeaud. une « usine de sang sec »
a été édifiée et offerte aux services du
professeur Benhamou et au Gouvernement général.
Ce centre est placé sous la direction du docteur Puglièse,
qui expliqua aux visiteurs le processus de fabrication du plasma desséché.
Une démonstration, effectuée par les soins de ce médecin
et de lIngénieur Dugerie, permit dapprécier
cette merveilleuse réalisation.
Véritable « usine-pilote », unique en Afrique du
Nord, elle ne nécessite l'intervention que de deux hommes.
Compresseurs et appareils de contrôle marchent automatiquement,
défiant les éventuelles pannes de secteur. Lorsque celles-ci
se produisent, elles déclenchent la mise en marche de groupes
électrogènes.
Lusine, qui fournit tous les établissements hospitaliers
d'Algérie, produit 300 bouteilles do plasma chaque jour. « La
vie en conserve » sort ainsi, chaque jour, du centre, véritable
enclave scientifique au sein d'un domaine agricole.
Les discours
M. Henri Borgeaud réunissait, quelques Instants plus tard, en
un banquet où tout était prévu - sauf
le nombre de convives qui répondirent au delà de toute
espérance à lhospitalité de leurs hôtes
- M. Roger Léonard, les représentants de l'Administration
centrale, les congressistes et leur président, des parlementaires
; MM. les députés Blachette, Chevallier, Aït Ali,
Paternot, Smaïl ; de lAssemblée algérienne,
MM. Bélaïche, Mesbah, Segond ; de lAssemblée
de lUnion française, M. Rosfelder et ses collègues
du conseil général. M. Gazagne, maire dAlger, était
également présent.
Prenant la parole, M. Borgeaud souhaita la bienvenue aux savants et
remercia M. Léonard d'avoir accepté de présider
cette manifestation. Il en précisa la signification : les Algériens
sont tous unis lorsquil sagit de défendre une cause
sacrée. Ils lont prouvé sur les champs de bataille
et le prouvent encore, sous légide de la métropole,
en accomplissant dans ce pays dexemplaires
réalisations sociales.
M. Blachette, au nom des parlementaires, adressa ses vux aux congressistes,
à leur président, le
professeur Benhamou, animé dune foi médicale ardente
et, se tournant vers M. Borgeaud, il lui dit en substance : « Grâce
à vous la Trappe est restée fidèle au sens que
ce terme exprime en dialecte percheron, le haut-lieu. Elle est restée
effectivement un haut-lieu de charité ouvert à tous sans
distinction de races ni de religions ».
Le sénateur Tamzali« médecin parlementaire musulman
», selon ses termes, se félicita de voir le développement
de la transfusion sanguine. Il rendit hommage au dévouement de
son promoteur, le professeur Benhamou et au sénateur Borgeaud
« gardien du patrimoine moral de sa famille. »
Le professeur Benhamou souligna le caractère de cette «
Réunion du sang » : Fête fraternelle, où sur
une terre historique, se mêlent pour se sauver réciproquement
les sangs français et musulman.
M. Roger Léonard exprima aux congressistes son plaisir «
deffectuer une escale heureuse au milieu de leurs travaux et leva
son verre à M. Henri Borgeaud, organisateur de cette réception.
Au Palais
d'Eté
Les hématologues quittèrent la Trappe pour reprendre leurs
séances à lamphithéâtre Widal. Un cocktail
devait à nouveau les réunir en fin daprès-midi
au Palais dEté, avec la plupart des officiels présents
aux manifestations de la matinée.
La musique de lAir agrémenta cette réception où
il fut donné, aux visiteurs, dapprécier lexquise
courtoisie de M. et Mme Léonard et le charme des salons gubernatorlaux.
Le congrès des Transfusions se poursuivra aujourd'hui et sera
clôturé ce soir par un banquet au Saint-George.