TROISIÈME PARTIE
LES
PRODUCTIONS MINÉRALES
-------Les produits
végétaux et animaux dont nous avons fait une énumération
rapide, en indiquant leur importance relative dans l'économie algérienne,
ne sont pas les seules richesses de la France africaine. Si le sol produit
abondamment des plantes et nourrit des animaux qui font la valeur de l'agriculture,
de l'élevage et d'une grande partie de l'industrie, on doit aussi
au sous-sol de dispenser, pour le plus grand profit de la colonie, d'immenses
ressources minérales.
-------La
production minérale est abondante et variée. Si variée
qu'elle a fait dire, avec un peu de mépris peut-être, que
la carte minéralogique de l'Algérie était une "
carte ,d'échantillons ". De ce mot, il faut surtout retenir
l'extrême diversité des minéraux utiles contenus dans
le sous-sol. Quant à croire qu'il ne s'agit là que "
d'échantillons " contenus en quantités trop faibles
pour être exploités, il n'y a rien de plus inexact : le développement
de l'industrie extractive est la preuve absolue du contraire.
-------Cette
industrie, à l'heure actuelle, rapporte à l'Algérie,
du seul fait des exportations, plus de 250 millions par an ; c'est plus
de 6 % de la valeur totale des expéditions à destination
de l'extérieur. Le tonnage expédié dépasse
3 millions de tonnes, près de la moitié des expéditions
totales par voie de mer. Par les salaires qu'elle permet de distribuer
à de nombreuses populations pauvres de l'Algérie, aux dockers
des ports d'embarquement, aux équipages des navires, par les bénéfices
qu'elle fait réaliser aux compagnies concessionnaires de mines,
aux réseaux de chemins de fer, aux compagnies de navigation, par
les redevances perçues par le budget algérien, la production
minérale a une valeur économique et sociale très
importante.
-------Elle
n'a d'ailleurs pas atteint son complet développementjment; tous
les gisements connus ne sont pas encore exploités ; il en est qui
ne font l'objet que d'une exploitation restreinte; enfin, toutes les richesses
minérales n'ont pas été. usqu'à présent,
entièrement reconnues et le prospecteur peut s'attendre à
d'heureuses surprises. L'activité présente des mines algériennes
est un gage de leur développement futur.
1.
- Les phosphates
-------Avec une
production annuelle de 5 millions de tonnes, la France et l'Afrique du
Nord française (Algérie, Tunisie et Maroc) fournissent à
elles seules plus de la moitié de la production mondiale de phosphates
(9 à 10 millions de tonnes). Leur principal concurrent, les Etats-Unis,
n'extrait chaque année que 3 millions et demi de tonnes. C'est
donc la France qui, avec ses possessions nord-africaines, se trouve maîtresse
du marché phosphatier.
-------Les
besoins de l'agriculture sont de plus en plus grands, car le phosphate
constitue un engrais de premier ordre, et son emploi se généralise.
A une consommation des produits agricoles qui s'accroît d'année
en année doit correspondre un accroissement des rendements et,
à cet effet, une utilisation de plus en plus grande des engrais.
On conçoit donc que la consommation des phosphates soit presqu'illimitée,
car elle est encore loin d'être générale ; avant qu'elle
ait atteint son maximum, on peut s'attendre à un considérable
développement de la production nord-africaine, partant de la production
algérienne.
-------L'essor
de l'exploitation des phosphates algériens a été
d'autant plus remarquable que ses débuts ne remontent pas à
quarante ans. La production, de 6.000 tonnes en 1893, dépassait
100.000 deux ans plus tard, 200.000 quatre ans après ; elle atteignait
et même dépassait, avant la guerre, 400.000 tonnes ; à
l'heure actuelle, la moyenne est supérieure à 800.000 tonnes.
Ces quelques chiffres disent assez clairement, sans qu'il soit besoin
d'y ajouter des commentaires, quelle fut la rapidité de ce développement.
-------Il
y a d'ailleurs corrélation étroite entre le développement
de la production phosphatière en Algérie et, en même
temps, en Tunisie et au Maroc, et la consommation en France et dans le
monde entier, en Europe surtout. Il est certain que la mise en valeur
des gisements phosphatiers rie l'Afrique du Nord a eu pour conséquence
d'accroître très sensiblement, en livrant sur le marché
d'énormes quantités de produits, l'emploi du phosphate dans
l'agriculture. La consommation européenne, qui était en
effet dé 1.400.000 tonnes en 1895 (dont 100.000 provenant ci Algérie),
dépassait déjà 2 millions et demi de tonnes en 1905,
approchait 4.400.000 tonnes en 1913 et se trouve actuellement très
supérieure à 5 millions de tonnes. La production nord-africaine
(112.000 tonnes en 1895. 872.0000 en 1905, 2.452.000 en 1913, 5 millions
aujourd'hui) et, partant, la production algérienne (112.000, 347.000,
461.000 et 800.000) n'ont pas été étrangères
à cette augmentation de la consommation.
-------C'est
dans le département de Constantine que se rencontrent les gisements
phosphatiers algériens.
-------Un
premier groupe est situé au Sud des Hauts-Plateaux, prés
de la frontière tunisienne, à proximité de Tébessa
: ce sont les gisements du Djebel-Kouif, du Djebel
Onk et du Djebel Dyr. Un second groupe se trouve au Nord des Hauts-Plateaux,
de Bordj-bou-Arréridj,
à l'Ouest, à Souk-Ahras, à l'Est, en passant par
Sétif : Tocqueville, Bordj-R'dir, M'Zaïta,
Djebel-Dekna. Quatre seulement de ces gisements sont en exploitation.
Celui du Djebel-Dekna, qui fut le premier exploité, fut vite abandonné,
car la teneur du phosphate en acide phophorique était trop faible
; ceux du Djebel Dyr ont cessé leur exploitation depuis 1912. Le
Djebel-Onk n'est pas encore exploité, malgré son importance
: on se heurte en effet à de grosses difficultés d'évacuation
qui retardent sa mise en valeur.
-------Restent
les gisements de M'Zaïta, de Tocqueville, de Bordj-R'dir et du Kouif.
Le dernier est à beaucoup près le plus important : il occupe
3.000 ouvriers et, pour loger, .dans la région désertique
où il est situé, tout le personnel qu'il emploie, on a dû
édifier une véritable ville, avec magasins, écoles,
etc... Sa production, qui atteint et dépasse parfois 700.000 tonnes
par an, est en grande partie exportée par le port de Bône.
-------Le
gisement de M'Zaïta, situé, comme ceux de Tocqueville
et de Bordj-R'dir, sur la ligne de chemin de fer d'Alger à
Constantine, a une production annuelle d'environ 100.000 tonnes ; il n'y
est employé, pour l'abatage du phosphate, que 500 ouvriers.
-------Moins
importants sont les gisements de Bordj-R'dir et de Tocqueville, dans lesquels
l'extraction annuelle est respectivement de 20.000 tonnes et de 5 à
10.000 tonnes accusant même une certaine diminution.
-------Les
ports de Bougie et de Bône sont les principaux ports d'embarquement
du phosphate ; celui de Bône, en particulier, qui dessert le gisement
du Kouif et pourrait dans l'avenir desservir celui du Djebel Onk, est
le premier port phosphatier d'Algérie, celui au surplus où
sont embarquées les plus fortes quantités de minerais de
toute la colonie Ce trafic, qui le met au, troisième rang des ports
algériens, après Oran et Alger, a permis de le doter d'un
outillage des plus perfectionnés.
-------Les
phosphates algériens, sans être aussi riches que ceux du
Maroc et des Etats-Unis, ont néanmoins la même valeur que
ceux de Tunisie. Leur teneur en phosphate tricalcique est comprise entre
63 et 70 %.
Leurs usages principaux sont l'agriculture, qui les emploie sous forme
de superphosphates; ou à l'état naturel. et la métallurgie
du fer.
-------L'industrie
des superphosphates, qui est actuellement très florissante en Algérie,
est la conséquence de l'existence dans la colonie de ces importants
gisements phosphatiers. Trois usines, employant plus de 200 ouvriers,
se livrent à cette fabrication, qui consiste en un traitement du
phosphate par l'acide sulfurique. Elles trouvent sur place la majeure
partie des produits nécessaires à leur fonctionnement :
le phosphate, dont elles consomment annuellement 70.000 tonnes environ,
et les pyrites de fer, extraites du sous-sol algérien et dont la
production atteint 12.000 tonnes,. qui servent à la fabrication
de l'acide sulfurique.
-------La
production du superphosphate dépasse 70.000 tonnes par an. La majeure
partie, 40.000 tonnes environ, est consommée par l'agriculture
algérienne; le reste, soit 30.000 tonnes, est exporté. Ajoutons
toutefois que la consommation locale, qui est de 60.000 tonnes, doit importer
de France une vingtaine de mille tonnes.
-------Le
superphosphate de chaux d'Algérie est un produit de vente courante
; sa teneur en acide phosphorique soluble, qui est de 16 %., en fait une
marchandise de bonne valeur, l'engrais phosphaté le plus recherché
dans l'agriculture, car il contient, sous le moindre volume, le maximum
d'acide phosphorique directement assimilable par les plantes. -------Aussi
peut-on prévoir que cette industrie ne pourra que trouver des débouchés
croissants et se développer considérablement dans l'avenir.
-------La
consommation de phosphate n'est pas, nous venons de le voir, très
importante en Algérie ; elle se borne à l'heure actuelle
à 70.000 tonnes par an. Encore devonshous constater qu'elle s'est
considérablement accrue dans ces dernières années,
car elle se limitait, avant la guerre, à 9 à 10.000 tonnes.
Il faut s'attendre à ce que l'agriculture de !a colonie emploie,
dans les années qui viennent, des quantités encore plus
élevées, car les terres algériennes ne contiennent
que des quantités minimes d'acide phosphorique, et cette substance
est indispensable au développement de la plante, de la graine en
particulier. Aussi-, plus s'intensifiera l'emploi des engrais phosphatés,
plus la céréaliculture verra ses rendements augmenter, car
c'est plus par la généralisation de ces fumures que par
l'augmentation des surfaces cultivées que l'on accroîtra
la production.
-------La
presque totalité des phosphates extraits en Algérie reste
disponible pour l'exportation. 7 à 800.000 tonnes sont chaque année
expédiées sur des destinations très diverses. Le
tiers environ (plus de 200.000 tonnes) est absorbé par la France;
l'Italie achète 100.000 tonnes. l'Angleterre` 90.000, l'Allemagne
et la Hollande à peu près autant, l'Espagne 60.000, la Pologne
40.000; les autres clients sont : la Yougoslavie, la Belgique, la Lettonie,
la Suède, l'Irlande, la Roumanie, la Nord vège, etc... La
liste s'allonge chaque année, et les achats se font de plus en
plus volumineux.
-------Ces
exportations rapportent à l'Algérie une soixantaine de millions
par an, Si l'on y ajoute, en ce qui concerne les superphosphates, l'excédent
des exportations sur les importations (5 à 6 millions de francs),
on trouve un total de plus de 65 millions de francs, qui donne une idée
de la valeur de l'exploitation phosphatière.
II. -
Le minerai de fer
-------Le
minerai de fer est le minerai métallique de beaucoup le plus répandu
en Algérie. C'est lui également qui
fournit, à l'exploitation, le plus fort tonnage. Dans un inventaire
dressé au début du siècle par le service des Mines
de l'Algérie, on compte en effet plus de 150 gisements, répartis
assez inégalement sur le territoire de la Colonie, et dont la densité
va en croissant de l'Ouest à l'Est : le département de Constantine
en contient 93, celui d'Alger n'en a plus que 30, et on n'en signale plus
que 28 dans le département d'Oran.
-------Ajoutons,
d'ailleurs, que bon nombre de ces gisements peuvent être groupés
en quelques formations seulement, ce oui réduit sensiblement les
gîtes existants. Il n'en reste pas moins que cette quantité
considérable d'affleurements est l'indice de la grande richesse
du sous-sol.
-------Tous
ces gisements ne contiennent certes pas une quantité de minerai
suffisante pour justifier une exploitation lucrative ; aussi n'en est-il
encore qu'un petit nombre qui aient jusqu'à présent été
mis en valeur. Une trentaine seulement sont actuellement exploités.
-------Le
minerai se présente sous des formes diverses et à une plus
ou moins grande profondeur. Il ne paraît pas utile de donner des
détails sur la qualité et la composition des différents
minerais de fer extraits en Algérie : une telle description sortirait
du cadre de cet exposé rapide. Mais on peut signaler que, suivant
la profondeur et la direction des filons, l'extraction est souterraine
(mines) ou à ciel ouvert (minières).
-------Si
les deux tiers des exploitations sont souterraines, les difficultés
d'abatage ont pour effet de réduire la production des mines, qui
ne fournissent que le tiers de la production totale de l'Algérie.
Les minières, par contre, moins nombreuses mais d'une exploitation
plus facile, produisent deux fois plus.
-------L'exploitation
actuelle du minerai de fer remonte à une soixantaine d'années,
mais la découverte de vestiges d'ex ploitations antérieures,
datant de l'occupation romaine, permet d'établir qu'une extraction
d'une certaine importance existait déjà à cette époque.
Elle avait d'ailleurs été oubliée, et c'est à
l'occupation française que l'on doit la découverte de nombreux
gisements et l'exploitation des plus importants d'entre eux.
-------La
production subit un rapide accroissement : de 5 à 600.000 tonnes
au début du siècle, elle dépassait 1.300.000 tonnes
en 1913; depuis deux ans, elle s'établit au-dessus de 2 millions
de tonnes : en 30 ans, on le voit, elle s'est trouvée quadruplée.
-------Le
département de Constantine, qui contient la moitié des gisements
exploités, répartis à peu près également
sur son territoire et jusqu'à une assez grande distance de la côte,
fournit la plus forte production de toute l'Algérie, presque la
moitié du total ; 950.000 à 1 million de tonnes sont extraites
chaque année, provenant au moins pour les 3/4 de l'Ouenza. Ce gisement,
le plus riche de la' colonie, est situé entre Souk-Ahras et Tébessa,
près de la frontière tunisienne, en pleine région
montagneuse. Sa mise en valeur a nécessité la construction
d'un chemin de fer le reliant à la ligne de Bône à
Tébessa.
-------L'exploitation
en est des plus actives : commencée en 1921, elle fournissait déjà,
en 1924, une production de 600.000 tonnes ; l'extraction approche actuellement
800.000 tonnes. C'est à la mise en valeur de l'Ouenza que l'on
doit l'essor considérable de la production de minerai de fer de
ces dernières années.
-------L'Oranie
vient en second rang dans la production algérienne, avec plus de
600.000 tonnes, extraites de six gisements seulement, situés au
Sud-Ouest d'Oran, et plus particulièrement dans la région
de Beni-Saf ; ce dernier groupe, avec quatre exploitations, fournit les
9/10 du minerai oranais, dont l'exportation â lieu par le port de
Beni-Saf, un des grands ports miniers de l'Algérie.
-------Les
exploitations du département d'Alger se trouvent toutes à
l'Ouest d'Alger, dans un quadrilatère formé par Ténès,
Orléansville, Médéa et Alger. Leur production est
d'environ 450.000 tonnes, dont près de la moitié (190 à
200.000 tonnes) est fournie par le gisement
du Zaccar. L'exportation du minerai a lieu en majeure partie par
les ports d'Alger et de Ténès.
-------Tout
le minerai de fer extrait des gisements algériens est exporté.
La métallurgie française, déjà abondamment
pourvue par la production métropolitaine, qui est d'environ quarante
millions de tonnes, n'absorbe qu'une faible partie du minerai algérien,
25 à 30.000 tonnes environ. Le reste, c'est-à-dire la presque
totalité de la production, est expédié à l'étranger
: 1 million de tonnes en Angleterre, 6 à 700.000 en Hollande, 2
à 300.000 aux Etats-Unis, 70.000 en Allemagne, 40.000 en Italie,
15.000 en Belgique ; les autres acheteurs, plus ou moins réguliers,
sont l'Autriche, la Norvège, le Canada.
-------On
pourrait, avec quelque raison, se demander pourquoi cette présence,
en grande quantité, de minerai de fer dans le sous-sol algérien
et cette puissante industrie extractive n'ont pas donné naissance
à une importante industrie métallurgique, à la création
de hauts-fourneaux. Nous avons vu, en effet, la production des phosphates
provoquer la création d'usines de superphosphates, l'existence
du troupeau faire naître l'industrie de la tannerie, la culture
du tabac avoir pour conséquence l'installation de nombreuses manufactures,
etc... Rien ne semble, somme toute, s'opposer à l'industrie sidérurgique
en Algérie, puisque d'autres industries ont pu naître.
-------En
fait, il a existé près de Bône, il y a un peu moins
de quatre-vingts ans, un haut-fourneau qui produisait annuellement 2.000
à 2.500 tonnes de fonte aciéreuse d'excellente qualité.
La production eût, pu être doublée; mais la fabrication
exigeait chaque jour 120 quintaux de charbon de bois provenant des forêts
de l'Edough et dés Beni-Salah, et l'on ne put mettre à feu,
faute de combustible, le second haut-fourneau qui venait d'être
terminé ; le premier dut même être éteint pour
la même raison.
-------Le
manque de charbon est en effet, en Algérie, l'obstacle principal
de la sidérurgie. L'économie de cette industrie est telle
qu'il est préférable, en l'état actuel des choses,
de transporter le minerai de fer à proximité des charbonnages
que d'amener le charbon sur les lieux de production du. minerai.
-------Mais
un jour viendra à coup sûr où le minerai algérien
sera transformé en Algérie. Il n'est pas d'exemple en effet
que les pays producteurs ne s'outillent pour mettre en oeuvre leur propre
production. Le cas se présente, bien typique, pour les Etats-Unis,
qui tendent à utiliser tout le coton qu'ils récoltent; pour
l'Australie, qui voit naître une industrie lainière. Rien
n'empêche qu'un jour l'Algérie ne construise aussi des hauts-fourneaux,
principalement lorsque le sous-sol de la colonie, qui n'a pas encore livré
tous ses secrets, sera en mesure de fournir le charbon nécessaire.
III.
- Les combustibles minéraux
-------Jusqu'à
présent, le sous-sol, qui se montre si prodigue de produits minéraux
de toutes sortes, est plutôt avare de combustibles. C'est grand
dommage, car l'Algérie doit importer 900.000 tonnes de houille,
près de 2 millions d'hectolitres de pétrole et d'essence,
46.000 tonnes d'huiles lourdes. Elle débourse, pour cela, plus
de 280 millions de francs, et les besoins de son industrie en plein développement
ne feront qu'accroître- d'année en année les dépenses
de cet ordre.
-------Aussi
y aurait-il le plus grand intérêt à ce qu'existassent
et fussent découverts des gisements importants de combustibles
minéraux.
-------Il
n'y a là rien d'absolument impossible.
-------L'inventaire
minéralogique de 1904 concluait à l'impossibilité
de trouver de la houille en Algérie : cependant, trois ans plus
tard, on découvrait dans le Sud-Oranais, à
Kénadsa,
la présence de petites veines de charbon. Ces veines sans
importance étaient l'indice, toutefois, d'un important gisement,
actuellement en pleine activité, qui produit annuellement 1-5 à
25.000 tonnes de houille, et qui, selon les découvertes toutes
récentes, paraît se prolonger dans le Maroc.
-------On
peut donc, de ce côté-là, fonder quelques espérances.
-------Du
côté des combustibles liquides, mêmes espoirs :
la production de pétrole, à l'heure actuelle, bien
qu'assez peu développée, dépasse 3.000 tonnes.
-------C'est
peu de chose encore en regard des importations, mais, nous le répétons,
la géologie de l'Algérie est encore peu connue, celle du
Sud en particulier, et peut-être découvrira-t-on, dans un
avenir prochain, de nouvelles richesses qui permettront à l'Algérie
de se passer des combustibles de l'extérieur.
-------En
l'état actuel de la question, nous nous trouvons surtout, en Algérie,
en présence de combustibles solides de peu de valeur. Les gisements
de lignite sont nombreux, mais fournissent un combustible très
cendreux, difficilement utilisable dans l'industrie; aussi ne sont-ils
pas exploités. Reste le gisement de Kenadsa, qui produit un charbon
de terre de bonne qualité, présentant à peu de choses
près les caractéristiques du charbon demi-gras de Newport
ou de Cardiff.
-------Situé
à 25 kilomètres au Sud de Colomb-Béchar, il a fallu,
pour son exploitation, commencée en pleine guerre, en 1918, prolonger
la ligne ferrée d'Arzew à Colomb-Béchar. Les chemins
de fer Algériens de l'Etat, à qui il a été
concédé, extrayaient dès la première année
plus de 4.000 tonnes de houille. La production, à l'heure actuelle,
oscille entre 15 et 20.000 tonnes, mais l'outillage existant, très
perfectionné, permettrait l'extraction annuelle de 40.000 tonnes.
-------Le
charbon produit est utilisé pour le chauffage des locomotives du
réseau oranais des Chemins de fer algériens de l'Etat ;
revenant moins cher que le charbon anglais, il permet à cette administration
de réaliser de sérieuses économies.
-------En
ce qui concerne les combustibles liquides, de nombreux indices pétrolifères
existent en Algérie, dans tout le territoire : suintements, roches
bitumineuses, tout indique l'existence de nappes
plus ou moins importantes.
-------De
tout temps, d'ailleurs, le pétrole fut connu en Algérie;
bien avant la conquête, les pirates barbaresques calfataient leurs
vaisseaux avec les huiles minérales s'échappant de la source
d'Aïn-Zeft, dans le Dahra.
-------Depuis
1877, de nombreuses recherches ont été faites ; il est inutile
de rappeler ici tous les sondages effectués, leurs succès
et leurs insuccès. Mais ce qu'on peut constater, c'est que les
prospections n'ont jusqu'à présent porté que dans
les départements d'Oran et d'Alger, et seulement dans la région
du Dahra et du Bas-Chéliff, entre Arzew et Orléansville.
Sur deux concessions instituées dans la colonie, une seule, celle
de Messila ou Tliouanet, est en exploitation, et produit en moyenne 250
tonnes d'huile par mois, soit plus de 3.000 tonnes par an.
-------Sans
doute la production d'huile minérale pourrait-elle erre augmentée.
Mais les recherches exigent d'énormes dépenses, car les
sondages, faits la plupart du iempz à peu près au hasard,
sont excessivement onéreux ; encore ne donnent-ils pas toujours
de résultats. Cette immobilisation d'importants capitaux, qui quelquefois
sont engloutis en pure perte, est un des principaux 'obstacles à
la découverte des combustibles liquides en Algérie.
IV
- Les autres produits minéraux
-------Les
minerais métalliques - La production des
autres minerais métalliques est beaucoup moins importante que celle
du fer. Zinc, plomb et cuivre se trouvent
plus ou moins abondamment dans un grand nombre de gisements qui sont des
éléments appréciables de l'activité économique
de l'Algérie.
-------Le
zinc se trouve en Algérie sous forme de blende et de calamine.
L'extraction subit l'influence des cours mondiaux ; aussi accuse-t-elle
de fortes variations et passe-t-elle, d'une année à l'autre,
de 30 à 60.000 tonnes.
-------La
production de galène, ou minerai de plomb, varie dans des proportions
aussi considérables, de 15 à 25.000 tonnes.
-------Bien
moins importante est la production du minerai de cuivre, qui oscille autour
de 2.000 tonnes.
La plupart des minerais de plomb et certains minerais de cuivre renferment
de l'argent; la production en est d'environ 6 à 7 tonnes par an.
-------Signalons
également quelques gisements d'antimoine,
de manganèse, de mercure, d'arséniate de plomb, dont
l'exploitation est assez irrégulière.
-------L'exportation
de ces différents minéraux rapporte à l'Algérie
entre 50 et 100 millions de francs.
-------Les
produits des carrières. - L'énumération
des productions minérales ne serait pas complète. si nous
ne disions quelques mots des produits divers extraits des nombreuses carrières
de la colonie.
-------Il
faut, au premier rang, citer le kieselguhr.
Ce minéral, qui est constitué par des carapaces silicieuses
d'algues microscopiques fossiles, est connu sous différents noms
: ceux de silice fossile, de terre d'infusoires et de tripoli sont les
plus connus. -------Ses
emplois sont multiples; l'utilisation la plus ancienne est peut-être
celle de ses propriétés abrasives (qui ne raye pas), pour
la fabrication de pierre à couteau, de pâtes dentifrices
ou de produits à polir les métaux ; mais, depuis quelques
années, on utilise sa faible densité et sa capacité
d'absorption des liquides pour la fabrication de briques légères
et réfractaires et pour la stabilisation de la dynamite. -------Aussi
les emplois de plus en plus nombreux du kieselguhr ont-ils eu pour conséquence
d'accroître la production, qui dépasse actuellement 10.000
tonnes. Les débouchés sont de plus en plus considérables
; à l'heure actuelle, la France, avec 3 à 4.000 tonnes,
l'Angleterre, avec 3.000 tonnes, les EtatsUnis, avec 1.500 tonnes, la
Belgique, avec un millier de tonnes, sont les principaux acheteurs de
kieselguhr d'Algérie.
-------Le
plâtre est une autre richesse algériene
dont l'extraction n'est que depuis peu en plein développement.
Certains gypses (pierre à plâtre) d'Algérie sont aussi
beaux que le plâtre ce Paris, universellement renommé. Ils
trouvent à l'extérieur, et surtout en Extrême-Orient,
une vente de plus en plus importante. La production de gypse atteint maintenant
70.000 tonnes, dont 35.000, valant 4 millions, sont exportées.
Le plâtre expédié d'Algérie n'a pas subi de
cuisson : c'est simplement du gypse moulu. Ajoutons que les usines à
plâtre d'Algérie, qui sont au nombre d'une vingtaine, sont
en mesure de satisfaire presqu'entièrement aux besoins de la consommation
locale, qui, en raison du développement de la construction, est
de plus en plus considérable.
-------On
doit encore signaler une production de 500.000 tonnes de pierre
à bâtir, d'un millier de tonnes de marbres
et onyx, de 60.000 pavés de grés, de 3 à
4.000 tonnes de kaolin.
-------On
ne saurait manquer de souligner l'essor pris par l'industrie de la chaux
et du ciment. Une quinzaine d'établissements dont certains très
importants, emploient un millier d'ouvriers et leur production (150 à
200.000 tonnes de produits d'excellente qualité) permet de réduire
très sensiti:lement les importations de l'Algérie.
-------L'industrie
céramique compte, de son côté 25 usines (un
millier d'ouvriers) quii fabriquent toutes les catégories de briques
et de tuiles exigées par la construction moderne.
-------Nous
signalerons encore, dans la production minérale, le soufre,
dont l'extraction est d'ailleurs assez faible, et le sel.
Ce dernier produit existe en Algérie sous deux formes. soit solide,
soit en solution dans l'eau. Bien que les gisements de sel gemme soient
très considérables, leur exploitation est rendue difficile
par leur éloignement de la côte ; aussi, usqu'à présent,
à part une petite extraction indigène, n'a-t-il fait l'objet
d'aucune mise en valeur. Plus intéressants sont les marais salants
exploités dans quelques lacs salés et, pour une moindre
part, au bord de la mer. La production de sel est de 30 à 40.000
tonnes par an; 15 à 20.000 tonnes sont exportées, presqu'entièrement
en France.
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