sur site le 14-08-2003
-Les Productions algériennes : deuxième partie
LES PRODUCTIONS ANIMALES
CHAPITRE II: la pêche maritime
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DEUXIÈME PARTIE
LES PRODUCTIONS ANIMALES

CHAPITRE II
La pêche maritime

------L'Algérie possède, sur la Méditerranée, une façade longue de 1.100 kilomètres en ligne droite, dont l'étendue. compte tenu des sinuosités du rivage, atteint 1.300 kilomètres. Elle était donc, de ce fait, prédisposée au développement de la pêche maritime. La Méditerranée est, de plus, une mer chaude, peu agitée de courants, qui entretient, d'un bout de l'année à l'autre, tous les éléments végétaux ou animaux nécessaires à l'alimentation de quantités innombrables de poissons.
------En fait, elle est fort poissonneuse : les poissons migrateurs, entraînés par le courant qui, passant par le détroit de Gibraltar, déverse sans arrêt les eaux de l'Atlantique dans la Méditerranée, y arrivent en bancs serrés, entraînant à leur suite des squales ou des cétacés, parfois même des phoques. Les pêches sont souvent miraculeuses, et les barques rentrent au port pleines à craquer de poissons, ies filets rompus par l'abondance de la prise.
------On peut donc s'étonner à bon droit que, lors de l'occupation française, la pêche en mer ait été à peu près inconnue sur les côtes algériennes. Il y a à cela plusieurs raisons. Nous citerons tout d'abord l'aversion qu'éprouvait l'indigène pour la mer, aversion qui, heureusement, disparaît aujourd'hui. Et puis la côte peu découpée n'offre pas d'abris naturels; il a fallu l'intervention de la France pour que des ports soient construits à grands frais ; comment des, pêcheurs auraient-ils pu, auparavant, abriter leurs frêles embarcations dans des baies ouvertes à tous les vents et à toutes les tempêtes ? Enfin, la dernière cause tient au caractère même de la Méditerranée : c'est une mer sujette à de brusques tempêtes, des tempêtes désordonnées, rapides, qui s'arrêtent aussi vite qu'elles ont commencé, prenant au dépourvu le marin ; on les prévoit difficilement, aussi le pêcheur n'aime pas prendre la mer lorsque le temps est tant soit peu menaçant, s'il dispose surtout de barques mal amarinées. On conçoit donc que la pêche ait autrefois peu tenté l'indigène.
------Il fallait l'occupation française pour amener, assez lentement d'ailleurs, la création de cette industrie. Le développement fut peu important tout d'abord : les quelques pécheurs européens qui vinrent les premiers s'installer sur les côtes algériennes provenaient pour la plupart des plus mauvaises populations maritimes d'Espagne ou d'Italie Paresseux, arriérés, réfractaires à tout progrès, ils se contentaient de pêcher, à quelques centaines de mètres du rivage, les poissons des hauts fonds qui rapidement s'épuisèrent. Car la côte algérienne est ainsi faite qu'après un seuil de faible profondeur qui s'éloigne du rivage d'au plus 200 ou 300 mètres, la sonde révèle aussitôt des bas-fonds considérables. Le poisson blanc, qui vit sur les fonds, est donc peu abondant ; le râclage continuel de ce seuil de faible épaisseur ne pouvait donc qu'en amener la destruction
------Aussi tenta-t-on une colonisation maritime comme on avait effectué une colonisation agricole : des villages, des centres de pêche furent créés et peuplés de pêcheurs. Mais ce n'est que depuis une vingtaine d'années, depuis la création d'une inspection des pêches maritimes, que cette industrie a pris un réel développement. Outre que les pêcheurs ont été éduqués, les capitaux métropolitains se sont vivement intéressés à une production algérienne pleine d'avenir.
------La Méditerranée, en effet, dans ses zones de grandes profondeurs, contient d'inépuisables richesses en poissons de surface, ou poissons bleus : sardine, anchois, thon, maquereau, bonite, etc... Pour les pêches, il suffit de s'éloigner du rivage, mais l'emploi de navires solides et d'équipages expérimentés est nécessaire.

 

------Le développement a été rapide : à l'heure actuelle, plus de 1.000 bateaux, dont une centaine de vapeurs et de nombreuses embarcations à moteur, emploient un équipagetotal de' 4 à 5.000 hommes, dont une bonne partie est indigène. La pêche au chalut, à un ou deux bateaux, est fort pratiquée, surtout par les navires de fort tonnage mus à la vapeur ou au moyen de moteurs; c'est elle qui fournit les plus forts rendements, les trois-quarts environ du produit total.
------Les résultats, sans atteindre encore aux chiffres qu'on serait en droit d'espérer, sont néanmoins intéressants plus de 20.000 tonnes de poissons de toutes sortes sont débarquées annuellement par les pêcheurs algériens
------8 000 à 9.000 tonnes de sardines;
------2.000 à 3.000 tonnesd'anchois;
------1.000 à 1.200 tonnes de maquereaux ;
------500 à 600 tonnes de bonites ;
------100 à 200 tonnes de thons ;
------500 à 600 tonnes de crevettes ;
------20 à 30 tonnes de langoustes ;
------20 à 30 tonnes de moules et de coquillages;
------7.000 à 8.000 tonnes de poissons et de crustacés divers.
------Le rendement est encore faible ; on estime qu'il est, relativement à celui des côtes les plus épuisées d'Europe, dans la proportion de 1 à 35 ou 40.
------Quoi qu'il en soit, il permet d'alimenter l'Algérie en poisson frais pendant toute l'année; le développement des chemins de fer et des communications automobiles, en reliant rapidement le littoral aux points les plus éloignés de l'intérieur, ouvre chaque jour à la pêche des marchés nouveaux.
------Mais là ne sont pas les seuls débouchés de cette industrie. Les services maritimes rapides qui relient l'Algérie avec les pays de l'extérieur lui permettent encore d'alimenter un commerce d'exportation intéressant : un millier de tonnes de poissons frais conservés dans la glace sont expédiées annuellement à destination de la France.
------Il existe enfin, à proximité des centres de pêche, une importante industrie de transformation du poisson. 2 000 personnes environ sont employées, dans près de 150 usines, à la fabrication des salaisons et des conserves. La production atteint 4.000 tonnes d'anchois et de sardines salées et 1.000 tonnes de. conserves de sardines à l'huile ou à la tomate, de thon, de maquereau ou d'anchois.
------La production algérienne, très soignée, a acquis rapidement une réputation' excellente sur le marché. ------Aussi l'exportation des poissons conservés est-elle importante 20 millions de francs de salaisons, 10 à 12 millions de conserves (sardines en particulier).
------Le poisson n'est pas la seule production intéressante de la côte algérienne : il faut aussi citer les mollusques et les crustacés, qui pourraient faire l'objet d'une très sérieuse exportation. Quant à la pêche du corail, pratiquée sur la côte orientale, qui fut de tout temps très importante, elle est actuellement en régression marquée, car la mode n'est plus au bijou de corail; elle rapporte tout au plus, maintenant, 1 million de francs.
------La pêche rapporte à l'Algérie, du seul fait des exportations, une quarantaine de millions par an. C'est encore peu de chose quand on envisage les immenses possibilités qui lui sont offertes par une mer généreuse, riche en produits variés. Mais il ne faut pas oublier qu'elle était inexistante il y a cent ans, que la côte algérienne ne possédait pas, et n'avait jamais possédé, comme les côtes des autres pays, une population maritime aimant la mer et habituée à la pêche. Cette population, il a fallu la créer de toutes pièces, il a fallu l'éduquer, l'équiper. Les résultats obtenus en quelques années sont, on le voit, remarquables : 4 à 5.000 pêcheurs, 2.000 ouvriers employés dans les industries de transformation, l'approvisionnement de l'Algérie assuré en poisson, et une exportation de 40 millions de francs. Ils sont le plus sûr garant de l'avenir.