PREMIÈRE PARTIE
:
LES PRODUCTIONS VÉGÉTALES
------Les
caractéristiques du climat algérien ne sont pas. à
beaucoup près, celles d'un climat tropical. Bien plutôt ressemble-t-il
à celui des rives méditerranéennes tôut entières,
d'Europe, d'Asie , ou d'Afrique. C'est, avec quelques exagérations,
le climat de la Provence ou du Languedoc, le climat de l'Italie, le climat
de l'Espagne
------Aussi
ne devons-nous pas nous attendre à trouver en Algérie des
cultures très différentes de celles de France ce seront
les céréales, la vigne, l'olivier, les fruits, les légumes,
etc... Un cultivateur de France, et surtout un cultivateur du Midi, ne
sera pas dépaysé en arrivant en Algérie : au delà
de la Méditerranée, à 800 kilomètres de France,
il retrouvera encore des productions françaises ; il sera encore
en France.
CHAPITRE PREMIER
Les productions agricoles
I. - Les céréales
------De
toutes les productions algériennes, les céréales
sont à beaucoup près la plus importante. Elles constituent
la base même de l'alimentation des populations tant européennes
qu'indigènes; sans peser très sérieusement sur le
marché mondial des céréales, l'appoint de l'Algérie
n'est pas négligeable, et apporte son contingent au commerce d'exportation.
A ce titre, les céréales ont joué un grand rôle
dans le développement de la prospérité économique
du pays.
------Leur
aire de culture s'étend depuis le littoral jusqu'à la limite
des Hauts-Plateaux. Limitée autrefois à une étroite
bande de terre proche de la côte, elle a reculé peu à
peu devant l'extension de cultures plus riches, plus appropriées
à la douceur du climat : primeurs, orangeries, etc. . En s'éloignant
de la mer, la céréaliculture a trouvé, dans des régions
plus élevées, au climat plus rude, un milieu plus en rapport
avec ses besoins : c'est là, dans la dépression médiane
de l'Atlas Tellien, depuis Tlemcen jusqu'à Souk-Ahras, en passant
par les régions de Sidi-Bel-Abbès, de Médéa,
d'Aumale, de Bordj-Bou-Arréridj et de Sétif, que se rencontrent
les plus belles terres à céréales qui constituent
une des plus grandes richesses de l'Algérie. Ces terres à
céréales débordent jusque sur les Hauts-Plateaux
où le milieu est encore favorable : le Sersou, Boghari, au Nord
des Hauts-Plateaux algérois, la région de Batna, sur ceux
de Constantine, donnent encore de belles récoltes.
------Les
céréales occupent en Algérie plus de 3 millions d'hectares
; 1.400.000 sont dans le département de Constantine; 900.000 dans
celui d'Alger, 700.000 en Oranie. Les emblavures y pourraient, certainement,
être plus importantes, mais bien des terres sont encore en friches,
et, de plus, la faible pluviométrie oblige les cultivateurs à
pratiquer la jachère une année sur deux ou deux années
sur trois, c'est-à-dire à laisser improductifs la moitié
ou les deux tiers de leurs terres, pour leur permettre d'emmagasiner l'eau
nécessaire à la vie de la plante.
------L'irrégularité
du climat algérien, les variations extrêmes du régime
des pluies exercent une très grande influence sur la production
des céréales : en bonne année, si les pluies ont
été suffisantes, on récoltera 20 millions de quintaux
de grains ; si elles ont été exceptionnellement abondantes
et bien réparties, la récolte atteindra et pourra même
dépasser 25 millions de quintaux. Si l'année a été
particulièrement mauvaise, les pluies rares et peu importantes,
la production pourra tomber à 10 millions, parfois même descendre
au-dessous de ce chiffre. Ces variations considérables sont heureusement
assez rares ; tout au, plus se sont-elles produites quatre ou cinq fois
pendant les vingt dernières années. Mais elles sont la cause
que l'Algérie, qui exporte annuellement 4 à 5 millions de
quintaux, parfois plus, peut devenir importatrice après une récolte
déficitaire.
------Les
faibles productions, au surplus, seront de-plus en plus l'exception. Les
procédés perfectionnés de culture tendent, en effet
à se généraliser, non seulement chez les colons,
mais chez les cultivateurs indigènes. Ceux-ci, longtemps réfractaires
à l'adoption de nouvelles méthodes, ont dû, en présence
des résultats meilleurs et plus réguliers obtenus par les
Européens, se rendre à l'évidence. Ils abandonnent
de plus en plus leurs primitifs instruments de culture pour des instruments
d'un meilleur rendement ; l'emploi des engrais s'intensifie ; enfin, les
labours préparatoires, qui consistent à maintenir la jachère
en parfait état de propreté et d'ameublissement, sont chaque
année plus importants.
------Car
les trois quarts des cultures de céréales appartiennent
aux agriculteurs indigènes ; mal cultivées, ces terres ont
des rendements irréguliers, qui influent sérieusement sur
la production totale; bien cultivées, elles fourniront une récolte
plus abondante et moins sujette à variations. Sur 2 300.000 hectares,
les indigènes produisent 12 à 13 millions de quintaux ;
sur 800.000, les Européens en récoltent 7 à 8 millions
; pour les premiers, le rendement est de 4 à 5 quintaux à
l'hectare, pour les seconds de 8 à 10. Lorsque les cultures indigènes
produiront autant que celles des colons, ce n'est pas 15 à 20 millions
de quintaux que l'Algérie produira en moyenne, c'est au bas mot
25 millions. On aperçoit tout de suite l'importance que peut acquérir
dans l'avenir la culture des céréales en Algérie
: la valeur de la production passerait de moins de 2 à plus de
3 milliards, la valeur des exportations de 500 millions à 1 milliard
au moins.C'est à cet accroissement des rendements par l' éducation
agricole que s'emploie activement l'Administration algérienne,
puissamment aidée dans cette tâche par les colons européens.
Les résultats acquis sont déjà considétables,
mais il reste encore beaucoup à faire : à un accroissement
de la production correspondra un accroissement du bien-être des
populations indigènes.
------Nous
passerons maintenant en revue les principaes céréales cultivées
en Algérie.
------Blé.
- Le blé couvre chaque année une superficie très
voisine d'un million et demi d'hectares. , C'est la plus importante des
céréales algériennes, puisque près de la moitié
des emblavures lui sont consacrées. La production atteint en moyenne
7 à 8 millions de quintaux, mais peut, dans les mauvaises années,
descendre au-dessous de 5 millions, et, dans les bonnes années,
approcher 10 millions.
------Deux
catégories de blé sont cultivées en Algérie
: le blé dur, qui domine, et le blé tendre.
------Blé
dur. - On peut estimer à 1.200.000 hectares les superficies
consacrées au blé dur. C'est par excellence une culture
indigène, car il est particulièrement adapté au milieu.
à la chaleur et au manque d'humidité.
------La production
annuelle atteint en moyenne 6 millions de quintaux et oscille entre 3
et 7 millions.
------Les
semoules de blé dur algérien, et particulièrement
celles de la région de Médéa, des plateaux de Sétif
et de la plaine du Chéliff, sont de toute première qualité.
Les fabriques de pâtes alimentaires du monde entier les recherchent
et les exportations algériennes de blé dur, sous forme de
grains ou de semoules, approchent 1 million et demi de quintaux.
------Est-il
besoin d'ajouter que le couscous, qui est à la base de l'alimentation
des indigènes, pour lesquels il remplace le pain, n'est autre que
de la semoule de blé dur ?
------La culture
du blé dur a fait naître en Algérie une importante
industrie : celle des pâtes alimentaires. C'est une branche très
prospère de l'économie algérienne, qui non seulement
suffit aux besoins de la consommation locale, mais encore fournit à
l'exportation un contingent de 15 à 20.000 quintaux valant plus
de 6 millions de francs.
------Blé
tendre. - Contrairement au blé dur, le blé
tendre est surtout une culture européenne. Les superficies, de
ce fait, sont plus faibles, et oscillent autour de 300.000 hectares. Mais
aussi les rendements sont plus élevés, et la production
est supérieure à 2 millions de quintaux, avec des minima
dépassant à peine 1 million et des maxima approchant 3 millions.
------Les
blés tendres d'Algérie, en raison de leur précocité,
sont très demandés sur les marchés de consommation.
Ce sont en quelque sorte des blés de primeur que la minoterie recherche
dès leur apparition, car ils sont un précieux appoint à
l'époque de la soudure, au moment où s'épuisent les
stocks provenant de la dernière campagne et où n'ont pas
encore été récoltés les blés en terre.
Outre leur qualité, qui est excellente car ils sont très
riches en gluten - c'est leur précocité qui en fait la réelle
valeur économique.
------Bon
an mal an, l'Algérie en exporte 2 à 300.000 quintaux, mais,
la production étant insuffisante pour satisfaire aux besoins locaux,
doit en échange importer 400.000 à 500.000 quintaux.
------Orge.
- L'orge occupe 1.300.000 à 1.400.000 hectares, soit
à peu près autant que blés dur et tendre. réunis.
La production, pour la raison que la culture en est presqu'exclusivement
entre les mains des indigènes, est extrêmement variable ;
elle peut tomber à 4 millions de quintaux ou dépasser 11
millions ; mais elle est, en année normale, de 7 millions de quintaux.
------Le motif
de la faveur dont jouit l'orge auprès des cultivateurs indigènes
réside dans sa grande rusticité et son aptitude à
s'adapter à des milieux trop arides pour le blé. Elle est
employée en grande partie dans l'alimentation des autochtones et
dans celle de leurs animaux. Mais ce n'est pas le seul emploi de l'orge
d'Algérie : un important débouché lui est réservé
pour la fabrication de la bière, à laquelle elle convient
tout particulièrement. Un million de quintaux d'orge sont exportés
d'Algérie, principalement pour cette utilisation.
------Avoine.
- La culture de l'avoine, bien que moins importante que celle
des autres céréales, n'en couvre pas moins 250.000 hectares,
dont plus des deux tiers sont ensemencés par les colons européens.
Elle tend d'ailleurs à prendre de l'extension, car ses débouchés
s'accroissent chaque jour, tant dans la colonie qu'en France et à
l'étranger.
------En année
moyenne, la production atteint 2 millions de quintaux; à part 1es
récoltes déficitaires enregistrées dans années
qui ont suivi la guerre, elle s'écarte assez peu de ce chiffre
moyen.
------Le sixième
environ de cette production (2 à 300.000 quintaux) est exporté
en France et à l'étranger.
------Autres
céréales. - Le blé, l'orge
et l'avoine sont des céréales d'hiver, c'est-à-dire
des céréales semées à l'automne ou au début
de l'hiver; il faudrait, pour être exact, y ajouter le seigle ;
mais les faibles uperficies qui lui sont consacrées- à peine
un millier d'hectares - en font une culture négligeable, que nous
ne citerons que pour mémoire.
------Il en
serait un peu de même des céréales d'été,
semées au printemps lorsque les pluies ont été favorables.
Elles couvrent au total - maïs, sorgho et millet - une vingtaine
de mille hectares. Leur culture est d'ailleurs, depuis la guerre, en régression
marquée.
II-
La vigne et le vin
------Une autre
richesse est pour l'Algérie la culture, de la vigne. On ne saurait
nier la répercussion qu'a eue, dans le développement de
l'Algérie, la constitution du vignoble, consécutive à
la crise phylloxérique de 1880. Cette culture, rémunératrice
surtout au moment où le vignoble métropolitain voyait, par
les attaques du phylloxéra, . diminuer sa superficie et sa production,
ne pouvait que s'étendre en Algérie, où elle trouvait
un milieu éminemment favorable. Aussi la superficie du vignoble
algérien passait-elle de 23.000 hectares en 1880 à 123.000
en 1896.
------C'était
un attrait nouveau pour la colonie : hommes et capitaux, séduits
par cette industrie agricole rémunératrice, affluèrent
à cette époque en Algérie. " C'est
elle, a-t-on dit qui a déclenché en quelque sorte la prospérité
magnifique dont la colonie, après avoir longtemps végété,
jouit depuis une trentaine d'années. "
|
|
------Mais
bientôt le phylloxéra faisait là aussi des ravages
en 1917, 94 % du vignoble était contaminé. La reconstitution,
toutefois, s'opérait rapidement au moyen de portegreffes américains
et l'essor de la vigne, un instant arrêté, reprenait de plus
belle.
------On compte
actuellement 250.000 hectares de vignes, dont 226.000 seulement sont en
'production ; la différence représente les vignes phylloxérées
non encore reconstituées et les jeunes plantations qui ne sont
pas entrées en production. I1 semble que la superficie du vignoble
algérien ne doive guère dépasser maintenant 250.000
hctares ; le chiffre de 300.000 paraît être un extrême
maximum, car les terres à vignes sont plutôt limitées.
------L'aire
de la vigne s'éloigne assez peu du littoral ; tout au plus son
extrême limite méridionale dépasse-t-elle une centaine
de kilomètres. Elle correspond à peine à l'aire de
dispersion de l'olivier.
------La culture
s'étend, dans le département d'Alger, sur 85.000 hectares,
dans la Mitidja, le Sahel, et dans les régions de Miliana, de Médéa
et d'Aïn-Bessem. ------La
production atteint en année moyenne 5 millions d'hectolitres de
vin.
------En Oranie,
on compte un peu moins de 125.000 hectares de vignes, répartis
dans le Sahel et la plaine d'Oran et dans les régions de Mostaganem,
de Tlemcen, de Sidi-BelAbbés et de Mascara. Ils fournissent 5 à
6 millions d'hectolitres.
------Dans
le département de Constantine, la superficie dépasse à
peine 17.000 hectares, s'écartant assez peu de la côte régions
de Bougie et de Djidjelli, plaines de Bône et de Philippeville.
La production moyenne s'établit autour d'un million d'hectolitres.
Les vins algériens, au point de vue de leurs qualités, peuvent
être classés en trois catégories
------les
vins de plaine, titrant 9 à 12° d'alcool, qui peuvent
être utilisés comme vins de table, mais que le commerce métropolitain
emploie en grande quantité pour le coupage des vins des vignes
à grand rendement du midi de la France;
------les
vins de coteaux, dont le degré
alcoolique est de 11 à 13°, et qui sont d'excellents vins de
table d'une bonne conservation ;
------les
vins de montagne, contenant de 12 à
15° d'alcool; ce sont des produits parfaitement constitués,
de bonne conservation, qui peuvent acquérir, après plusieurs
années de bouteille, des qualités remarquables de finesse
et de bouquet.
------Certains
de ces vins, bien que n'étant pas classés parmi les grands
vins, ont su, grâce à leur finesse, à leur bouquet,
acquérir une place appréciable sur la table des connaisseurs
tels sont, pour n'en citer que quelques-uns, les Médéa,
les Mansourah, les Mascara, etc...
------Mais
ce n'est pas à ce titre que les produits d'Algérie ont une
importance. considérable dans le marché des vins. Ils la
tirent surtout de leur richesse alcoolique, de leur robustesse et de leur
couleur qui en font des vins de coupage recherchés
pour améliorer certains vins métropolitains. Le marché
de Bercy en fait une consommation considérable, trois à
quatre millions d'hectolitres peut-être, si l'on s'en rapporte
aux seules importations par le port de Rouen.
------C'est
d'ailleurs vers la France qu'est dirigée la plus grande partie
des exportations algériennes ; le marché français
absorbe 7 à 8 millions d'hectolitres de vins d'Algérie;
le surplus est expédié vers l'étranger (Suisse, Allemagne,
etc...) et vers les colonies. Quant à la consommation locale, elle
ne dépasse guère 1 million et demi à 2 millions d'hectolitres,
car elle est limitée à la population
européenne, les indigènes musulmans ne pouvant, conformément
aux prescriptions du Coran, boire de boissons alcooliques.
------Mais
le vin n'est pas le seul produit commercial de la vigne. Il faut citer
les mistelles, qui font l'objet, surtout
dans le département d'Oran, d'une importante fabrication.
-----Ce sont des
moûts dont la fermentation a été arrêtée
par addition d'alcool; ces vins, d'un degré alcoolique très
faible, sont employés dans la préparation des vins de liqueur
et de certains vins médicinaux. Une partie est utilisée
sur place et sert à fabriquer des vins de liqueur dont la qualité
a été reconnue ; le reste est exporté. Mistelles
et vins de liqueur alimentent un commerce d'exportation de 45 à
50 millions de francs (100.000 hectolitres de mistelles et 5 à
10.000 de vins de liqueur).
------On retiendra
également que la distillation des vins et des marcs fournit des
quantités variables d'alcool, dont l'importance est proportionnelle
à la production des vins. La distillerie joue, pour la viticulture
algérienne, le rôle de soupape de sûreté, en
permettant, après une récolte pléthorique, d'utiliser
les vins mal constitués qui nc trouveraient pas de débouchés
dans l'exportation.
------Signalons
enfin la production des tartrates et, depuis
quelques années, celle de l'huile de pépins
de raisins.
------On juge,
par ce rapide exposé, de la valeur économique de la vigne.
Pour conclure, on doit reconnaître que les produits de la vigne.
- vins, mistelles, alcools, tartrates, etc... - rapportent à l'Algérie,
du chef de la seule exportation, 1 milliard et demi, soit plus des quatre
dixièmes de la valeur des exportations totales de la colonie.
III.
- L'olivier, les olives et l'huile d'olive
------L'oléiculture
n'est pas une des moindres richesses de l'Algérie; c'est la plus
ancienne peut-être. Elle fut introduite par les Carthaginois, bien
avant l'ère chrétienne ; les Romains la développèrent
à tel point qu'il semble que c'est plutôt par ses huiles
que par ses céréales que l'Afrique romaine mérita
son nom de " Grenier de Rome
". Pendant la période barbaresque, l'Algérie exportait
de grandes quantités d'huile; enfin, dès les premières
années de la conquête, la colonisation française contribua
largement à son amélioration et à son extension.
------L'olivier
est d'ailleurs, dans tout le bassin méditerranéen, une plante
spontanée. L'oléastre, qui est sa forme sauvage, se rencontre
à l'état d'essence dominante, ou en mélange avec
d'autres essences, sur de vastes territoires forestiers; son greffage,
qui se fait couramment, permet la mise en valeur de forêts ou de
broussailles à peine productives.
------Cet
arbre, dans le bassin méditerranéen, se complaît dans
les climats à hiver doux et pluvieux et à étés
chauds et secs. Aussi peut-on considérer que le Tell algérien,
dans toutes les altitudes comprises entre 50 et 700 mètres, constitue
son aire de végétation. En Kabylie, il se rencontre, jusqu'à
1.000 mètres d'altitude, sur quelques versants montagneux tournés
vers la mer. Dans la partie orientale de la colonie, l'aire de l'olivier
se prolonge sur les Hauts-Plateaux, depuis Constantine jusqu'à
Batna, les basses vallées de l'Aurès et Biskra.
------On ne
compte pas moins, dans toute l'Algérie, de 14 à 15 millions
d'oliviers, dont les deux tiers environ sont cultivés. Plus de
la moitié des peuplements (7 à 8 millions d'arbres, dont
plus des deux tiers sont en culture) se trouvent dans le département
de Constantine, répartis dans les vallées de Soummam et
de la Seybouse, d'El-Kantara à Philippeville, à Gastu et
à Jemmapes, et dans les régions de la Galle, Batna, Guelma
et Tebessa.
------Le département
d'Alger compte seulement 4 millions et demi d'arbres répandus dans
toute la Kabylie ; la proportion d'arbres cultivés est plus faible
que dans le département de Constantine, et n'est guère supérieure
aux trois cinquièmes du total.
------Les
peuplements sont moins importants encore en Oranie et n'atteignent pas
2.400.000 arbres. On les rencontre en particulier à Mostaganem,
à Saint-Denis-du-Sig, à Mascara,
à Relizane et surtout Tlemcen où ils constituent une véritable
forêt. Là, l'effort de mise en valeur des oléastres
a été moins considérable, car on ne compte qu'un
million d'oliviers cultivés.
------Grâce
aux bénéfices que procure l'olivier, grâce aussi à
l'aide de l'administration, qui encourage par des primes les greffages
et les plantations, l'essor de l'oléiculture est remarquable; tout
permet de croire qu'il n'est pas près de s'arrêter : depuis
1913, le nombre d'oliviers s'est accru de plus d'un million d'unités,
et cela malgré la guerre; en une année, de 1928 à
1929, cent mille arbres étaient greffés,
cinquante mille étaient plantés.
------Bien
qu'elle ait été à l'origine une culture indigène,
l'oléiculture tente de plus en plus les agriculteurs européens,
qui possèdent maintenant les deux cinquièmes des arbres
- 5 à 6 millions d'oliviers, dont les sept dixièmes (4 millions)
sont cultivés ; la proportion est importante ; elle s'accroîtra
encore. ------L'augmentation
est beaucoup plus lente dans les
peuplements appartenant à des indigènes ; les trois
cinquièmes seulement des arbres (5 millions et demi) sont susceptibles
de produire.
------Sur
les 9 à 10 millions d'oliviers cultivés, un certain nombre,
nouvellement plantés ou greffés, ne sont pas encore entrés
en rapport ; les autres, 7 à 8 millions, fournissent chaque année
une quantité d'olives variant entre 1 million et demi et deux millions
de quintaux : le département de Constantine en produit à
lui seul 1 million, celui d'Alger 4 à 500.000, celui d'Oran 2 à
300.000.
------L'olive
est employée à deux usages, dont le plus important est la
fabrication de l'huile, l'autre la conserve.
------C'est
surtout vers la production d'huile qu'est orientée l'oléiculture
algérienne : 90 % de la récolte sert à cette industrie
très active, qui compte plusieurs centaines de moulins, dont plus
de cent sont de véritables usines dotées des appareils les
plus perfectionnés. La production d'huile, qui est très
variable, puisque, en ces quinze dernières années, on l'a
vu osciller entre 150.000 et 500.000 hectolitres, s'établit en
moyenne autour de 300.000 hectolitres.
------La majeure
partie de cette production est employée dans la consommation locale
; les indigènes ne connaissent pas d'autre aliment gras ; quant
à la population européenne, originaire en grande partie
du midi de la France, d'Italie
ou d'Espagne, elle en absorbe une grande quantité. ------Le
surplus est exporté ; les deux tiers vont en France ; l'Italie,
l'Angleterre, les Etats-Unis, le Maroc, la Tunisie se partagent le reste
avec l'Allemagne, la Hollande, la Bulgarie, la Grèce, l'Extrême-Orient
et l'Amérique du Sud. Mais la production algérienne ne serait
pas suffisante pour satisfaire aux besoins de la consommation d'une part,
à ceux de l'exportation d'autre part, car on évalue la consommation
annuelle d'un kabyle à 15 litres, celle d'un Européen à
12, celle d'un Arabe à 2,5; aussi l'Algérie doit-elle importer
chaque année 150 à 200.000 quintaux d'huiles de graines.
Elle réalise à cette opération un beau bénéfice,
car les huiles de graines sont moins chères que les huiles d'olives,
bénéfice qu'on peut évaluer de 80 à 100 millions
par an.
------L'industrie
de la conserve présente aussi un sérieux intérêt,
bien qu'elle soit loin d'avoir l'importance de l'huilerie.
------Elle
utilise environ 150.000 quintaux d'olives par an. Une centaine de mille
(près du tiers de la récolte totale d'olives du département)
sont produits en Oranie, où existent de nombreuses fabriques de
conserves ; les terres irriguées de Relizane, du Sig, de Perrégaux
et de Tlemcen sont les régions de production de ces olives. Dans
le département d'Alger, on récolte 40.000 quintaux, dans
celui de Constantine, un peu plus de 10.000. Les populations algériennes,
et notamment les Espagnols et les Italiens, font une importante consommation
d'olives conservées; il reste néanmoins 20 à 30.000
quintaux libres pour l'exportation, et qu'achète surtout la France.
------Les
exportations algériennes d'huiles et de conserves d'olives ont
atteint, en 1928, 176 millions.
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