Bou Haroun,
village d'Algérie.
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-------La
côte algérienne est presque rectiligne, si ce n'est quelques
petites criques entourées de falaises abruptes dont le fond est contitué
de plages de sable. -------L'anse de Bou-Haroun ne fait pas exception, ouverte vers le nord, le mouillage en eau profonde y étant exclu, sa plage contraint depuis toujours les pêcheurs à "pousser" chaque matin leurs bateaux avant de prendre la mer. Le soir, ils les "tirent" à terre pour les mettre hors d'atteinte des grosses vagues déferlantes. -------Pratiquée depuis l'Antiquité, la pêche du corail, très florissante amenait sur les côtes d'Algérie des pêcheurs siciliens et napolitains. A la fin du siècle dernier, Antoine Pilato était à Bou-Haroun, le dernier à pratiquer la pêche du corail blanc, moins apprécié que le corail rose ou rouge pêché au large de la Calle et de Collo. -------Du temps des Turcs, des pêcheurs espagnols, napolitains et siciliens pratiquaient déjà une pêche au poisson bleu. C'était une pêche saisonnière. Ces communautés étaient alors tolérées, mais non protégées. Arrivant sur la côte en été à bord de tartanes chargées de sel de Trapani pour la conservation du poisson, elles repartaient avant le retour de l'hiver. -------En 1830, il n'y avait sur ce site dénommé " Haouch ez Zaouia" que des palmiers nains et des fourrés de capriers. Les lieux étaient inhabités. Bou-Haroun n'existait pas, la présence de nombreuses koubas maraboutiques dont celle du vénéré "Bon Haroun" située dans un ravin est probablement à l'origine du nom du village. D'abord simple hameau de Tefeschoun, le village est situé entre ce ravin et celui de Sidi-Hassine, plus connu sous le nom de "Ravin des voleurs". -------A cette époque, l'Algérie se trouvait au confluent de plusieurs courants migratoires. -------Dès le 6 juin 1831, Ferrer Jéronomo, originaire de Calpé arrive à Bou Haroun, les hommes viennent seuls, ils s'abritent à côté de leur bateau, dans de pauvres cabanes de roseaux ou de planches ou parfois dans des grottes. La sécurité s'améliorant les femmes ne tardent pas à les rejoindre, contribuant à l'amélioration de leur confort ménager. De nombreuses familles originaires d'Espagne continentale et des îles Baléares, notamment de l'île de Minorque éprouvée par une sévère crise économique, arrivent sur la côte. -------Bien connu des Italiens du royaume des Deux-Siciles, le littoral voit arriver des émigrants originaires de la région de Naples et des îles de Procida et d'Ischia dont l'économie était complètement ruinée par le séisme de 1883. Un membre de la famille Rotolo aurait été le premier à tirer son bateau sur la plage de Bou-Haroun. Il y sera suivi par beaucoup d'autres. -------Installés sommairement dans de petites maisons édifiées sur le domaine maritime, peu mobiles, ayant de nombreux enfants et de vieux parents, ces hommes habitués aux caprices de la Méditerranée, à ses redoutables grains accompagnés de grosses pluies orageuses, résistent aux difficiles conditions de vie et de travail sur leurs palangriers. -------En 1903, la pénurie de sardines sur les côtes bretonnes incite les deux frères Thimothée et Jean-Guillaume Ampart à se fixer à Bou-Haroun après avoir apprécié les qualités des marins-pêcheurs d'origine espagnole et italienne. Connaissant bien leur métier de conserveur et maîtrisant parfaitement les techniques de préparation et d'emboîtage, ils ouvrent en 1909 leur première usine. Deux hameaux : un seul coeur -------Les habitations construites au début du XX° siècle sur la falaise et sur la propriété de M. Guillaume Prats sont plus connues sous le nom de village Prats ou de la Fermette, judicieusement qualifiée par M. Maurice Pons de noyau historique de Bou-Haroun. -------Un peu plus bas sur la plage, le hameau maritime abritait des pêcheurs originaires d'Espagne et d'Italie dont la plupart ont opté pour la nationalité française. Leurs enfants font leur service militaire dans la Marine nationale ou dans l'Armée d'Afrique. En 1904, soixante dix-huit familles sont encore indûment installées de façon précaire sur la plage. Beaucoup sont pauvres, mais cette pauvreté n'engendre pas la misère. Les hommes travaillent avec acharnement et en dépit de rudes conditions d'existence, "ils tiennent là où d'autres abandonnent". Ils sont alimentés par un puit et par deux sources, dont l'eau est saumâtre dès que les vagues déferlent sur la plage. Le débit de deux sources captées sur la propriété de M. Prats sera dirigé vers le village par une conduite installée sur sa propriété. M. Prats s'engage par écrit à autoriser sans indemnité la pose ainsi que tous les travaux qui seront entrepris utérieurement pour l'entretien de cette conduite. -------Enfin, ils n'ont toujours pas de port et doivent dès trois ou quatre heures du matin pousser leurs palangriers à la mer et le soir les tirer à terre en rentrant dans l'eau glacée jusqu'à la poitrine. Pour le préfet d'Alger, ces hommes sont à l'origine d'une ressource et d'une industrie de conserveurs salaisonniers. C'est donc au plus vite "qu'il faut les fixer en leur faisant engager leurs capitaux dans la colonie". -------En conséquence, trente-huit familles de pêcheurs ayant pris la nationalité française sont installées sur douze hectares expropriés sur les bonnes terres agricoles de M. Chabert-Moreau. Des lots à bâtir sont vendus aux pêcheurs, avec étalement du paiement sur dix ans moyennant un intérêt de 5%. Vers 1905 et après plus de trente années d'attente, les pêcheurs Bou-Harounais peuvent enfin acheter un terrain sur la falaise pour y construire leur petite maison. L'ouverture sur les petits métiers de la pêche -------En raison de la précarité du mouillage et en l'absence de port, les pêcheurs de Bou-Haroun, n'utilisent que des embarcations de faible tirant d'eau. Les "bateaux boeufs", les "pareilles" à voile qui traînaient le filet sont remplacés par des chalutiers à moteur. -------Enfin, même si depuis 1940, les cabestans sont équipés d'un moteur à explosion, les pêcheurs n'utilisent que de légères embarcations susceptibles d'être hallées le soir sur la plage et poussées le matin à la mer. Alors qu'il n'y avait en 1830, aucun pêcheur algérien sur ce littoral ; en 1900 Echaïb ou Echaïba Mohamed était le premier à s'intéresser à cette activité à Bou-Haroun et environs. Il sera suivi par beaucoup d'autres patrons pêcheurs, englobés dans ce que l'on appelle toujours "les petits métiers". Kabyles ou Arabes acquièrent palangriers et "lamparos" sur lesquels ils s'empressent de graver au feu, une main aux doigts largement écartés, sans changer le nom du bateau. Bou-Haroun au fil des grands
évènements du XXe siècle Edgar Scotti ------ |