sur site le 27/03/2002
-Bab el Oued
extrait de " aux échos d'Alger, décembre 1988, n°24 "
-Le faubourg d'Alger qui symbolise le petit peuple algérien d'origine européenne, que l'on désigne communément sous le sobriquet de "pieds-noirs", Bab-el-Oued doit son nom a une porte du vieil Alger et un ruisseau qui coulait aux abords de cette porte. La porte s'ouvrait dans le rempart nord de la ville a peu près entre ce qui est aujourd'hui la caserne Pélissier et le lycée Bugeaud...
auteur du texte : inconnu
illustrations : collections Francis et Bernard

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BAB-EL-OUED

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------Le faubourg d'Alger qui symbolise le petit peuple algérien d'origine européenne, que l'on désigne communément sous le sobriquet de "pieds-noirs", Bab-el-Oued doit son nom a une porte du vieil Alger et un ruisseau qui coulait aux abords de cette porte. La porte s'ouvrait dans le rempart nord de la ville a peu près entre ce qui est aujourd'hui la caserne Pélissier et le lycée Bugeaud.

porte "Bab-el-Oued" en 1830-
porte "Bab-el-Oued" en 1830------

-----L'oued coulait des hauteurs de la Bouzaréah à travers le ravin qui s'appelle aujourd'hui le Frais Vallon. Il s'appelait l'Oued M'kacel, et la porte de l'Alger Turc qui ouvrait sur le ruisseau s'appelait tout naturellement la porte du Ruisseau, soit la porte de l'Oued, donc Bab-el-Oued.

-----Bab-el-Oued était la " Porte déshéritée " d'Alger. Elle ouvrait sur les dépôts d'ordures et les cimetières. Quand les Français furent entrés à Alger dans la matinée du 5 juillet 1830, on installa les troupes dans les locaux des bagnes désormais vidés des esclaves qui y étaient enfermés, et dans les casernes des janissaires ou plus simplement dans les bivouacs. Les états-majors réquisitionnèrent les palais officiels et les luxueuses villas des "raïs " dissimulées dans les jardins et les vergers de Mustapha au sud d'Alger. Les cabaretiers et les truands allèrent rejoindre tout naturellement au bord de l' Oued M'kacel la foule des coupe-jarrets qui y vivaient déjà un peu en marge des règlements de police du Dey d'Alger.

----- Puis, pendant que le baron de Vialar tentait les premiers essais de colonisation de la Mitidja avec l'aide officielle de Clauzel et de Bugeaud, commencèrent à affluer à Alger tout ce que la Méditerranée comptait d'aventuriers efflanqués, attirés par la perspective de faire fortune en Afrique. C'étaient des pêcheurs napolitains, des maraîchers mahonnais, des laitiers maltais ou des carriers de Valence. Justement, Alger brusquement grossie par la présence du corps expéditionnaire d'administration, avait besoin de poissons, de légumes et de lait. Elle avait surtout besoin d'un port on entreprit de le construire avec les pierres d'une carrière qui se trouvait au bord de l'oued M'kacel et la vie du futur faubourg s'organisa autour de la carrière la Cantera, le plus vieux quartier de Bab-el-Oued.

les carrières de Bab-el-Oued
les carrières de Bab-el-Oued

-----Puis, naquirent La Bassetta autour du bassin où l'on faisait boire les chevaux qui tiraient les lourds convois autour de la pompe où l'on puisait l'eau et enfin autour du moulin ou des Messageries d'où partaient les diligences et dont le nom français prouve déjà que Bab-el-Oued avait cessé d'être un faubourg exclusivement espagnol, italien, mahonnais ou maltais. Quand Bab-el-Oued eut une gare, il sut qu'il avait cessé d'être un village, et qu'il était déjà une ville dont la population avait, en moins de cinquante ans, dépassé celle de villes métropolitaines célèbres depuis plusieurs siècles. Une telle promotion était incompatible avec la présence du ruisseau nauséabond qui coulait entre la Bassetta et le "Bain des familles ", cette plage qui borde les quartiers voisins du cimetière et que le génie espiègle des latins de Bab-el-Oued a baptisée Consolation, on couvrit donc l'Oued M'kacel qui disparut ainsi d'abord de la vue des habitants de Bab-el-Oued puis de la mémoire des générations suivantes au point qu'il n'est pas un "pied-noir" sur dix mille qui en garde le souvenir.

 

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la gare de Bab-el-Oued

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la plage des familles

 

-Couverture CAGAYOUS, pas de lien avec une autre page.
Couverture du livre

-----Le faubourg était prêt pour entrer dans la légende. Un petit fonctionnaire - sorte de Courteline africain - qui s'appelait Robinet et se forgea le pseudonyme à la fois aimable, poétique et sentimental de Musette, les lui ouvrit toutes grandes et du même coup lui offrit un héros Cagayous Par la grâce de Musette l'argot du faubourg atteignait à la dignité d'uns langue, et il ne fut pas un" Ouallioune " de Bab-el-Oued qui ne se reconnut en Cagayous.

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On dit qu'il "n'est bon bec que de Paris " Il n'en est pas de meilleur en Afrique que de Bab-el Oued. La confrontation serait passionnante. Il y faudrait une langue commune au Poulbot et au Ouallioune. Mais Bab-el-Oued, c'est indiscutablement une sorte de Montmartre algérois, et pour que le rapprochement soit plus vraisemblable, le coeur de Bab-el-Oued est la place Dutertre en souvenir du défenseur de Sidi-Brahim.
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Cependant Bab-el-Oued ce n'est pas seulement ce faubourg où vit La famille Hernandez de Geneviève Baïlac, ce n'est pas seulement cette ville qui sent les parfums mêlés du vent de mer et des fumées qui montent des braseros sur lesquels on fait griller des sardines, cette ville où l'antique noblesse héritée des races latines incline les hommes à dissimuler les misères de 1a condition humaine derrière l'insolent défi d'un éclat de rire. C'est une ville synthèse, un creuset miraculeux, au fond duquel se sont lentement fondues dans le nom français toutes les races de la Méditerranée que n'aveuglaient pas la haine raciale et l'intransigeance religieuse. Et c'est dans ce miracle et cette leçon que se fonde la véritable grandeur de Bab-el-Oued.