Alfred Chataud
Portrait d'Alfred Chataud par Fritz Muller, Musée national
des Beaux-Arts d'Alger, 1937.
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Placée sous le haut patronage
du gouverneur général Georges Le Beau, une exposition
d'oeuvres du peintre Alfred Chataud a été présentée,
en 1937, au Musée national des beaux-arts d'Alger. Elle avait
été organisée par Jean Alazard, avec la collaboration
de Max-Pol Fouchet, attaché à ce musée. Plus de
la moitié des oeuvres présentées avaient été
prêtées par M. Frédéric Lung. Cette exposition
réunissait environ cent vingt toiles, aquarelles et gouaches
ainsi que des dessins.
Alfred Chataud, né à Marseille le 17 août 1833,
était le fils du directeur du Comptoir d'Escompte; sa mère
était originaire de la Louisiane. Ils auraient souhaité
voir leur jeune fils faire carrière dans une compagnie d'assurances.
Alfred Chataud a d'ailleurs été employé, quelque
temps, à la Compagnie nationale de Paris.
Cependant, il avait pris des leçons avec le peintre Émile
Loubon (18091863) qui fut directeur de l'École pratique de dessin
de Marseille. Il décide d'abandonner son poste dans les assurances
et travaille, à nouveau, avec Loubon de 1857 à 1860. On
le retrouve ensuite à Paris dans l'atelier de Charles Gleyre
(1806-1874), professeur à l'École des beaux-arts de 1843
à 1870.
En 1856, il effectue son premier voyage en Algérie. Il y reviendra
souvent. Il expose notamment à la galerie Charpentier et au Salon
des artistes français. En 1885, il se fixe à Mantes dont
il dessinera la cathédrale; puis en 1892, il vient s'installer
près de Sidi-Moussa dans une petite propriété dont
il a hérité. Il a d'ailleurs réalisé deux
superbes dessins de cette propriété: " Intérieur
de la ferme de Chataud à SidiMoussa ".
L'Algérie devient donc sa province d'adoption. Il est principalement
attiré par les vieux quartiers d'Alger: " Cour de la bibliothèque
nationale ", " Intérieur de la mosquée de Sidi
Abd Er Rhaman ", " Rue voûtée du vieil Alger
", " Tente de moutchou, rue Porte-Neuve à Alger ",
" Rue du vieil Alger ", " La boutique aux jasmins-Alger
", " La rue Médée à Alger "...
Mais il a également été séduit par le charme
de Tlemcen : " Entrée du tombeau de Sidi Bou Médine
à Tlemcen ", " Un coin de Sidi Bou Médine ",
" Une porte à Tlemcen ", " Rue à Tlemcen
"...L'artiste aime le décor arabe, les lignes sinueuses,
la forme d'un bijou ou d'une lampe ainsi que les objets: " Lanterne
de la mosquée de Sidi Bou Médine à Tlemcen ",
" Épingle de femme arabe ", " Pressoir à
huile ", " Selle arabe ", " Étude de narguileh
"...
Il admire les visages, les attitudes et les expressions qu'il sait saisir
avec un rare bonheur: " Femmes arabes à la fenêtre
", " La danseuse ", " Étude d'enfants ",
" Arabe buvant à une gargoulette ", " Mauresque
à la cruche ", " Arabe portant un plat "...
Alfred Chataud est sensible aux sons, à la musique et aux instruments:
" Musicien nègre au rebec ", " Musiciens ",
" Les musiciens nègres ", " Mauresque à
la derbouka ", " Mauresque au tambourin "...
Bien entendu, il saura capter les scènes traditionnelles: "
Mariage arabe ", " Procession musulmane sur les hauteurs d'Alger
", " Fantasia en Kabylie ", " La batteuse de tapis
", " Femme arabe triant le blé ", " Sortie
d'école ", " Femmes kabyles à la fontaine "...
Alfred Chataud, "Musiciens nègres à
Alger ",
huile sur toile 102 x 73 cm,
musée des Beaux-Arts de Marseille.
Extrait de Alger et ses peintres. 1830-1962,
Marion Vidal-Bué, Paris-Méditerranée.
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Les lieux de l'histoire retiennent aussi ses crayons:
" Le pavillon du coup d'éventail " dans lequel, le
30 avril 1827, le dey Hussein Pacha frappa au visage le consul de France,
Pierre Duval, avec son chasse- mouches formé de plumes de paon
qu'il tenait à la main.
Il est certain que Chataud a adoré et étudié les
conceptions "orientalistes" de Delacroix. De plus, dans toutes
ses toiles ou aquarelles, on le sent particulièrement sensible
à la beauté des contrastes lumineux. Il a su parfaitement
peindre, avec une grande sobriété et d'une main sûre,
tout ce qui caractérisait l'Algérie de son époque.
Le peintre Fritz Muller a réalisé un superbe portrait
d'Alfred Chataud; il est daté de 1903. Il faisait partie des
collections du Musée des beaux- arts d'Alger. Le grand peintre,
aujourd'hui bien oublié, est décédé le 11
mai 1908.
Henri Sey