L'Armée
d'Afrique et l'armée coloniale des origines à 1962
par Maurice Faivre
Les précurseurs
Dans les pays musulmans où elle a exercé
sa souveraineté, la France a engagé dans ses armées,
comme soldats de métiers, conscrits ou supplétifs, des ressortissants
des populations autochtones. En même temps, le gouvernement a souvent
confié à l'autorité militaire l'administration de
ces populations.
Les premiers musulmans furent engagés dans la Syrie franque par
Tancrède en 1108 et Renaud de Châtillon en 1170. Vingt mille
auxiliaires combattent sous les ordres de Guy de Lusignan contre Saladin
en 1187. Recrutés par les Templiers, les Turcopoles sont, selon
Grousset, les goumiers de la Syrie franque. En 1765 au Sénégal,
des Laptots furent affranchis pour participer à la défense
de Gorée.
Le véritable précurseur de l'engagement des musulmans est
le général Bonaparte qui, au cours de la campagne d'Egypte
en 1798-1799, forme le projet de recruter 30000 auxiliaires. Il limite
ses ambitions et utilise des déserteurs turcs et une centaine de
cavaliers palestiniens qui l'accompagnent dans sa campagne de Palestine.
Il constitue un régiment de Dromadaires qui s'illustre sous le
commandement de Desaix et Cavalier, et ramène en France, avec femmes
et enfants, des chasseurs d'Orient et des mameluks de la garde, qui participent
à toutes les campagnes de l'Empire. Plus tard, il lèvera
des troupes illyriennes en Dalmatie.
La conquête de l'Algérie et la colonisation de l'Afrique
ouvrent la voie au recrutement de contingents musulmans moins symboliques
que ceux de ces précurseurs.
L'Armée d'Afrique
Chasseurs d'Afrique (aquarelle
de Maurice Toussaint), in Les chasseurs d'Afrique,
de Jacques Sicard et François Vauvillier, éd. Histoire
et Collections, Paris.
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Lors de la conquête de l'Algérie, des unités
de zouaves et de chasseurs d'Afrique sont créées dès
1830 et 1831 mais, au bout de quelques mois, les Algériens rejoignent
leur douar d'origine; on les remplace donc par des volontaires français.
Autre formation prestigieuse de l'Armée d'Afrique, la Légion
étrangère, créée en 1831, et qui va transformer
le marécage de Sidi- Bel-Abbès en cité florissante
et en terre de culture, avant de participer à la mise en valeur
de l'Algérie. À partir de 1835, des auxiliaires sont recrutés
dans les compagnies d'infanterie; ce sont les fameux Turcos, devenus Tirailleurs
en 1841, et dont le modèle sera reproduit au Sénégal
en 1857, au Tonkin en 1879 et à Madagascar en 1895. Le corps des
spahis est mis sur pied en 1841, et les compagnies méharistes en
1894. Des Bureaux arabes auxquels succéderont les officiers des
Affaires indigènes et sahariennes, administrent les territoires
militaires à partir de 1844. En 1908, le général
Lyautey crée les goums marocains. En 1912 enfin, la conscription
est instituée, de façon sélective, en Algérie.
Auxiliaires ou réguliers, ces combattants ont été
engagés au xixe siècle dans toutes les campagnes militaires
de la France, Algérie, Crimée, Italie, Indochine, Mexique,
Tunisie et Madagascar. 8 900 musulmans sont engagés en 1870.
Parallèlement, et en partant de l'infanterie de marine, les généraux
Faidherbe et Gallieni ont formé des bataillons de tirailleurs qui,
de 1852 à 1892, établissent l'ordre colonial en Afrique
occidentale et équatoriale, au prix d'opérations qui eurent
leurs heures de gloire, mais aussi leur part d'ombre. Créée
en 1900, l'armée coloniale (à ne pas confondre avec l'Armée
d'Afrique) constitue la Force noire sur laquelle le général
Mangin fonde les plus grands espoirs.
La guerre de 1914-1918
En Algérie, 172 000 musulmans, dont 85 000 engagés
volontaires, sont mobilisés en 1914, soit 3,6 % de la population.
À leurs côtés, 93 000 Français d'Afrique du
Nord et 39 000 Tunisiens sont appelés, et 14 000 Marocains sont
mobilisés, dont les trois quarts sont engagés sur les fronts
de France ou d'Orient. Au Maroc, Moulay Youssef et les grands caïds
lèvent des auxiliaires et des contingents dans les tribus, ce qui
permet au général Lyautey d'envoyer trente-sept bataillons
en métropole.
Les soldats originaires d'Afrique du Nord se sont dans l'ensemble bien
battus. Décimés par le feu en 1914, les vieux tirailleurs
furent d'abord remplacés par des recrues inexpérimentées,
dont certaines paniquèrent et refusèrent d'obéir.
Le commandement réagit parfois de manière expéditive,
par exemple, en décimant une compagnie tunisienne en décembre
1914. À partir du printemps 1915, ces troupes misérables
se transmutent en troupes d'assaut, aptes à manier des engins modernes
et à prendre des initiatives. Les tirailleurs marocains se distinguent
en mai 1916 pour la reprise du fort de Douaumont. Sur le front d'Orient
en 1918, la ire brigade de tirailleurs marocains, renforcée de
deux escadrons de spahis, attaque de flanc l'armée de von Kluck
et fait prisonnier le maréchal von Mackensen, commandant en chef
du frond sud-oriental (raid d'Uskub).
Dix bataillons coloniaux sont engagés sur le front français
en 1914, ils sont quarante-deux en 1918, plus vingt-trois dans l'armée
d'Orient. Les Français d'AFN ont de 12 000 à 20 000 tués,
et les Maghrébins 36 000 tués et disparus dont 9 800 Tunisiens
et 25 000 Algériens. Les prisonniers, regroupés à
Zossen, résistent à la propagande allemande; 5 à
8 % d'entre eux cependant s'engagent dans l'armée turque. Aucune
mutinerie n'est imputable aux régiments de tirailleurs en 1917.
Ils participent à toutes les opérations et, pour les décorations,
les tirailleurs viennent juste après le RICM et le 2e Étranger.
Les drapeaux du 4e régiment de tirailleurs sont décorés
de la Légion d'honneur, leurs pertes sont supérieures à
celles des autres unités d'infanterie.
Les Maghrébins furent heureusement surpris de l'accueil réservé
par les civils français, et en retirèrent l'image d'une
France accueillante et solidaire dans le malheur. L'armée fut à
son insu un melting-pot entre Kabyles, Arabes, Noirs d'Afrique et Indochinois.
L'institution militaire devient ainsi un modèle d'intégration
et donc d'évolution future. S'ils se sont bien intégrés
dans l'armée, ils ne furent cependant pas considérés
comme l'égal des Français. Clemenceau accorde alors des
avantages aux combattants, il supprime certains impôts et augmente
le nombre des représentants musulmans. En 1927, le Code de l'indigénat
sera aboli. Les successeurs de cette armée servent ensuite dans
les unités régulières de tirailleurs, spahis ou chasseurs
d'Afrique, en métropole et au Maghreb. En 1953, une trentaine de
bataillons nord-africains combattent en Indochine.
Les mobilisations de
1939-1945
Dès septembre 1939, l'armée d'Afrique met
sur pied deux divisions marocaines et douze divisions d'infanterie d'Afrique
sur son propre sol, plus sept divisions d'infanterie nord-africaine en
métropole, soit au total 73 000 Français et 176 000 musulmans.
Sur les 400 000 hommes de l'armée de Terre en AFN, 170 000 sont
engagés en métropole ou au Levant. Les pertes sont de 5
400 Maghrébins, et 2 700 Européens tués. C'est dire
que les capacités de résistance de l'Afrique du Nord en
juin 1940 étaient très amoindries, et que la poursuite de
la lutte en AFN était une vue de l'esprit. Cette armée est
pauvre en blindés, en avions, en armes anti-chars et anti-aériennes
et son matériel est vétuste.
En 1939, dix divisions d'infanterie coloniale (DIC) sont sur pied, et
en novembre 1943, 80 000 Africains sont engagés sur les théâtres
d'opérations, au prix de 17 500 tués...
Après la défaite de 1940, le général Weygand
est nommé délégué général et
commandant en chef en AFN. Il prépare clandestinement la revanche
en exaltant le moral des troupes et en menant deux actions conjuguées
:
- officiellement, négociation avec la Commission italienne d'armistice
en vue d'accroître les effectifs militaires (passant de 100 000
à 135000);
- clandestinement, camouflage de matériels, de matériaux,
de personnels spécialisés ou non (35000 supplétifs
et travailleurs), préparation clandestine de la mobilisation, entraves
à la surveillance des commissions de contrôle. Il s'oppose
enfin aux protocoles de Paris négociés par Darlan avec la
Wehrmacht.
Il est relevé en novembre 1941 à la demande des Allemands;
le général Juin lui succède comme commandant en chef
et poursuit son action de rénovation de l'Armée d'Afrique;
il remanie en particulier le plan de défense de la Tunisie. Surpris
par le débarquement américain du 8 novembre 1942, il convainc
l'amiral Darlan, qui se trouve, par hasard, en Algérie, d'ordonner
un cessez-le-feu aux troupes du Maroc et d'Algérie. Il faut rappeler
en effet qu'afin d'éviter l'occupation de la zone libre, les forces
françaises d'AFN avaient pour mission de s'opposer à tout
envahisseur. Seuls quelques conjurés avaient été
prévenus (groupe des 5).
Arrivé le 9 novembre, le général Giraud est nommé
commandant en chef, il prépare avec Juin l'intervention en Tunisie
où les Allemands sont en train de débarquer. 240 000 hommes
sont mobilisés (16 % des Français d'Algérie, 2 %
des musulmans). En même temps, il donne ses directives au général
Frère pour créer l'Organisation de résistance de
l'armée (ORA) en métropole. Après avoir pris contact
avec le général Barré (commandant des troupes de
Tunisie) et avec le Britannique Anderson à la frontière
tunisienne, il conclut avec le général Marshall le plan
d'Anfa, destiné au réarmement de huit DI, trois DB et quatre
QG d'armée et de corps d'armée, et la livraison de 1 000
avions. La première tranche du réarmement arrive à
Alger le 13 avril. Le plan d'Anfa, interrompu en novembre 1943 pour des
raisons politiques, et par manque de spécialistes, est réduit
de huit à cinq divisions d'infanterie.
Sans le soutien américain, et sans en référer au
général De Gaulle, Giraud organise la libération
de la Corse en septembre 1943, avant d'être éliminé,
en novembre 1943, de la co-présidence du Comité français
de Libération.
La revanche de
1940
La campagne de Tunisie
Jusqu'à la fin de 1942, ce sont les troupes françaises
qui encaissent l'essentiel de l'effort germano-italien en Tunisie, le
Ve Corps britannique ayant complètement échoué dans
sa tentative en direction de Bizerte et de Tunis. En février 1943,
le He Corps américain, jusque-là maintenu à l'instruction
face au Maroc espagnol, entre à son tour en lice, mais c'est pour
subir de plein fouet l'offensive de Rommel, qui vient d'arriver de Libye
avec son Afrikakorps. Le résultat est catastrophique pour les Américains
qui, en guise de baptême du feu, subissent une déroute du
style mai-juin 1940. Là encore, la division de Constantine du général
Welvert encaisse le choc et contribue à l'amortir. Mais à
peine Rommel a-t-il effectué sa jonction avec les forces de von
Arnim qui tiennent le nord de la Tunisie, qu'il se voit bousculé
par Montgomery et sa VIIIe armée, et par les forces anglo-américaines
du nord, qui sont montées en puissance et qui ont conquis la supériorité
aérienne. Le général Alexander coiffe désormais
les Ire et VIIIè armées.
Début mai, Alexander lance enfin son offensive générale
en direction de Tunis. Les forces germano-italiennes capitulent au prix
de 230 000 prisonniers.
Après que la force L de Leclerc (2 500 hommes) eût débordé
la ligne Mareth, le 19e Corps français, porté à 80
000 hommes, participe à l'offensive générale. La
victoire de Tunis est la grande revanche d'une armée battue, privée
de tout et, pour finir, tenue en suspicion. Ses pertes sont aussi lourdes
que celles des Britanniques : 4 500 tués.
La campagne d'Italie
Deux divisions françaises, la 2e DIM et la 3e DIA
embarquent le 19 novembre 1943. La 2e DIM est immédiatement engagée
et s'empare du mont Pantano
et de la Monna Casale. Le 3 janvier 1944, le général Juin
engage la 3e DIA qui, le 25 janvier, entame la conquête du Belvédère,
au cours d'une bataille acharnée jusqu'au 1" février
(journal du général Gandoêt). Mais cette victoire
n'est pas exploitée par les Alliés.
Le 11 février, la 4e DMM arrive en Italie, ainsi que trois groupements
de tabors; elle est dirigée vers la tête de pont du Garigliano.
Elle est rejointe en avril par la ire DFL, renforcée d'une brigade
de Djibouti et baptisée re DMI. Le 4 avril, le général
Juin soumet au général Clark, un mémoire visant à
déborder Cassino par le Monte Majo, en partant du Garigliano.
L'offensive est conduite le 11 mai par la 2e DIM et la 3e DIA, qui s'emparent
du Monte Majo et de Castelforte. Puis le Corps de montagne (4e DMM et
tabors) fonce à travers les monts Aurunci jusqu'au Petrella. Esperia
est atteint le 17 mai. La 3e DIA repousse une violente contre-attaque
et s'empare de Pico le 22 mai. La route de Rome est ouverte. Les Allemands
abandonnent Cassino. Le 5 juin, le général Juin monte au
Capitole aux côtés de Clark.
Après la prise de Rome, le CEF dépasse le IIe corps US et
s'empare de Sienne et de San Geminiano le 3 juillet, avant d'être
regroupé à Naples le 23 juillet, pour le débarquement
de Provence. Le 17 juin 1944, l'armée de Lattre s'est emparée
de l'île d'Elbe.
De la Provence à
l'Alsace
L'opération Anvil, rebaptisée Dragoon, met
en action 2 000 navires, dont 400 bateaux de guerre, organisés
en six courants maritimes, 1 900 avions, le corps d'armée américain
de Truscott, la lre division aéroportée anglo-américaine
et l'armée B du général de Lattre.
Ayant réussi à s'évader de la prison de Riom, de
Lattre arrive à Alger le 20 décembre 1943. Il est aussitôt
nommé au commandement de l'armée B, qui comprend toutes
les unités stationnées en AFN : lre et 5e DB, 9e DIC.
A partir de juillet, elle est renforcée par les quatre divisions
du CEF d'Italie : ire DFL, 2e DIM, 3e DIA et 4e DMM.
Le 14 juillet, de Lattre installe son PC à Naples et prépare
le débarquement. Aux ordres de la 7e armée US de Patch,
l'armée B débarque en deuxième échelon, mais
de Lattre lance aussitôt ses divisions vers Toulon et Marseille,
qui sont libérés après de durs combats, vingt jours
avant la date prévue par les plans américains.
Tout en exécutant le plan US de libération du Languedoc,
de Lattre décide de faire traverser le Rhône au IIe corps
d'armée, confié plus tard à Monsabert, et de le faire
progresser rapidement par la rive ouest, afin de ne pas perdre de temps
par rapport aux Américains qui progressent par la route Napoléon.
Le IIe corps participe, le 2 septembre, à la libération
de Lyon; le 12 septembre, après les durs combats d'Autun, la jonction
est faite avec les forces alliées venant de Normandie, et notamment
la 2e DB. Le ler corps de Béthouart progresse par Briançon
et longe la frontière suisse.
Le 19 septembre, l'armée B devient la 1è armée française.
Elle est coiffée par le 7e groupe d'armées commandé
par le général Devers. Mais faute de ravitaillement en carburant,
elle est stoppée le 30 septembre sur une ligne Moselotte-le Thilllot-Ronchamp
.
Pendant deux mois, le 2e corps de Monsabert est fortement ralenti dans
les Vosges; ce n'est que le 11 novembre que de Lattre lance le 1er corps
de Béthouart: la 5e DB et la 2e DIM qui prennent Héricourt
et Montbéliard et sont les premiers à atteindre le Rhin
à Rosenau (le 19 novembre, quatre jours avant Leclerc à
Strasbourg). Belfort est libéré le 28 novembre, mais la
poche de Colmar, contrôlée par Himmler, résiste. Les
Noirs et les Maghrébins, souffrant du froid et fatigués
par des opérations incessantes sont peu à peu relevés
par des FFI (amalgame de 117000 résistants et engagés volontaires).
L'absence de mobilisation en métropole provoque un certain malaise
parmi les soldats de la le armée.
Le 16 décembre, devant la menace allemande des Ardennes, Eisenhower
ordonne d'évacuer la plaine d'Alsace. Le général
De Gaulle, soutenu par Churchill, conteste cet ordre, et charge la ire
armée de défendre Strasbourg. La bataille durera jusqu'au
18 janvier, date à laquelle la ire armée est renforcée
par le 21e corps US et la 12e DB US. Le 20 janvier s'engage la bataille
pour la libération de Colmar, qui aboutit le 2 février à
la prise de la ville par les troupes franco-américaines, et le
7 février, à la libération totale de l'Alsace.
La 2e Division blindée
Mieux connue du public que la 1è armée,
la 2e DB est créée le 26 août 1943, après fusion
des forces combattantes. Mise sur pied dans la forêt de Tamara à
partir de trois unités FFL, elle est recomplétée
aux deux tiers à partir des dépôts de l'Armée
d'Afrique. Une fois complétée et instruite, la 2e DB est
transférée en Grande-Bretagne. Elle débarque le 30
juillet à Utah Beach au sein de la 3e armée de Patton. Elle
libère Paris, soutient un dur combat à Dompaire, s'empare
de Strasbourg et participe à la libération de l'Alsace (pendant
quatre semaines), avant d'être engagée à Royan, puis
de s'élancer vers Berchtesgaden où elle pénètre
en même temps que les Américains. Ses pertes s'élèvent
à 4 987 tués, blessés et disparus.
Malgré l'apport important en effectifs de l'Armée d'Afrique,
les relations des FFL ne seront pas toujours coopératives (défilé
de Tunis avec les Britanniques, débauchage de combattants, refus
de servir aux ordres de de Lattre, 2e DB engagée à Royan
et te DFL (2e DMI dans les Alpes du Sud).
Rhin et Danube
S'engageant au nord de Strasbourg, le 2e corps franchit
la Moder et la Lauter avant de percer la ligne Siegfried et d'atteindre
Spire.
Le 29 mars, le général Devers prescrit à la te armée
de franchir le Rhin. Après des franchissements audacieux à
Spire et Gemerschein, en l'absence de moyens lourds du génie, la
tête de pont française atteint Karlsruhe. De Lattre évite
d'attaquer Stuttgart de front, et déborde par la Forêt-Noire
et le Jura souabe. Freudenstadt est atteint le 17 avril, Tübingen
et Reutlingen le 22 avril, Stuttgart le 21 et Ulm le 22. La prise du Kehl
par la 9e DIC permet d'engager le 1er corps de Béthouart vers le
sud. Le 18e corps d'armée SS, encerclé dans la Forêt-Noire,
tente de faire une percée le 25 avril, il est en grande partie
capturé. Le 6 mai la 2e DIM et la te DB font leur jonction à
Saint-Anton. Les pertes de la te armée sont de 14 000 tués
depuis le 15 août 1944. Elle a fait 28 000 prisonniers à
Stuttgart, 18 000 à Ulm et 15 000 en Forêt-Noire.
Les 19e et 24e armées allemandes capitulent à Garmish et
à Innsbruck. Le maréchal Kesselring, commandant le front
ouest, signe à Harr. La capitulation de l'Allemagne est signée
le 7 mai à Reims, en présence du général Sevez,
et le 8 mai à Berlin où le général de Lattre
figure parmi les quatre vainqueurs.
Mobilisations
cumulées, comparées à la population
|
Les estimations des effectifs sont souvent contradictoires,
par le fait que les troupes de souveraineté ne sont pas toujours
distinguées des forces engagées sur un théâtre
extérieur.
Quant aux chiffres des pertes, ils additionnent souvent les tués
au combat, les disparus, les morts de maladie ou par accident, et les
blessés non récupérables. Les chiffres des tableaux
sont donc des approximations qui peuvent être contestées.
La légende de la chair à canon des combattants musulmans
n'est pas confirmée par les statistiques. Les taux de pertes des
Européens sont aussi lourds, sauf pour la campagne de 1940 où
les Allemands ont fait preuve de racisme envers les Noirs.
Pertes
comparées (tués au combat) par rapport aux effectifs
cumulés
|
Effectif des armées en 1942-1945
Les différentes sources indiquent des données parfois contradictoires,
qui ne permettent pas une évaluation précise. En voici quelques
éléments partiels:
Effectifs
de fin 1942 (Indochine non comprise):
|
Forces
de souveraineté (fin 1943)
|
Forces engagées:
En Tunisie : 60 000 à 80 000, de novembre 1942 à mai 1943;
En Italie: 98 000 à 112000, de novembre 1943 à juillet 1944;
En France : (plan d'Anfa : 5e DI, 3e DB): 250 000, d'août 1944 à
juin 1945; FFI: 100 000 en juin 1944; 200 000 en juillet; 340 000 à
400 000 en octobre 1944;
Armée de l'Air : 140 000;
Marine : 50 000 à 68 000;
Gendarmerie : 50 000.
Unités nouvelles constituées en
1945:
207 bataillons FFI = 157 000 hommes;
137 000 engagés Pe armée;
40 régiments territoriaux 100 000 hommes;
6 groupements de pionniers sur 34 = 7 500 hommes;
Unités de transport et de sécurité : 10 000 hommes;
5 à 8 divisions FFI à 18 000 hommes = 90 000 à 144
000 (?) engagées en partie :
- 3 divisions pour le front de l'Atlantique : 50 000 à 75 000 ?
- 1 division pour le front des Alpes =?
Divisions pour l'Extrême-Orient : 37 000
Effectif total au 8 mai 1945 = 1 300
000 armée de Terre; 1 700 000 interarmées. Ce total paraît
difficile à justifier.
Sources:
Les sources utilisées pour les évaluations
d'effectifs et de pertes sont les suivantes :
- SHAT - documentation pour le xixe siècle et les campagnes d'Outre-mer.
- SHAT (archives): 7T 134-137, 7T 250, 1H 1375-1376 pour les effectifs
de 1954 à 1962 et les pertes de 1940 et 1945. 7T 204, 1H 1 402
/1, 1H 2 708 / 5 pour les pertes en Algérie.
Ainsi que les ouvrages suivants :
- AGERON (Cr), Histoire de la France coloniale, A. Colin, 1990, pour 19391940
et 1943-1944.
- AZAN (Paul), Conquête et pacification de l'Algérie, Paris,
1931.
- BECKER (J.-J.), La Première Guerre mondiale, éd. MA, 1985.
- BOISFLEURY (Bernard de), L'Armée en résistance, 1940-1944,
Esprit du Livre, 2005.
- CARLIER (C.) et PEDRONCINI (G), Les troupes coloniales dans la Grande
guerre, Économica, 1997.
- CHAMPEAUX (Antoine) et GAUJAC (Paul), Actes du colloque sur le débarquement
de Provence, 2009.
- CLAYTON (Antony), France, soldiers and Africa, Brassey's, 1987.
- Colloque SHAT, Les armées françaises pendant la Seconde
Guerre mondiale, 1985.
- CORVISIER (André), Histoire militaire de la France, tome iv,
PUF, 1994.
- DELMAS (général), Naissance des Corps indigènes
en Afrique, in L'Épaulette 7/92, p. 31.
- Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale, Larousse, 1979.
- DOUCERET (B), Paul Gandoët, général, Lavauzelle,
1987.
- FAIVRE (Maurice), Les combattants musulmans de la guerre d'Algérie,
L'Harmattan, 1996.
- FRÉMEAUX (Jacques), L'Afrique à l'ombre des épées,
SHAT, 1995. La France et l'Islam, PUF, 1991.
- Participation des contingents d'Outre-mer aux opérations alliées,
colloque SHAT, mai 1985.
- GORCE (P. M. de la), L'Empire écartelé, Denoël, 1988.
- GROUSSET (R), L'épopée des croisades, Plon, 1939.
- HURE (général), L'Armée d 'Afriq ue, Lavauzelle,
1977.
- KASPI (André), Musulmans et Pieds-Noirs sous les drapeaux, L'Histoire
n° 140, 1 /1991.
- LEVISSE-TOUZE (Christine), L'Afrique du Nord dans la guerre, A. Michel,
1998.
- MASSON (Philippe), Histoire de l'armée française de 1914
à nos jours, Perrin, 1999.
- MICHELET (Louis Christian), Contribution militaire à l'effort
de guerre allié, 1941-1945, Guerres mondiales et conflits contemporains,
1995.
- La revanche de l'Armée d'Afrique, Godefroi de Bouillon, 1998.
- MEYNIER (Gilbert), L'Algérie révélée, Genève
1981, pour 1914-1918. - RECHAM (Belkacem), Les musulmans algériens
dans l'armée française, 1919-1939, Économica.
- SPILLMANN (général), De l'Empire à l'hexagone,
Perrin, 1981. Souvenirs d'un colonialiste, Presse de la Cité, 1968.
- VALETTE (Jacques), La France et l'Afrique, l'AFN, 1914-1962, Sedes,
1994.
- VERNET (Jacques), Le réarmement et la réorganisation de
l'armée de terre, 1943-1962, SHAT, 1980.
- YACONO (Xavier), Histoire de l'Algérie, L'Atlanthrope, 1994.
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