sur site le 1-04-2003
-L'Algérie, Alger, leur Histoire.
Poursuite des opérations militaires et de police en Algérie
Pénétration au Sahara
pnha, n°98 , février 1999

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-----1890-1916 - Je vous avais proposé de vous entretenir de la pénétration au Sahara après l'échec, en 1881, de la mission du lieutenant-colonel Flatters massacré par les Touareg.Depuis interdiction était faite aux officiers des territoires du Sud de toute tentative de pénétration dans le Hoggar, le Tidikelt et le Touat.

-----Le 5 août 1890 une convention avec l'Angleterre reconnaît nos droits sur le désert jusqu'à la frontière actuelle, nord du Nigéria. L'Angleterre se voit consentir la possession du cours inférieur du Niger.
-----La France protège les sédentaires sahariens des pillards.
-----Eu égard à l'audace des pillards qui attaquent les sédentaires du sud algérien, le début de la pénétration française est aussi progressive que timide, sous une température estivale tout juste supportable. Le poste d'El-Goléa, occupé sporadiquement par des détachements français depuis 1877, devient permanent à compter de 1891 ; des fortins, édifiés le long de l'Erg, commandent l'accès aux puits, le long de l'Erg occidental. Fort Allemand au sud-est de Ouargla, Berresof entre Tébessa et Ghadamès, Fort-Miribel à 135 kilomètres d'El-Goléa et Fort Mac-Mahon, au sud de l'Erg occidental.
-----Parallèlement, dans le sud oranais, les troupes de Tirailleurs et de Spahis, pas particulièrement adaptées au désert, avancent jusqu'à El-Abiod-Sidi-Cheikh, à l'est d'Aïn-Sefra occupée avec Figuig. Cette oasis est source de grosses difficultés car la frontière entre le Sahara et le Maroc n'est pas clairement délimitée.
-----Cette voie de pénétration vers le Niger, dénommée "la rue des Palmiers", relie Figuig au Touat et au Tidikelt en passant par El-Moungar, Béni-Abbès le long de l'oued Zousfana puis Taourirt.
-----Le Sahara, région de solitudes embrasées et déshéritées, eut d'autres voies de pénétration qui, comme la première, bien que pacifiques n'en eurent pas moins de martyrs en voulant apporter à l'Afrique la civilisation qui faisait défaut à ses populations.
-----La seconde voie permet de relier Alger à InSalah en passant par Boghar, Djelfa, Laghouat, El-Goléa, Fort Miribel et le plateau de Tadmàit.
-----La troisième voie reliera Constantine au Soudan en passant par Biskra, Touggourt, Ouargla, l'Erg Oriental, Amguid, Tamanrasset dans le massif du Hoggar pour aboutir à Agadès et Zinder au Soudan. C'est cette dernière voie qu'emprunta la mission Foureau-Lamy dont je vous avais promis de vous entretenir. En fait, la France autorise l'organisation de trois missions qui ont comme objectif commun d'assurer la liaison entre l'Algérie, le Sénégal, le Soudan et le Congo. La première, opère à partir de l'Algérie sous les ordres du commandant Lamy assisté de l'explorateur Fourreau ; la seconde mission Voulet-Chanoine à partir de Dakar remonte le Congo, la troisième, à partir de Constantine est celle de Gentil. Ces trois missions devaient opérer leur jonction au Tchad.
-----Le Commandant Lamy est Saint-Cyrien et sert au 1er Régiment de Tirailleurs. Le détachement qu'il met sur pied à Biskra comporte des hommes en qui il a une grande confiance et qui la lui rendent bien. Ils sont Tirailleurs et d'origine Kabyle pour la plupart. Il y a quelques Spahis algériens. Les moyens de locomotion sont un millier de chameaux. Il s'adjoint des Sahariens à Ouargla, sous les ordres du lieutenant Rondenay qui commandera un groupement. Quatre autres groupements se lancent dans cette merveilleuse aventure qu'était la traversée du Sahara. Ils sont commandés par le lieutenant Métois, le sous-lieutenant Bristch, le lieutenant Oudjari, le lieutenant Verley-Hanus.
-----Un premier bond de 480 kilomètres les conduit à Temassanine.
-----Les guides Chaamba craignent les Touareg ; ils quittent la mission. Mais les guides Touareg ne rejoignent pas la colonne tel qu'ils s'y étaient engagés.
-----L'expédition se sent mal à l'aise car les Touaregs l'épient et chacun se sent vulnérable. La sûreté est renforcée.
-----La progression repart vers le sud à travers le Tassili des Azdjers et le Hoggar pour arriver au lieu du massacre de la mission Flatters 18 années plus tôt ;Aïn-Tadjenout. Ravitaillée par une colonne partie de Ouargla, l'expédition s'enfonce dans un paysage minéral, aride et dépourvu d'eau. Fidèlement traduit par "le pays de la soif", le Tanezrouft est empreint d'un silence et d'une grande âpreté qui n'ont d'égal que sa solitude dans l'immensité du désert saharien.
-----Un poste fortifié est construit à In-Azaoua à la sortie du Tanezrouft. Ce sera Fort-Flatters.
-----Hommes et bêtes, bien qu'aguerris, ne sont pas habitués au Sud de la Hamada, et souffrent.
-----Pour poursuivre sa mission, la colonne abandonne, à Fort-Flatters, le superflu pour s'engager sur les pentes du massif de l'Aïr, en direction d'Agadès.

 


-----Le 12 mars 1899 alors qu'elle quitte Ouargla à la mi-octobre 1898, la colonne est attaquée lors de sa première halte à Ighezzar par les Touaregs armés ; les tribus marquant une grande hostilité et refusant d'apporter leur aide, le commandant Lamy dut entreprendre quelques razzias pour s'équiper en chameaux, ânes et boeufs. La mission répartie en deux échelons quitte le bivouac d'Ighezzar les 25 Mai et 10 Juin 1899.
-----Le 14 juin l'arrière-garde commandée par le lieutenant Rondenay est attaquée par plus d'un demi-millier de Touaregs chargeant sabre au clair. Les assaillants sont vigoureusement repoussés et perdent le 1/4 de leurs effectifs, ce qui ralentit leur ardeur belliqueuse.
-----La mission rallie Agadès le 27 juillet 1899. Le sultan, après quelques palabres, accepte de signer un traité, d'arborer le pavillon français et de fournir contre paiement, en thalers, des vivres.
-----Le 11 octobre, l'expédition poursuit sa route vers Zinder, atteinte le 2 novembre. Les hommes sont exténués, pieds-nus, en guenilles, mais prêts à repartir pour le Tchad après avoir laissé un poste de Tirailleurs sénégalais. Lamy s'installe à Tessaouar pour réorganiser ses troupes. En effet la prudence le lui commande car il vient d'apprendre la tragédie de la mission Voulet Chanoine et l'assassinat le 14 juillet par deux officiers devenus fous, du lieutenant colonel Klobb. Autre mauvaise nouvelle celle du massacre de la mission du lieutenant de vaisseau Bretonnet par les bandes du fameux sultan noir Rabah qui ayant attaqué l'escorte de la mission Gentil à Kouno, a considérablement ralenti la progression de cette colonne.
-----Rabah est un aventurier qui s'est taillé à coups de sabre un vaste territoire compris entre le Nil et le Tchad, dans le centre du Soudan.
-----Tous les chefs locaux et de tribus qui ne lui sont pas soumis sont soit chassés, soit tués. Quant aux populations qui marquent quelques signes de résistance eh bien, il les massacre purement et simplement, assurant ainsi son pouvoir après avoir été l'adjoint d'un marchand d'esclaves égyptien nommé Zobeïr.
-----Il tient ainsi le Bournou au Sud-Ouest du lac et Baghirni au Sud-Est.
-----C'est pour répondre à l'appel du sultan de Kouka, capitale du Bournou que le commandant Lamy après avoir réorganisé son expédition, lance sa marche vers le Tchad. 20.000 habitants de Kouka avaient été, sur l'ordre de Rabah, égorgés. Et l'on comprend l'impatience de l'ancien sultan dépossédé, Ameur Sinda de participer à une action punitive.
-----Mais le commandant Lamy a une mission à remplir, opérer la liaison avec les deux
autres missions.
-----C'est à l'est du Lac Tchad que se fait la liaison avec un détachement de Tirailleurs Soudanais, aux ordres de Joalland et Meynier. Les effectifs du commandant Lamy se trouvent ainsi augmentés pour atteindre 450 combattants. Au sud du lac Tchad, Rabah regroupe ses forces à Dikoa.
Lamy, déjoue les observateurs de Rabah, fait franchir par surprise le Char, fleuve tributaire du lac Tchad, qui reçoit son affluent, le Logone à Djamena, Les moyens de franchissement sont les pirogues pour le personnel et les équipements, matériels et ravitaillements, à la nagepour les animaux.
-----L'expédition suit la rive gauche du fleuve jusqu'au confluent avec le Logone où s'élève une ville fortifiée : Koucheri (ou Kousséri), située à environ une centaine de kilomètres de Dikoa. La ville se rend après une courte mais brillante bataille remportée par les hommes de l'expédition. La mission Gentil se trouve en difficulté dans le sud et le commandant Lamy envoie pour l'aider à se dégager, trois petites colonnes à une dizaine de jours d'intervalle.
-----La première colonne bat le fils aîné, lieutenant de Rabah, qui fuit en abandonnant un important butin, laissant même aux vainqueurs un méchoui tout préparé.
-----La seconde colonne commandée par le lieutenant de Chambrun, astronome de la mission algérienne part, le 22 mars au devant de Gentil, avec quelques Tirailleurs. La troisième colonne, partie le 2 avril, fera sa jonction avec la mission partie du Congo et lui permettra d'atteindre Koucheri, le 21 avril, les 300 Tirailleurs de la mission sont dans un piteux état.
-----Monsieur Gentil est beau-frère de Savorgnan de Brazza le célèbre explorateur dont les expéditions furent à l'origine du Congo Français.

 

Lt Colonel (ER) Bautista