| ------------Construits 
        après la Première Guerre mondiale, deux ascenseurs dressaient 
        leur fine silhouette entre le bleu des eaux du port et l'amphithéâtre 
        de la ville blanche. Accoudés au bastingage des paquebots en approche, 
        leurs passagers éblouis admiraient ces deux édifices, figures 
        de proue élancées, prenant appui sur les boulevards et sur 
        les quais. -----------Le 
        premier toujours situé en face du square Bresson devenu Aristide 
        Briand, desservait la gare d'autobus du bastion central et celle des CFA.
 -----------Le 
        second en face du Café de la Bourse permettait d'accéder 
        à la Pêcherie et au Rowing Club. Ils étaient tous 
        les deux appréciés des sportifs, des voyageurs, des promeneurs 
        familiers du port, des touristes étrangers ainsi que des navigateurs 
        en escale. Construits par la Société des ascenseurs Otis 
        au début des années vingt, ils étaient gérés 
        par la CFRA. Un receveur, coiffé d'une chéchia, sacoche 
        de cuir en bandoulière, crayon surmonté d'un bout de tuyau 
        en caoutchouc dans une main, planchette de tickets dans l'autre, percevait 
        le prix et assurait, à la main, la fermeture des doubles portes 
        métalliques à claires-voies avant d'actionner le levier 
        de commande du rhéostat. Les travailleurs du port n'utilisaient 
        pas ces deux ascenseurs. Partant très tôt, certains dès 
        4 heures du matin, à une heure où ils n'étaient pas 
        encore en service. Partageant une même pauvreté acceptée, 
        calfats, dockers, lamaneurs, pêcheurs, scaphandriers, préféraient 
        de loin les escaliers ou la rampe de la Pêcherie. Saluant au passage 
        d'un salam, d'un buenos lias ou d'un buono jomo, les garçons des 
        restaurants spécialisés " poissons ", " Cassar 
        " et " Azzopardi " ou ceux du magasin d'articles de pêche, 
        tous trois situés sur la rampe de la Pêcherie sous la mosquée 
        Djemaâ ed J'did. En 1930, à l'occasion des cérémonies 
        du centenaire, les deux ascenseurs furent entourés de milliers 
        d'ampoules électriques du plus bel effet nocturne.
 -----------En 
        1943, à la suite d'une quarantaine de bombardements aériens, 
        l'ascenseur de la Pêcherie fut détruit afin de supprimer 
        un point de repère aux appareils ennemis visant le port en piqué. 
        Cette destruction eut lieu presque en même temps que celle de la 
         
          colonne (Bailloud) du Fort 
        l'Empereur érigée à la mémoire 
        de l'Armée d'Afrique. Il n'est hélas pas possible d'en fixer 
        la date, en raison de la censure et de l'absence de nombreux Algérois 
        engagés sur le front de Tunisie.
 -----------En 
        dépit de son absence, l'ascenseur de la Pêcherie est toujours 
        présent dans la mémoire du port d'Alger, au même titre 
        que d'autres hauts lieux de la ville blanche, comme la Brasserie de la 
        Bourse et les immeubles de la place du Gouvernement.
 Edgar Scotti 31000 Toulouse
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