agriculture et arboriculture en Algérie avant 1962
Dans la Mitidja
LA MOISSON DU RIZ PADDY VA COMMENCER

Dans la Mitidja
LA MOISSON DU RIZ PADDY VA COMMENCER

Les premiers essais de cette culture dans nos régions ne remontent qu'à 1951

Au moment où va commencer la moisson du riz dans la Mitidja, M. Donin de Rosière, président du syndicat des riziculteurs du département d’Alger, nous communique un aperçu de la campagne rizicole 1953 qui permettra à nos lecteurs de juger de l’essor de cette culture, dont les essais dans nos régions remontent seulement à 1951.

Si à fin août retentit la cloche annonçant le commencement des vendanges, celle-ci, pourrait donner
aussi le signal de la moisson du riz Paddy.

Les belles taches vertes que d’avion on apercevait au sud de Coléa commencent à se brunir, indice de la maturité des grains et de la proche moisson.

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voir aussi : Après une première année de mise en culture
LES RIZIÈRES DE LA MITIDJA COUVRENT 250 HECTARES

et encore
Dans une rizière de la Mitidja

Echo d'Alger du 15-9-1953 - Transmis par Francis Rambert
janvier 2025

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Dans la Mitidja

Dans la Mitidja

Dans la Mitidja
LA MOISSON DU RIZ PADDY VA COMMENCER

Les premiers essais de cette culture dans nos régions ne remontent qu'à 1951

Au moment où va commencer la moisson du riz dans la Mitidja, M. Donin de Rosière, président du syndicat des riziculteurs du département d’Alger, nous communique un aperçu de la campagne rizicole 1953 qui permettra à nos lecteurs de juger de l’essor de cette culture, dont les essais dans nos régions remontent seulement à 1951.

Si à fin août retentit la cloche annonçant le commencement des vendanges, celle-ci, pourrait donner
aussi le signal de la moisson du riz Paddy.

Les belles taches vertes que d’avion on apercevait au sud de Coléa commencent à se brunir, indice de la maturité des grains et de la proche moisson.

Les riziculteurs s’affairent déjà : recherche d’une moissonneuse-batteuse équipée pour le Paddy, surveillance constante des clos pour leur mise à sec au moment opportun, afin que la moissonneuse-batteuse puisse y pénétrer et y circuler sans dommage pour elle-même et la récolte, préparation de hangars où le Paddy sera déposé afin que les rayons solaires arrivant latéralement et le vent, s’ajoutant à une aération à la pelle, permettent d’obtenir un séchage aussi rapide et complet que possible, car le rizicu teur sait que le séchage à la ferme est le moins onéreux et lui évitera le coefficient de réfaction que ne manquera pas de lui appliquer l’usine de décorticage si le Paddy a un degré d’humidité supérieur à quatorze ; bétonnage hâtif du sol des hangars pour éviter les remontées d’humidité, etc...

Si en 1951 et 1952 de timides essais de riziculture avaient été entrepris par quelques agriculteurs hardis, en 1953, la culture du riz s’inscrit dans la liste des possibilités agricoles de l’Algérie, d’ailleurs le bassin sud méditerranéen est, pendant la période estivale aux nombreuses et longues journées d’ensoleillement. particulièrement propice à la production abondante du riz, à condition toutefois de fournir aux rizières l’irrigation nécessaire.
Il semble donc opportun de donner un rapide aperçu sur cette campagne rizicole dans la région du Mazafran.

Dés le mois de mars, les riziculteurs entreprenaient la préparation des rizières : terrassements, nivellement, confection de diguettes pour délimiter les clos, aménagement de stations de pompages en rivière, forages de puits, ouverture et approfondissement de canaux d’irrigation, de canaux de colature, construction de chemins d’exploitation traversés de conduites assurant l’intercommunication des clos, mise en place de vannettes permettant de régler l’arrivée d’eau ; les diverses étapes de la campagne rizicole 1953 allaient alors se dérouler : mise en eau des clos, semailles, répandage des engrais, repiquage, désherbage des clos, faucardement des canaux, lutte contre les parasites de toute sorte : insectes, vers d’eau, rats et les plus acharnés... les oiseaux, lesquels peu avant la moisson, n’ayant plus de blé ou d’orge se jettent en vols épais sur les rizières, trouvant sur les arbres et taillis voisins des abris sûrs où ils peuvent digérer le Paddy et se reposer à leur aise.

Après bien des soucis, nous arrivons à la veille de la moisson.

Mais si en mars les riziculteurs commençaient hardiment leur campagne, M. le Gouverneur général et son administration étudiaient déjà les problèmes nombreux que posait le développement de la culture du riz et après des contacts répétés avec les riziculteurs, un arrêté et une circulaire du 4 mai 1953 fixaient les conditions d’agrément des rizières, ainsi que les avantages financiers auxquels donnait droit l’agrément.

Le magnifique tapis de végétation qui couvre la zone sud de Coléa commence donc à se brunir et, en visitant les rizières qui le forment où alternent les riz ronds, dits de qualité courante (Balilla. Bomba, Américano, Benlloch, etc.), variétés de sécurité, et les riz longs, dits de luxe (Magnolia, Rinaldo, Bersani, Stirp, etc), variétés aux prix élevés et de plus en plus demandés dans les pays évolués, on est surpris de voir la succession de vastes bassins, chacun formant un clos où circule une eau abondante sans cesse renouvelée et dans laquelle pullulent les gambouses, ces poissons minuscules cependant grands destructeurs d’anophèles. alors que des canaux de oolature, judicieusement tracés, reconduisent au grand cours d’eau les eaux sortant des rizières ; canaux d’irrigation et de colature étant eux-mêmes abondamment peuplés de gambouses, le danger de paludisme se trouve ainsi sensiblement réduit si non écarté.

Splendides réalisations, œuvre de colons audacieux qu’il faut aider, encourager et non brimer ou freiner dans leurs initiatives, car la production mondiale de riz est tellement au-dessous des besoins que ce serait une grave erreur pour l’Algérie de ne pas profiter de la situation privilégiée que lui confère la vocation rizicole incontestable de certaines de ses terres, son climat qui permet de réduire de près de trois semaines la durée du cycle végétatif des diverses variétés et, dans certaines régions, de possibilités d’irrigation suffisantes, particulièrement rassurantes dans celle du Mazafran où à cette époque considérée comme étant celle de l’étiage, on constate l’importance du débit des forages et des stations de pompages. Cela permet d’envisager de porter, sans crainte de ne pouvoir assurer les pointes d’irrigation, à douze cents hectares la superficie totale des rizières de la région du Mazafran où, au surplus, terre et eau sont totalement dépourvues de salure alors que air et eau sont à la température, idéale de 20-22° exigée pour la bonne végétation du riz et que le sirocco, vent chaud et très desséchant, qui peut ruiner la récolte s’il se produit au moment de la fécondation ou au cours de la maturation. est heureusement tempérépar la brise de mer qui arrive aux rizières, à travers le couloir de l’embouchure du Mazafran dont elles sont distantes de quelques kilomètres.

Au cours du périple à travers les rizières de la Mitidja, le visiteur remarquera avec beaucoup d’intérêt les clos de la station expérimentale de la Société algérienne d’exploitations agricoles, laquelle, par ses recherches effectuées en contact permanent avec les Services agricoles, pourra dresser le véritable bréviaire du riziculteur donnant tous renseignements utiles sur les variétés de riz plus spécialement cultivées, leur comportement au repiquage, la durée du cycle végétatif, les besoins en eau, les formules d’engrais les plus rationnelles, car si le sulfate d’ammoniaque a toujours été et reste l’engrais idéal pour le riz, il faut cependant pour le choix de l’élément fertilisant tenir compte de l’analyse des terres et doser convenablement azote, acide phosphorique et potasse et aussi ne pas délaisser le compost ayant la paille de riz pour base, car il est démontré que le fumier est pour le riz comme pour beaucoup d’autres cultures le meilleur engrais.

Les panicules pleines de promesse et retombant sous le poids des grains qui les garnissent vont donc, sous peu de jours, décider le riziculteur à prescrire la mise à sec terminale, laquelle atteindra successivement chaque clos, libérant ainsi l’aiguadier au rôle essentiel pendant toute la période d’irrigation.
Les déflagrations d’effarouchement vont s’accentuer pour chasser les oiseaux de plus en plus nombreux, puis moissonneuse-batteuse dans les grandes rizières et moissonneurs dans les petites vont couper la récolte ; la machine égrènera les panicules lourdement chargées et éjectera les sacs gonflés de paddy, alors que les moissonneurs confectionneront hâtivement des gerbes, puis les rassembleront en petits meulons que l’on acheminera vers le hangar de séchage et ensuite vers l’aire à battre.

Et ce sera la fin du stade agricole, les stades industriel et commercial lui succédant, car produire du riz est une chose, le vendre en est une autre et exige l’interdépendance des trois stades afin de fixer le choix des variétés d’après le rendement à l’usinage, mais aussi sans négliger le comportement du riz à la cuisson, le goût de la clientèle et alors toute la cascade d’opérations de l’usine au consommateur va surgir. C’est donc à ces deux derniers stades qu’incombera l’organisation rationnelle des marchés et la recherche des débouchés contribuant ainsi, notamment, au plein emploi des hommes et des terres.

Mais le riziculteur n’en aura pas terminé pour autant et, dès ses rizières débarrassées du paddy, il devra procéder à leur déchaumage, à leur disquage et à la culture d’assolement. C’est Ici le lieu de rappeler que la riziculture a créé en Camargue une activité particulièrement rémunératrice et ceux qui ont connu Arles il y a quinze ans sont stupéfaits de voir le développement pris par la petite cité provençale de jadis.

Or, en Camargue, pour pallier l’insuffisance de pente et assurer irrigation et colature, il a fallu créer de toute pièce un dispositif ngénieux englobant le Rhône, le petit Rhône et l’étang de Vaccarèse, complétés par des vannages judicieusement établis ainsi que par de puissantes et nombreuses stations de pompage.

Fort heureusement, nous n’avons pas dans la région du Mazafran un problème de pente aussi difficile et coûteux à résoudre et l’état actuel des rizières permet d’espérer des résultats très satisfaisants.

Si plusieurs films donnent un aspect de la riziculture dans divers pays (Italie: « Riz amer »; Camargue « Le sel de la terre » ; Japon), l’Algérie n’a pas encore le sien, mais cela n’est que partie remise. Il permettra alors à chacun de mesurer l’importance de l’effort accompli par les riziculteurs de la Mitidja; ceux-ci apportent donc une contribution non négligeable à la solution du grave problème démographique et social qui retient toute l’attention des pouvoirs publics en Algérie aussi bien qu’en métropole, car la meilleure contribution que l’on puisse fournir à la paix du monde n’est-elle pas de produire le maximum de biens de consommation essentiels pour assurer le mieux-être d’une humanité cruellement sous-alimentée dans son immense majorité.