LE PORT D'ALGER

A l’instar de ceux de Marseille et du Havre, les remorqueurs et les vedettes du pilotage du port d’Alger seront-ils bientôt équipés de radio-téléphones ?
Echo d'Alger du15-1-1954 - Adressé par Francis Rambert
sur site : mars 2022

A l’instar de ceux de Marseille et du Havre, les remorqueurs et les vedettes du pilotage du port d’Alger seront-ils bientôt équipés de radio-téléphones ? On le saura après les essais qui vont prochainement être entrepris en ce sens sous l’égide de la direction du port, en collaboration avec la capitainerie, le service du pilotage et l’Entreprise de remorquage, de sauvetage et d'acconage.

A cet effet, six radio-téléphones sur onde de 156 kilocycles, émettant sur deux mètres environ et branchés sur accus vont être fournis au port par la direction des phares et balises.

Deux de ces appareils seront fixés sur des vedettes du pilotage, deux autres prendront place sur deux « Furet », et les deux derniers seront installés à la capitainerie et au poste de pilotage du boulevard de la Marine.

Ceux-ci, qui n’auront qu’une portée d’émission ne dépassant pas 50 kilomètres seront à usage exclusivement intérieur et branchés en liaison directe, ne dépendront ni du central de Mustapha, ni de la station de Fort-de-l’Eau.

Si les essais sont concluants, et de l’avis même des techniciens il n'y a aucune raison pour qu’ils ne le soient pas, on équipera ainsi toutes les « embarcations de servitude » actuellement en service. Ce sera assurément là une heureuse réalisation appelée à rendre les plus grands services à ceux qui ont pour mission de mouiller par tout temps dans nos eaux les bateaux de toutes conditions et de tous tonnages.

Ces moyens de transmissions qui manquaient à un port moderne comme Alger leur permettront en effet non seulement de communiquer entre eux au cours de l’acheminement et lors des manœuvres, mais encore de rester en liaison constante avec le mât de signaux, la capitainerie et le poste de pilotage.

Ce sera un énorme progrès, si l’on songe qu’ils sont actuellement obligés, pour garder le contact, d’être en vue du mât de signaux qui les appelle, grâce à un jeu de pavillons, puis leur indique par porte-voix les navires à entrer, à sortir ou à changer de quai — ce qui par temps de brume, fréquent à Alger est loin d’être pratique — ou pis encore, de prendre les ordres à leur poste de pilotage du boulevard de la Marine, ce qui leur occasionne une importante perte de temps.

Ceci met d’ailleurs, ou plus exactement remet en question, la situation irrationnelle du poste de pilotage par rapport au port qu’il a à desservir : se trouvant en effet à l’extrémité nord des différents plans d’eau, sur l’actuel boulevard Amiral-pierre, il oblige les pilotes à de constants va-et-vient à travers la darse de l’Amirauté, le port nord et les arrière-ports, ces derniers étant distants de plus d’un kilomètre de leur P.C...., d’où de trop nombreux temps morts au détriment du service, sans parler de la fatigue que ces voyages incessants occasionnent.

L’idéal serait de construire une station de pilotage à équidistance des deux extrémités nord et sud, soit à peu près à hauteur de l’actuel bassin du radoub.

Ce recasement aura d’ailleurs lieu lorsque les immeubles condamnés du boulevard Amiral-Pierre, dont la station fait partie, seront effectivement démolis....

Echo d'Alger du 15-1-1954 - Adressé par Francis Rambert
sur site : mai 2025

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Le pilotage
Le pilotage
Immeuble du pilotage
Immeuble du pilotage, rue Amiral Pierre
(Collection F.Rambert)


          A l’instar de ceux de Marseille et du Havre, les remorqueurs et les vedettes du pilotage du port d’Alger seront-ils bientôt équipés de radio-téléphones ?



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Le majestueux paquebot pour accoster est à la merci du petit remorqueur

Nous sommes allés accueillir le " Ville-d'Oran " en deçà de la jetée à bord d'un bateau-pilote arborant le pavillon rouge-blanc-bleu en carré. Rien ne peut mieux faire ressortir l'effort constant que demande une manœuvre, répétée 900 fois par an, que la relation exacte et minutée de celle-ci, telle qu'elle pourvait être inscrite dans un quelconque " livre de bord " ;

Le paquebot est au large
5 h. 30. - De la dunette du mât à signaux, placé sous le contrôle direct de la capitainerie du port,l'homme de veille aperçoit à quelques miles au large, le paquebot qui se dirige vers Alger.
5 h. 31, - Il hisse le " rappel ", pavillon rouge rayé noir, au faîte du pylône qui semble protéger leport de ses deux grands bras d'acier.
5 h. 32. - Le pavillon claque joyeusement dans la fraîche brise matinale, semblant faire les premiers signaux de bienvenue au paquebot qui n'est encore qu'un point à l'horizon.
5 h. 33. - L'homme de quart téléphone au commandant de la capitainerie du port qui fait prévenir le pilotage : le bateau " à rentrer " est signalé.
5 h. 45. - Le bateau-pilote quitte son quai, ayant à bord le pilote et deux hommes d'équipage.
Le toussotement rageur, têtu et cadencé de son moteur diesel se répercute longuement sur la mer etdans le port immensément calme du petit matin.

En route sur le bateau pilote
5 h. 50. - Nous sommes sortis du fourmillement des barques qui dorment, doucement bercées dansla darse de l'Amirauté.
Nous augmentons la vitesse et le rauque grondement de notre moteur s'emballe sourdement, mais son bruit semble maintenant happé par l'infini de la mer, car nous nous trouvons déjà à proximité de la passe.
5 h, 55. - Nous doublons les feux de l'entrée, vert à tribord, rouge à bâbord. Ceux-ci se clignant mutuellement de leurs yeux de cyclopes, semblent vouloir se moquer de nous.
5 h. 57. - Dès le dernier bloc de ciment armé doublé, la lourde houle cadencée du large s'empare denous. Nous nous dirigeons rapidement vers le feu à éclats blancs du bout de la jetée laissant " sur tribord " la bouée d'entrée à feu vert intermittent.
A cette occasion le pilote nous signale que deux grands " feux " délimitent la baie d'Alger : l'un,au Cap-Matifou " donne " trois éclats groupés toutes les quinze secondes, l'autre, au Cap-Caxine,brille une fois toutes les cinq secondes.

Le pilote monte ã bord
6 h. 07. - Le majestueux paquebot siffle trois longs coups pour appeler le pilote au moment même ou notre vedette double la jetée.
6 h. 10. - Le bateau se trouve à quelques encablures de nous et ralentit considérablement sa marche tandis qu'un matelot jette par dessus son bord une échelle de corde accrochée au bastingage quiva permettre au pilote de monter à l'abordage.
6 h. 10. - Le pilote grimpe le long de la coque. La houle est forte et il faut la longue pratique de ce marin accompli qu'est le pilote pour que cet embarquement acrobatique se fasse rapidement et avec une apparente facilité.
6 h. 11. - Le " Ville-d'Alger " hisse le pavillon du pilotage à son mât de poupe. Un peu avant son" ascension " M. Grégory me narre une autre histoire vécue.
" En 1923, j'ai " sorti "› par gros temps un bateau hollandais de 8.000 tonnes, l'" Inderland ", quifaisait route sur la France. Après la passe, la houle fut tellement forte qu'il me fut impossible, malgré mes efforts répétés, de toucher ma vedette qui, suivant les " creux " de plus de six mètres, ne pouvait s'approcher du bateau autour duquel les flots étaient particulièrement tumultueux. Force me fût donc de rester a bord jusqu'à Villefranche, prochaine escale du bateau.
Tout récemment, ajoute-t-il, un pilote marseillais se trouvait encore à Alger sur un bateau venu de Marseille. Heureusement pour nous ces surprises sont rares. "
6 h. 15. -_ Le " Ville-d'Oran ", sous la conduite du pilote, double la passe, son remorqueur, le " Furet-II ", l'attend à proximité du feu " bâbord ".

Paré pour la manœuvre
6 h. 18. - Sur la passerelle de commandement du paquebot, le commandant, assisté du pilote du port qui est devenu son conseiller, donne l'ordre au timonier de siffler deux coups brefs, et met lesmachines au " stop ".
Les vibrations auxquelles les passagers se sont habitués cessent tout à coup tandis que la puissante sirène mugit par deux fois. Cela signifie que le remorqueur peut " attacher " sur " bâbord poupe "sans risque de " prendre " les amarres dans les hélices.
6 h. 20. - De la timonerie, le commandant ordonne par téléphone au lieutenant de poupe, de lancer la " touline " au remorqueur la petite corde, jetée comme un lasso par une main adroite, prendaussitôt son envol du gaillard arrière du paquebot pour venir atterrir sur la plage avant du remorqueur.
6 h. 20' 30". - Le matelot du remorquage se saisit de ce " mandeur », à l'extrémité duquel se trouve attaché le câble d'amarrage et le hale avec l'aide de trois camarades, jusqu'à ce que la lourde amarre d'acier soit sortie de l'eau et soit fixée au crochet mobile qui se trouve derrière la cheminée.
6 h. 22. - Un _coup bref, rageur et aigu, venu de la sirène du remorqueur, indique que celui-ci estparé pour la manœuvre.
La gros colosse qui, quelques minutes avant, pourfendait orgueilleusement une mer écumante de rage impuissante, est maintenant enchaîné pitoyable et muet, à ce modeste petit ami sans lequel il ne peut rien.
6 h. 30. - Le " liner " approche du môle de la Gare maritime. Sur le quai aérien, de nombreux parents et amis font des signaux de bienvenue aux passagers massés sur les ponts.
Ceux-ci soupçonnent-ils la reconnaissance qu'ils doivent a ces marins qui consciencieusement ontaccompli les gestes qui leur ont permis de " faire un bon voyage " ?
Ou bien trouvent-ils tout naturel que cet immense mouvement d'horlogerie ait fonctionné sans incident, à la minute près ?
Même si la deuxième supposition est exacte. c'est encore en l'honneur des hommes de la mer, carcela prouve qu'ils ont habitué les passagers a des manœuvres impeccables et leur plus grande récompense est que celles-ci paraissent banales.
Et pourtant que d'efforts accomplis !

" Rien å signaler "
6 h. 35. - Un " mandeur " est lancé du gaillard d'avant du bateau sur une petite barque qui le " tire " au quai.
6 h. 37. - Le câble sorti de l'eau tout suintant, est fixé à la bite d'amarrage du môle. Le treuil dunavire se met en route. Ébranlant sa poupeet enroulant l'attache d'acier qui le tire peu à peu parl'avant vers la terre.
6 h. 40. - Le " Furet " siffle un coup bref, largue son amarre et s'en va en grognant de toutesses machines.
6 h. 45. - A l'arrière, un deuxième câble relie le bateau au quai ; le treuil de poupe se met également en marche
6 h. 50. - La manœuvre est terminée. l'échelle de coupée est fixée. Les matelots s'épongent le front.
Le commandant serre la main du pilote et inscrira sur son livre de bord : " Arrivée à Alger à 6 h. 50,
rien à signaler ".