| Les réalisations 
        sociales à Kenadsa et Colomb-Béchar " Il fut un temps, dans la province 
        d'Oran, par exemple, où une colonne qui s'était hasardée 
        jusqu'au Chott croyait être arrivée aux limites du possible 
        et avoir atteint une ligne au delà de laquelle l'air n'était 
        plus respirable que pour les nègres et les antilopes "." Mais il est une puissance qui tient peu de compte des calculs des 
        timides et que ne peuvent arrêter les barrières qu'ils imposent 
        : cette invincible et éternelle loi du progrès qui régit 
        le monde doit avoir, ici comme partout, son inévitable effet. 
        "
 Lieutenant-Colonel 
        de Colomb.Revue Algérienne et Coloniale (Août 1860).
 Pionnier authentique et véritable 
        prophète des destinées du Sud Oranais, le lieutenant-colonel 
        de Colomb, qui consacra de longues années de sa vie à l'étude 
        des voies naturelles de pénétration vers le Soudan, situa 
        très justement l'oasis de Béchar, à laquelle son 
        nom est resté associé, sur le parcours de ce qui est devenu 
        de nos jours une quasi-réalité : le Méditerranée-Niger.
 " En résumé, disait-il à la fin de son 
        étude, notre route n'est pas par les immenses et arides déserts 
        qui entourent R'hadamès et R'hat, elle est par les vallées 
        peuplées de l'oued Béchar, de la Messaoura et de Touat. 
        Tous nos regards doivent être tendus, tous nos moyens d'action dirigés 
        vers Tombouctou et vers la route la plus courte pour y arriver ".
 
 Ce que le Colonel de Colomb n'avait pas prévu, ne pouvait pas prévoir, 
        étant donné les connaissances de l'époque sur la 
        géologie du Sahara, c'est que l'essor de Béchar serait dû 
        à la fois à sa situation géographique et à 
        la constitution du sous-sol de ses environs immédiats.
 
 L'ESSOR ÉCONOMIQUE ET LES RÉALISATIONS 
        SOCIALES.
 
 Le développement de l'exploitation du bassin houiller de Kenadsa-Béchar-Djedid, 
        la réalisation progressive des projets du Méditerranée-Niger 
        étaient conditionnées par un recrutement suffisant de main- 
        uvre. Dans cette région au climat pénible où 
        les écarts annuels de température atteignent 50°C, où 
        le problème de l'eau se pose d'une manière impérieuse, 
        la création de conditions de vie qui attirent et retiennent les 
        travailleurs présentait des difficultés qui peuvent paraître 
        insurmontables à un profane survolant les sommets dénudés 
        du Nord de Béchar pour la première fois.
 
 Et cependant, trois agglomérations existent, vivantes, reliées 
        par des voies ferrées et des pistes : Colomb-Béchar, soulignée 
        par l'oued et verdie de palmiers, Béchar-Djedid et Kenadsa, cités 
        ouvrières modernes, blanches et bistres, plaquées au sol 
        et auréolées des plages noires des différents sièges 
        de la mine. Si les anciens quartiers de Colomb-Béchar et le Ksar 
        de Kenadsa, la ville sainte célèbre par sa Zaouïa, 
        restent dans le cadre du pittoresque local, les cités ouvrières, 
        confortables et coquettes, et les bâtiments modernes de l'oasis, 
        témoignages d'un effort courageux, rationnel et méthodique, 
        affirment une fois de plus le génie civilisateur de la France.
 
 LA POPULATION.
 
 Groupant environ 10.000 habitants, Musulmans, autochtones et Européens, 
        Colomb-Béchar est, si l'on peut dire, la capitale administrative 
        de l'ensemble Kenadsa-Béchar-Djedid. Nombre de réalisations 
        sociales : hôpital, groupes scolaires, Dar-el-Askri, ont été 
        conçus en tenant compte de la population globale de l'oasis et 
        des centres miniers.
 
 La population totale de Kenadsa, Béchar-Djedid, 
        est de 13.000 habitants environ, y compris les petites agglomérations 
        de Musulmans des environs. Sur ce total, 5.100 ouvriers sont employés 
        à la mine, dont 700 Européens composant les cadres d'exploitation 
        et la majeure partie du personnel de jour.
 L'HABITAT.
 
 Le cachet différent des trois agglomérations reflète 
        fidèlement leur histoire.
 
 Oasis dont la population européenne, militaire d'abord puis civile, 
        s'est accrue progressivement et lentement depuis 1890, la cité 
        européenne de Colomb-Béchar construite 
        au fur et à mesure des nécessités se mêle parfois 
        à la cité indigène et présente de petites 
        rues aux maisons basses et sans style groupées autour des bâtiments 
        de l'annexe et des territoires, puis s'égaye résolument 
        à l'Ouest en percées Larges bordées de villas confortables 
        et modernes.
 
 Kenadsa, dont la mise en exploitation 
        remonte à la guerre 1914-1918, mais dont le développement 
        réel date de 1940, conserve, intact et retiré, son vieux 
        Ksar célèbre par sa vie religieuse et ses marabouts, tassé, 
        resserré autour d'une vaste place tandis que vers les sièges 
        de la mine, cités européenne et indigène, largement 
        conçues, s'étirent le long de rues droites et blanches.
 
 Cité européenne, couleur de sable, où l' " ancienne 
        " et unique rue de Kenadsa de 1920 est déjà une antiquité, 
        et dont les constructions récentes suffisent à loger tout 
        le personnel de la mine. Villas individuelles, blocs de 4 villas, logements 
        collectifs pour célibataires, toutes ces constructions coquettes, 
        avenantes, sont entourées du petit bout de terre qui sera un jardin 
        et où au prix de quels soins, de quelles ruses pour détourner 
        le minimum d'eau qui leur est indispensable, poussent des tamaris de quelques 
        centimètres ou parfois un jeune caroubier agressif.
 
 Meublés sommairement, mais d'une manière suffisante, ces 
        appartements qui possèdent tous une salle de bains avec installation 
        de douches, permettent aux familles et aux célibataires de se loger 
        dans des conditions d'hygiène parfaites et de confort satisfaisant.
 
 Les bâtiments essentiels : direction de la mine, restaurants, salle 
        des fêtes, économat, écoles, sont groupés vers 
        le centre de la cité européenne.
 
 La cité indigène, ou nouveau Ksar de Kenadsa, s'étale 
        toute blanche autour d'une large place où un petit souk en réduction 
        offre en été la fraîcheur relative de son couvert 
        de natte et un immense café maure spacieux et accueillant permet 
        de longues stations aux heures de repos. Chaque groupe de constructions 
        est conçu spécialement pour ses différents habitants 
        : les uns sont cloisonnés et chaque famille dispose de 2 pièces 
        et d'une cour entourée de murs élevés, les autres 
        aménagés en vastes dortoirs sont destinés aux célibataires. 
        Un groupe, enfin, retiré, et d'un style différent, forme 
        un véritable petit village kabyle où les transplantés 
        retrouvent les conditions de vie de leur pays natal.
 
 Cité ouvrière moderne, conçue en tenant compte des 
        moeurs et des besoins des populations musulmanes, réalisé 
        entièrement depuis 1940, le nouveau Ksar de Kenadsa réalise 
        le type même des constructions qui doivent, dans un avenir plus 
        ou moins lointain, s'élever dans toute l'Algérie industrialisée.
 
 Étendue au pied d'une colline couverte de villas modernes et confortables, 
         Béchar-Djedid conçue 
        en 1941, réalisée entièrement en 1942, n'est pas 
        une réplique fidèle de Kenadsa. Si l'ensemble des cités 
        européennes et indigènes donne la même impression 
        de modernisme et de confort, des détails précis : aménagement 
        de terrasses spécialement destinées aux nuits chaudes où 
        les intérieurs surchauffés sont inhabitables par exemple, 
        montrent que l'expérience de Kenadsa a permis ici d'éviter 
        les erreurs et d'atteindre un résultat encore plus satisfaisant.
 
 LE SERVICE SANITAIRE.
 
 Le cadre général de l'organisation des services d'Assistance 
        à Colomb-Béchar et à Kenadsa est celui des Territoires 
        du Sud. Mais l'essor industriel de la région, cause directe de 
        l'accroissement de la population, a rendu indispensable le développement 
        du Service de Santé.
 2 hôpitaux, l'un à Colomb-Béchar, 
        l'autre à Kenadza ;
 2 infirmeries indigènes ;
 3 postes de secours ;
 tel est le bilan actuel des réalisations effectuées.
 
 L'ancien hôpital de Colomb-Béchar, agrandi successivement 
        au cours des dernières années, modernisé, vient de 
        mettre en service, il y a trois mois à peine, ses derniers bâtiments 
        dont une maternité de 15 lits.
 
 Avec son pavillon d'officiers, véritable villa mauresque, confortable 
        et fraîche, sa pharmacie moderne, ouverte à tous les habitants, 
        son laboratoire, sa salle d'opérations et ses 250 lits, cet hôpital, 
        sur lequel sont dirigés les malades graves de la région, 
        peut soutenir avantageusement la comparaison avec beaucoup de ceux du 
        Nord.
 
 Bâtiment moderne et sobre, actuellement en voie d'achèvement, 
        l'hôpital de Kenadsa, aménagé provisoirement pour 
        recevoir 30 malades, pourra normalement porter son effectif à 80 
        dans quelques mois.
 
 Doté d'une salle d'opérations, véritable modèle 
        du genre, de deux chambres climatisées, ce petit hôpital, 
        qui doit prochainement recevoir un appareil de radiographie, pourra ainsi 
        subvenir à tous les besoins de Kenadsa et dispenser les malades 
        graves d'un transport dangereux sur une piste de e tôle ondulée 
        " jusqu'à Colomb-Béchar.
 
 Hôpitaux, infirmeries indigènes et postes de secours, périodiquement 
        visités, permettent la régularité des services de 
        consultations gratuites, de vaccinations et l'organisation de la lutte 
        contre les épidémies et les affectations oculaires, en particulier 
        la conjonctivite granuleuse ou trachôme, si fréquente dans 
        la région.
 
 C'est avec un dévouement inlassable que les médecins militaires 
        chargés de l'assistance aux populations prodiguent soins, consultations 
        et visites, et le seul médecin de Kenadsa assure le fonctionnement 
        d'un hôpital, d'une infirmerie indigène, de deux postes de 
        secours éloignés d'une vingtaine de kilomètres donnant, 
        la plupart du temps, plus de 100 consultations dans la journée.
 
 L'ENSEIGNEMENT.
 
 C'est dans des bâtiments clairs et fort bien aménagés 
        que le groupe scolaire de Colomb-Béchar prospère et se ramifie.
 1906: 1 classe mixte ;
 1911: 2 classes (filles et garçons) ; 1933: 6 
        classes ;
 1946: 18 classes, dont 12 pour les enfants musulmans 
        500 enfants scolarisés.
 
 Étant donné les conditions matérielles actuelles 
        et le manque de locaux, la plupart des nouvelles classes créées 
        fonctionnent à mi-temps.
 
 Un cours complémentaire fonctionne et le programme d'extension 
        du groupe qui comprend l'aménagement de quatre nouvelles classes 
        prévoit également la création d'un cours d'enseignement 
        professionnel où les élèves se spécialiseront 
        dans le travail du cuir et du bois.
 
 7 classes fonctionnent actuellement à Kenadsa, dont 4 au village 
        européens, 2 au vieux Ksar, ouvertes en janvier 1946 pour 80 enfants 
        musulmans, et 1 au nouveau Ksar. Souvent créés dans des 
        locaux de fortune, mais toujours dans des conditions d'hygiène 
        excellentes, ces classes du vieux Ksar seront remplacées dès 
        que les conditions matérielles le permettront, par une école 
        moderne conçue dans le style des constructions des cités 
        ouvrières.
 
 L'ORGANISATION DU RAVITAILLEMENT A KENADSA ET 
        BECHAR DJEDID.
 
 A une époque où la question du ravitaillement se pose d'une 
        façon angoissante dans pas mal de villes de France et d'Algérie, 
        il est reposant et rassurant de visiter l'économat de Kenadsa.
 
 Tous les employés de la mine y trouvent rassemblés : denrées 
        contingentées ou non, vins, alcools, légumes frais venant 
        de Colomb-Béchar ou de Taghit, viandes, poissons et glace. Une 
        boulangerie moderne y fabrique 5.000 rations de pain par jour, la plupart 
        des familles indigènes touchant directement leur ration de farine.
 
 Des annexes de l'économat fonctionnent au nouveau Ksar et à 
        Béchar-Djedid, facilitant ainsi les conditions de vie d'une population 
        soumise, par ailleurs, à des rigueurs de climat et aux inconvénients 
        bien connus du " bled ".
 
 Un restaurant installé au centre de la cité européenne 
        permet aux célibataires de prendre leurs repas dans les meilleures 
        conditions et se charge également de la cuisine de l'hôpital. 
        Cette centralisation présente le double avantage de réduire 
        le personnel et les frais.
 
 LE PROBLÈME DE L'EAU.
 
 Favorisée à ce point de vue par la présence de l'Oued, 
        Colomb-Béchar se suffit largement et peut entretenir une culture 
        maraîchère assez abondante. Les quelques puits locaux de 
        Kenadsa et BécharDjedid sont nettement insuffisants aux besoins 
        des populations et de la mine, et une conduite d'eau venant de Colomb-Béchar 
        fournit le gros appoint.
 
 Problème d'épuration posé par la qualité de 
        ces eaux salines, problème d'économie, car la quantitéest 
        souvent restreinte, et les besoins considérables, dans ces pays 
        à évaporation intense où il est admis qu'un homme 
        travaillant normalement doit absorber de 6 à 8 litres d'eau par 
        jour.
 
 Problèmes posés et résolus, puisque l'ensemble Béchar-Kenadsa, 
        qui possède par ailleurs un lavoir pour le traitement du charbon 
        et de nombreuses installations de douches, s'enorgueillit à juste 
        titre de 5 piscines.
 
 Piscine de Colomb-Béchar enfouie dans le jardin public de la palmeraie, 
        piscine de Béchar-Djedid construite sur un mamelon d'où 
        l'on domine les cités fraîchement édifiées, 
        piscines de Kenadsa enfin dont la plus ancienne en bordure de la palmeraie 
        du vieux ksar, s'enfonce, bordée de pisés couleur de sable, 
        à l'ombre d'un caroubier imposant.
 *** C'est avec stupéfaction que le voyageur aérien 
        et profane découvre ce véritable centre industriel moderne 
        après avoir survolé les arêtes croulantes et désolées, 
        les pics nus et les plateaux arides du Nord de Béchar, et c'est 
        avec confiance dans les destinées de la France qu'il réalise 
        rceuvre accomplie ici.
 Tous ces hommes, ceux qui assument avec perspicacité les lourdes 
        responsabilités de l'administration de la région, ceux qui, 
        avec un dévouement inlassable, prodiguent soins et assistance aux 
        populations, ceux qui dirigent avec compréhension les exploitations 
        industrielles, ceux enfin qui travaillent dans des conditions toujours 
        pénibles avec sérénité et courage, méritent 
        que l'on connaisse leurs efforts et que l'on apprécie leur réussite, 
        symbole de l'essor de l'Algérie et du génie civilisateur 
        de la France.
 |