-"Expulsion des émigrants clandestins : le précédent de 1962"
PIEDS-NOIRS D'HIER ET D'AUJOURD'HUI . N' 103 - JUILLET/AOUT 99

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PIEDS-NOIRS D'HIER ET D'AUJOURD'HUI . N' 103 - JUILLET/AOUT 99
"Expulsion des émigrants clandestins : le précédent de 1962"


Monsieur le Rédacteur en Chef
VALEURS ACTUELLES
54, rue Martre
92586 CUCHY Cedex


Monsieur le Rédacteur en Chef,

Votre numéro du 20 juin publie dans la rubrique citée un courrier intitulé "expulsion :le précédent de 1962" qui a fait sursauter vos lecteurs Pieds-Noirs.
Son contenu est tellement extravagant qu'il est même difficile de discerner s'il s'agit d'un gag provocateur débité sur le ton de l'ironie, ou d'une affirmation sérieuse : mais comme vos lecteurs peuvent s'y tromper, une mise au point s'impose.
Pour qui a vécu cette période, les conditions du "rapatriement" des Français d'Algérie en 1962 ne le cédaient en rien à celle de l'exode de 1940. Côté Sud, c'était l'entassement dans les ports et les aérogares, les enfants morts de déshydratation dans les files d'attente au soleil, les biens abandonnés sur place, les réfugiés du bled enlevés sur la route et torturés par le FLN avant égorgement, les brimades de la police etc. Puis la traversée dans des conditions inimaginables, par tous les moyens disponibles, auxquels le gouvernement français n'avait pas ajouté une seule rotation d'avion ou de bateau, refusant les moyens militaires et allant jusqu'à repousser l'aide de la marine américaine qui nous avait été proposée ; côté Nord, c'était presque pire débarquement sous contrôle des CRS, brimades administratives et policières, destruction des biens de déménagement par les dockers cégétistes, dispersion géographique organisée au mépris de la loi, internement pour les Harkis, hostilité généralisée allant jusqu'aux menaces de mort officielles (Cf. Gaston Deferre), absence totale de logements, arnaque immobilière généralisée, prélèvement des taxes douanières comme pour des étrangers, etc.
Ultérieurement , ce fut la misérable allocation de survie pour les plus pauvres, le refus d'indemnisation jusqu'à ce jour, les brimades administratives qui durent encore (Cf. les preuves de nationalité française), l'isolement politique organisé, etc. Ajoutons que ces "rapatriés" étaient tellement heureux de l'être que leur population a connu à l'époque un taux de suicide que l'on n'avait jamais relevé en aucune période de l'Histoire de France.
Pagaille, imprévision, méconnaissance des problèmes, incapacité, voilà sans doute ce qu'évoque votre correspondant lorsqu'il écrit que la volonté du gouvernement fut sans faille et que l'opération se déroula de façon satisfaisante...
Quant à comparer la situation d'un million de Français menacés de mort et celle des émigrants clandestins actuels venus en France pour parasiter un pays prospère et sans défense, c'est une démarche qui n'appelle pas d'autre réaction qu'un haussement d'épaules...
Je pense représenter ici l'unanimité de ces Français effarés devant de tels propos, par le canal du Cercle Algérianiste, première association culturelle Pieds-Noirs, vous demande instamment de publier notre réponse pour dissiper le malaise qu'engendre votre absence de commentaires devant un écrit aussi délirant.
Vous en remerciant par avance, je vous prie de croire, Monsieur le Rédacteur en Chef, à l'expression de mes sentiments distingués.


M. LAGROT
Cercle Algérianiste


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